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mieux que personne à traiter une semblable question. Or, ce ne sont pas seulement des armes qui ont été trouvées à la Thièle, mais des monnaies en grand nombre. La série de ces monnaies est très éloquente. Un propriétaire voisin de Marin, nom du village au pied duquel est la station, M. Dardel (de Préfargier), a pu recueillir 150 monnaies gauloises ou préromaines, au nombre desquelles des marseillaises, des éduennes, des séquanaises; quelques monnaies des colonies de Vienne, d'Orange et d'Arles, et enfin 160 et quelques monnaies romaines, tant consulaires qu'impériales, des règnes d'Auguste et de ses successeurs jusqu'à Trajan. Mais il y a plus : deux briques romaines sorties des fouilles sont estampillées ces briques portent la marque de la xxr légion Rapax, cantonnée sous Auguste à Vindonissa. Le mystère de la station de la Têne est donc complètement dévoilé.

Cette station, placée au débouché de la Thièle sortant du lac de Neufchâtel pour se jeter dans le lac de Bienne, et dominant la vieille route gauloise, plus tard route romaine, qui traverse toute la Suisse, du lac de Genève au lac de Constance, était un poste défensif, qui, après avoir été occupé par les Helvètes à l'époque de leur indépendance, fut réoccupé sous Auguste et jusqu'à Trajan par un détachement de la légion placée à Vindonissa, pour y garder les abords du Rhin.

Cet oppidum semble avoir été abandonné après un désastre. Le nombre des armes découvertes, la plupart brisées ou fortement ébréchées, militerait déjà en faveur de cette hypothèse, quand même nous n'aurions pour l'appuyer un fait plus significatif encore, la présence d'une trentaine de squelettes ensevelis dans le sable, à proximité des armes, squelettes sur le crâne desquels se reconnaissent encore des traces très sensibles de fortes lésions reçues pendant la vie.

Espérons que le Gouvernement norvégien mettra bientôt

M. Undset à même de nous donner les résultats de la mission dont il a si bien profité. Je suis heureux de pouvoir rendre ce témoignage à M. Undset, qui assiste à la séance.

N° VII.

NOTICE HISTORIQUE ET CRITIQUE SUR LES FABLES LATINES DE PHÈDRE

*

ET DE SES ANCIENS IMITATEURS, DIRECTS ET INDIRECTS, PAR M. LÉO

POLD HERVIEUX.

M. Léopold Hervieux, ancien agréé au tribunal de commerce de la Seine, a donné lecture d'une Notice historique et critique sur les fables latines de Phèdre et de ses anciens imitateurs, directs et indirects. Cette notice n'est elle-même qu'un résumé des deux premiers volumes, qui sont à la veille de paraître à la librairie Firmin Didot et C, d'un ouvrage intitulé : Les fabulistes latins depuis le siècle d'Auguste jusqu'à la fin du moyen âge.

Dans cet ouvrage il a entrepris de mettre au jour toutes les collections de fables latines que les anciens manuscrits nous ont conservées. Après avoir passé de nombreuses années à exhumer des grandes bibliothèques de la France et de l'étranger et à réunir les matériaux qu'il a pu y rencontrer, il les a classés méthodiquement, et, rattachant à chaque œuvre originale toutes les collections qui en étaient directement ou indirectement dérivées, il a formé du tout plusieurs groupes distincts, dans lesquels il est aisé de suivre la filiation des textes.

Des deux premiers volumes, consacrés au plus important de tous les groupes, c'est-à-dire aux fables latines de Phèdre et de ses imitateurs directs et indirects, le premier contiendra une étude historique et critique, et le deuxième renfermera les textes.

Parlant d'abord de Phèdre, M. L. Hervieux rappelle les

controverses auxquelles a donné lieu l'authenticité, tant des premières fables, découvertes en 1596 par Pierre Pithou, que de celles trouvées à Parme en 1727 par Philippe d'Orville et publiées à Naples en 1808 par Cassitto et en 1809 par Jannelli. Les premières nous sont parvenues par les manuscrits de P. Pithou et des Bénédictins de Saint-Remi de Reims, écrits au 1x° siècle, par le manuscrit de Daniel, dont l'écriture remonte au xr siècle, et par les deux manuscrits des xv et xvi° siècles contenant l'Epitome de Niccolo Perotti. Ce sont seulement ces deux derniers qui renferment les fables les plus récemment découvertes. M. L. Hervieux a démontré matériellement l'authenticité des premières fables par des fac-similés de l'écriture des manuscrits, et il a fourni ensuite les raisons qui ne permettent pas d'attribuer aux dernières une origine diffé

rente.

Examinant ensuite les dérivés directs de Phèdre, il a considéré comme tels les trois recueils de fables contenus : le premier dans le manuscrit de Leyde, publié par Nilant en 1709; le deuxième dans le manuscrit de Wissembourg, actuellement à Wolfenbüttel; le troisième dans les manuscrits de Romulus.

Après avoir prouvé que le premier de ces recueils est l'œuvre du chroniqueur Adémar de Chabanais, moine de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges, mort en Terre Sainte en l'an 1030, et que les deux autres sont du x° siècle, il examine comment ils se rattachent à l'œuvre du fabuliste romain.

D'abord il démontre que, contrairement à l'opinion de M. L. Müller, la collection d'Adémar, très différente des deux autres, a été directement tirée de l'œuvre de Phèdre. A l'égard des deux collections contenues tant dans le manuscrit de Wissembourg que dans ceux de Romulus, il établit qu'il a existé, non pas à l'époque mérovingienne, mais à l'époque carlovingienne, un Esopus ad Rufum, aujourd'hui disparu, qui n'a pas été un Corpus fabularum réunissant toutes les fables latines

alors connues, mais qui était uniquement issu de la transformation partielle des fables de Phèdre, de telle sorte que l'Esopus ad Rufum ne comprenait que les fables qu'on retrouve dans l'œuvre du compilateur pseudonyme appelé Romulus. M. L. Hervieux n'en a pas moins considéré les deux collections de Wissembourg et de Romulus comme des dérivés directs de Phèdre, parce que, ainsi qu'il l'a d'ailleurs démontré, elles n'ont été, l'une partiellement, l'autre intégralement, que la copie littérale de l'Æsopus ad Rufum, qui lui-même était directement tiré de l'œuvre de l'affranchi d'Auguste.

M. L. Hervieux a ensuite donné connaissance de la partie de sa Notice relative aux imitateurs indirects de Phèdre. Leur nombre considérable l'a obligé à les diviser en deux catégories: la première embrassant ceux exclusivement issus de Phèdre, et la seconde ceux dérivés tant de cet auteur que d'autres

sources.

Les dérivés en prose dont Phèdre a été l'origine directe, mais unique, comprennent :

1° Vingt-neuf fables que Vincent de Beauvais a, d'après celles de Romulus, consignées dans ses Miroirs historial et doctrinal;

2° Quatre-vingt-deux fables qu'à cause des lieux où en existent les manuscrits M. L. Hervieux a qualifiées de Romulus de Vienne et de Berlin, et parmi lesquelles s'en trouvent deux étrangères à celles du Romulus primitif;

3° Cinquante-deux fables connues sous le nom de Romulus de Nilant, publiées en 1709 au nombre de quarante-cinq et complétées par M. L. Hervieux à l'aide de deux manuscrits par lui retrouvés;

4° Quarante-cinq fables qui, existant à Oxford dans un manuscrit du Corpus Christi college, offrent une imitation sous une forme plus concise de l'œuvre du Romulus primitif ;

5° Treize fables contenues dans le manuscrit latin 141 de

la bibliothèque cantonale de Berne et formées de la combinaison du texte de ce Romulus avec celui de Phèdre.

que

Les dérivés en vers sont moins nombreux.

Avant tout autre il faut citer celui qui est encore aujourd'hui connu sous le nom d'Anonyme de Névelet. Il se compose de soixante fables en vers élégiaques, qui ne sont elles-mêmes la transformation de celles composant les trois premiers livres de Romulus. M. L. Hervieux s'est livré à de laborieuses recherches pour découvrir le nom du véritable auteur de ces soixante fables, et il a, au moyen de documents nombreux, établi qu'elles devaient être attribuées au chapelain de Henri II Plantagenet, appelé Walther et surnommé l'Anglais.

Ayant trouvé disséminées, tant dans les manuscrits des fables de Walther l'Anglais que dans les nombreuses éditions qui en ont été publiées pendant la seconde moitié du xv° siècle, diverses autres fables en vers élégiaques, il les a, au nombre de quatorze, réunies dans un Appendice, qui figurera dans le second volume de son ouvrage, à la suite des soixante premières.

Il a ensuite cité une collection en prose, qui n'était ellemême qu'un dérivé de l'œuvre en vers et qui existe dans le manuscrit latin 14961 de la Bibliothèque nationale.

Puis il s'est étendu plus longuement sur un second dérivé en vers, qui, pour être inconnu et, dans tous les cas, inédit, n'en est pas moins curieux. Il présente en effet un singulier mélange des règles de la prosodie latine et de celles de la versification française. Les fables se composent de quatrains, dont les quatre vers sont sur une seule rime. Elles sont au nombre de cinquante-deux, ont pour origine le Romulus de Nilant et paraissent ne pas remonter plus haut que le XIV siècle.

Passant aux dérivés indirects issus tant de Phèdre que d'autres sources, et commençant par l'examen des dérivés en

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