par la même série que passent les foyers observés à la suite de phlébite, soit spontanée, soit traumatique; et de même que dans ce dernier cas, tantôt c'est le foie seul qui est affecté, tantôt c'est le poumon, d'autres fois la rate, les sérum, les synoviales, le tissu cellulairé, les muscles, le cerveau, etc., en un mot toutes les fractions du système capillaire, soit isolément, soit à la fois, de même, dans une expérience, j'ai vu le mercure traverser pour ainsi dire, inaperçu, le système capillaire pulmonaire de quelques sujets, et se nicher plus spécialement dans le foie, la rate, ou bien dans l'épaisseur des muscles, les séreuses', jamais dans les reins. Dans les observations de M. Tonnellé, la phlébite des sinus n'a jamais parcouru toutes les périodes que je viens d'indiquer; plusieurs malades ont succombé à la première, c'est-à-dire, par l'effet de la simple coagulation du sang; d'autres ont succombé dans le cours de la seconde, c'est-à-dire, à l'époque où du pus occupe le centre du caillot, ou bien à celle de la décoloration de ce même caillot, par l'absorption de la matière colorante, et qui lui donnait l'aspect d'une fausse membrane. D'après cela, on voit que je n'admets pas la distinction établie par l'autre entre les altérations du sang, et les altérations des parois des sinus. Si la phlébite des sinus n'a jamais parcouru le cercle complet des périodes que j'ai indiquées, cela tient non à une différence de texture, la membrane interne des veines se prolongeant dans les sinus, mais à une différence de situation, ainsi que l'a trèsbien vu M. Tonnellé. Les sinus, en effet, sont les veines principales du cerveau; par eux doit nécessairement passer le sang qui revient du cerveau, si cette voie est interceptée, point ou presque point de voie collatérale qui puisse y suppléer; mais une remarque extrêmement importante, c'est que, si ces veines cérébrales sont distinctes à leur embouchure dans les sinus, elles communiquent largement entr'elles à leur origine; aussi peuvent-elles se remplacer les unes les autres, en sorte que pour l'interruption de la circulation veineuse dans un sinus, il faut que la totalité de ce sinus soit imprrmcéable ; et, pour l'interception complète de la circulation dans les siuus cérébraux, il faudrait l'imperméabilité complète de tous les sinus. C'est ainsi que, dans des expériences où je suis parvenu à oblitérer com plètement le sinus longitudinal supérieur, l'animal n'a éprouvé aucun accident. L'oblitération dans un point ou dans une petite étendue du tronc veineux principal d'un membre, a peu d'influence sur la circulation de ce membre, les voies collatérales remplaçant le vaisseau surabondamment; mais si l'oblitération occupe toute la longueur du tronc vasculaire, si elle s'étend dans les veines collatérales, alors, mais seulement alors, arrive l'œdème du membre, ainsi que l'a parfaitement signalé M. Bouillaud. Si on injecte un corps irritant du cœur vers les extrémités dans la veine d'un membre, le membre se tuméfie énormément au bout de quelques heures: on trouve des foyers de sang, de véritable forme apoplectique, dans l'épaisseur des muscles et du tissu cellulaire. Si l'animal survit, ces foyers apoplectiques musculaires passent à travers toutes les phases des foyers apoplectiques cérébraux. De là j'ai conclu (Voyez Nouv. Biblioth., 1826) qu'il existait des apoplexies veineuses, et que certainement, si on obtenait par nn moyen quelconque l'inflammation des veines cérébrales, on obtiendrait les mêmes résultats. Les observations de M. Tonnellé sont, pour ainsi dire, des expériences toutes faites, sorties des mains mêmes de la nature, qui confirment pleinement ces inductions. Ainsi, dans toutes les observations qu'il a rapportées, il y a stase du sang dans les veines cérébrales, et exhalation de sérosité: dans deux cas, il y a une exhalation de sang dans la cavité de l'arachnoïde; dans quelques cas, rupture des vaisseaux de la pie-mère; de là de larges ecchymoses, épanchement sous-arachnoïdien avec ramollissement de la substance cérébrale des circonvolutions; rupture des vaisseaux contenus dans l'épaisseur du cerveau; foyer apoplectique au centre d'un hémisphère. Dans un cas, il y a une apoplexie des tégumens extérieurs, infiltration de sang. Il est clair que ces différences résultent, comme l'a fait observer M. Tonnellé, de la différence de siége, d'étendue de la lésion, et plus encore de la rapidité de l'oblitération des sinus. Certes, voilà des faits curieux sous le point de vue de l'anatomie pathologique; resterait maintenant à les examiner sous le point de vue clinique, but essentiel de tous nos travaux ; mais l'analyse des symptômes observés chez tous ces enfans, ne me conduit à rien de positif. La somnolence, le coma profond des C. TOME XX, uns, les mouvemens convulsifs des autres, l'air de stupeur, la céphalalgie dans quelques cas, décèlent sans doute une souffrance du cerveau; mais est-elle idiopathique, est-elle symphathique, symptomatique? et quelle est l'espèce de lésion à laquelle ces symptômes correspondent? De nouveaux faits permettront peut-être de démêler au milieu de cet ensemble de phénomènes cérébraux, les données sans lesquelles la solution du problème est impossible. Jusqu'à ce moment, la thérapeutique sera bornée aux moyens généraux de traitemens employés contre les congestions cérébrales; peut-être encore, lors même que nous pourrions arriver à un diagnostic rigoureux, n'aurions-nous, dans l'état actuel de la science, rien de spécial à opposer à une maladie dont les causes sont jusqu'à ce jour d'une obscurité impénétrable. Telle est, Messieurs, l'esquisse rapide du travail de M. Tonnellé, qui me paraît mériter toute l'attention et tous les éloges de l'Académie. Élève encore, M. Tonnellé appartient à cette classe d'internes des hôpitaux qui savent puiser dans cette mine d'autant plus féconde qu'elle est plus exploitée, et une instruction solide et des matériaux précieux pour la science; il y a puisé en bon observateur; sa manière est large, facile, indépendante, et le raisonnement suit toujours les faits, mais jamais en esclave; jamais une grande question ne s'est présentée sur ses pas ans qu'il ne l'ait abordée, et, s'il s'arrête, c'est toujours en deçà des limites d'une induction légitime. M. Tonnellé promet à la science un médecin distingué; La Commission de l'Académie a proposé de lui conférer le titre de correspondant de l'Académie, immédiatement après sa réception. 22. DICTIONNAIRE DE MÉDECINE ET DE CHIRURGIE PRATIQUES, en 15 vol.; par MM. AMDRAL, BENIN, BLAGDIN, Bouvier, Cruveilhier, Cullerier, DeverGIE (Alph.), Ducès, DuPUYTREN, FOVILLE, GUIBORT, JOLLY, LALLEMAND, LOUDE, MAGENDIE, RATIER, RAYER, ROCHE, SANSON. Tom. Ier. In-8°. A. ALIEN-; Tom 2o. In-8°. ALIM = ANHEL; prix broché, 7 fr.; port franc par la poste, 9 fr. chaque volume; 1829. On souscrit à Paris, chez Gabon, Méquignon-Marvis, Baillière. er Nous avons annoncé ce nouveau Dictionnaire lorsque le 1 volume a paru, et nous nous sommes bornés alors à indiquer rapidement les principaux articles qui y étaient contenus. Aujourd'hui nous reviendrons avec quelques détails sur cette publication. Le besoin le plus généralement senti aujourd'hui en Francè et partout, à la suite des discnssions théoriques, de l'examen des diverses doctrines, et des recherches étendues d'anatomie pathologiques auxquelles se sont livrés les médecins des différentes écoles, est de fixer les points de médecine et de chirurgie pratiques qui sont susceptibles de l'être et d'indiquer ceux qui, parleur nature, restent douteux, ceux qui le seront toujours, et enfin ceux dont la solution ne peut être déterminée d'une manière générale, et dépend toujours d'une part de l'état individuel du malade, et de l'autre, du tact et des connaissances propres au médecin qui dirige le traitement. Envisagées sous ce point de vue, la médecine et la chirurgie pratiques, disons mieux, toute thérapeutique, forment un art qui profite des faits acquis à la science, c'est-à-dire qui a des règles; mais que sont les règles dans un art, elles posent seulement des limites qu'il faut rarement dépasser, mais qu'il faut cependant savoir hardiment franchir quand le cas l'exige. Quel guide faut-il donc suivre dans la pratique? tenir compte des faits recueillis et toujours observer pour saisir l'indication thérapeutique. Aussi ne connais-je de traité de médecine ou de chirurgie pratiques que les leçons cliniques faites au lit des malades; rien là-dessus ne peut être écrit si ce n'est pour les accouchemens où les difficultés peuvent être prévues, tout doit être de tradition, et fécondé ensuite par le talent et le génie de ceux qui sont les derniers venus. On me comprendrait mal cependant, si on croyait que je veux dire ici qu'il ne doit point y avoir de traités pratiques, mais je veux faire sentir qu'ils doivent nécessairement, et par leur nature, être incomplets; en un mot ils ne peuvent contenir des règles que pour les cas faciles, pour ceux où le diagnostic est clair et le traitement bien connu; mais pour tous les cas difficiles, ce sera rarement dans les livres qu'il faudra aller chercher un guide; un fait observé par soi-même, comparé à l'état présent du malade, ou plus souvent l'état qui cause l'embarras du praticien, examiné en lui-même, d'après les symptômes et les causes, pourra conduire à saisir l'indication thérapeutique. Ce n'est point sans dessein que j'applique ici ces réflexions à la chirurgie ainsi qu'à la médecine; la certitude chirurgicale dont se targuent quelques chirurgiens est une absurdité; souvent ils ne sont pas même sûrs de ce qu'ils coupent ou de ce qu'ils lient; peuvent-ils seulement prédire si, à la chute d'une ligature, il n'y aura pas d'hémorrhagie? Peuvent-ils assurer qu'un cristallin sortira facilement, ou sera résorbé suivant le procédé qu'ils emploient? avaient-ils droit d'assurer que tel membre fracturé qu'ils ont amputé, n'aurait pu être conservé? N'ont-ils jamais enlevé un organe sain pour un organe malade? Et que serait-ce encore si on examinait de près ce qu'ils appellent des succès; n'y verrait-on pas souvent des mutilations plus hideuses que la maladie même, et des témoins vivans d'inconcevables prétentions ? Quel est le but de ces réflexions, me dira-t-on : c'est de faire bien sentir avant de rendre compte d'un livre pratique, qu'il ne faut accepter qu'avec défiance les règles tracées, lorsqu'il faudra en venir à les appliquer, et que bien rarement le cas qu'on a à traiter, s'il est un peu grave, rentrera nettement dans la loi générale qu'on aura voulu nous imposer. Après avoir ainsi commencé par faire nos réserves en masse, nous n'aurons guères que des éloges à donner aux divers articles qui sont contenus dans les deux premiers volumes de ce dictionnaire. Cependant j'éprouve le besoin d'exprimer ici combien je suis loin de partager l'opinion émise par l'excellent et habile confrère qui a écrit l'introduction du dictionnaire. Suivant ce médecin les théories (pour lui le mot théorie est synonyme de système, ou du moins il se sert indifféremment de ces deux mots), et même les hypothèses sont, dans la marche de l'esprit humain, des points de repos, des échelons, qui facilitent sa progression ascendante, en lui fournissant de nouveaux points d'appui. Il n'y a qu'une chose à répondre à cette phrase résonnante, c'est que, si l'échelon ou point d'appui manque, qu'en résulte-t-il? une erreur grave. Autant, suivant nous, aurait-il valu ne pas la commettre. Mais, ajoute notre confrère : «Qui pourrait, sans un système régulier, retenir les faits observés, les retrouver au besoin, les invoquer à volonté, afin de se conformer aux leçons qu'ils donnent, ou de tenter et de varier des explorations nouvelles, propres à lever les incertitudes qu'ils laissent trop souvent après eux. » Je répondrai à cette assertion qui me paraît fort singulière, que je veux bien que les systèmes servent à faire retenir, retrouver, invoquer à volonté ces faits, |