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dans les villes qui pratiquent le tout à l'égout que dans les autres (1) et cela se conçoit. Les 2.500 mètres cubes de vidanges, tombant chaque jour dans une masse de 500.000 mètres cubes d'eau d'égout en mouve

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Fig. 58. Coupe en élévation d'une maison desservie par le tout à l'égout.

ment n'en représentent que la 200me partie et c'est à peine si on peut s'en apercevoir.

On a cependant accusé cette adjonction de tous les méfaits reprochés a l'épandage. Durand-Claye, qui a consacré sa vie à la défense de ce système, qui a mis au service de cette cause son expérience, ses talents

1) Chapitre III, art. Jer, § 6, t. IV, Eaux d'égout, page 292.

et son activité incomparable, a prouvé d'une manière irréfutable l'injus tice de ces accusations et cependant cette vieille querelle s'est renouvelée en 1892, à l'occasion de la petite épidémie de choléra qui a régné à Paris et surtout dans la banlieue (1). Cette fois encore, les mêmes intérêts et les mêmes passions étant en jeu, on a persisté à confondre la question du tout à l'égout, avec celle de l'épandage et de la souillure de la Seine. Nous avons déjà montré combien cette confusion était injuste. La souillure de la Seine n'est que trop réelle; elle est due à l'arrivée des caux d'égout, cela est certain; mais ce ne sont pas les quelques mètres cubes de vidanges provenant des 7.898 chutes établies jusqu'à ce jour qui les empoisonnent; les eaux ménagères, le lavage des rues, le produit des lavoirs et tout ce qu'une grande ville projette d'ordures dans sa canalisation souterraine suffisent pour leur donner un degré de souillure tel, qu'il est impardonnable de les déverser dans le fleuve qui fournit encore à Paris une partie de ses eaux potables.

L'administration municipale l'a compris du reste, et a mis le plus louable empressement à délivrer la ville de cette cause d'insalubrité. En 1894, elle a demandé à contracter un emprunt de 117 millions pour y pourvoir et aussitôt que les Chambres y ont consenti, elle s'est empres sée d'augmenter l'étendue de ses champs d'épandage, par l'acquisition de 305 hectares de nouveaux terrains (2); elle a poussé activement les travaux d'égout sur les terrains d'Achères et posé le grand siphon à la faveur duquel les eaux traversent la Seine, enfin au mois de décembre de cette même année, elle a publié la liste officielle des rues qui devaient être soumises au régime de l'écoulement direct à l'égout.

En somme, le tout à l'égout est appliqué depuis longtemps dans la plupart des grandes villles de l'étranger (3) et partout la mortalité a baissé dans des proportions notables; partout les champs d'épandage sont devenus d'une fertilité sans exemple et n'ont rien perdu de leur salubrité. Les craintes de voir les germes des maladies infectieuses et notamment de la fièvre typhoïde et du choléra pulluler et se répandre sur les terrains soumis à l'irrigation est chimérique. La question est jugée; elle ne se discute plus en Allemagne et, en Angleterre, elle a été tranchée par Franckland d'une façon magistrale.

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« Il a été maintes fois démontré, dans notre pays, écrivait-il il y » 12 ans, que les eaux d'égout, même infectées par le choléro et la » fièvre typhoïde, n'ont jamais, tant qu'elles sont employées en irriga

(1) Voyez les conclusions du comité de défense sanitaire des communes de Seine-et-Oise (Journal d'hygiène, 1892, no 829, p. 374).

(2) Bulletin municipal officiel du 6 novembre 1894.

(3) Londres, Bruxelles, Berlin, Breslau, Dantzig pratiquent le tout à l'égout. On l'applique à Naples; il est à l'étude à Coni, Florence, Bologne, Brescia, Palerme, Messine, Catane, etc, Quelques villes de France, Reims entre autres, l'ont adopté.

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» tion, transmis de maladies, soit à ceux qui vivent sur les terres arrosées » soit à ceux qui en consomment les produits (1) ».

On n'a donc rien à craindre pour l'avenir de Paris des nouvelles mesures prises par l'administration municipale.

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I. Viciation de l'air. L'air n'est absolument pur que dans les hautes régions de l'atmosphère et sur le sommet des montagnes; dans les habitations il est toujours altéré par le mélange de poussières, de vapeurs, de gaz étrangers à sa composition. Parmi ces éléments, les uns viennent du dehors, de la voie publique, des cours, des égouts, ou des usines du voisinage; les autres se forment, au sein même de l'habitation, ce sont les exhalaisons du sous-sol, des cabinets et des fosses d'aisances, les fuites du gaz d'éclairage, la fumée des cheminées et des fourneaux ; les derniers enfin proviennent de l'homme lui-même.

Par sa respiration, il déverse incessamment dans l'atmosphère du lieu qu'il habite un air saturé de vapeur d'eau et renfermant 4 p. 100 d'acide carbonique. Les gaz complexes qui s'échappent de son intestin sont formés d'hydrogène sulfuré, d'acide carbonique, butyrique et acétique, de phénol, de scatol. Les sécrétions sudorale et sébacée, surtout celles qui proviennent de certaines régions de l'économie, renferment des acides. gras volatils, d'une odeur très désagréable. Enfin les excrétions solides, les crachats, le mucus nasal, les squames épidermiques, les exhalaisons qui se produisent à l'état de maladie, viennent compléter la liste des éléments de viciation que l'homme répand dans l'air qui l'entoure. Ce sont les seuls dont nous nous occuperons en ce moment. Nous avons parlé des autres lorsqu'il a été question des éléments accidentels de l'atmosphère, des poussières et du nettoyage des habitations.

1° Composition de l'air confiné. - L'air dans lequel un certain nombre de personnes ont résidé, sans qu'il ait été renouvelé, est plus chaud, plus humide et plus riche en acide carbonique que l'air vierge ; il renferme de plus des principes volatils organiques de nature toxique et des bactéries en nombre variable. L'élévation de la température et T'accroissement de la vapeur d'eau peuvent être gênants, mais constituent rarement un danger. C'est l'acide carbonique qui sert de base dans l'appréciation de la souillure de l'air. Nous verrons bientôt que ce n'est

(1) Lettre de M. Frankland à M. Mille, inspecteur général des ponts et chaussées, sur les eaux d'égouts, 17 mai 1881 (Alfred DURAND-CLAYE, Observations des ingénieurs du service municipal de Paris au sujet des projets. Rapport présenté par MM. Girard et Brouardel, Extrait des Annales industrielles, p. 78).

pas qu'il soit plus dangereux que d'autres produits; mais on admet que l'augmentation de ces derniers marche parallèlement avec la sienne. Or l'air commence à être vicié, lorsqu'il renferme plus de 4 volumes p. 10.000 d'acide carbonique; à 7, il est pourtant inoffensif, mais au-dessus de 10 il doit être regardé comme insalubre (Pettenkofer). On ne doit pas tolérer plus de 6 p. 10.000 dans les appartements (De Chaumont).

On peut aller plus loin dans les locaux où on ne séjourne pas, Ainsi, dans les théâtres, à la fin des représentations, l'acide carbonique monte jusqu'à 10 et même 32 p. 10.000 et, dans certaines écoles, il s'élève de 24 à 90 pour 10.000, pendant les classes. Ce sont là des proportions exagérées et éminemment antihygiéniques. Il est vrai qu'on ne passe que quelques heures dans ces salles et qu'on n'y couche pas. On peut, dans ces conditions, supporter sans mourir des atmosphères encore plus chargées. Pettenkofer a séjourné quelque temps, sans être positivement incommodé, dans un air qui contenait 1 p. 100 d'acide carbonique, et Forster, dans une cave où l'air en renfermait 4 p. 100.

Il faut que l'air contienne le quart de son volume d'acide carbonique pour qu'il ne puisse plus entretenir la combustion. Il est mortel pour les reptiles entre 13,5 et 17 p. 100. Les mammifères peuvent aller jusqu'à 30. Il est bien entendu qu'il faut pour cela que l'acide carbonique n'ait pas été produit par la respiration, car dans ce cas, ce n'est pas lui qui tue, ainsi que nous allons le voir.

On croyait autrefois que, dans l'asphyxie par le charbon, la mort était causée par l'acide carbonique; on sait aujourd'hui que c'est l'oxyde de carbone qui la produit. Quelques auteurs ont conclu de là que l'acide carbonique n'était doué d'aucune propriété toxique : c'est aller trop loin. Les animaux meurent beaucoup plus vite dans l'acide carbonique que dans l'azote qui n'a lui que des propriétés négatives. Ils succombent également dans une atmosphère d'acide carbonique, même alors qu'on y introduit assez d'oxygène pour entretenir la combustion. Paul Bert a démontré que l'acide carbonique est toxique à la façon des anesthésiques. « L'acide carbonique, dit-il, est un poison universel qui tue » animaux et végétaux de grande taille ou microscopiques, qui tue les » éléments anatomiques isolés ou groupés en tissus. Et tout cela n'a rien d'étonnant, puisqu'il est le produit d'excrétion universelle de toutes

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» les cellules vivantes. Sa présence empêche l'excrétion et arrête par » conséquent, en y opposant un obstacle terminal, toute la série des >> transformations chimiques de la vie qui commencent par l'absorption d'oxygène et finissent par le rejet d'acide carbonique. La vie végétale, >> la germination, le développement des moisissures, la putréfaction, » sont ralentis, suspendus, arrêtés définitivement par l'acide carbonique >> sous une tension suffisante ».

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Les faits précédents ont sans doute un grand intérêt en ce qu'ils expliquent le mode d'action de l'acide carbonique; mais il est bien rare

qu'on ait l'occasion de le respirer à l'état de pureté. Dans l'air confiné dont nous nous occupons maintenant, il est mélangé aux éléments que nous avons énumérés et notamment à l'élément toxique que contient l'air expiré. Bien que ce principe n'ait pas été isolé, il est démontré par les expériences suivantes : En plaçant une souris dans un flacon muni d'un tube ouvert pour permettre le renouvellement de l'air et contenant des fragments de chlorure de calcium, des éponges imbibées de baryte, pour absorber la vapeur d'eau et l'acide carbonique, Hammond a vu l'animal succomber aussi rapidement que s'il avait été mis dans un flacon

bouché.

MM. Brown-Sequard et d'Arsonval ont démontré le même fait d'une autre manière. Ils ont injecté dans la carotide de lapins de 4 à 7 centimètres cubes de liquide obtenu par condensation des vapeurs pulmonaires entrainées avec l'air expiré par l'homme et ils ont obtenu des effets nettement toxiques: dilatation des pupilles, ralentissement très marqué des mouvements respiratoires, abaissement rapide de la température, faiblesse paralytique des membres postérieurs. En injectant à un lapin vigoureux 15 centimères cubes du liquide provenant de l'air expiré par un gros chien, les mêmes expérimentateurs ont vu survenir un tétanos promptement mortel.

Le principe toxique que contient l'air expiré est probablement de la nature des ptomaines; il est soluble dans l'eau car il passe rapidement à travers un filtre de papier (1). Les matières hygroscopiques, telles que la laine, les plumes, les tapisseries et les murailles humides, la paille, s'en imprègnent facilement.

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Les principes volatils odorants qui se dégagent des sécrétions cutanées et sudorales sont très désagréables, probablement très nuisibles, mais on pas d'expériences directes pour le démontrer. Ils sont d'autant plus abondants que les locaux sont plus malpropres et que ceux qui les habitent ont moins de soin de leurs personnes. L'expérience permet aujourd'hui de le constater. Dans les casernes où les hommes prennent chaque semaine un bain par aspersion, où les couvertures et les vêtements sont battus toutes les semaines, où les chaussures et la sellerie sont renfermées dans des réduits à part, il suffit d'une ventilation peu active pour avoir une atmosphère exempte d'odeurs, tandis que dans les conditions opposées, au moyen de la ventilation la plus coûteuse, on n'arrive pas a obtenir la pureté de l'air. Roth nous apprend que, dans les casernes saxonnes, l'air est devenu incomparablement meilleur, depuis que les soldats passent régulièrement à la douche (2). On a fait la même remarque dans les hôpitaux et les écoles suivant que les malades sont ou ne sont pas baignés.

1) BROWN-SEQUARD et D'ARSONVAL, Démonstration du pouvoir toxique des exhalaisons puimonaves provenant de l'homme et du chien (Comptes-rendus hebdomadaires de la Société de biologie, 1887, p. 114).

(2 E. RICHARD, Précis d'hygiène appliquée (loc. cit.), p. 455.

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