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Alphonse VÉTAult.

SEP 27 1911

Sur la proposition de la Commission des Mémoires et documents publiés par la Société de l'École des Chartes, le Conseil de la Société a décidé la publication de la thèse de M. Abel RIGAULT, Le procès de Guichard, évêque de Troyes, dans la collection des Mémoires et documents. M. Auguste MOLINIER, membre de la Société, a été désigné pour surveiller l'impression du volume en qualité de commissaire responsable.

Fait à Paris, le 14 mars 1896.

Le président de la Société,
Signé A. GIRY.

Le commissaire responsable,
Signé A. MOLINIER.

AVANT-PROPOS

«Les premières années du xive siècle ne sont qu'un long procès. Il y eut comme une épidémie de crimes... Les accusations vinrent en foule, empoisonnements, adultères, faux, sorcellerie surtout. Cette dernière était mêlée à toutes, elle en faisait l'attrait et l'horreur... Le premier de ces vilains procès de sorcellerie est celui de Guichard, évêque de Troyes, accusé d'avoir par engin et maléfice procuré la mort de la femme de Philippe le Bel'. »

A vrai dire, trente ans plus tôt, on avait déjà vu, sous Philippe III, la cour de France émue d'un scandale de ce genre, où l'on parlait de poison et de mauvais sorts, louche intrigue où s'étaient trouvés compromis, avec deux béguines de Flandre, l'évêque de Bayeux, Pierre de Benais, et son cousin, qui fut pendu pour ce fait, le conseiller et le favori du roi, Pierre de la Broce 2.

1. Michelet, Histoire de France, liv. V, ch. 5.

2. Voy. l'enquête, publiée par J. de Gaulle, Bulletin de la Société de l'histoire de France, 1844, pp. 87-100 (d'ap. Arch. Nat., J. 429), et par Léopold Delisle, Cartulaire normand, no 927. Une information fut commencée contre Pierre de Benais sur les accusations qu'il avait répandues contre Marie de Brabant, la deuxième femme du roi, et sur ses tentatives d'embauchage vis-à-vis des béguines de Flandre: mais l'évêque s'était enfui dans les domaines du Saint-Siège et le pape arrêta l'affaire (1278).

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Mais ce furent surtout les dernières années de Philippe IV et le règne de Louis X que troublèrent ces enquêtes monstrueuses où l'on trouvait mêlés à des griefs plus communs, l'hérésie, la magie et d'autres « crimes énormes. » Coup sur coup, en quinze ans, on vit, à côté des grands procès de Saisset, de Boniface et du Temple, ceux d'Arnauld de Villeneuve 1, de Guichard de Troyes, de Marguerite Porete, de Pierre de Latilly 3, d'Enguerrand de Marigny, l'affaire du cardinal François Caïetani, neveu de Boniface VIII, celle de Mahaut d'Artois, d'autres

1. Son procès eut lieu à Paris en 1299: il était accusé d'hérésie. Voy. Hist. littéraire, XXVIII, 35.

2. Brûlée en Grève le 31 mai 1310, comme hérétique. Son procès est aux Archives nationales (J. 428). Voy. B. Hauréau, Hist. litt., XXVII, 70-74; Ch. V. Langlois, Revue historique, 1894, mars-avril, pp. 293-299.

3. Pierre de Latilly, chancelier, évêque de Châlons, fut accusé en 1315 d'avoir procuré la mort de Philippe le Bel et de Louis le Hutin: il fut emprisonné et un tribunal ecclésiastique fut appelé à se prononcer sur son cas (Contin. de Nangis, Histor. de France, XX, 609-45).

4. Son procès eut lieu à Vincennes le 15 mars 1315 : sa condamnation fut déterminée par les sortilèges que sa femme et sa belle-sœur pratiquaient avec un sorcier et une sorcière pour le débarrasser de ses ennemis, le roi et les royaux. Elles avaient fabriqué des images de cire consacrées au démon; elles prétendirent qu'elles l'avaient fait pour que le roi rendit son amitié à Enguerrand (Jean de S. Victor, Histor, de Fr., XXI, 660-61). Voy. Hist. littéraire, XXVIII, 458-60.

5. Bibl. Nat., Clairambault, no 487, p. 427: Rapport d'Evrard de Barsur-Aube sur une tentative d'envoûtement par le cardinal François Caïetani sur deux cardinaux, le roi et le comte de Poitiers (avril 1316). Voy. Bertrandy, Recherches historiques sur l'origine, l'élection et le couronnement du pape Jean XXII, Paris, 4854, 8°.

6. Mahaut, comtesse d'Artois et de Bourgogne, fut accusée en 1317, par une sorcière du pays d'Hesdin, de maléfices et de meurtre. Ses deux filles avaient été compromises dans le scandale de la Tour de Nesle: on disait que Mahaut avait composé un philtre pour amener la réconciliation de son gendre, Philippe, comte de Poitiers, avec sa femme Jeanne, détenue à Dourdan; on avait prétendu encore qu'elle avait empoisonné le roi Louis X pour faciliter à ses enfants l'accès du trône de France: elle fut reconnue innocente. Voy. l'enquête publ, par le mis de Godefroy-Ménilglaise, Mém, de la Soc. des antiq. de France, XXVIII, 181.

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