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NOUVEAU DICTIONNAIRE

DE

MÉDECINE ET DE CHIRURGIE

PRATIQUES

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OREILLE. — Anatomie. L'anatomiste, s'inspirant des données de la physiologie, distingue dans l'organe de l'audition: 1° un appareil collecteur des ondes sonores; 2° un appareil de renforcement ou de transmission; 3° un appareil de perception. Au premier, qui est le seul visible à l'extérieur, il donne le nom d'oreille externe; l'appareil de perception, creusé dans l'épaisseur du temporal, forme l'oreille interne; quant à l'appareil chargé de relier entre ellès l'oreille externe et l'oreille interne, il prend naturellement le nom d'oreille moyenne (fig. 1).

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FIG. 1.

Schéma de l'ensemble de l'appareil auditif de l'homme.

On voit de droite à gauche l'oreille externe, le conduit auditif, la caisse du tympan avec la chaîne des osselets et la trompe d'Eustache, le labyrinthe (Dalton, Physiologie et hygiène).

L'ensemble de ces appareils forme ce que l'on est convenu de désigner sous la dénomination vulgaire et générale d'oreille. Placée sur les limites de la face et du crâne, l'oreille appartient à la fois à l'une et à l'autre : à la face, par le pavillon et le conduit auditif externe qui constituent sa partie

NOUV. DICT. DE MÉD. ET CHIR.

XXV. - 1

externe, par la caisse tympanique et la trompe d'Eustache appartenant à sa partie moyenne; au crâne, par sa partie profonde qui est, comme je l'ai dit, creusée dans l'apophyse pétrée du temporal.

I. Oreille externe. L'oreille externe, destinée spécialement à colliger les ondes sonores, présente la forme d'un entonnoir légèrement recourbé, dont la portion évasée (pavillon) est dirigée en dehors, et dont la portion tubulaire (conduit auditif externe) va se terminer en s'abouchant avec la caisse du tympan, dont elle est séparée par la membrane de ce nom. A. Situé de chaque côté de la face, en arrière de l'a ticulation temporomaxillaire, le pavillon est un appendice mince, aplati, élastique, de forme à peu près ovalaire, avec l'extrémité large dirigée en haut. Adhérent dans. toute sa partie antérieure, où il se continue avec le conduit auditif externe; il est libre en haut et en arrière et semble comme détaché des parties latérales du crâne, avec lesquelles il forme un angle variable suivant les individus, les familles et les races. Il faut toutefois reconnaître que la plus ou moins grande ouverture de cet angle peut être modifiée par certaines habitudes de toilette : c'est ainsi que, chez la femme, le pavillon est d'ordinaire plus rapproché de la tête, par suite de la pression exagérée déterminée par les coiffures qui sont particulières à ce sexe.

On a prétendu, sans trop de preuves, que le développement du pavillon est en rapport direct avec l'intensité de l'ouïe; mais une prétention moins justifiée encore est celle d'Amédée Joux,' qui veut reconnaître, à la forme du pavillon, le caractère et le degré de développement intellectuel de l'individu. Une oreille blanche, fine, de forme élégante, ne pourra appartenir qu'à un homme élevé par son mérite au-dessus de la moyenne. Une oreille rouge, épaisse, à lobule volumineux, sera le partage d'un homme déshérité de la nature ou même adonné à d'ignobles passions. Joux ne s'arrête pas là la forme du pavillon étant essentiellement transmissible par hérédité, la recherche de la paternité trouverait en elle son premier signe de certitude, et ainsi serait justifiée la formule de cet auteur: « Montre-moi ton oreille et je te dirai qui tu es, d'où tu viens, où tu vas. » Cette vue ingénieuse d'un esprit jaloux de se singulariser méritait d'être citée pour mémoire.

On peut considérer au pavillon une face externe, une face interne, et une circonférence.

La face externe est excavée profondément dans sa partie moyenne et antérieure pour former la conque, large concavité allongée transversalement et se continuant en bas et en dedans avec le conduit auditif externe.

Outre la conque, on rencontre sur cette face externe une série d'éminences et de dépressions. C'est d'abord l'hélix, repli demi-circulaire, bordant la circonférence du pavillon; il commence dans la cavité de la conque, se porte en avant, puis en haut, et après avoir suivi le pourtour du pavillon, il s'incline en dedans pour se terminer en arrière de la conque, non loin de son point d'origine, dont le sépare l'anthélix. L'anthélix est une saillie concentrique à l'hélix, dont il est séparé par une rainure, dite rainure de l'hélix. Il naît, comme l'hélix, en arrière et un peu au-dessous de la conque,

mais se dirige plus directement en haut; là il se divise en deux branches interceptant entre elles un enfoncement qui porte le nom de fossette naviculaire ou fossette de l'anthélix.

Au devant de la conque, au-dessous de la portion réfléchie de l'hélix, se voit une éminence aplatie de forme triangulaire, adhérente en avant par sa base, et dont le sommet arrondi et libre regarde en dehors et en arrière. Cette éminence, dont la face interne est couverte de poils chez l'adulte et chez le vieillard, porte le nom de tragus: elle est disposée de manière à pouvoir recouvrir l'orifice externe du conduit auditif.

Au-dessous de la conque, en avant de l'origine de l'hélix, en arrière du tragus, dont le sépare une échancrure assez profonde, dite échancrure de la conque, il existe une deuxième éminence de même forme que le tragus, mais bien moins étendue: c'est l'antitragus. Sa face interne, hérissée de poils comme celle du tragus, regarde en haut et en dedans; sa face externe regarde en bas et en dehors.

Inférieurement, le pavillon se termine par le lobule, appendice cutané, mou, souple, aplati latéralement, continu en avant avec la peau de la joue, libre en arrière et en bas, se rattachant en haut à l'hélix et à l'anthélix. La face interne du pavillon, obliquement dirigée en arrière et en dehors, présente des saillies et des enfoncements répondant en sens inverse aux cavités et aux éminences de la face externe.

La circonférence du pavillon ne peut être suivie qu'en haut, en arrière et en bas, par suite de l'adhérence antérieure du pavillon.

Le pavillon est formé par un squelette cartilagineux, que recouvre, sur ses deux faces, une enveloppe cutanée. Cette peau est mince, transparente, remarquable par sa grande vascularité et les nombreuses ramifications nerveuses qui s'y distribuent. Elle est très-adhérente au cartilage, surtout en avant, et en reproduit toutes les ondulations; au niveau du lobule, où ce squelette fait défaut, elle s'adosse à elle-même et devient plus dense. En ce point elle forme un repli qui attache le lobule à la région parotidienne. La peau du pavillon est doublée par un tissu cellulaire très-dense, continu avec la couche sous-cutanée des régions voisines de la face et du crâne, et presque entièrement dépourvu de graisse, excepté dans le lobule.

Le cartilage du pavillon présente les anfractuosités déjà signalées, ou, pour parler plus exactement, c'est lui qui les détermine. On peut les distinguer en deux portions: une verticale et une horizontale. Cette dernière forme une sorte de tube continu au conduit auditif externe et inséré sur le pourtour du canal auditif osseux. Mince, élastique et très-solide, ce cartilage présente en différents points (entre l'antitragus et l'origine commune de l'hélix et de l'anthélix; en avant, au niveau du tragus) des fentes ou divisions comblées par du tissu fibreux et dites incisures de Santorini.

En dehors de ses insertions directes au pourtour de l'orifice du conduit auditif osseux et de sa continuité avec la portion cartilagineuse de ce conduit, le cartilage est maintenu dans sa position par des ligaments auxquels leur situation et leur usage ont fait donner le nom de ligaments extrinsèques du pavillon. Ces ligaments sont au nombre de trois, savoir: un supé

rieur ou temporo-auriculaire, allant de la partie supérieure de la conque à l'aponévrose épicrânienne; un antérieur ou zygomato-auriculaire, naissant de la base du tragus pour s'attacher à la base de l'apophyse zygomatique; un postérieur ou mastoïdo-auriculaire, s'attachant, comme son nom l'indique, d'une part à la conque et d'autre part à la face externe de l'apophyse mastoïde. Il existe également, sur le pavillon même, des fibres ligamenteuses destinées à maintenir les plis du cartilage et dits ligaments intrinsèques ces fibres sont surtout apparentes dans le fond de la rainure qui existe à la face interne et qui correspond à l'anthélix.

Le cartilage du pavillon est formé de fibres élastiques entre-croisées, renfermant dans chacune de leurs mailles un ou deux corpuscules cartilagineux sphériques ou ovalaires, terminés en pointe à leurs deux extrémités : il appartiendrait donc à l'espèce des fibro-cartilages; au contraire, pour Kölliker, il devrait être rangé dans le groupe des cartilages jaunes ou réticulaires. Son épaisseur est surtout considérable dans la conque, au niveau de l'antitragus et du tragus, et dans la fossette de l'anthélix.

Au pavillon est annexé un appareil musculaire qui, très-marqué chez les animaux, n'existe chez l'homme qu'à l'état rudimentaire. Cet appareil est formé de deux ordres de muscles: les uns, extrinsèques, au nombre de trois, comme les ligaments du même nom, et présentant les mêmes insertions; ils ont pour but, quand ils se contractent séparément, d'attirer le pavillon vers leur insertion fixe; les autres, intrinsèques, composés seulement de quelques fibres pâles perdues dans le tissu cellulaire sous-cutané, et n'ayant qu'une action extrêmement limitée : ce sont les grand et petit muscles de l'hélix, le muscle du tragus, celui de l'antitragus et un muscle transverse. Ce dernier est le seul situé à la face interne du pavillon il se porte de la convexité de la conque sur la saillie correspondante à la racine de l'hélix.

B. La conque du pavillon sert en quelque sorte de vestibule au conduit auditif externe, qui représente la portion rétrécie ou tubulée de l'entonnoir formé par l'ensemble de l'oreille externe et dont le pavillon est la portion évasée.

Situé en arrière de l'articulation temporo-maxillaire, ce conduit, qui aboutit à l'oreille moyenne, est long d'environ 20 à 22 millimètres chez l'adulte. Sa coupe est celle d'une ellipse, avec cette particularité que le grand diamètre, vertical dans la moitié externe, devient horizontal dans la partie profonde.

Son orifice externe apparaît au fond de la conque, et est en partie recouvert par le tragus : les poils qui hérissent la face interne de cette éminence, servent même à le défendre contre l'introduction des corps étrangers. Son orifice interne est occupé par la membrane du tympan : celle-ci n'est point perpendiculaire à l'axe du conduit, mais bien oblique d'arrière en avant, de haut en bas et de dehors en dedans. Il résulte de cette disposition que la membrane tympanique fait un angle aigu avec la paroi inférieure du conduit, et que cette paroi est la plus longue de toutes. Chez l'enfant, par

suite de l'horizontalité du tympan, cette prédominance de longueur de la paroi inférieure est beaucoup plus marquée.

Entre ses deux orifices, le conduit auditif, loin d'avoir une direction rectiligne, présente plusieurs courbures qu'il est important de connaître. C'est d'abord une courbure générale à concavité inférieure, dont l'inflexion correspond à peu près exactement à la moitié de la longueur du conduit. En outre, le conduit auditif, à partir de son orifice externe, forme avec la conque une courbure concave en avant; mais dans sa partie profonde, il se porte un peu en arrière, pour s'infléchir de nouveau en avant à la façon d'un S italique (Hirschfeld).

Les parois du conduit auditif sont formées par un revêtement cutané qui, affectant dans sa portion externe une coloration rosée, devient rouge dans sa partie profonde. Épaisse, résistante, pourvue de poils très-fins et doublée d'un tissu cellulaire dense dans la moitié externe du conduit, cette peau est très-mince et adhère très-intimement à l'os sous-jacent au voisinage de l'oreille moyenne. Son feuillet épidermique se réfléchit sur la membrane du tympan. Dans l'épaisseur de cette couche cutanée sont contenues de nombreuses glandes en cul-de-sac et des follicules, destinés à sécréter une matière grasse, jaunâtre, amère, qui lubrifie l'intérieur du conduit et porte le nom de cérumen. Ces glandes qui, par l'enroulement de leur partie profonde sur elle-même, rappellent les glandes sudorifères, se composent d'une membrane anhyste doublée de fibrilles allongées et d'une enveloppe conjonctive. Leur contenu est formé de cellules à contours foncés et semblables aux cellules des glandes de Meibomius.

Le squelette du conduit auditif est en partie osseux, en partie cartilagineux et membraneux. La portion osseuse, qui répond à la moitié interne du canal, est formée par le temporal (apophyse vaginale) et fait défaut chez l'enfant. Son orifice interne présente une rainure dans laquelle s'enchasse la membrane du tympan, et qui détermine l'obliquité déjà signalée de ce diaphragme. Son orifice externe, qui n'est visible que sur une pièce osseuse, est irrégulier inférieurement et donne attache au squelette cartilagineux.

Celui-ci est placé en dehors du précédent, à la partie inférieure et antérieure du conduit. Il est formé par une lame cartilagineuse enroulée en demi-gouttière et continue avec le cartilage du pavillon. Cette lame présente, comme ce dernier, plusieurs fentes transversales, dites aussi incisures de Santorini, et comblées par du tissu fibreux.

Le demi-canal formé par la portion cartilagineuse est complété en haut et en arrière par une membrane fibreuse qui s'insère sur ses bords d'une part, et, d'autre part, à l'orifice externe du conduit osseux et au pavillon. Le squelette du conduit auditif peut ainsi être divisé en deux moitiés presque égales : l'une interne, entièrement osseuse; l'autre, externe, membrano-cartilagineuse.

Le système vasculaire artériel de l'oreille externe provient de la temporale superficielle par les auriculaires antérieures, et de la carotide externe par l'auriculaire postérieure. Les veines, satellites des artères, se jettent

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