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comme esclaves, ou flagellées, ou passent du rang d'épouses à celui de servantes. Les pères ont le droit de vendre leurs enfants, selon leur gré.

Les chefs des Masevé et des Masava, toutes deux tribus Masaï, se font servir par des femmes sans aucun vêtement, et qui remplissent les fonctions de valets de chambre. Si une d'elles fait mal son service, on la condamne à mort de la manière suivante. On commence par lui couper un doigt; un autre, le lendemain et ainsi des autres membres, es uns après les autres, jusqu'à ce qu'elle succombe à la douleur.

C'est ainsi que ces buveurs de sang de bœufs pratiquent l'humanité à l'égard de pauvres créatures, coupables de fautes bien légères.

L'usage observé par le capitaine Speke, chez d'autres peuplades africaines, relativement aux princesses, paraît exister également chez les grands chefs Masai. Afin de rendre leurs femmes dignes de leur rang, on commence dès le plus bas âge à les gorger de lait, jusqu'à ce que ne pouvant plus, à cause de leur obésité, se tenir debout, elles marchent à la manière des quadrupèdes.

Les deux femmes Masaï dont j'ai parlé plus haut prétendent avoir vu la femme d'un chef qui, d'après les dimensions indiquées par elles, devait avoir des bras de deux pieds de tour et des mollets de trois pieds. Suivant elles, le buste aurait eu quatre pieds et demi de circonférence.

Comparés à ceux que donne le capitaine Speke, témoin oculaire et très-véridique, ces détails, si extraordinaires qu'ils paraissent, n'ont rien d'exagéré.

A cause de leur origine semi-abyssinienne, les Masaï ont les cheveux droits et non crépus, comme les nègres pur sang. Les Arabes ne les aiment pas, parce que les Masaï disent qu'ils sont blancs comme eux, et pour cette raison ils se soumettent difficilement à l'esclavage.

Aussi nous achetons sur le marché de Zanzibar, à meilleur compte les enfants Masaï. Vingt-cinq francs un garçon, quarante francs une fille ; tandis que des enfants de race noire comme le jais, nous coûteraient bien plus cher, toutes choses égales d'ailleurs. Jusqu'ici nous avons lieu d'être satisfaits de ces enfants à peau rougeâtre.

Les Masaï sont très-superstitieux, je n'en donnerai qu'une preuve. Lorsqu'il y a une éclipse de lune, tout le monde se réunit en criant et frappant sur des objets sonores, pour faire peur au soleil et l'empêcher de dévorer l'astre des nuits. Du reste cette crainte est commune à tous les Africains.

A Zanzibar même, qui est déjà un peu civilisé, j'ai été souvent réveillé la nuit par des cris affreux. « Nenda nyoka, nenda joua, akouna koula mouézi: Va-t'en, serpent, va-t'en, soleil, ne mange pas la lune. » Les uns croient que c'est un serpent, les autres le soleil qui va manger la lune.

Comme on voit, nulle part le serpent n'a perdu la mauvaise réputation qu'il s'est faite, dès le commencement du monde.

Au vacarme qu'on faisait pour effrayer les mangeurs de la lune, j'aurais cru à une révolution dans un pays moins paisible que Zanzibar. Tous les noirs étaient sur pied. Chacun était armé d'une vieille marmite, d'une casserole, d'un fer-blanc, d'un bidon ou d'autres objets sonores, sur lesquels on frappait à tout casser, en poussant des hurlements inhumains.

Comme jusqu'ici ils ont toujours réussi à battre à plate couture le serpent et le soleil, les noirs rentrent tout triomphants chez eux après l'éclipse de la lune, fiers d'avoir fait un vacarme si utile.

La religion des Masaï consiste à apaiser au moyen d'un tribut la haine d'esprits malfaisants, afin de détourner du pays les fléaux et d'obtenir aux moissons leur fécondité naturelle. Ils n'ont pas une idée nette de Dieu et de la vie future.

Cependant ils immolent tous les ans une vache devant le tombeau de leurs pères, pour obtenir de bonnes récoltes. Quoique sachant très-bien que les montagnes ne mangent pas, ils placent devant des vivres en forme de sacrifices.

Les prodiges de la création les étonnent, comme il arrive à tous les indigènes, et ils comprennent bien que ces merveilles ne se sont pas faites

d'elles-mêmes, tant l'idée de l'athéisme, inventée par les philosophes modernes, est contraire à la croyance naturelle de l'homme et même du sauvage.

CHAPITRE XXV

Discipline militaire des Masaï.

Punition des lâches.

compense des braves. Vente et achat des femmes. - Garde

nationale sur les frontières.

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Costume.
Sorciers.

Productions.

Peuple guerrier, les Masaï sont très-courageux, tant que leurs idées superstitieuses ne sont pas en jeu. Mais dès qu'ils entendent l'aboiement d'un renard, les troupes rangées en bataille battent en retraite.

Le capitaine Speke a trouvé la même superstition dans le royaume de Karagué, dont le roi lui disait «Lorsque je conduis mes troupes au combat, si j'entendais l'aboiement d'un renard, je battrais immédiatement en retraite, pareil pronostic me présageant une défaite 1. >>

Le chant des oiseaux et le cri d'autres animaux produisent le même effet, et empêchent les guerriers de commencer la mêlée. Ces superstitions en usage chez les peuples de l'antiquité, montrent que le démon ne vieillit pas.

En dehors de ces cas de superstition, tout guerrier qui se montre lâche est coupé en morceaux,

1 Tour du monde, n. 227, p. 327.

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