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REVUE

DE THÉRAPEUTIQUE

MÉDICO-CHIRURGICALE,

ACCOMPAGNÉE DE NOMBREUSES GRAVURES SUR BOIS INTERCALÉES DANS LE TEXTE,

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Après vingt années d'existence, en présence d'une énorme collection sur le point d'être épuisée, et au milieu d'une prospérité toujours croissante, le JOURNAL DES CONNAISSANCES MÉDICO - CHIRURGICALES vient de prendre une grave détermination, dans l'intérêt des anciens comme des nouveaux abonnés.

Pour les premiers, il clòt dignement son passé en publiant une Table alphabétique générale des matières.

Pour les seconds, il résume, dans cette table, toute la thérapeutique du journal et toute celle des principaux ouvrages de la première moitié du dix-neuvième siècle, pour en faire un DICTIONNAIRE COMPLET DE THÉRAPEUTIQUE, destiné à remplacer et les vingt premières années du journal et la plupart des autres dictionnaires.

En vue de cette œuvre, actuellement en voie d'exécution, et en face d'une génération médicale à moitié renouvelée, le Journal des CONNAISSANCES MÉDICO-CHIRURGICALES s'ouvre une ère nouvelle dans l'intérêt de tous, avec son nouveau titre de Revue de Thérapeutique médico-chirurgicale.

Ses anciens lecteurs, ceux de la fondation, trouveront dans cette nouvelle série le même journal amélioré: même direction avec plus d'expérience, même rédaction avec plus de collaborateurs. Pour ses nouveaux abonnés, ce sera un nouveau point de départ, une nouvelle collection destinée à se compléter aussi. Tous, enfin, auront, dans LE DICTIONNAIRE et LA REVUE, un livre où le présent et le passé seront sans lacune, et où l'avenir aura sa page toujours ouverte.

Dr MARTIN-LAUZER.

CATALOGUED,
E. H. B.

1 2 / 6 / 87.

PARIS.

TYPOGRAPHIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, RUE JACOB, 56.

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LA MÉDECINE DE RÉCAMIER. I. Du pouls récurrent.

Un mot d'explication.

La résolution en est prise, notre plan est arrêté : nous écrirons deux traités distincts, l'un intitulé Médecine de Récamier; l'autre, Chirurgie de Récamier. Le premier de ces titres pourra paraître nouveau, mais il nous semble logique. On a bien écrit la chirurgie de Boyer, la chirurgie de Dupuytren, la chirurgie de Dieffenbach, et l'on n'a jamais publié la médecine de personne. On a eu tort. Récamier, d'ailleurs, était un praticien à part, un lutteur infatigable, un novateur intrépide; il n'avait ni système exclusif, ni parti pris d'avance; il allait toujours droit au but: soulager et guérir; et, guidé par une lumineuse méthode, enhardi par une longue expérience,. non-seulement il posait admirablement ses diagnostics, mais il donnait à ses traitements la plus vigoureuse direction.

Or, jeté au milieu des exigences d'une immense clientèle, appelé ici, retenu là; obligé de donner tout son temps aux malades impatients et aux confrères dans l'embarras, Récamier n'a pas eu le loisir de publier l'analyse de ses enseignements et les secrets de sa pratique.

Nous voulons suppléer un peu à ce malheur; non-seulement nous réunirons en faisceaux ses travaux et ses découvertes en chirurgie, mais nous entreprendrons de raconter la précieuse histoire de sa pratique médicale; nous décrirons, nous commenterons, nous expliquerons de notre mieux l'ingénieuse stratégie qu'il apportait dans cette espèce de bataille incessante que l'on appelle Thérapeutique.

Certes, la tâche est sérieuse, difficile; mais elle nous appartenait plus qu'à personne. Et, tout

OBSERVATIONS.

en demandant grâce pour notre faiblesse, nous ne reculons pas devant une tentative que nous considérons comme un devoir.

De la dimculté de reconnaître les affections latentes et subaiguës.

A qui n'est-il point arrivé, dans sa carrière médicale, d'avoir à soigner de ces maladies que l'on nomme subinflammatoires, affections douteuses, désolantes, espèces de sophismes vitaux, qui jettent le praticien dans une cruelle perplexité?

Le malade est sans fièvre et sans forces; la langue, le facies ne donnent pas de renseignements positifs; aucun des symptômes accusés n'est probant, caractéristique. Le malade se plaint de douleurs de foie, de douleurs d'estomac, ou bien d'ardeur dans les entrailles, de sécheresse dans la gorge, ou bien, enfin, de pesanteurs, de faiblesses et de palpitations. On le palpe, on percute, on ausculte, on ne trouve aucune preuve de désordre, aucun signe de lésion.

Cependant le pauvre patient maigrit de plus en plus. Il ne digère qu'avec peine; il dort peu, ou dort mal. Son pouls s'affaiblit, l'appauvrissement vital augmente tous les jours. C'est en vain que l'on tâche de le relever par des toniques ou des ferrugineux; c'est inutilement que l'on emploie les dérivatifs et les antispasmodiques. Alors le médecin, interrogé sur le caractère d'une maladie si réfractaire à toutes les médications, prononce les noms d'anomalies, d'affection nerveuse; puis, quelques jours plus tard, une hydropisie de la poitrine et du ventre vient démontrer qu'il s'agissait de toute autre chose que d'une névralgie.

Récamier, en pareille circonstance, tâtait le pouls longtemps et minutieusement, et souvent il y découvrait le signe certain d'une maladie subaiguë, la marque presque infaillible d'une affection subinflammatoire, générale ou localisée.

Ce signe, cette marque, ce caractère, Récamier

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l'a appelé pouls récurrent. Il en parlait souvent | fàché pour les positivistes, mais dans le grand

dédale des affections humaines, les signes, les indications, les symptômes, en un mot, ce que j'appellerais volontiers les enseignes pathognomoniques, n'ont pas besoin d'être toujours parfaitement explicables.

dans ses cours cliniques; il le faisait observer, quand l'occasion s'en présentait, dans ses conférences avec les confrères et dans ses nombreuses consultations. Je ne sache pas,. cependant, que cette observation, ou, pour mieux dire, cette découverte soit passée dans l'enseignement actuel; c'est pourquoi j'ai cru devoir commencer ces travaux par un renseignement d'une aussi nota-langue est-elle regardée, à juste titre, comme le ble importance.

Des caractères du pouls en général.

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passe

Pourquoi l'engorgement de la rate accompagne-t-il les fièvres intermittentes? Pourquoi la

miroir de l'estomac? Comment se fait-il que la présence de quelques vers intestinaux dans le rectum réagisse assez sur le cerveau pour dilater les pupilles et déterminer des démangeaisons dans le nez?

Éclaircissons notre pensée par une comparaison. Un homme dont tout dernièrement encore le Journal des Connaissances médico-chirurgicales analysait les travaux, un observateur récompensé par une pension publique des services qu'il a rendus à l'agriculture, M. Guenon, enfin, en examinant attentivement la robe des vaches laitières, remarque que les meilleures d'entre elles ont le poil planté de telle et telle façon. Il constate des plaques, des épis accompagnant et par conséquent prédisant toujours l'aptitude à la sé

Je ne veux pas faire le critique, mais je dois être historien. On n'apprend guère à tâter le pouls dans la plupart de nos cliniques. On a des montres à secondes fixes, ou tout simplement des montres munies de trotteuses, on place les doigts tant bien que mal sur l'artère radiale et..... et l'on compte ! Combien de pulsations? - Quatrevingts, cent, cent vingt! · On à l'examen d'un autre symptôme. Et cependant qui pourrait nier la valeur syndesmologique des variations que peuvent présenter les pulsations de l'artère radiale? Combien je rappellerais de renseignements oubliés et d'indi-crétion lactée, et, en accumulant les faits, les cations précieuses si, me posant en compilateur, observations, il parvient à en faire ressortir une je voulais analyser tout ce que les anciens, nos règle fixe, invariable, et la certitude presque mapères dans la science, ont écrit sur cet immense thématique de reconnaître les bonnes ou mausujet? Depuis Hippocrate, Hérophile, Érasisvaises qualités des vaches laitières. Où est la lotrate, jusqu'à Aristogène, Archigène et Ga-gique, l'explication de cette importante découlien; depuis Solano de Lucques jusqu'à Bordeu et Fouquet, tous ont démontré qu'à l'aide du pouls bien étudié, bien compris, on pouvait reconnaître, non-seulement le caractère, mais la situation des maladies internes; de là le pouls cérébral, le pouls pectoral, le pouls abdominal, etc.

Les symptômes tirés des variations du pouls ont été perdus de vue par certains enseignements entachés de positivisme, On veut se rendre compte de tout; or, la valeur, la signification du pouls n'est pas toujours explicable, toujours exactement rationnelle. Le pouls dur, roide et fréquent est le signe logique d'une fièvre générale ; c'est vrai. Le pouls faible et flasque est le signe rationnel de l'anémie; c'est encore vrai. Mais voici un pouls intermittent qui indique des souffrances intestinales, un pouls ondulant qui annonce la sueur, un pouls rebondissant qui permet de prédire les hémorrhagies, un pouls en queue de rat qui avertit d'avance de l'émission des urines! Où est la losique, le rapport, l'explication? J'en suis bien

verte?

Il en est de la science thérapeutique comme de toutes les sciences d'observation : elle ne repose, elle ne doit reposer que sur des faits, sur des faits bien reconnus, bien établis, sur des faits passant et repassant sans cesse par le contrôle de l'expérience.

Mais il importe peu que ces faits soient bizarres et plus ou moins compréhensibles, car un fait, par sa nature, est inflexible et dominateur.

Qu'est-ce que le pouls récurrent?

II n'est pas hors de propos de rappeler la situation de l'artère radiale et sa réunion avec l'artère cubitale, qui, plus profonde et plus volumineuse, marche si longtemps parallèlement avec elle.

Tout le monde sait qu'arrivée à la partie inférieure et antérieure de l'avant-bras, l'artère radiale, glissant entre les deux tendons musculaires qui se rendent dans la paume de la main,

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de l'articulation de l'avant-bras avec la main; mais, parvenue au niveau du premier os métacarpien, elle contourne la masse musculaire qui constitue l'éminence dite thénar; d'antérieure elle devient extérieure, puis postérieure, pour revenir, entre le pouce et l'index, se plonger sous l'aponévrose palmaire; là, elle s'anastomose bout à bout avec l'artère cubitale, laquelle demeure toujours antérieure, et forme dans la paume de la main cette arcade bien connue de tous les anatomistes, l'arcade palmaire.

Ce qu'il faut bien remarquer, c'est que l'artère radiale devient non-seulement sous-cutanée avant de contourner l'articulation de la main; mais encore, c'est qu'elle serpente dans une sorte de gouttière osseuse creusée dans l'extrémité antérieure et inférieure du radius; c'est-à-dire qu'elle repose sur une base solide et complétement inflexible. Cette condition était nécessaire pour la plupart des phénomènes du pouls; elle est indispensable pour le phénomène de la récur

rence.

Qu'est-ce donc que le pouls récurrent?

Récamier a désigné ainsi le choc que fait sentir l'artère radiale au-dessous d'un point comprimé assez fortement pour empêcher le passage du sang; tout choc artériel est produit par le passage du sang dans l'artère; c'est évident. Or, l'artère radiale étant comprimée assez fortement pour y produire une complète oblitération, on conçoit qu'un choc assez vigoureux puisse être

Fig. 4. Artère oblitérée par la pression des doigts.

Fig. 5. Représentation de l'artère donnant le symptôme
de la récurrence.

Les détails anatomiques que nous rappelions plus haut, nous permettent de l'expliquer. Nous avons vu que la radiale s'anastomosait avec la cubitale à la suite de l'arcade palmaire. Or, si vous comprimez la radiale, vous ne comprimez pas l'artère cubitale, et cette dernière s'empresse de fournir à l'artère comprimée le sang qui produit le choc remarqué par Récamier. C'est donc une espèce de choc en retour; et c'est pour cette raison que l'illustre professeur la désigne sous le nom de pouls récurrent.

Le pouls récurrent est-il le pouls bisferiens des anciens? Je ne le pense pas. Il y a peut-être un phénomène de récurrence dans le pouls à deux temps; mais cette récurrence est sans valeur appréciable. Et, d'ailleurs, quand les anciens nous auraient désigné le pouls récurrent, ils sont bien loin de l'avoir regardé comme le symptôme de l'inflammation subaiguë. C'est ce qu'a fait Récamier, et c'est ce que je veux établir.

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