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CHAPITRE III

La côte de Zanguebar. - Notions géographiques et historiques. -L'île et la ville de Zanzibar: description. - Projet de la misArrivée des premiers missionnaires.

sion.

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Première

Portrait de ce prince. - Repas africain.

Prenons une carte d'Afrique et arrêtons nos regards sur la partie orientale de la grande péninsule. A partir du canal de Mozambique jusqu'au cap Gardafui, vous trouvez, baigné par la mer des Indes, un littoral de six cents lieues de long. Telle est, sur une largeur non exactement mesurée, la côte de Zanguebar, à laquelle les géographes donnent sans hésiter six cent mille kilomètres earrés.

Situé entre les tropiques, ce vaste pays est d'une grande fertilité, mais d'une chaleur extrême, excepté sur les bords de la mer. Ajoutons qu'il est comme la terre natale des animaux féroces, des crocodiles et des serpents. Néanmoins, il a été fréquenté par les commerçants arabes et indiens, depuis l'antiquité la plus reculée.

Oubliée de l'Europe pendant le moyen âge, cette contrée fut, en 1498, visitée pour la première fois par Vasco de Gama. Le grand navigateur se rendit maître d'une partie de la côte et se contenta de

faire reconnaître le roi de Portugal comme suzerain des roitelets du pays.

Longtemps après le voyage de Vasco de Gama, les Portugais entreprirent de former des colonies, en 1569 au Mozambique, et en 1594 à Mombas. Malheureusement ils s'abandonnèrent à toutes les passions et finirent par se faire chasser de la plupart de ces contrées, par l'Iman de Mascate, qui avait prêté le secours de ses armes aux indigènes.

Ce prince devint ainsi maître du pays en 1698, depuis le cap Guardafui jusqu'au cap Delgado. Après la révolution qui, en 1744, détrôna l'ancienne dynastie, la côte orientale d'Afrique se détacha presque tout entière de l'Imanat de Mascate.

Plus tard elle fut soumise de nouveau à l'Imanat, par un prince d'une nouvelle dynastie, Saïd-BenAhmed. Son petit-fils, père du Sultan actuel de Zanzibar, après avoir soumis presque toute la côte de Zanguebar, transporta, en 1828, sa résidence dans l'île de Zanzibar.

A la mort de ce prince, l'Imanat de Mascate fut partagé en deux royaumes indépendants. Celui de Mascate devint l'apanage de Saïd-Touény, qui a été assassiné par son propre fils, Saïd-Salim. Celui de Zanzibar vit sous le sceptre d'un prince intelligent et distingué, régnant actuellement sous le nom de Saïd-Meggid.

Son autorité est représentée par des gouverneurs militaires, appelés Djémadars, dont la résidence est

fixée sur les principaux points de la côte. L'élément féodal domine dans le régime du gouvernement actuel. Bienveillant pour les Européens, ce gouvernement laisse une liberté illimitée à toutes les religions. Quant à l'indépendance du Sultan, elle est garantie par des traités conclus avec la France et l'Angleterre.

Après ce coup d'œil général jeté sur la côte de Zanguebar, entrons dans l'île de Zanzibar, point central de la mission catholique 1.

L'île de Zanzibar, dont la ville capitale porte le même nom, est située à six lieues du continent africain, par le sixième degré de latitude sud, et le trente-sixième de longitude est. Elle court parallèlement à la côte, sur une longueur d'environ vingt lieues. Sa largeur est, en moyenne, de cinq à six lieues, et sa superficie d'environ sept cent soixante mille hectares.

Vue à quelque distance, elle ressemble à une vaste corbeille de verdure, posée au milieu des flots. Elle est en effet très-basse et toute plantée comme un verger. On remarque surtout dans cette vaste forêt le manguier, l'oranger, le citronnier, le giroflier, au-dessus desquels s'élève le cocotier, étalant la richesse de ses fruits et son mobile feuillage. Le sol est un terrain déposé par les flots de la

1 J'écris ceci, à Fuans, au moment où arrive la nouvelle de la proclamation de la république à Paris, 5 septembre 1870. Que Dieu ait pitié de la France et du monde !

mer, sur un large banc de corail. La couche est maintenant très-épaisse et la fertilité remarquable. Par sa nature, il est propre à la culture de la canne à sucre. On pourrait le travailler presque partout avec la charrue. Les quelques collines qu'on rencontre dans l'île, l'abondance des végétaux qui la couvrent, le voisinage de la côte, font qu'elle est bien arrosée et passablement rafraîchie.

Il en résulte que le climat est loin de mériter la mauvaise réputation qu'on lui a faite. Il est assez sain, et non-seulement supportable, mais souvent agréable, même pour les Européens.

La ville de Zanzibar, dont la population s'élève à près de quatre-vingt mille âmes, est bâtie à la partie ouest de l'île, sur une pointe de sable qui s'avance dans une rade, également sûre et spacieuse. Les hautes maisons blanches qui bordent le rivage, lui donnent un aspect imposant.

Il suffit toutefois de pénétrer dans l'intérieur pour se convaincre que c'est une ville mal bâtie. Les rues sont fort étroites et très-sales. L'œil blessé par la vive lumière du ciel de l'équateur, ne trouve nulle part de verdure où il puisse se reposer.

Cependant une grande lacune existait dans la ligne de circonvallation catholique, établie autour de l'Afrique, depuis le Mozambique jusqu'au pays des Gallas. Cela veut dire que dans une étendue de plus de huit cents lieues, on ne trouvait aucun établissement de mission.

De temps immémorial l'idolâtrie et le mahométisme régnaient sur ces plages, lorsqu'en 1859, M. Fava, vicaire général de Saint-Denis (île Bourbon), encouragé par son évêque, résolut de se dévouer pour y porter l'Évangile.

L'île de Zanzibar fut choisie comme le point le plus accessible. La courageuse expédition partit de Bourbon vers la fin de 1860. Elle se composait de M. Fava, nommé vice-préfet, de deux prêtres, de Bourbon, MM. Jégo et Schimpff, de six religieuses de la Congrégation des Filles de Marie et d'un chirurgien de la marine française, M. Abel Sémanne.

Laissons à M. Fava le soin de décrire l'arrivée des nouveaux conquérants. « Ce fut le 21 décembre que nous aperçûmes Zanzibar, et le 22 au matin nous étions en rade. Toute la journée fut employée à opérer le débarquement de nos bagages et à les transporter dans la maison qui nous avait été préparée et à laquelle nous donnâmes le nom de la Providence.

« Déjà la nuit était faite, lorsque nous descendîmes dans les embarcations qui devaient nous porter à terre. Il nous sembla que nous quittions alors notre patrie, l'île de la Réunion, dont la Somme elle-même, notre cher navire, nous retraçait l'image.

<< Les Zanzibariens qui nous virent débarquer et prendre le chemin de la Providence, se retiraient avec un respect mêlé d'effroi. M. Lerché, consul de

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