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couvre tout fait fautif de l'ouvrier (hormis le fait intentionnel), et seulement la faute légère du patron. La faute grossière du chef d'entreprise « ou de son représentant légal » le replace sous le droit commun de la responsabilité (art. 1325 et 1326 du Code civil autrichien), et le rend passible, non seulement des dommages-intérêts accordés par la loi nouvelle à l'établissement d'assurances, mais encore d'une réparation intégrale envers l'ouvrier blessé (art. 46 de la loi). La situation faite au patron autrichien est donc très dure, beaucoup plus dure que celle du patron allemand.

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168. Avant 1894, la responsabilité de droit commun, seule applicable aux accidents du travail, était moins favorable à l'ouvrier que notre Code civil: le patron répondait de sa faute, et non de celle de ses subordonnés,

La loi du 23 juillet 1894 consacre, pour un grand nombre d'industries, la théorie du risque professionnel, en instituant un régime d'assurance obligatoire.

Les primes d'assurances sont exclusivement payées par les patrons et réalisées par un établissement national d'assurance, institué pour l'ensemble du pays et garanti par l'Etat.

En plus de la force majeure et du cas fortuit, toute faute de l'ouvrier est englobée dans le risque professionnel. La faute lourde du patron, constatée pour une condamnation pénale, le rend justiciable du droit commun; et, chose singulière, tout fait de ses subordonnés est traité comme un risque et soumis à la loi de 1894. Il demeure toujours entendu que le fait intentionnel est exclu du risque professionnel.

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169. En Angleterre, comme ailleurs, la faute constitue le principe de la responsabilité civile en général. On répond non seulement de sa faute personnelle, mais aussi de celle de ses préposés; pour obtenir réparation, la victime doit toujours établir la preuve de la faute. Tel est le droit commun anglais.

Une dérogation importante était admise dans la responsabilité du patron en matière d'accidents du travail. Par le fait même du contrat d'ouvrage, l'ouvrier était censé avoir prévu et implicitement assumé tous les risques de son travail. Ces risques comprenaient non seulement ceux du travail luimême, mais encore ceux provenant de la négligence ordinaire d'un de ses compagnons et même du patron (1). La jurisprudence consacra cette théorie, connue sous le nom de <«< Common employment (2) ». Ainsi la « Common Law » de l'ouvrier (3) rendait sa situation moins favorable et même

(1) Tendance caractéristique de l'esprit de l'ouvrier anglais de s'attribuer volontiers à lui-même la responsabilité des accidents dont il est victime même par la négligence de son patron : c'est la self-responsability.

(2) Application particulière de l'exception « Volenti non fit injuria », si chère à la doctrine de l'école manchestérienne de la liberté naturelle le laissez-faire, laissez-passer »).

droit com

(3) On a tort de confondre la « common law » avec le mum ». Celui-ci est le droit positif général; et celle-là est le droit coutumier résultant de la fusion de divers éléments (droit uormand, danois, saxon), fixé par les cours de justice dites « de loi commune », et ayant, par son caractère général et sa constante application, la force d'une loi positive. La common law est encore aujourd'hui une des bases du droit anglais.

plus précaire que celle d'un tiers, étranger à l'industrie, et comme lui victime du même accident. L'ouvrier, en effet, supportait, en vertu d'un clause tacite de son contrat, le dommage causé par une négligence du patron, alors qu'un tiers, en dehors de tout contrat, en aurait, après l'administration de la preuve, obtenu réparation. En outre, l'action en indemnité ne pouvait être intentée que par la victime, et seulement contre l'auteur responsable du dommage : c'est une action personnelle, qui s'éteint avec la personne créancière ou débitrice; par suite, les accidents les plus graves, ceux qui entrainent la mort, ne donneront jamais lieu à indemnité.

La loi du 26 août 1846, dite « Campbell's act », apporta une atténuation à la rigneur de cette législation, en accordant aux ayants-cause du défunt le droit d'agir en son lieu et place; mais n'oublions pas que les ayants-cause de l'ouvrier décidé ne pourront agir qu'en cas de faute lourde du patron on de ses préposés, et ne seront indemnisés qu'après l'administration de la preuve.

La rigueur de ce régime fut tempérée par une loi du 7 septembre 1880 (Employer's liability act). Cette loi enleva à l'action en dommages-intérêts tout caractère personnel, de sorte qu'il fut permis d'agir au nom et place d'un ouvrier sculement blessé; de plus, elle étendit la responsabilité du patron dans différentes hypothèses de négligence de sa part ou de celle de ses préposés, tout en maintenant la preuve à la charge de la victime.

En somme, on peut dire que l'ouvrier supportait non seulement les accidents causés par cas fortuit ou par sa propre faute, mais encore en principe ceux dus à la faute légère du patron ou de ses subordonnés ; quant aux accidents dus à la

faute lourde de la direction, fallait-il encore que l'ouvrier en fournisse la preuve.

Après divers essais infructueux pour étendre la responsabilité du patron, le 3 mai 1897 le gouvernement anglais présenta à la Chambre des Communes un projet de loi sur les indemnités à allouer dans les accidents du travail. Ce bill est devenu la loi du 6 août 1897 (Workmen compensation act). Cette loi établit la responsabilité du patron sur des bases nouvelles elle adopte, dans une mesure assez large, comme fondement de cette responsabilité, le principe du Risque professionnel. Au début limité, le champ d'action de ce principe s'accrut à l'égard d'autres accidents du travail, par exemple le travail agricole (loi du 30 juillet 1900).

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La charge du risque professionnel incombe toute entière. au patron. A la différence des législations allemande et autrichienne, le chef d'entreprise n'est pas tenu de s'assurer, il n'est même lié par aucune solidarité avec les autres patrons; en cette matière comme dans les autres, la plus grande liberté est laissée à l'initiative individuelle.

Les risques couverts par la loi, sont « tous les dommages corporels causés à un ouvrier par un accident survenu à raison et dans le cours de son travail ». A l'instar des lois allemande et autrichienne, la loi anglaise exige la réunion de ces deux conditions: la relation de cause à effet entre l'accident et le travail, et la survenance de l'accident pendant le cours du travail. Les accidents dus à la force majeure ou au cas fortuit, qui surviennent dans le travail, sont indemnisés par le patron; ainsi disparait l'inique présomption, d'après laquelle l'ouvrier était censé avoir accepté le risque inhérent à son travail par la seule connaissance de ce

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risque. Quant aux dommages causés par la faute lourde de l'ouvrier ou du patron, la loi anglaise, à l'encontre de ses devancières, les exclut du risque professionnel : fidèle à son esprit traditionnel, elle entend maintenir autant que possible, le caractère subjectif de la responsabilité. Pour ces accidents, le droit commun reprend son empire; néanmoins la victime a l'option et peut réclamer une indemnité en vertu de la loi de 1897.

Une disposition importante atténue singulièrement la portée de ce bill. Les patrons et ouvriers peuvent, en dehors de la dite loi, adopter d'un commun accord un autre régime de prévoyance, de réparation ou d'assurance, et le substituer par contrat aux dispositions de cette loi. Pour que cette convention soit valable et exécutoire, il faut qu'elle soit approuvée par le Regitrar of friendly societies, qui s'assure au préalable de l'accord des parties, et qui délivre un certificat constatant que le système adopté n'est pas moins favorable que la loi de 1897 à l'ensemble des ouvriers et de leurs ayants-droits. A part cette importante restriction, le bill est toujours applicable, nonobstant toute convention contraire.

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170. La responsabilité en matière d'accidents du travail était régie par le droit comman de la responsabilité Le patron répondait de sa faute personnelle et de celle de ses subordonnés. Une loi votée le 15 janvier 1898 est venue modifier ces principes et apporter des règles nouvelles.

Cette responsabilité consacre la théorie du Risque profes

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