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en haut entre leur surface interne et le plan des dents inférieures, oblique en haut et en dedans, les alimens tombés dans leurgouttière. Ceux-ci, pressés, remontent en glissant, comme le noyau que l'enfant pince entre ses doigts, et quand cette action est insuffisante, il s'y en joint une autre qui la précède et la rend plus sûre. Le peaucier abaisse vivement la joue et la commissure des lèvres, la bouche grimace, les joues et les lèvres se contractent ensemble et les alimens ne résistent pas ordinairement à cet effort. Dans cette action, le bord inférieur du buccinateur a été abaissé au-dessous des parcelles alimentaires à déplacer, et les a alors saisies par dessous; voilà pourquoi cet effort a eu plus de succès que le premier. Il est rare, en effet, que cette action reste impuissante et que la langue soit forcée d'agir ellemême comme je l'ai décrit d'abord,

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J'ai dit plus haut que les alimens sont repoussés sur la langue par l'action des joues qui pénètrent entre les dents; ce fait avancé, je me crois obligé de le prouver et de l'expliquer. Tout le monde peut le vérifier sur soi-même en écartant les mâchoires, serrant les joues et touchant, entre les dents séparées d'un doigt, le bourrelet qui s'avance dans leur intervalle et le rem plit. Cet effet est dû à l'action du buccinateur et particulièrement de ses fibres moyennes, qui vont, horizontalement, de l'aponévrose, ou mieux de l'intersection buccinato-pharyngienne, à l'angle des lèvres. Ce faisceau de fibres tendant à devenir droit par sa contraction, pousse la membrane intérieure de la joue dans l'intervalle des dents et y pénètre lui-même, lorsqu'elles viennent à s'écarter. C'est ainsi que se forme le bourrelet qui fait tomber les alimens sur la langue et les livre à son action. Comme nous coupons les alimens avec les dents molaires, tant qu'elles sont armées de tubercules, plutôt que nous ne les écrasons, et comme par suite de ce mécanisme nous ne mâchons ordinairement que d'un côté, ainsi que je le démontrerai dans mon ouvrage de physiologie, la joue qui doit pousser sur la langue les alimens mâchés, se contracte avec plus d'énergie que celle du côté opposé dont l'action est à-peu-près inutile. §2. Mouvemens de la langue dans la préhension des boissons. L'homme boit assez souvent par affusion, plus souvent encore par succion et très-rarement par aspiration.

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Il boit par affusion en versant le liquide, de haut, dans la bou

che ouverte. Il boit encore par le même mécanisme, lorsque, buvant au gobelet, il verse rapidement le liquide dans sa bouche, ensorte qu'il s'y écoule par son propre poids. C'est ainsi que boivent avec précipitation les gens altérés et les gens grossiers qui le sont presque toujours. Dans ce mode de préhension la langue, abaissée par sa pointe, permet à la boisson de couler dans la bouche; mais relevée par sa base, elle tient fermée l'entrée du pharynx, jusqu'au moment où la bouche étant pleine, ce qui ne se fait pas attendre, elle avale d'un coup le liquide qui la surcharge.

Dans la succion de l'enfant qui tète ou qui boit au chalumeau, les lèvres embrassent le mamelon ou le fétu de paille, la langue se soulève contre le palais, se gonfle, efface toute la cavité de la bouche, s'insinue entre les dents jusques derrière les lèvres contre le mamelon de sa nourrice ou son chalumeau de paille, fait le vide en se retirant en arrière par sa pointe, et aussitôt le liquide pénètre dans l'espace qui lui est ouvert, la langue l'avale, et ainsi à chaque succion. D'autres fois, au contraire, sa base reste immobile soulevée contre le voile du palais, tandis qu'elle s'abaisse par son corps et que sa pointe se reporte derrière les lèvres; alors le liquide glisse dans le petit espace que lui offre le corps surbaissé de la langue, tandis que celle-ci opère une nouvelle succion par sa pointe; une seconde quantité de liqueur pénètre dans le vide, la langue se surbaisse davantage et cette nouvelle portion de liquide se réunit à la première A mesure que se répètent ses succions, l'organe se surbaisse de plus en plus et, après quelques mouvemens semblables, la masse de liquide recueillie devenant trop considérable, la langue ne peut plus s'abaisser sans détacher sa base du palais et r'ouvrir la communication de la bouche avec le pharynx: alors elle avale le liquide amassé.

Dans la succion de l'homme qui boit au gobelet, manière qui est la plus commune, la langue fait un vide imparfait en venant toucher les dents avec sa pointe, et se retirant ensuite sans les avoir dépassées, ni s'être même insinuée entre ces organes. Cependant sa base ferme toujours l'ouverture de la gorge, qu'elle ouvre seulement pour avaler les boissons.

Dans l'aspiration, la langue reste inactive, les lèvres s'appliquent à la surface du liquide à boire, le pharynx contracté em

brasse le voile du palais soulevé, la poitrine fait le vide par une forte inspiration, et la bouche se ferme à chaque inspiration, aussitôt que le liquide parvient à la gorge, pour l'empêcher d'entrer dans le larynx et l'avaler ensuite.

§ 3. Mouvemens de la langue et du pharynx dans la déglutition. Ce phénomène consiste dans le passage des alimens et des boissons de la bouche dans l'œsophage. Ce passage est rapide, il se fait par deux systèmes d'actions dans chacun desquels ces actions sont vives et si rapprochées, qu'on peut les regarder comme simultanées. Il en résulte deux actes fort compliqués et si difficiles à analyser, qu'ils ne l'ont été encore que d'une manière très-imparfaite. Ces deux actes sont d'ailleurs assez distincts, quoiqu'ils ne laissent aucun intervalle entr'eux et que les effets du second commencent avant que ceux du 1er soient achevés.

Dans le 1er acte, et lorsque la bouche est déjà fermée, que la substance à avaler se trouve plus ou moins exactement rassemblée sur la langue, celle-ci s'élève d'une manière peu sensible, s'applique au palais de sa pointe à sa base par tous les points de sa surface successivement; la pâte alimentaire fuit vers le pharynx, dans un espace triangulaire qui diminue et disparaît d'avant en arrière; aussitôt qu'elle atteint l'isthme du gosier, la base de la langue se soulève, se porte en haut et en arrière, et déjà le second acte est commencé et presque accompli. En effet, tandis que la langue se soulève, soudain contre le voile du palais, alors tendu; tandis que par ce mouvement l'isthme du gosier se resserre devant les alimens,le pharynx, se contractant, se resserre et se raccourcit de bas en haut. En se raccourcissant, il soulève l'os hyoïde, la langue, le larynx qu'il pousse sous celle-ci, l'œsophage qu'il approche de l'isthme du gosier et qu'il remonte, pour ainsi dire, sur le bol alimentaire. En se resserrant, il se porte en avant et embrasse étroitement et vivement le voile du palais avec la base de la langue, efface entièrement le bas de sa cavité et force le bol alimentaire à s'échapper. Celui-ci, réagissant, ouvre l'œsophage et fuit vers l'estomac par ce conduit. C'est là le 3o et dernier acte de la déglutition. Vous voyez, d'après ce que je viens d'exposer, que alimens ne sont poussés dans le 1er acte de la déglutition que jusqu'à l'isthme du gosier et non jusque dans le pharynx, C. TOME XX.

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les

comme le disent les physiologistes; que c'est dans le second acte qu'ils sont chassés dans le pharynx et le franchissent du mème coup; que d'ailleurs, pendant ce second acte, le voile du palais n'est point soulevé horizontalement, comme on le dit enmais qu'il est étroitement embrassé avec la base de la langue par le pharynx, et si vivement qu'il serait lui-même avalé s'il n'était solidement fixé par sa base et ses côtés. $4. Mouvemens de la langue et du pharynx dans l'expuition des crachats.

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L'expuition des crachats se compose de 3 actes successifs et très-distincts. Par le 1er, le crachat est chassé par l'expectoration jusques dans le pharynx ; par le 2me, il est porté sur la surface de la langue et derrière les lèvres; par le 3me, il est chassé au dehors. Nous ne voulons nous occuper ici que des derniers.

Dans l'expuition des crachats, ceux-ci étant déjà dans le pharynx, cet organe se resserre, embrasse le voile du palais tendu, ensorte qu'il en résulte une paroi sans ouverture et sans interruption depuis le pharynx jusqu'au palais de la bouche; la base de la langue se gonfle, se relève, jusqu'à ne laisser qu'un canal étroit entre elle et le voile du palais, et les muscles expirateurs se contractant soudain avec énergie, l'air s'échappe, avec un bruit grossier, à travers le larynx; et la gorge réduite ́en un canal étroit, le voile du palais vibre, la masse du crachat se détache et s'avance sur la surface de la langue; celle-ci se gonfle et s'élève davantage, s'applique au palais de sa base à sa pointe; la matière des crachats pressée, arrive en même temps derrière les lèvres qui se rapprochent, et ne laissent entr'elles qu'une légère ouverture. Dans le 3o acte, le pharynx embrassant toujours le voile du palais tendu, les expirateurs se contractent, l'air reste comprimé entr'eux et la langue soulevée et gonflée. Tout-à-coup celle-ci se baisse, l'air se précipite sur les lèvres, et chasse le crachat au travers de leur ouverture étroite, qu'il enfile avec bruit. Lorsque le crachat ne vient que de la bouche, l'expuition ne se compose non plus que du dernier acte de ce phénomène.

§5. Mouvemens de la langue et du pharynx dans la prononciation. La prononciation est la modification que le pharynx, la langue et toutes les parties de la bouche font éprouver aux sons. C'est le phénomène le plus admirable et le plus étonnant de

tous ceux de ces organes : il est si varié, qu'il semble n'avoir pas de terme dans sa puissance, il revêt les sons d'une foule de nuances diversifiées, et les change de mille manières.

L'analyse peut saisir ces modifications en apparence infinies,. et si la nature des plus délicates l'embarrasse et lui échappe, la nature de celles qui le sont moins ne saurait rester inapperçue; au reste, il n'est pas nécessaire qu'elles soient toutes très-distinctes pour être décrites, les nuances qui se confondent comme celles qui se séparent, appartiennent à la nature, et l'historien de celle-ci n'en doit être que le peintre fidèle.

Cependant ces nuances sont si nombreuses, et les erreurs qu'on a commises à leur égard si nombreuses aussi, que j'en ai fait le sujet d'une note particulière que j'ai publiée dans le T. VII, p. 318, de ce Bulletin.

§ 6. Mouvemens de la langue, de l'isthme du gosier et du pharynx, dans la respiration et dans les sons aigus.

La langue ne reste point immobile dans la bouche pendant la respiration, comme on pourrait le croire. A chaque inspiration elle s'abaisse et se retire, à chaque expiration elle se relève et s'avance, et l'isthme du gosier s'agrandit un peu. Quoique ces mouvemens soient très-faibles, on les sent se passer au fond de la gorge lorsqu'on y fait beaucoup d'attention. Ils ne paraissent plus aussi distincts lorsqu'on respire par le nez. Ces phénomènes sont évidemment analogues à la dilatation et au resserrement alternatif des narines des animaux, et de la glotte pendant la respiration. On les distingue ordinairement en les observant sur soi-même au miroir.

Dans les sons aigus, le pharynx se raccourcit et se resserre, le voile du palais se tend et se courbe en une voûte faisant régulièrement suite a celle du palais, la luette se raccourcit, la base de la langue s'élève, et l'isthme du gosier se resserre. Ces actions tendent toutes ces parties, et les rendent plus élastiques, ce qui contribue à la production des sons aigus (voy. mon art. Voix, dans l'Encyc.). Quoique la luette se raccourcisse graduellement jusqu'à s'effacer entièrement lorsque la voix monte très-haut, je ne me crois pas autorisé à en conclure que ce mouvement, en particulier, concourre à la production des sons aigus, autrement qu'en concourrant à la tension du voile par contraction du releveur de la luette.

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