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leurs traditions et leurs moeurs, anglo-bretonnes. Elle montre aussi qu'entre Français et Anglais, les vieilles inimitiés sont mortes et l'union vivante. Les deux peuples ont, en effet, aujourd'hui à défendre de concert upe grande cause la cause de la civilisation et de la liberté européenne, menacée par l'esprit de conquête et de dictature. (Nouveaux applaudissements.)

>> Messieurs, en vous donnant rendez-vous au Congrès de l'année prochaine, il convient de dire un mot de la direction des études historiques dans l'Association bretonne.

Ce matin, nous avons décidé de mettre en tête de notre prochain programme une série de questions relatives à l'histoire des municipalités et des communes de Bretagne, des corps de métiers, des paroisses et des populations rurales, et aussi à l'histoire du commerce, de l'industrie et de l'agriculture dans notre province.

C'est dans cette direction que se sont toujours portées de préférence les études de la section historique de l'Association bretonne, et la rai son en est simple: il y a là un terrain neuf à défricher et un nouveau monde à découvrir, auquel les histoires monumentales de nos provinces, composées par les Bénédictins, n'ont pas touché.

> En composant ces histoires, nos Bénédictins, malgré leur grande et si admirable érudition, ne pouvaient se soustraire à l'influence de la société où ils vivaient. Dans cette société, la royauté et la noblesse étaient tout; dans leurs histoires, elles sont presque tout; les classes non privilégiés, tiers-état, roturiers, paysans, restent dans l'ombre.

Aujourd'hui, depuis les généreux sacrifices de la nuit du 4 août, tous les Français sont égaux dans la société française, ils doivent tous être égaux devant l'histoire. En suivant dans nos études la direction que je viens d'indiquer, nous aussi loin de le combattre nous obéissons

donc à l'esprit de la société dans laquelle nous vivons.

D

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Mais, dira-t-on peut-être, dans la nuit du 4 août, ce n'est pas seulement la noblesse qui abjura ses priviléges; les provinces mêmes, sans excepter la Bretagne, renoncèrent là à leurs franchises, à leur existence. Et cependant vous, Association bretonne, que faites-vous? Sans cesse vous exaltez le sentiment et le patriotisme breton, sans cesse vous agitez le drapeau de la Bretagne.

» C'est vrai, Messieurs, nous le faisons; si c'est un crime, nous l'avouons; nous sommes même décidés à le commettre tant que Dieu nous prêtera vie. (Applaudissements.)

>> Mais prenez garde : est-ce donc qu'en déposant ses franchises et son organisation distincte, chaque province ait abjuré son esprit et son caractère particulier, son énergie propre, en un mot la part spéciale apportée par elle au grand trésor dont se compose la force et le génie de la France? Ancune province ne l'a fait ni ne pouvait le faire ç'aurait été appauvrir et diminuer la patrie comniune.

L'esprit distinctif de la Bretagne, son énergie native et caractéristique, tout le monde le sait, c'est son esprit de stabilité, sa force incalculable de résistance.

» Résistance au mal, à l'injustice, à l'oppression, surtout à l'invasion

CHRONIQUE.

étrangère, qui attaque le sol et le cœur de la patrie! (Applaudissements)

Aussi voyez, dans tous les grands périls de la France, en tête de la résistance il y a un Breton :

» Au XIVe siècle, du Guesclin;

» Au XVe, Richemont;

» Et au XIXe, dans ces désastres terribles qui nous ont frappés, aux premiers rangs on trouve des Bretons partout: en province, le général Charette; dans Paris, dirigeant la résistance et la poussant, par miracle, jusqu'au dernier morceau de pain, un autre Breton qui, du fond de sa retraite et du haut de son généreux patriotisme, a bien le droit de déle général Trochu. (Apdaigner tous les aboiements de la calomnie,

plaudissements.)

» Donc, quand elle étudie, quand elle exalte la Bretagne et ses héros, l'Association bretonne fait une œuvre utile à la France; car en remettant en lumière les grandes figures des Bretons d'autrefois, elle dit à ceux d'aujourd'hui :

- Voilà vos pères; enfants, ne dégénérez pas! Comme ils ont aimé la France et la Bretagne, aimez-les toutes deux; comme ils les ont servies, servez-les. Ces deux amours aujourd'hui n'en font plus qu'un, dont l'arcomme aussi soit double, enfants, la force de deur doit être double, la pavos cœurs et de vos bras, au jour où il faudra défendre et venger trie! (Vifs applaudissements dans toute la salle.) >

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BIBLIOGRAPHIE BRETONNE ET VENDÉENNE

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In-18, XVI

ESSAIS HISTORIQUES SUR LA PAROISSE DE SUCÉ; par l'abbé P. Grégoire, membre de la Société archéologique du département. 296 p. Nantes, imp. Vincent Forest et Émile Grimaud.

FOUILLES DU LAC DE GRAND-LIEU. Les lacs Paladru et de Grand-Lieu; par F. Parenteau. In-8°, 4 p. Nantes, imp. Vincent Forest et Emile Grimaud.

HISTOIRE DE MÉLUSINE, princesse de Lusignan, et de ses fils; suivie de l'histoire de Geofroy la grand'dent, sixième fils de Mélusine, princesse de Lusignan; par Nodot. Avec une introduction sur l'origine des légendes concernant la Mélusine. In-80, XLIV-278 p. Niort, imp. et lib. Favre; Paris, lib. Champion.

MÉMOIRE SUR LES PUISSANCES DE POINTS. Étude de géométrie plane; par M. Laisant, capitaine, chef du génie à Tlemcen. In-8°, 15 p. Nantes, imp. Vincent Forest et Emile Grimaud; Paris, 76, rue de Rennes. Extrait du compte rendu de l'Association française pour l'avancement des sciences. Congrès de Nantes, 1875.

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POÉSIES CHRÉTIENNES, par Francis Goullin. In-18, 174 p. Nantes, imp. Vincent Forest et Emile Grimaud; Paris, lib. Haton; Nantes, lib. Libaros.

RÉPONSES AUX QUESTIONS SUR L'ABRÉGÉ DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE. - In-18, 296 p. Nantes, imp. Vincent Forest et Emile Grimaud.

SOUVENIRS D'UNE MISSION MUSICALE EN GRÈCE ET EN ORIENT, par L.-A. Bourgault-Ducoudray. Paris, J. Baur, rue des Saints-Pères. Broch. petit in-8°, 43 pp.

JEAN

UN ÉVÊQUE DE Saint-Pol-de-LÉON A L'ACADÉMIE FRANÇAISE. DE MONTIGNY (1632-1671), par M. René Kerviler. - In-8°, 46 pp. Nantes, impr Vincent Forest et Emile Grimaud. Tiré à 50 ex.

Extrait de la Revue de Bretagne et de Vendée.

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UN NOUVEAU RECUEIL GÉNÉALOGIQUE ET HISTORIQUE, par M. Paul Marchegay. Broch, in-80, 8 pp. Nogent-le-Rotrou, impr. Gouverneur. Extrait de la Bibliothèque de l'Ecole des Chartes.

LA CONSECRATION

DE SAINT-NICOLAS DE NANTES

Notre ville vient d'être témoin d'une cérémonie rare toujours, mais qui, dans les circonstances où elle s'est produite, est peut-être sans exemple. Nous voulons parler de la consécration d'une vaste église, d'une véritable basilique, par un évêque qui en avait, comme prêtre, jeté les fondements. Autrefois de pareilles œuvres usaient plus d'une vie d'homme. Le temple projeté par David ne fut édifié que par Salomon; la cathédrale construite par notre vieil évêque Evehmère, ne fut terminée et inaugurée que par son successeur, saint Félix. Le plus souvent même, ce n'étaient pas seulement deux hommes, c'étaient cinq et six générations qui passaient et disparaissaient entre la première et la dernière pierre de ces splendides monuments. Notre-Dame de Chartres date des XII® et XIII siècles, et sa haute flèche du XVe; Notre-Dame de Paris sortail de terre en 1163, et, deux cents ans après, on y travaillait encore; Saint-Gatien de Tours était commencé en 1170, et ses deux tours ne recevaient leur couronnement qu'en 1507 et 1547. On ne citerait peut-être que Notre-Dame d'Amiens, parmi nos illustres églises, qui ait été édifiée en moins de cent ans, de 1220 à 1288; et encore l'une de ses tours n'atteint-elle pas la hauteur de l'autre.

A Nantes, il n'a pas fallu quarante ans pour que la pensée de reconstruire Saint-Nicolas fût conçue, arrêtée et accomplie. Le 1er août 1844, la première pierre du nouvel et grandiose édifice est posée par Mgr de Hercé; le 30 octobre 1848, en pleine révolution, le sanctuaire, le transept et les chapelles absidales sont solennellement bénits par le curé de la paroisse, l'inspirateur de l'œuvre, l'abbé Félix Fournier; les cinq nefs sont ouvertes à la

TOME XL (X DE LA 40 SÉRIE.)

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prière, la veille de Noël 1854; la grande flèche, hardie rivale du Creisker de Saint-Pol, est débarrassée de ses échafaudages en 1868, et, hier enfin, 10 octobre, fête de saint Clair, premier évêque du diocèse, l'église, achevée, ornée, toute brillante de cette poésie que le génie chrétien sait inspirer à la pierre, était consacrée, avec une pompe religieuse digne de celle qu'un autre Félix déploya lors de la consécration de sa cathédrale et dont les vers de Fortunat nous ont conservé le souvenir.

Que d'obstacles cependant avait rencontrés devant elle cette audacieuse entreprise? obstacles du côté de l'art, du côté de l'argent, du côté des révolutions.

Du côté de l'art, il fallut vaincre la résistance des Vitruves de l'époque, qui se refusaient à admettre d'autre style que le style grec et ne comprenaient pas la différence qu'on prétendait ét blir entre un temple de Jupiter et l'église du Dieu vivant. Le jeune curé de Saint-Nicolas fut le premier en France à entrer pratiquement en lutte, au nom de notre vieil art religieux et national, contre ce despotisme inintelligent, et, s'il en triompha, te ne fut pas sans encourir le blâme sévère du conseil supérieur des bâtiments civils, blâme dont le consola, il est vrai, l'admiration qu'éveillèrent partout ailleurs ses projets et son plan.

Du côté de l'argent, les difficultés furent plus grandes encore, el on pouvait les croire insurmontables. Sans doute, le vénérable abbé Dupaty, prédécesseur immédiat de l'abbé Fournier, avait prudemment économisé les revenus de sa fabrique, dans une pensée d'avenir; le gouvernement allouait cent mille francs, la ville ne se montrait pas moins généreuse '; mais qu'étaient-ce que toutes ces sommes réunies en présence d'un devis qui montait à près de deux millions?

Heureusement, la foi, on le sait, et notre diocèse en a fourni plus d'une preuve, est de force à remuer les montagnes.

« C'est un prodige inouï, écrivait Haimon, abbé de Saint-Pierresur-Dive, à l'époque des grandes constructions religieuses du XIIe siècle, c'est un prodige inoui de voir les hommes les plus puis

Les 100,000 francs de la ville font, en définitive, si nous ne nous trompons, 4 ou 5 francs par paroissien. N'aurait-on pas vu, depuis lors, d'autres paroissiens, non catholiques, demander 25 francs par tète pour les aider à construire un temple avec clochers, à l'usage d'un culte qui n'admet pas le son des cloches?

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