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Le modèle de cahier des charges joint à la circulaire du 8 octobre 1843 contenait un article G, ainsi conçu :

<< Article G. Il ne pourra être procédé à l'ouverture de puits ou galeries partant du jour pour être mis en communication avec des travaux existants, sans une autorisation du préfet, accordée sur la demande du concessionnaire et sur le rapport des ingénieurs des mines. >>>

Mais, depuis 1861, les cahiers des charges des concessions ne contiennent plus cet article, qui est remplacé par trois autres, dont M. Dupont résume, comme suit, les dispositions :

Lorsque le concessionnaire voudra ouvrir un nouveau champ d'exploitation, ou établir de nouveaux puits ou galeries partant du jour, il adressera au préfet un plan, qui devra se rattacher au plan général de la concession, et un mémoire indiquant le projet des travaux, le plan étant dressé à l'échelle de 1 millimètre par mètre et divisé en carreaux de 10 en 10 millimètres, et le mémoire indiquant avec détails le mode d'exploitation, l'indication de ce mode d'exploitation étant aussi tracée sur les plans.

Le préfet renverra ces pièces à l'examen de l'ingénieur des

mines.

S'il est reconnu que ce projet présente des vices, abus ou dangers, ainsi qu'il est prévu, tant dans le titre V de la loi du 21 avril 1810 que dans les titres II et III du décret du 3 janvier 1813, le préfet notifiera au concessionnaire son opposition à l'exécution totale ou partielle dudit projet.

Si le préfet n'a pas fait d'opposition dans le délai de deux mois à partir du jour du dépôt des pièces à la préfecture, il sera passé outre par le concessionnaire à l'exécution des travaux.

On remarquera que, dans ces clauses et conditions, le système de la déclaration est substitué à celui de l'autorisation et que l'Administration n'a plus qu'un veto suspensif d'une durée de deux mois.

Au point de vue de l'occupation des terrains nécessaires à l'exploitation de la mine, à l'intérieur du périmètre concédé, la question de compétence ne présente plus, depuis la loi du 27 juillet 1880, le même intérêt, puisque l'article 43 revisé spécifie que les occupations de ce genre ne s'effectueront plus qu'en vertu d'arrêtés préfectoraux.

On a, au chapitre 1x, qui traite des droits des conces

sionnaires, montré que l'autorisation administrative leur est nécessaire pour :

1° L'exécution de travaux sous lieux habités, nonobstant la caution qu'ils ont à fournir, en exécution de l'article 15 de la loi de 1810;

2o L'abandon des travaux, car les articles 8 et 9 du décret du 3 janvier 1813, qui a force de loi en matière de police des mines, en font une obligation formelle.

Dans chacun de ces articles, on voit que les arrêtés préfectoraux n'autorisent l'abandon que sous la condition d'exécution de mesures de police, de sûreté et de conservation, proposées par l'ingénieur des mines;

3o L'action de l'Administration apparait tout autant dans les articles 3, 4 et 5 du décret du 3 janvier 1813, qui tracent, en cas de danger, les devoirs des concessionnaires comme le rôle de l'ingénieur des mines, en prévision des trois cas suivants :

Sûreté compromise, motivant la proposition de mesures à prendre (art. 3);

Urgence pouvant motiver l'exécution provisoire de l'arrêté (art. 4);

Danger imminent donnant à l'ingénieur des mines droit de réquisition aux autorités locales, comme cela a lieu en matière de grande voirie, en cas de chute imminente d'un édifice (art. 5).

Il est utile de noter ici un point de jurisprudence très intéressant.

Des ouvriers qui avaient été requis pour des travaux destinés à parer à un danger imminent, ont été déclarés coupables, par jugement du 30 août 1899 du tribunal correctionnel de Saint-Étienne, pour ne s'être pas présentés.

Ce jugement a été infirmé par un arrêt du 15 novembre 1899, rendu par la Cour d'appel de Lyon, par suite du considérant ci-après.

« Attendu qu'aux termes de cet article 5 du décret du 3 janvier 1813, comme aussi de l'article 14 du même décret, si l'ingénieur des mines qui reconnaît une cause de danger imminent, doit, sous sa responsabilité personnelle, faire les réquisitions nécessaires aux autorités locales pour qu'il y soit pourvu sur-le-champ, c'est

aux autorités locales seules qu'il appartient de faire ces réquisitions d'hommes ainsi qu'il est pratiqué, en matière de voirie, lors du péril imminent de la chute d'un édifice. »

Dans l'espèce, l'ingénieur en chef des mines avait lui-même, et en son nom seul, réquisitionné les ouvriers.

Sur le même sujet, on peut citer un autre jugement du tribunal correctionnel de Saint-Étienne, du 7 avril 1900, qui a condamné quelques ouvriers régulièrement réquisitionnés.

Quelques auteurs prétendent que, dans ce cas, les pénalités encourues ne sont pas celles prévues par le titre X de la loi de 1810, mais bien celles de l'article 475, 12o du Code pénal, soit une amende de 6 à 10 francs, et, en cas de récidive, un emprisonnement de cinq jours, contre ceux

<< Qui, le pouvant, auront refusé ou négligé de faire les travaux, le service, prêter le secours dont ils auront été requis, dans les circonstances d'accidents, tumultes, naufrages, inondation, incendie ou autres calamités. »

Dans ce cas l'infraction ressortirait à la compétence du tribunal de simple police, mais ce point de droit n'a pas encore été tranché.

Mais le décret du 3 janvier 1813 laissait une lacune fàcheuse quant au paiement des travaux exécutés d'office; et il occasionnait, en imposant l'obligation de l'approbation préalable du Ministre, des lenteurs parfois regrettables.

L'ordonnance du 26 mars 1843, modifiée par décret du 25 septembre 1882, y a pourvu, en réduisant à deux les cas de danger:

Dans le premier, obligation au concessionnaire, préalablement entendu, d'exécuter les mesures prescrites; et, à défaut, exécution d'office et à ses frais.

Dans le second, réquisition par l'ingénieur des mines. pour exécution immédiate, aux autorités locales.

2. Compétence pour les travaux à prescrire aux concessionnaires. L'autorité judiciaire commettrait un empiètement sur les attributions de l'autorité administrative, si elle ordonnait à un exploitant des travaux différents de ceux prescrits par l'autorité administrative (Arrêt de la Cour de cassation, 9 août 1876).

En Angleterre, les prescriptions de l'inspecteur des mines qui, constatant dans une exploitation un vice dangereux, a ordonné d'y remédier, ne deviennent obligatoires, au cas d'opposition de l'exploitant, qu'après une sentence arbitrale; et les délais accordés pour le recours, le choix des arbitres, l'arbitrage et l'exécution de la sentence n'exigent pas moins de quatre-vingt-deux jours, sans qu'il y ait exception même pour le cas de danger imminent.

3. Mines menacées d'inondation. On a vu, sans trop s'y arrêter cependant, que la loi du 27 avril 1838 règle spécialement les obligations des concessionnaires dans le cas où leurs mines seraient inondées ou menacées d'inondation.

Tout en proclamant le droit du Gouvernement et les obligations particulières des concessionnaires, l'article premier de cette loi prescrit une enquête administrative que, seul, le Ministre des Travaux publics a le droit d'ordonner, et dont tous les détails sont précisés par l'ordonnance du 23 mai 1841 ̧ portant règlement d'administration publique pour les mines menacées d'inondation.

C'est le Ministre qui, après l'enquête, désigne les mines. devant supporter les frais communs des travaux d'asséchement. I organise les concessionnaires en syndicat, puis prend un arrêté fixant les modes d'exécution et de paiement desdits travaux, comme aussi le recouvrement des taxes.

En cas d'inertie des syndics, il a le droit de nommer des commissaires pour l'exécution d'office de ces travaux.

L'article 6 de la loi de 1838 présente un grand intérêt, car il proclame le principe du retrait de la concession (principe qui se révèle déjà dans l'article 49 de la loi de 1810), dans le cas d'un défaut de paiement de la taxe dans le délai de deux mois.

La mine peut alors être réputée abandonnée, et on a vu, au chapitre des droits des concessionnaires, quel recours ceux-ci peuvent exercer contre le prononcé du retrait de la concession et comment ils peuvent arrêter les effets de la dépossession.

En dehors du refus ou défaut de paiement de la taxe d'asséchement en commun des mines menacées d'inonda

tion, l'article 9 prévoit le défaut de paiement des travaux quelconques ordonnés par l'Administration aux frais des concessionnaires.

C'est, en somme, un deuxième cas de retrait de concession, puisque les dispositions de l'article 6 lui sont applicables. Il constitue une sanction à l'article 50 de la loi de 1810, et rend efficace la surveillance administrative des mines.

4. Mines inexploitées. Il peut aussi y avoir un cas de retrait de concession, lorsque l'inexploitation d'une mine. donne lieu, pour les besoins des consommateurs, aux craintes prévues par l'article 49 de la loi du 21 avril 1810.

Ce cas est nettement régi par l'article 10 de la loi de 1838, qui impose au retrait d'une concession et à l'adjudication de la mine, les formes prescrites par le même article 6 de ladite loi.

Le retrait d'une concession est d'ailleurs une mesure très grave, et il faut, pour que celle-ci soit justifiée, qu'il soit bien reconnu que l'inexploitation de la mine porte une réelle atteinte aux besoins des consommateurs, car il importe de ne sacrifier l'intérêt particulier à l'intérêt général qu'en cas de nécessité absolue. Aussi le Gouvernement n'use-t-il de son droit qu'avec une très grande discrétion.

Cette mansuétude n'a cependant pas eu les effets qu'on pouvait en attendre, car on relève, de 1855 à 1875, soit en vingt ans, un accroissement assez notable:

De 358 mines inexploitées sur 852 concédées (soit 42 0/0), en 1855, on comptait 692 inexploitées sur 1.228 concédées (soit 56 0/0) en 1875.

Des mesures en sens contraire ont bien été prises pour enrayer cet accroissement; ainsi :

Une circulaire du 29 décembre 1838 recommandait aux ingénieurs la plus grande réserve dans l'application rigoureuse, aux mines inexploitées, de l'article 10 de la loi du 27 avril 1838; et une circulaire ministérielle du 30 novembre 1873 leur demandait, avec leurs propositions quant aux mesures à prendre, une statistique des mines inexploitées.

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