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permis, après deux années de recherches comparatives, d'espérer
qu'on pourra, dans un temps pas trop éloigné, faire comme au
jugement dernier et séparer la bonne et la mauvaise espèce, au
point de vue de l'abondance et de la qualité des produits.

Nous devons signaler les louables efforts et le fructueux con-
cours qu'ont prêté plusieurs honorables instituteurs communaux
pour parfaire cette remarquable collection de fruits; leurs choix in-
telligents et les nombreuses investigations qu'ils ont faites dans
leurs arrondissements respectifs ont été récompensés de plusieurs
médailles et mentions honorables.

Les Raisins n'étaient peut-être pas aussi beaux ni aussi bien venus
que d'habitude, en raison de la sécheresse toute spéciale de l'année.
Mais on pouvait encore admirer les produits de M. Rose Charmeux,
de MM. Dupont d'Alençon, Ocquidant-Nolotte de Nuits, Collette de
Rouen et Acher d'Yvetot. Je n'ose mettre sur la même ligne, mais
je les mentionne pour mémoire, les dix ou douze variétés de Rai-
sins de Syrie, d'Égypte et de Grèce que j'avais apportés à Rouen pour
les faire connaître et en encourager la culture, en offrant des bou-
tures à tout amateur qui voudra bien s'engager à en répandre
gratuitement des boutures aussitôt que les produits le permettront.

COMPTE-RENDU DE L'EXPOSITION DES FRUITS DE TABLE ET DE PRESSOIR
QUI A ÉTÉ OUVERTE A ROUEN LE 30 SEPTEMBRE 1863;

Par M. MICHELIN.

MESSIEURS,

Une Exposition ouverte à Rouen, le 30 septembre, avait pour
objet les Fruits de table et en même temps les Fruits de pressoir
de la Normandie.

Délégué par M. le Président pour représenter la Société impé-
riale et centrale, j'ai été spécialement attaché à la section du Jury
qui a été chargée des Poires et des Pommes à cidre, laissant à notre
collègue, M. le docteur Pigeaux, l'honneur de vous entretenir de
ces fruits de dessert si attrayants et précieux à tous les titres que
des arboriculteurs distingués avaient apportés de bien loin.

Cette fois, Messieurs, la culture était sous la protection du

commerce qui, chaque jour davantage, lui doit l'élément de ses spéculations. Les exposants étaient les hôtes de la salle des consuls, vaste et imposante construction du siècle dernier, qui suffisait à peine pour contenir les humbles et utiles récoltes des champs étalées à côté des brillants produits des jardins.

Puisse cette union du commerce et de la culture répandre d'abondantes ressources dans les campagnes où croissent ces Poiriers et ces Pommiers à cidre, dont les voies ferrées emportent les fruits chaque jour en plus grande quantité.-Ces fruits, Messieurs, sauvages en apparence, auxquels néanmoins la Normandie doit une bonne partie de sa richesse territoriale, se distinguent toutefois par des aptitudes et des qualités bien diverses pour le but auquel ils sont destinés; ils n'ont été soumis à aucune étude sérieuse sur le degré de leur mérite relatif; disons plus, des cultivateurs insouciants conservent des variétés mauvaises, épuisées, délicates et improductives; d'autres, au contraire, par dessus tout avides, négligent de consulter la nature des variétés et recherchent celles qui n'ont de valeur que par leur rusticité, leur vigueur et leur fructification à toute épreuve.

Beaucoup de cultivateurs se croient à l'abri de tout reproche en alléguant que le mélange qui se fait au pressoir remet en valeur les qualités naturelles du cru; vous êtes arboriculteurs, Messieurs, et sans vouloir retirer de son effet à cet assemblage de goûts et de caractères divers, vous restez persuadés que le choix intelligent et raisonné qui aura réglé cet assortiment des fruits d'un verger ou d'une ferme, fera monter à un niveau plus élevé la qualité de la boisson qui en sera exprimée.

Ils en étaient convaincus, comme vous le serez vous-mêmes, Messieurs, les hommes pratiques et éclairés, qui en 1862, avec le concours empressé de leurs concitoyens, entreprirent cette étude des Poires et des Pommes à cidre pour en régénérer les espèces, en régulariser la nomenclature, la réduire à un point qui permit de la bien connaître et de l'approprier aux conditions de sol et de climat; de pouvoir les recommander ou les proscrire avec connaissance de cause; enfin, de réglementer en quelque sorte le présent en vue de concourir à la préparation de l'avenir.

Il y a un an, une première exhibition de ces fruits de plein champ

et de vergers a mis à la disposition de la Société d'Horticulture de Rouen près de 5000 échantillons, dans lesquels la Commission d'études instituée à cet effet a trouvé des sujets sûrs et précieux pour ses appréciations.

On a obtenu de ces spécimens la description, le dessin au trait, la reproduction par le moulage de 360 fruits dont 338 Pommes et 22 Poires. Un cahier imprimé qui a été publié permet à chaque personne compétente de s'initier au travail et de le juger.

Toutefois, Messieurs, la tâche n'est pas encore accomplie, et il importe de ne pas négliger les fruits qui, peut-être trop localisés, tiendraient probablement un rang élevé parmi les bons, si leur plantation était généralisée.

L'Exposition du 30 septembre renfermait 26 lots et en tout 2400 échantillons qui, pendant l'hiver et au fur et à mesure de leur maturation, vont devenir la base de nouvelles études de la part de la Commission rouennaise.

Je dois en outre, Messieurs, une mention à la Société d'Horticulture de Caen, qui, de son côté, a dégusté et décrit 450 fruits, en suivant le plan qui, en 1862, avait été concerté à Rouen. - Dans cette session, Messieurs, on a essayé l'étude qui peut conduire à fondre en une seule les nomenclatures dressées par les Sociétés locales; on en a tracé le programme dont la condition fondamentale est le transport périodique des délégués des Sociétés unies dans les grands centres de la Normandie, de la Bretagne et des antres contrées analogues.

De tous ces efforts, Messieurs, sortira la rédaction d'un guide pratique qui est appelé, j'en ai l'espoir, à exercer une grande influence sur les choix des propriétaires qui auront à planter. Les hommes éclairés commenceront; leur exemple entraînera bientôt les autres. Cette modification dans les habitudes actuelles n'introduira-t-elle pas peu à peu une amélioration que réclament les intérêts des propriétaires de biens ruraux, aussi bien que ceux des cultivateurs et des consommateurs dans les départements du nord-ouest de la France?

Vous n'en doutez pas, Messieurs, les hommes expérimentés dont, depuis deux ans, j'ai été heureux autant qu'honoré d'être en votre nom le collaborateur, y ont une entière confiance, et leur

travail mené à bonne fin sera un jour inscrit au nombre de ceux qui, à notre époque, ont été imaginés et exécutés pour un motif d'utilité publique.

Je reviens au présent, à l'Exposition: des médailles ont été décernées aux collectionneurs dont les lots offraient le plus d'intérêt. Je crois ajouter un nouveau prix à ces récompenses en vous les faisant connaître.

Vous ne serez pas surpris de me voir citer des instituteurs communaux parmi les lauréats; plusieurs, avec zèle et intelligence, se sont faits collecteurs des fruits cultivés dans leurs villages et dans le pays adjacent ; ils ont ajouté à leurs envois des notes rédigées avec autant de soin que d'intelligence.

La Société d'Horticulture de la Seine-Inférieure prend des mesures pour faire enseigner l'horticulture aux instituteurs communaux, afin que ceux-ci apprennent aux jeunes enfants l'art de cultiver avec profit les jardins.

Dans ces rapports, dont le but est un enseignement hautement utile, s'établit un lien étroit entre la Société d'Horticulture et ces instituteurs, que toutes les entreprises faites pour éclairer les habitants de nos campagnes sur les moyens d'augmenter leur bienêtre, trouveront prêts à les seconder.

Dans ce louable concours, ces modestes fonctionnaires auront l'honneur de rendre service aux populations laborieuses et intéressantes de nos villages; ils acquerront des droits à la reconnaissance publique. Puisse le pays les en récompenser un jour, en améliorant encore leur sort qui déjà a été l'objet de justes préoccupations!

Voici, Messieurs, le relevé des récompenses qui ont été accordées pour les Poires et les Pommes à cidre, et dont la distribution a été faite, le 4 octobre, en séance publique, à l'Hôtel de ville, en la présence des autorités départementales et urbaines :

Médaille d'or du Ministre à la Société d'Horticulture de Caen et du Calvados, pour un superbe lot de plusieurs centaines de Poires et de Pommes.

Médaille d'argent de la ville de Rouen à M. Cochet, pépiniériste à Suisnes (Seine-et-Marne), pour une belle collection de Poires à cidre et de Pommes, que leur nature, qui les rend propres au pressoir et à la table, a fait récompenser à titre de Fruits de verger.

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POMMES. Médaille d'argent du Ministre à M. Damourt, de Roncherolles, pépiniériste.

Médaille d'argent de l'Association normande à M. Legouat, jardinier à Sassetot-le-Mauconduit.

Médaille d'argent, petit module, à M. Gaudu (Jean-Baptiste), instituteur à Goderville.

Médaille de bronze, grand module, à M. Féret, instituteur communal à Saint-Ouen-le-Mauger, et à M. Gaudu, instituteur à Ourville.

POIRES. Médaille d'argent, petit module, à M. Lebled, instituteur à Lalonde.

Médaille de bronze de l'Association normande à M. Féret, instituteur à Saint-Ouen-le-Mauger, et à M. Gaudu (Jean-Baptiste), instituteur à Goderville.

SEMIS DE FRUITS A CIDRE.-Médaille de bronze, grand module, à M. Jouvet, pépiniériste à Montivilliers.

Je vous ai entretenus longuement, Messieurs, d'études qui ne semblent intéresser particulierement que les départements du nord-ouest de la France; je l'ai cependant fait avec une pleine confiance dans votre approbation.

Parmi nos si nombreux collègues, il en est qui sont liés à quelque titre au sort des régions à cidre. Nos grandes pépinières des environs de Paris élèvent en nombre considérable ces arbres qui, plus tard, vont puiser une abondante nourriture dans les champs fertiles de la Normandie.

Enfin, Messieurs, par devoir et par habitude, vous vous attachez avec une vive sympathie aux travaux qui ont pour but l'utilité. La Société de la Seine-Inférieure ne l'a pas mis en doute; aussi, faisant appel depuis deux ans à votre concours, elle a donné, au sein de sa Commission d'études, à votre délégué, une marque de distinction et de confiance pour laquelle il reste profondément reconnaissant, mais dont il s'empresse de vous reporter tout l'hon

neur.

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