Page images
PDF
EPUB

cription. L'écusson central, accompagné d'une crosse et d'une mitre, quoique usé par le frottement des pieds, porte toujours trèsvisibles un chevron et une croix en abime; or, M. de Courcy et les vitraux de l'ancienne cathédrale de Rennes, dont Mgr Thomé avait été trésorier, donnent pour armes à ce prélat d'argent au cherron de gueules, abaissé sous un chef d'azur chargé de deux étoiles d'or, accompagné en pointe d'un cœur de gueules surmonté d'une croix de même. C'est donc sous celte pierre que reposent les restes de Mre François Thomé 1.

L'ABBÉ GUILLOTIN DE CORSON.

(La fin à la prochaine livraison.)

' Pendant l'impression de cette étude, nous avons retrouvé une preuve certaine de ce qui précède dans le passage suivant de l'Hist. des Evêques de Saint-Malo, par le P. Le Large (Ms. de la bibliothèque de Sainte-Geneviève à Paris): « François Thomé mourut à Saint-Malo de Beignon, et fut enterré dans le sanctuaire de l'église, du côté de l'évangile; son tombeau est d'une pierre dure et noire, où les armes de cet évêque sont gravées on voit aux quatre coins les armes de l'évêque Jean du Bec (l'un de ses successeurs, auquel est dû ce monument). Au côté de ce tombeau est un tableau de cuivre où notre prélat est représenté à genoux. » Cette effigie de Mgr Thomé a malheureusement disparu,

POÉSIE

LE CHEMIN PERDU

A MON AMI CHARLES MARIONNEAU, QUI VENAIT DE M'OFFRIR
UN PAYSAGE.

Ce tableau que, joyeux, je suspends à mon mur,
Est plein de poésie,

Et de bons juges d'art m'ont dit : « Soyez-en sùr,
» C'est une œuvre choisie. »

Pour moi, qui ne sais point m'attacher à demi,
Souvent je le regarde,

Et seul, comme l'on fait avec un vieil ami,
Près de lui je m'attarde.

Car je t'aime, ô chemin perdu sous les grands bois,
Tout velouté de mousse,

Où de maints oisillons se concertent les voix,

Où le bouton d'or pousse.

Quels jours furent tracés les méandres?... Quels jours
Nos plus lointains ancêtres
Plantèrent-ils, au sein des vignes, des labours,
Tes chênes et tes hêtres?...

Hache ou framée au poing, les vis-tu s'élancer,
Le cœur gonflé de haines,

Les farouches Gaulois, quand venaient à passer
Des légions romaines?

Au temps de la Terreur, tu vis assurément
Ces révoltés sublimes,

Ces géants vendéens, dont le fier dévoùment
M'inspira tant de rimes.

S'ils pouvaient nous parler, tous tes buissons épais,
Ils nous diraient des drames

Que ne soupçonnent pas, s'énervant dans la paix,
Nos langoureuses âmes.

Sombres tableaux! sur eux je glisse et les bannis:
Je veux, antique voie,

N'ouïr que les accords modulés dans tes nids,
Que tes frissons de joie.

Oh! comme il me plairait, libre, d'aller m'asseoir
Sous tes feuilles jaunies,

Pour lire, ou pour rêver, lorsque descend le soir,
Aux choses infinies!

.

Je serais, sans me plaindre, un peu troublé parfois
Dans mes graves pensées

Par un pauvre, liant en fagot pour les froids.
Quelques branches cassées.

Dans un repos profond là je contemplerais
L'ineffable nature...

Mais je n'ai, pour répondre à ces besoins secrets,

Que toi, chère peinture!

Nantes, 16 février 1876.

ÉMILE GRIMAUD.

BERRYER AVOCAT

ŒUVRES DE BERRYER. 2o série: Plaidoyers. Tome I (1815-1835) 1.

La Revue a rendu compte des Discours parlementaires* formant la première série des œuvres de Berryer. La seconde série, composée des Plaidoyers, va paraître, et nous avons aujourd'hui entre les mains le premier volume, qui va de 1815 à 1835.

Le moment est donc venu, après avoir étudié l'orateur politique, d'étudier l'avocat, et, dès ici, nous pouvons dire que, chez Berryer, l'avocat n'est pas moins grand que l'homme de tribune.

--

[ocr errors]

I

Le 26 décembre 1811, Berryer se présentait à la barre et prêtait le serment d'avocat. Il devait figurer sur le tableau de l'ordre jusqu'au mois de novembre 1868. Pendant cette période de près de soixante ans près de quatre fois le grande mortalis ævi spatium de Tacite, Berryer a prononcé un si grand nombre de plaidoyers qu'il eût été impossible de les réunir tous. De ces plaidoyers, d'ailleurs, beaucoup n'ont pas été reproduits; il en est d'autres dont l'on ne possède que des fragments ou d'insuffisantes analyses. - La bibliothèque de l'ordre des avocats possède une collection complète des Mémoires, Plaidoyers et Consultations d'ANDRÉ-MARIEJEAN-JACQUES DUPIN, avocat à la cour royale de Paris, docteur en ́droit, membre correspondant de l'académie ionienne, etc., etc. Į

--

Librairie académique Didier et C, 35, quai des Augustins. Paris, 1876. Au moment où nous mettons cet article sous presse, parait le second volume des Plaidoyers de Berryer. Ce second volume est à la hauteur du premier, et nous ne le recommandons pas moins vivement à nos lecteurs.

2 Cinq beaux volumes in-8°. Librairie Didier et C. Voy. la Revue, n' de janvier 1874.

Maître Dupin, qui avait tous les genres d'esprit, y compris l'esprit d'ordre, avait formé lui-même cet immense et compendieux recueil, où sont soigneusement rassemblés, étiquetés, rangés, tous les arguments, répliques et bons mots que semait sa main droite et que recueillait sa main gauche. Mouvements dans l'auditoire, bravos, sourires, jusques aux simples Ah! Ah! tout est noté, rien n'est perdu; ou plutôt, hélas! tout est perdu, car, à l'exception de quelques curieux endurcis, qui s'avisera jamais de remuer les cendres refroidies de tous ces vieux dossiers? Berryer n'a eu garde, en cela comme en mainte autre chose, de suivre les errements de maître Dupin. Avec une insouciance d'artiste et de grand seigneur (et qui fut plus artiste et plus grand seigneur que Berryer?), il laissait aller ses plaidoiries où vont la feuille de rose et la feuille de laurier; il se préoccupait peu d'en disputer au vent les feuillets déchirés. Mais la gloire est capricieuse comme la fortune; poursuivez-la, elle vous fuit; fuyez-la, elle vous recherche. Elle a été fidèle à Berryer vivant ; elle sera fidèle à sa tombe. Elle est parfois capricieuse, ai-je dit, et j'ai peut-être eu tort de faire ici cette remarque, qui ne fut jamais moins en situation. Jamais en effet la gloire ne plaça mieux ses faveurs qu'en les accordant à Berry er. Qui les mérita plus que lui? Qui réunit, en un degré plus éminent, les qualités les plus rares, une âme plus grande, une inspiration plus haute, un plus noble caractère ?

[ocr errors]

Le volume que j'ai sous les yeux suffirait à montrer que Berryer possédait tous les dons, tous les talents qui font les grands avocats, cette science profonde du droit et cette puissance de logique qui forcent les convictions, cette chaleur d'âme qui émeut les esprits, ce souffle d'éloquence qui incline les volontés, cette décence qui, suivant Guillaume du Vair, « est la plus grande et plus difficile partie de l'oraison>'; et avec tout cela, et au-dessus de tout cela, je ne sais quoi qui n'appartient qu'au génie et qui fait les grands orateurs comme les grands poètes.

1 Guillaume du Vair. De l'Eloquence française.

« PreviousContinue »