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En deux à trois minutes, tout est terminé pour chacun de ces pelits sujets; je prenais soin, d'ailleurs, de montrer le manuel opératoire à mes auditeurs.

Je noterai que chez les quatre petits garçons, l'érection de la verge s'est produite pendant les injections.

Telle est la manœuvre opératoire; pendant qu'elle s'accomplit, un aide doit avec soin fermer l'orifice péritonéal du sac herniaire, avec un doigt. Je considère que l'injection de liquide dans le péritoine abdominal pourrait avoir de gros dangers. Il résulte, en effet, d'expériences faites avec mon collaborateur, M. Achard, que les animaux, cobaye surtout, dans le péritoine desquels nous avons injecté la même solution de chlorure, ont succombé très vile, en moins de vingt-quatre heures, à une perforation de l'intestin ou de l'estomac. Cette perforation est le résultat de l'action du médicament sur la paroi du tube digestif; en mortifiant plus ou moins cette paroi, en l'affaiblissant tout au moins, cela permet aux microbes du canal alimentaire d'agir sur elle et de provoquer ensuite sa mortification.

Les autres complications sont peu à redouter. L'injection de liquide dans la vaginale du sac herniaire me paraît sans danger; je crois que je l'ai faite une fois ou l'autre chez l'un de nos malades sans le savoir. Il ne s'est produit que de la vaginalite avec épanchement et sans conséquences sérieuses.

La lésion des vaisseaux, des veines en particulier et principalement l'injection de chlorure dans les veines pourrait être dangereuse; je n'ai pourtant jamais rien observé dans aucune région, du corps où j'ai fait un grand nombre d'injections et où probablement j'ai intéressé quelque vaisseau. Pour le cordon, en prenant les précautions que j'ai indiquées plus haut, il sera, je crois, facile d'éviter les vaisseaux. Je crois qu'on ne doit pas redouter la blessure du canal spermatique.

Immédiatement après l'injection, j'ai appliqué un bandage compressif ouaté en spica, avec un tampon humide en face de l'anneau supérieur pour mieux fermer le ventre.

Quatre de nos malades ont été opérés le 17 juin et on trouvera plus loin, dans le résumé des observations, la marche isolée des phénomènes. Voici l'appréciation générale des accidents locaux et généraux à la suite des piqûres.

La température est arrivée au plus à 38 degrés chez trois de mes opérés vers le 3° ou le 7° jour, et une fois seulement. Donc pas de réaction générale à proprement parler. L'état général est resté

excellent, les malades ont toujours mangé; ils se sont levés au huitième jour. Ils ont souffert le lendemain et deux ou trois jours ensuite, mais sans se plaindre spontanément. Pourtant le mouvement imprimé au lit ou les soins qu'on leur donnait, réveillaient la douleur locale.

L'état local a offert un intérêt tout particulier. Il a consisté en un gonflement profond des tissus placés au-devant du pubis, des parties contenues dans le trajet inguinal et de ce canal jusqu'à la peau elle-même. La vaginale isolée du sac a présenté de l'épanchement qui s'est résorbé en cinq ou six jours dans tous les cas, sauf un où il persiste encore. De plus, il s'est formé des produits néo-membraneux qui sont en voie de résorption. Les testicules sont sains.

Je ne donnerai pas jour par jour les caractères du gonflement. Je me borne à indiquer l'état actuel, qui est à peu près le même chez chacun de mes malades, dix-neuf jours après l'opération, c'est-à-dire aujourd'hui 7 juillet.

Il existe, à l'heure présente, un gonflement notable dans la région du trajet inguinal, qui atteste trois choses absolument essentielles et nécessaires à obtenir pour le succès de tout traitement curatif. Ce sont :

1° Une oblitération du sac herniaire qui est complète dans tout le trajet inguinal. Dans les deux cas où la hernie communiquait avec la tunique vaginale, celle-ci s'est isolée entièrement de la portion inguinale qui est absolument close.

2o Le cul-de-sac supérieur du péritoine, de pénétration dans le trajet, le vestibule, semble oblitéré et il y a là, probablement, un épaississement séreux important ainsi que l'indique l'induration profonde de la paroi abdominale au niveau de ce point; c'est là un fait intéressant à signaler.

3o Le trajet inguinal et les tissus voisins, fibreux cellulaires, musculaires, font partie d'une induration qui comprend toute la paroi abdominale. Cette induration a pour limites en dedans, la ligne médiane; elle descend en bas sur le pubis plus ou moins loin. En haut, la plaque s'élève à deux travers de doigt environ au-dessus du pubis et elle remonte en dehors au delà des limites du canal inguinal.

Cet épaississement a tantôt la forme d'un plastron, tantôt il peut être comparé à un fibrome de la paroi abdominale; il part du périoste et adhère à la peau qui ne peut plus être plissée sur lui. En résumé, le trajet est fermé, la séreuse est oblitérée, le

cul-de-sac supérieur du péritoine paraît épaissi et toute la région fait partie d'un épaississement dont les plans sont adhérents entre eux depuis le périoste jusqu'à la peau..

On comprend bien que chez les petits malades on ne trouve plus aujourd'hui rien qui rappelle de près ou de loin une hernie. Si on examine par la palpation le gonflement en faisant tousser les enfants après les avoir fait courir, on n'y trouve plus d'impulsion.

En second lieu, lorsqu'on cherche à pénétrer avec un doigt dans le trajet inguinal en refoulant le scrotum, on n'y parvient plus, on est arrêté par le plastron fibreux qui bouche l'orifice.

Cet état est différent du résultat immédiat qu'on observe après T'opération ordinaire de la cure radicale. Car en mettant la main sur la cicatrice, on sent ici une impulsion d'habitude très nette. Cela s'explique par l'opération on ouvre la paroi abdominale, c'est-à-dire qu'on l'affaiblit en vue de la recoudre pour qu'elle soit plus solidement reconstituée. Mais peut-on garantir que le rapprochement cherché remplira bien son office? Les éventrations à la suite de laparotomie témoignent du contraire.

Par la méthode sclérogène, on ne détruit rien, on fait un appel à des éléments anatomiques nouveaux pour constituer un nouveau tissu, tissu de remplissage dans le trajet inguinal, de renforcement dans la séreuse péritonéale, d'obstruction dans la séreuse du sac.

Le résultat immédiat est certain et les effets sont remarquables. Mais je ne veux pas engager l'avenir davantage, et je ne saurais affirmer aujourd'hui que les malades seront à l'abri de toute récidive.

Ce n'est pas la première fois qu'on a préconisé, pour la cure radicale des hernies, les injections péri-herniaires. Luton (de Reims), en 1875, a injecté, au niveau des anneaux, une solution de sel marin; Schwalbe, plus tard, une solution alcoolique et Heaton et Warren, un extrait simple d'écorce de chêne.

Ces essais sont différents de la méthode systématique que j'indique et qui consiste non plus à agir sur les anneaux seulement, mais sur tous les tissus y compris le périoste et l'os. Le pubis. est, en effet, le point de repère duquel on part pour les injections, et qu'il me soit permis de dire que le chlorure de zinc, antiseptique de premier ordre, jouit de propriétés sclérogènes incomparables et sur lesquelles je ne puis m'appesantir en ce moment, y ayant longuement attiré l'attention autrefois.

1896. N 27.

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3 SÉRIE, TOME XXXVI.

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Court résumé des cinq observations: Le premier fait n'est qu'une tentative incomplète, car il n'a été injecté que quelques gouttes de solution.

OBS. I. Fille, onze ans et demi. Hernie droite depuis l'âge de trois ans, de la grosseur d'une grosse noisette. Il y a un large orifice. Opérée le 3 juin 1896. On est à la période d'essai. L'outillage, du reste, est mauvais et les 3/4 du liquide injecté sont ressortis. Aussi comme résultat n'a-t-on qu'un gonflement médiocre. Comme résultat, au point de vue de la hernie, nous avons la persistance d'une pointe à la toux. Mais la tumeur a disparu. Dans le canal inguinal on constate la présence d'un chapelet d'induration.

Il n'y a jamais eu une température supérieure à 37°,5.

OBS. II. Tillary. Garçon de six ans. Hernie inguinale gauche depuis l'âge de quatre ans, à la suite d'une coqueluche, de la grosseur d'un œuf de poule. Hernie intestinale compliquée d'hydrocèle réductible. Le canal inguinal est large; l'index s'y enfonce largement. Opéré le 17 juin. 5 injections de 6 gouttes chacune, environ 4 gr. 50. Gonflement considérable, profond, adhérent à l'os. Le gouflement occupe la paroi abdominale et remonte au-dessus du trajet inguinal. Il est très dur. Il existe sur la peau, au niveau des injections, une escarre superficielle due à l'injection et qui est en voie de guérison. L'hydrocèle a disparu. Température atteint 38 degrés le soir du 17 et le matin du 19, ensuite 37 degrés.

OBS. III. Camille M..., garçon de six ans. Hernie inguinale gauche. Opéré le 17 juin 1896. La hernie existe depuis trois ans. Elle a le volume d'une grosse noix; elle est arrondie, réductible. Il y a double hydrocèle vaginale. Large orifice externe. Je pratique 5 injections de 5 à 6 gouttes chacune, c'est-à-dire 30 gouttes en tout environ.

Le 24 juin, on constate une grosse masse dans le canal et au pourtour, formant une plaque adhérente à l'os et à la peau. Cette plaque part de la ligne médiane, remonte au-dessus de l'orifice externe ou supérieur du trajet et comprend tout le trajet. On ne constate aucune impulsion par la toux. La température reste normale, sauf le 24 au soir où elle atteint 38 degrés.

OBS. IV. René M..., garçon de quatre ans. Apparition de la hernie à l'âge de trois ans. Hernie inguinale gauche de la grosseur d'une noix formée par l'intestin. Trajet inguinal large, hydrocèle moyenne, irréductible au moment de l'examen. Opération le 17 juin 1896. 5 piqûres de chlorure de zinc au 1/10°. A chaque piqûre, on injecte 5 à 6 gouttes en haut, en bas et latéralement jusqu'à l'os et au-dessous du cordon.

Résultat gonflement de toute la région inguinale et dépassant la

région. Ce gonflement est dur, adhérent à l'os, s'enfonçant profondément, englobant le canal inguinal. Pas d'épanchement dans la vaginale. Mais il existe des produits indurés qui descendent presqu'au contact du testicule. On ne peut retrouver le trajet inguinal en refoulant le scrotum avec le doigt. Pas d'impulsion herniaire sous l'influence de l'effort.

La température monte à 38 degrés le 25 juin. Le reste du temps, elle est normale.

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OBS. V. Gaston J..., garçon de onze ans. Hernie inguinale droite récente, depuis avril 1896. On s'en est aperçu à la suite d'un traumatisme. Peu volumineuse, de la grosseur d'une noisette. L'orifice inguinal est large. Il existe une hydrocèle vaginale se réduisant difficilement.

L'opération a lieu le 17 juin 1896. 5 piqûres de chlorure de zinc à 4/10 chaque piqûre formée de 5 à 6 gouttes: 2 à droite, 2 à gauche, 1 en bas au-dessous du cordon. Durée de l'opération, 3 minutes. Résultats le 1er juillet on trouve au niveau de l'aine une plaque profonde se prolongeant en pain de sucre dans le canal inguinal. Il existe une hydrocèle légère. Le cordon et le canal inguinal sont perdus au milieu d'une masse indurée. Pas d'impulsion herniaire.

La température reste normale. Cependant, le 25, on constate 38 degrés.

A quatre heures cinq minutes, l'Académie se forme en comité secret afin de discuter des modifications à son règlement et d'entendre la lecture d'un rapport de M. Debove sur le concours pour le Prix Saint-Paul en 1896.

- A quatre heures cinquante minutes, la séance est levée.

ERRATUM

Page 720, t. XXXV, au lieu de : «< et, en 1894, à la Société obstétricale de France », lire : « et, en 1893, à la Société obstétricale de France» (Nouv. Archives d'obstétrique et de gynécologie, mai 1893, p. 206);

D

Et au lieu de « Ma première opération, qui date de 1892 », lire : « Ma première opération, qui date de 1890 » (Bull. et Mém. de la Société obstétricale el gynécologique de Paris, p. 269).

Le Secrétaire perpétuel, BERGERON.

L'Éditeur-Gérant: G. MASSON.

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