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Ces règles sont fort sages, elles tendent à mettre toutes les forces sociales au service des malheureux en laissant à la religion, véritable inspiratrice de la charité, la place qui lui convient. Malheureusement toutes les paroisses ne possèdent pas, en 1789, de bureaux de cette nature(); il y a progrès, mais le but final est loin d'être atteint.

CONCLUSIONS.

Il résulte de tout ce qui précède que dans la seconde moitié du XVIII° siècle, la charité privée, secondée quelquefois par les municipalités ("), assure, à Paris notamment, l'assistance médicale gratuite des malades des villes. Associations paroissiales, bureaux d'aumônes, confréries, sœurs de divers ordres concourent avec un dévouement admirable à l'organisation de ce service qui comprend la visite des médecins et chirurgiens, le concours des sages-femmes, les saignées et pansements, l'allocation de médicaments, la délivrance d'aliments, d'objets de literie, etc.

Dans les campagnes la situation est plus difficile; on doit lutter contre le manque presque absolu de praticiens éclairés, le défaut de communications, l'absentéisme des grands propriétaires et des gros décimateurs. En outre, des conditions économiques mauvaises, des impôts mal répartis et souvent excessifs entretiennent la misère des classes rurales ). Malgré ces conditions fâcheuses la charité privée s'ingénie à venir en aide aux cultivateurs frappés par la maladie; le clergé, réduit si fréquemment à la portion congrue, montre un dévouement au-dessus de tout éloge, il fait appel au zèle des propriétaires, des principaux habitants. Sous son impulsion, avec les entributions de ces bureaux: «Le bureau de charité connaît les pauvres malades et leurs besoins. Dans les lieux où son zèle est plus éclairé ou mieux secondé par les libéralités du public, il tient en réserve une provision suffisante de linge, de meubles, d'ustensiles à l'usage des deux sexes dans leurs infirmités; il paie une pension honnête à des médecins et des chirurgiens d'une habileté, d'une probité reconnues, pour visiter et traiter tous les malades de la paroisse, il fournit à ses frais tous les remèdes, tous les bouillons, toute la nourriture nécessaire pendant la maladie et la convalescence."

(1) Abbé Baudeau, ut suprà, p. 65. «Il est encore une multitude de paroisses des villes et surtout des campagnes qui n'ont pas encore de bureau de charité."

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(2) Nous n'avons entendu parler ici que de l'assistance normale, laissant de côté les mesures exceptionnelles prises par les municipalités des villes en temps de peste ou de contagion.

(3) On voit sous quelles réserves il est permis de parler de l'amélioration. Je répète qu'on la trouve sur certains points du pays, non sur d'autres, en certains moments, mais jamais durable. Il suffit d'une crise pour replonger les populations dans une profonde misère. Le mal imputable au mauvais régime se fait sentir d'une manière continue. H. Baudrillart, Les populations agricoles de la France. Normandie et Bretagne, in-8°, Paris, 1885, p. 89.

couragements du pouvoir central, les bureaux de charité se multiplient; ces œuvres qu'il préside tendent au relèvement des âmes en même temps qu'à la guérison des corps, elles contribuent donc éminemment, ainsi que nous l'avons déjà dit, au salut de la société.

Il y a dans tout ce mouvement charitable des imperfections de détail, un manque fréquent de plan d'ensemble, de règles fixes destinées à assurer la bonne répartition des secours et la régularité des ressources, mais en réalité le bien accompli est immense. Ces congrégations de sœurs à la fois hospitalières et enseignantes apportent un concours que rien ne saurait remplacer ; elles méritent une mention spéciale, et en terminant cette rapide étude nous aimons à leur adresser l'hommage de notre respectueuse admiration.

M. le docteur BARTHÈS, de Caen, délégué de la Société internationale pour l'étude des questions d'assistance, soutient que l'assistance proprement dite n'existait, en réalité, que dans les villes.

Les campagnes étaient livrées à l'ignorance des médecins, la plupart du temps appartenant à la catégorie des barbiers, et, dans certaines contrées de la Normandie, la pratique chirurgicale était exercée par des matelots qui, après avoir voyagé pendant deux ans et avoir éventré des morues, se figuraient posséder l'art de la chirurgie.

Les médicaments fournis par l'État, fort mal préparés, étaient distribués par des sœurs et des religieux, visitant à pied les campagnes, et donnés indistinctement à toute espèce de maladies.

Les hôpitaux recevaient non seulement les blessés et malades indigents, mais encore les vagabonds et mendiants qu'y amenait la maréchaussée. De là une promiscuité très dangereuse tant au point de vue du moral qu'à celui de l'hygiène.

M. le docteur Barthès rappelle qu'un philanthrope de xvm° siècle préconisa, dans l'intérêt des finances départementales et de l'Etat, de reporter les dépenses hospitalières sur les nombreuses familles, convaincu que de cette manière on remédierait, dans une mesure sérieuse, à l'extension de la mendicité en retenant les paysans au village.

M. l'abbé VOILLERY, membre de la Société d'histoire et d'archéologie de Beaune, borne son champ d'investigations à la portion de la Bourgogne comprise dans les limites actuelles du département de la Côte-d'Or. Il examine ce que l'on a fait, à la fin du siècle dernier, pour admettre un plus grand nombre de malades dans les

hôpitaux, les soigner dans des dispensaires et les visiter à domicile. Il présente notamment l'exposé suivant :

Un vœu fréquemment émis dans les cahiers des paroisses rurales, en 1789, était que les sages-femmes fussent mieux instruites des devoirs de leur état et que de plus sérieuses garanties fussent, à l'avenir, exigées des chirurgiens. Cependant beaucoup avait été fait en Bourgogne, sous ce double rapport. En 1775, les Élus avaient établi un cours gratuit d'accouchement, auquel assistaient annuellement plus de 50 sages-femmes et, comme le déplacement de ces élèves et leur séjour à Dijon entraînaient des dépenses au-dessus des moyens de la plupart d'entre elles, on décida de leur donner à chacune 24 livres. A Dijon, bien avant 1750, les chirurgiens avaient souvent des conférences où ils se communiquaient les observations, les réflexions et les mémoires composés sur les cas chirurgicaux qui se présentaient dans le cours de leur pratique; un résumé de chaque conférence était fait et conservé pour pouvoir être au besoin consulté. Les récipiendaires étaient soumis à de nombreuses épreuves, à plusieurs examens et à des démonstrations anatomiques.

Les médecins de Dijon s'étaient réunis et formaient un collège, dès le commencement du xvII° siècle; mais ce ne fut qu'en 1654 qu'il fut établi par lettres patentes. Aucun médecin ne pouvait pratiquer, dans la ville, s'il n'était agrégé à ce collège, et, pour y être admis, il fallait être régnicole et docteur des universités de France, subir deux examens de trois heures et soutenir une thèse thérapeutique, publiquement, en présence des officiers municipaux. Le collège de médecine était le seul juge de la capacité des empiriques, auxquels les officiers municipaux ne pouvaient permettre aucune distribution de remède, si ce n'est de son consentement.

La Société de la Miséricorde, qui fut établie, en 1768, pour le soulagement des malheureux, leur distribuait, avec du bois, du charbon, des sirops, confitures, onguents, eaux vulnéraires, le baume du Commandeur, dont elle possédait la véritable recette. Les sociétaires conservaient un secret particulier pour guérir de la râche; chaque semaine ils avaient un jour de pansement, ordinairement le vendredi. Souvent il fallait fournir aux malades, linge, habits, nourriture et logement; ce qui constituait la société dans des dépenses d'autant plus considérables que ces dépenses duraient souvent plusieurs mois; mais les membres de cette corporation charitable estimaient qu'ils étaient bien payés de leurs peines et de leurs sacrifices, quand ils parvenaient à délivrer quelques malheureux atteints de cette mauvaise gale.

400 lits à l'hôpital, un cours gratuit d'accouchement, des consultations gratuites pour les blessés, de nombreuses garanties pour l'exercice de la médecine et de la pharmacie, un traitement intelligent et complètement désintéressé pour la râche, alors si fréquente, voilà déjà bien des ressources

à la disposition des malades à Dijon, à la fin de l'ancien régime. A tout cela il faut ajouter le concours actif et dévoué de deux congrégations religieuses, les sœurs Sainte-Marthe et les sœurs grises de Saint-Vincent de Paul.

Les premières, fondées à Dijon en 1628, par l'évêque Sébastien Zamet, approuvées en 1678, exercèrent, dès l'origine, les œuvres extérieures de charité que saint François de Sales avait rêvé d'attribuer aux religieuses de la Visitation : éducation des jeunes filles pauvres, soins des malades à domicile et, dans la communauté, pansements gratuits, service de dames pensionnaires. Les secondes, établies à Notre-Dame de Dijon en 1696, à SaintPierre en 1702, à Saint-Jean en 1719, à Saint-Michel en 1743, à Saint-Philibert et à Saint-Médard en 1751, enfin à Saint-Nicolas en 1753, faisaient chez elles une distribution de remèdes et de bouillons aux pauvres malades, les visitaient et les soignaient à domicile. A Blaisy, à Beaune, des sœurs du même ordre, établies sur la fin du xvII° siècle, et, à Châtillonsur-Seine, seulement en 1788, exerçaient les mêmes offices de charité.

Les petites bourgades de Bligny-sur-Ouche, Saint-Seine-l'Abbaye et Nolay, à défaut d'hôpital, avaient un bureau de charité où se distribuaient des remèdes, des bouillons et autres secours aux malades de chacune de ces paroisses. A Nolay, on forma même, en 1769, le projet de supprimer la mendicité en fournissant du pain, du bois, des outils et en érigeant une filature de coton; Courtépée note (tome II, p. 336) que, de son temps, ce nouvel établissement avait produit des avantages; il y avait, dit-il, plus d'activité et moins de misérables, dans ce bourg. M. l'abbé Guenot, curé de Chevannay, où il mourut en 1797, voulut arriver au même résultat, mais par d'autres moyens. Il réussit à former une nitrière artificielle, pour laquelle il obtint une médaille de Louis XVI; il institua aussi des prix pour les laboureurs les plus méritants. Le résultat fut une augmentation de bien-être pour ses paroissiens et comme une assurance contre la maladie par les ressources créées et la disparition de la misère, source de tant de maux corporels.

Il nous faut, pour être complet, citer les fondations faites à la campagne, de 1750 à 1789, en faveur des pauvres et des malades.

Alexandre-Louis-François Le Fèvre de Caumartin, chevalier de Malte, châtelain de Pontailler et prieur de Saint-Léger-Champeau, en 1775, altacha aux terres dépendantes de son prieuré un chirurgien auquel il donnait annuellement 300 livres, pour prendre soin des malades. Il faisait tenir constamment à Saint-Léger et à Pontailler des boîtes fumigatoires pour les noyés, avec promesse d'une gratification de 50 écus pour ceux qui, les premiers, rappelleraient à la vie un noyé.

Le comte Érard-Louis Guy de Chastenay-Lanty établit, dans sa terre d'Essarois, un bureau de bienfaisance qui était entièrement à sa charge. Un médecin devait visiter les malades deux fois le mois et les remèdes leur étaient distribués gratuitement.

Claude-François Francoz, curé de Charrey depuis vingt-deux ans, mourut en 1771, laissant tout son bien à la fabrique et aux pauvres de sa paroisse. Un ancien curé de Painblanc, mort en 1775, légua également tout son avoir à la fabrique et aux pauvres de son ancienne paroisse. Edme Gonthier, conseiller au parlement, avait hérité d'un domaine à Auvillars, à charge de donner annuellement 200 livres aux malades du lieu. Simon Dupré, curé d'Esbarre, légua, en mourant, aux pauvres et aux malades de sa paroisse, le domaine qu'il possédait à Santenay. Étienne Quarré d'Aligny, seigneur de Cussy-la-Colonne, a laissé 300 livres de rentes pour soigner les pauvres du lieu et marier des filles de Cussy. Toutes ces générosités ont été les premières mises de fonds des bureaux de bienfaisance existant actuellement dans les localités que nous venons de citer.

M. DES CILLEULS insiste sur ce point qu'il est inexact de soutenir que les intendants des provinces ne s'occupaient pas de l'assistance. Il en trouve la preuve certaine dans l'enquête faite par le contrôle général pour propager l'assistance dans les campagnes et remédier au vagabondage. Les rapports des intendants sont formels à cet égard.

L'ordre du jour appell la 10° question du programme: Examiner le rôle et l'influence des écoles centrales sous la Révolution, soit dans une étude d'ensemble, soit d'après un exemple particulier.

M. BOISSONADE, professeur au lycée d'Angoulême, empêché d'assister au Congrès, a transmis un mémoire sur l'École centrale de la Charente, qui, à raison de l'empêchement où s'est trouvé l'auteur de se rendre au Congrès, est lu par l'un des assesseurs, M. Pascaud.

M. NICOLLET, de la Société des études littéraires et scientifiques des Hautes-Alpes, lit ensuite un mémoire sur l'École centrale de Gap.

Avant la Révolution, il y avait dans le pays qui devait former le département des Hautes-Alpes deux collèges, l'un à Embrun, l'autre à Gap. Celui d'Embrun, fondé en 1606, fut dirigé par des jésuites jusqu'au 23 septembre 1762, et depuis par des prêtres diocésains. Il était le plus important; en 1789, il avait encore près de 400 élèves (1).

Celui de Gap, fondé en 1616, fut dirigé tantôt par des dominicains, lantôt par des doctrinaires. Durant tout le xvII° siècle, ce ne fut qu'un petit collège avec deux ou trois régents pour enseigner le latin; dans la

(1) Archives départementales, C. 149 et 150.

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