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rôme, de saint Cyprien, du pape saint Léon et de saint Thomas d'Aquin. Mais bientôt la médecine et le droit eurent leur tour. Ulric Hahn, qui avait déjà publié en 1468 un petit traité relatif à la guérison des bubons pestilentiels, se décida trois ans plus tard à donner une édition des statuts de Paul II. Le volume ne porte, il est vrai, aucune indication d'année, de lieu ni d'imprimeur; mais les bibliographes les plus compétents l'attribuent sans hésitation à Ulric Hahn et le datent de 1471, à cause de l'identité des caractères avec ceux du Tite-Live et du Justin sortis cette même année de son atelier. C'est un des monuments les plus importants et les plus précieux du premier âge de la typographie italienne. Les exemplaires en sont d'une insigne rareté. Audiffredi en avait connu deux, l'un aux archives du Capitole, l'autre en la possession d'un prélat romain, Honoré Gaëtani; Panzer en a signalé un troisième à la bibliothèque de Nuremberg; M. Vito la Mantia nous révèle l'existence d'un quatrième chez les dominicains de la Minerve; j'en ai moi-même, grâce aux bons offices de notre savant confrère M. Léopold Delisie, rencontré un cinquième dans la réserve de notre grande Bibliothèque nationale.

En se chargeant de la publication des statuts, Ulric Hahn avait évidemment espéré que l'entreprise serait fructueuse. L'événement trompa son attente. On conserve en effet aux archives du Vatican la minute d'un édit, en date du 7 juin 1474, par lequel le cardinal camerlingue informait le sénateur qu'il restait encore en magasin un grand nombre d'exemplaires, et mandait à chacun des avocats ou notaires attachés à la juridiction du Capitole d'avoir à s'en procurer un dans le délai de huit jours, sous peine d'une amende de vingt ducats. Grâce à cette mesure, l'édition finit par s'écouler, et cinquante ans plus tard le pape Adrien VI se plaignait que le volume fût devenu très-rare. Il attribuait

même à cette rareté les fréquentes erreurs commises dans l'interprétation du texte. En conséquence, il en ordonnait la révision, et confiait le soin de ce travail à deux docteurs consistoriaux, Paul Planca et Salomon Albertysco. La nouvelle compilation fut publiée en 1523. Elle devint à son tour l'objet d'une refonte presque totale, en 1580, sous le pontificat de Grégoire XIII.

C'est le dernier fait qui mérite d'être signalé dans l'histoire des statuts de la ville de Rome. Le caractère des institutions politiques et civiles de l'ancienne capitale du monde était désormais fixé, et la forme même n'a éprouvé que des changements insignifiants jusqu'à l'époque des guerres de la Révolution. L'énumération des diverses éditions des statuts publiées depuis 1580 n'offrirait plus qu'un intérêt bibliographique. Je m'arrête donc ici, en avouant que, malgré les renseignements fournis par M. Vito la Mantia et malgré les

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efforts que j'ai faits pour les compléter, l'esquisse que je viens de tracer offre de nombreuses lacunes. Mais la plus grave d'entre elles ne pourra être comblée que le jour où le Vatican ouvrira ses portes et permettra d'étudier à loisir le manuscrit de Pierre Mellini. Espérons, pour l'honneur du Saint-Siége et pour le profit de la science, que ce jour n'est pas éloigné !

APPENDICE N° II.

RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES ANTIQUITÉS DE LA FRANCE, sur les ouvrages envoyés au concours de l'année 1878,

PAR M. GASTON PARIS.

(LU DANS LA SÉANCE DU 10 JANVIER 1879.)

MESSIEURS,

Votre Commission a eu cette année à examiner les ouvrages de vingt-deux concurrents. Ce chiffre a été souvent dépassé, mais le concours de 1878 était plus remarquable par la qualité que par la quantité. Un très-petit nombre d'ouvrages a pu être éliminé sans discussion approfondie et la Commission a regretté de devoir borner à dix le nombre de ceux auxquels elle attribue une distinction. Elle désire exprimer ce regret nommément pour deux ouvrages, pour les Recherches historiques sur les établissements hospitaliers de la ville de Saint-Omer, par M. Deschamps de Pas, correspondant de l'Académie, et pour l'Examen critique, par M. Blanchard, du Cartulaire des sires de Rays. Le travail de M. Deschamps de Pas, appuyé sur de nombreuses pièces recueillies dans les archives départementales, municipales et surtout hospitalières, présente les qualités de labeur consciencieux et de saine critique qui ont mérité à l'auteur les approbations répétées de l'Académie; mais la plupart des faits qu'il relate et des documents qu'il cite appartiennent à une époque plus moderne que celle où se renferme d'ordinaire la Commission des antiquités nationales. L'étude de M. Blanchard porte sur un sujet restreint et ne dépasse pas 36 pages in-8°; elle est cependant méritoire l'auteur a pensé qu'un

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certain nombre de dates contenues dans le Cartulaire des sires de Rays sont inexactes, et que le savant auquel on doit l'analyse de ce recueil ne les a pas toutes bien interprétées. Plusieurs des rapprochements qu'a faits M. Blanchard sont décisifs, et les rectifications qu'il a proposées ne laissent aucune espèce de doute. Nous l'attendons avec confiance à un travail plus considérable.

En présence de la valeur exceptionnelle des quatre ouvrages qu'elle avait mis au premier rang, la Commission n'a pu se résigner à ne vous proposer que les trois médailles réglementaires. Elle a décidé à l'unanimité de prier M. le Secrétaire perpétuel d'en demander pour cette année une quatrième. Cette demande a été accueillie par M. Bardoux, ministre de l'instruction publique, et l'Académie a pu ainsi récompenser dignement le livre de M. l'abbé Hanauer.

M. l'abbé Hanauer n'est pas un inconnu pour la Commission des antiquités nationales. En 1865, il a obtenu une de nos médailles pour ses Études sur les cours colongères de l'Alsace au moyen âge, et bien que plusieurs des théories et des allégations de l'auteur aient été à bon droit contestées, personne n'a mis en doute que, par la nouveauté des aperçus et des faits qu'elles contenaient, ces études n'eussent mérité la récompense dont elles ont été honorées. C'est, au moins en grande partie, la suite de ce travail que l'auteur a soumise cette année à notre jugement nous y avons retrouvé le même labeur, le même zèle, la même intelligence, la même abondance de textes publiés et commentés, et nous n'avons pas eu à y reprendre, comme dans l'autre ouvrage, la prédominance de l'imagination sur la froide critique et la hâte de conclusions dépassant les prémisses. Dans ses Études sur les cours colongères, M. l'abbé Hanauer s'était surtout occupé de la condition politique des classes agricoles de l'ancienne Alsace; dans ses Études économiques sur l'Alsace ancienne et moderne (2 vol. in-8°), il a eu particuliè

rement en vue leur condition matérielle. Mais, à mesure qu'il pénétrait au cœur du sujet, le cadre qu'il s'était d'abord tracé prenait insensiblement des proportions plus grandes. Les recherches accomplies par lui dans les archives de nos anciens départements du Rhin avaient mis entre ses mains des richesses immenses et lui offraient le moyen d'entrer dans une foule de développements qu'il n'avait pas d'abord prévus. C'est ainsi que l'auteur s'est vu amené à tracer un tableau complet de la condition matérielle non-seulement des classes agricoles, mais bien de toutes les classes laborieuses de l'Alsace ancienne. A ce tableau, qui est le fond de son travail, il a joint, comme autant d'épisodes, des digressions d'un véritable intérêt sur les principales institutions administratives, financières ou commerciales qu'il rencontrait sur son chemin. Le caractère du livre est ainsi devenu beaucoup plus général que son titre ne semblait le promettre; mais cette extension si profitable n'a rien diminué de la profusion et de l'exactitude des détails. L'auteur a ramené toutes ses recherches à trois points principaux les monnaies, les denrées et les salaires. Le premier volume tout entier est consacré aux monnaies. Après une explication des mots techniques employés dans le cours de l'ouvrage, nous trouvons une histoire aussi complète que possible des ateliers monétaires de l'Alsace et des contestations auxquelles le droit de battre monnaie donna lieu entre les princes, les évêques et les cités. Cet exposé, où la politique intervient naturellement plus d'une fois, se termine à la création de la cour française des monnaies, à laquelle sont rattachés, en raison de sa juridiction, les orfévres, les horlogers, les fourbisseurs, batteurs et tireurs d'or. De l'histoire des personnes employées au travail des métaux nous passons à celle des métaux euxmêmes: deux chapitres nous font connaître les principales mines de l'Alsace, leur organisation, leurs procédés d'extraction, leur rendement, puis les règlements et l'installation du com

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