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de Hesse - Darmstadt. Mais le duc de Kathen mourut, et Dabelow eut la franchise de déclarer au duc de Dessau, qui prit l'administration du pays de Kathen, que la plupart des personnes au service du défunt étaient des rouages inutiles, et eut la conscience de se mettre luiMême en première ligne dans la foule des fonctionnaires à congédier. Il se rendit alors dans les villes de Heidelberg et de Gættingue pour en exploiter les richesses bibliographiques, et de la dans celle de Halle qui n'appartenait plus à l'éphémère royaume de Westphalie, mais où sa chaire resta, comme sous la domination de Jérôme, remplie par un autré. Soit qu'il espérât la recouvrer un jour, soit qu'il trouvât des ressources dans la multitude des élèves qui fréquentaient cette université,ildemeura dans Halle comme professeur particulier; et l'on put croire qu'il voulait s'y fixer lorsqu'on le vit rejeter les offres des deux universités de Rostock (1817) et d'Erlangen (1818). Sa résolution ne tint pas contre les propositions brillantes qui Jui furent faites la même année par l'université de Derpt, en Livonie. Il arriva dans cette ville en 1819, après un voyage pénible et dangereux. Il prit sur-le-champ possession de sa chaire dans laquelle il devait professer le droit civil d'origine romaine et germanique, le droit général et la jurisprudence. Dabelow parcourut ce vaste cercle avec un grand succès, traitant chaque spécialité comme si elle eût été l'affaire de toute sa vie. L'éclat de son enseignement lui valut avec les bravos du public une amélioration prompte dans sa position. De conseiller de cour (c'était son titre en 1819), il devint au bout de deux ans conseiller de collège, bien que

d'ordinaire six ans au moins séparent ces deux nominations. Renonçant à poursuivre son travail sur tout le Corpus juris romani, il se préparait à publier seulement le texte épuré de cette vaste compilation, et le gouvernement russe lui avait assigné vingt mille roubles pour cette entreprise, lorsque l'annonce presque simultanée de trois éditions plus portatives et plus commodes que celle qu'il projetait lui fit encore abandonner son dessein. Dabelow mourut le 27 avril 1830 à Derpt. On a de ce laborieux professeur un grand nombre de livres sur toutes les parties de la jurisprudence. Il n'en est pas un dans lequel on ne trouve ou des vues importantes ou des rapprochements ingénieux. Nous indiquerons seulement: I. Meletematum juris feudalis collectio prima, Halle, 1791. Ce recueil jette de la lumière sur plusieurs points de la jurisprudence féodale. II. Essai d'une explication systématique détaillée de la doctrine sur la présence simultanée de plusieurs créanciers, 1re et 2e partie, Halle, 1792, 3e (avec une table pour fout l'ouvrage), 1794; 2e édit., 1796; 3, 1801 (cette dernière est trèsaméliorée). III. Bases de la jurisprudence générale du mariage chez les chrétiens d'Allemagne, Halle, 1792. IV. Introduction à la jurisprudence allemande positive, Halle, 1793; 2o édit., 1796. V. Encyclopédie et méthodologie de la jurisprudence allemande, Halle, 1793. VI. Système de la ju risprudence civile actuelle, Halle, 1793 et 1794. VII. Manuel du droit public et du droit des gen: en Allemagne, Halle 1795. VIII. Histoire des source du droit positif de l'Allemagne, Halle, 1797,

2 vol. IX. Gazette bibliographique du droit (en collaboration avec Hoffbauer en 1799 et avec Maas en 1800). X. De la prescription, Halle, 1805 et 1807, 2 v. XI. Manuel du droit pénal allemand, Halle, 1807. XII. Archives pour le code Napoléon, 5 livraisons, 1808 et 1809. XIII. Commentaire détaillé, théorique et pratique sur le code Napoléon, Leipzig, 1810, 2 vol. XIV. Situation et administration actuelle de la France, Leipzig, 1810. XV. Répertoire complet du droit français, Leipig, 1811, 2 parties. XVI. Pensées sur l'obstacle opposé par la paix de Paris du 30 mai 1814 à lafusion des états allemands, avec un appendice sur les plans de Napoléon relativement à l'Allemagne si la guerre contre la Russie eút été heureuse, Gætting., 1814. XVII. Manuel du droit des Pandectes, Halle, 1816 et 1817, 2 vol. XVIII. Canevas de lectures sur les Pandectes, Derpt, 1819. XIX. Canevas historico-dogmatique d'un cours du droit primitif de l'Allemagne. XX. Jus antiquum Romanorum, Derpt, 1821. XXI. Tituli ex corpore Ulpiani qui et Ulpiani fragmenta appellantur, etc., Derpt, 1823. On trouve aussi divers articles de Dabelow dans les journaux de droit de 'Allemagne; et l'on parle de maascrits qu'il aurait laissés à peu près en état d'être mis sous presse, sur les Topiques de Cicéron, la Germanie de Tacite, le droit primitif des Romains, et l'histoire du droit. P-oT. DACHKOFF. Voyez DasOFF, ci-après. DACIANO (JOSEPH), médecin, Boins connu qu'il ne mérite de l'êe, naquit en 1520 à Tolmezzo,

con

dans le Frioul, de parents pauvres. Son père, ouvrier tailleur, le duisit jeune à Udine, où il s'établit dans l'espoir de trouver plus facilement les moyens de vivre avec sa famille. Ayant obtenu, en 1547, des magistrats d'Udine un secours pour continuer l'étude de la médecine, il alla suivre les cours des plus célèbres professeurs de son temps, et revint en 1555 dans sa patrie adoptive. Revêtu presque aussitôt du titre honorable mais peu lucratif de médecin de la ville, les talents qu'il montra dans l'exercice de cette charge lui méritèrent en peu de temps la confiance générale; et son modeste traitement fut augmenté à plusieurs reprises. Les succès qu'obtenait Daciano dans sa pratique excitèrent la jalousie de ses confrères, qui tentèrent de l'empoisonner en lui faisant manger du pain où l'on avait mêlé de la céruse et du sublimé corrosif; mais il reconnut à temps la présence du poison; et dès lors il se tint en garde contre les projets de ses ennemis. Quoique fort occupé de son art, il n'était point étranger à la littérature; il composait avec facilité des vers latins et italiens; et l'on en trouve quelques uns de lui dans la Raccoltà encomiastica di Salome della Torre, Venise 1568. Cet habile praticien mouruten 1576, quelques mois après avoir terminé l'ouvrage sur lequel repose sa réputation Trattato della peste e delle petecchie, nello quale s'in segna il vero modo che si dee tenere per preservarsi e curare ciascuno oppresso di tali infermita, etc., Venise, 1577, in-4° de 152 pag. La partie théorique de cet ouvrage n'offre rien de plus remarquable que la plupart des traités de médecine du même temps. Mais

ce qui le rend précieux, ce sont les observations faites par Daciano au chevet de ses malades, et qu'il rédigeait ensuite avec autant d'exactitude que de précision. Ce médecin, l'un des premiers, a su distinguer la peste bubonique des fièvres contagieuses avec lesquelles on la confondait alors, et a déterminé ses signes caractéristiques. Dans toutes les circonstances, il avait combattu les affections contagieuses avec succès par les contre-stimulants. Aussi recommande-t-il d'employer, dès le principe de la maladie, la saignée, l'application des sangsues, les scarifications, etc.; il cite à l'appui de son sentiment ce qu'il avait observé dans une épidémie qui dura depuis la fin d'avril jusqu'à la fin de sept. 1560, où tous les malades qui n'avaient point été saignés succombèrent, tandis que les autres se rétablirent assez promptement. L'ouvrage de Daciano, devenu rare, était depuis longtemps tombé dans l'oubli, lorsqu'en 1817 le docteur Marcolini d'Udine en publia un curieux extrait dans son livre intitulé: Delle principali febbri tisiche di Udine nel secolo XVI; e di una operetta del dottor Daciano, etc. Rétabli par là dans ses droits, ce zélé praticien est maintenant compté parmi les médecins qui se sont occupés le plus utilement des moyens de se préserver de la peste et de s'en guérir; et il ne paraît en Italie presque aucune dissertation sur le typhus ou les autres maladies contagieuses sans que son nom y soit cité d'une manière honorable.

W-s.

DACIER (BON-JOSEPH), secrétaire perpétuel de l'académie des inscriptions et membre de l'académie française, naquit le 1er avril 1742 à Valogue en Normandie. Destiné par

ses parents à l'état ecclésiastique après avoir fait ses humanités au collège de sa ville natale, il vint à Paris, où il entra boursier au collège d'Harcourt, et joignit l'étude de la théologie à celle des lettres. Ses dispositions précoces l'ayant fait connaître des frères La Curne (Voy. SAINTE-PALAYE, XXXIX, 558), ils l'admirent au nombre des jeunes gens studieux dont ils s'aidaient dans leurs recherches et pour le classement des nombreux matériaux qu'ils avaient réunis, tant sur l'ancienne langue française que sur l'histoire de France. Dacier dut aux frères La Curne d'être en rapport avec Foncemagne, qui, devenu son protecteur le plus zélé, lui fit partager les exercices du duc de Chartres (1) dont il était le sous gouverneur, et l'introduisit dans les sociétés les plus distinguées où il puisa cette fleur de politesse dont il resta toute sa vie un modèle accompli, mais en même temps aussi ce goût des plaisirs et de la dissipation qui l'empêcha d'attacher, comme il en était capable, son nom à des ouvrages de quelque étendue. Foncemagne, veuf et ayant eu le malheur de perdre son fils unique, concentra de plus en plus son affection sur Dacier; il lui permit de renoncer à l'état ecclésiastique et le dédommagea des avantages que cet état aurait pu lui procurer. En 1772 Dacier publia la traduction des Histoires diverses d'Elien, que Formey avait déjà traduites en 1764 (Voy. ELIEN, XIII, 20); et l'estime qu'elle obtint dès le moment de sa publication lui prouva qu'il avai eu raison de ne pas se laisser ef. frayer par la concurrence du traduc teur de Berlin. Ce travail, qui fai autant d'honneur à son goût qu'à (1) Père du roi Louis-Philippe.

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pour

érudition, n'aurait cependant pas suffi lui ouvrir les portes de l'académie des inscriptions, si Foncemagne eût eu moins de crédit dans cette compagnie. Il y fut admis en 1772; et deux ans après il succéda dans la place de garde des chartes à Lebrun, traducteur de l'Iliade et de la Jérusalem délivrée (V. LEBRUN au Suppl.). Depuis son admission à l'académie, il se livrait aux recherches historiques, et pour se délasser, il traduisit la Cyropédie de Xénophon, qu'il fit paraître en 1777. A cette époque, Dacier s'occupait déjà de préparer une nouvelle édition des Chroniques de Froissart; et l'on ne saurait trop regretter que les circonstances ne lui aient pas permis d'achever une tâche que personne n'était capable de mieux remplir. Le secrétaire perpétuel de T'académie, Dupuy (Voy. ce nom, XII, 326), ayant donné sa démission en 1782, Dacier fut choisi pour le remplacer. Comprenant toute l'importance de ses nouvelles fonctions, sy dévoua tout entier, et n'eut plus dans ses travaux d'autre but que la gloire et les intérêts de l'académie, avec laquelle il s'était pour ainsi dire identifié. C'est à ses constantes démarches qu'elle fut rede vable de l'augmentation du nombre des pensionnaires et du fonds des ons; de la création d'une classe d'académiciens libres; de l'établissement d'un comité, chargé de dépouiller les nombreux manuscrits de la Bibliothèque du roi, et d'en publier notices ou des extraits (2); et, eafin d'un nouveau réglement qui, sans rien altérer dans l'essentiel de la Constitution primitive de l'académie, etait plus en rapport avec les chan

la déjà paru de cette collection 12 VO

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gements arrivés dans les mœurs depuis Louis XIV. Plusieurs mémoires lus dans des séances publiques, et où l'élégance du style était jointe à l'étendue et à l'exactitude des recherches, ajoutaient presque chaque année à la considération dont jouissait Dacier. En 1784 il fut pourvu de la charge d'historiographe des ordres. réunis de St-Lazare, de Jérusalem et du Mont-Carmel, dont Monsieur (depuis Louis XVIII) était alors grand-maître. Trop éclairé pour ne pas sentir la nécessité des réformes, il adopta les principes d'une révolution qui promettait la suppression des abus et l'accroissement du bonheur public; mais il était loin de prévoir tous les excès et les malheurs qui devaient être la suite et l'inévitable conséquence de pareilles réformes faites d'une manière aussi brusque et aussi absolue. Élu membre du corps municipal de Paris en 1790, Dacier fut chargé des travaux nécessaires pour établir dans cette grande ville le nouveau système des contributions directes; et il s'acquitta d'une tâche si contraire à ses goûts et à ses habitudes de manière à mériter le suffrage des personnes les plus éclairées. L'infortuné Louis XVI, qui connaissait les véritables sentiments de Dacier et qui l'avait appelé quelquefois près de lui dans des moments de crise, lui offrit le porte-feuille des finances; mais il le refusa prétextant son incapacité pour les affaires. D'après la marche des évènements, Dacier, redoutant une catastrophe prochaine, ne se trouvait déjà que trop en évidence; et, s'il l'eût pu, depuis long-temps il se serait démis de ses modestes emplois pour retourner à ses occupations littéraires. La déplorable journée du 10 août 1792 le trouva siégeant à l'hôtel-de-ville; et

l'on peut présumer qu'il eût été la victime de son attachement aux principes monarchiques, si son confrère Dussaulx (Voy. ce nom, XII, 390) -ne se fût empressé de le soustraire au danger. Dès qu'il fut remis de cette première alarme, il reprit ses habitudes de travail, et revint même aux Chroniques de Froissart, qu'il n'avait jamais entièrement perdues de vue, et dont les premières feuilles étaient déjà sorties des presses de l'imprimerie royale. La suppression des académies, prononcée en 1793, le força d'ajourner à des temps meilleurs une édition qui lui avait coûté tant de soins et de re cherches; mais ce qu'il y eut de plus fâcheux c'est qu'une grande partie de ses matériaux, déposés au secrétariat de l'académie des belles-lettres, fut dispersée et perdue pour la France, comme pour lui (3). Dacier se tint caché dans le voisinage de Paris, tant que dura l'odieux régime de la terreur. Plus tard il accepta le titre de conservateur des monuments des arts dans le district de Gouesse ; et quelque temps après, la place de commissaire du directoire exécutif pour le canton de Louvres, place qui lui fournit des occasions assez fréquentes de rendre service aux victimes de nos troubles civils. A la création de l'Institut en 1795, il fut nommé membre de la classe des sciences morales et politiques. En 1800 il remplaça Legrand d'Aussy au département des manuscrits de la Bibliothèque du roi; pendant vingt

(3) Dacier a lui-même rendu compte des pertes qu'il avait éprouvées à cette occasion dans son Rapport sur le progrès des sciences historiques depuis 1789. Indépendamment de la plus grande partie de son travail, on lui enleva les manuscrits dont il s'était servi pour corriger le texte de Froissart, entre autres celui de la bibliothèque de Besançon, qu'il regardait comme un des plus précieux, et qui se trouve maintenant en Russie.

ans qu'il resta chargé de l'administration de ce magnifique établissement, il concourut beaucoup à l'enrichir par de nouvelles acquisitions. Nommé membre du tribunat en 1802, il y fit plusieurs rapports sur des lois de finances, et ne cessa de faire partie de ce corps qu'à sa suppression. Ayant été consulté par le premier consul sur les changements qu'il se proposait d'apporter à l'organisation de l'Institut, Dacier contribua beaucoup au rétablissement de l'académie des inscriptions sous le titre de classe d'histoire et de littérature ancienne (1803). Le vœu unanime de ses collègues lui rendit aussitôt la place de secrétaire perpétuel qu'il avait remplie d'une manière sí distinguée jusqu'à la suppression de cette compagnie. En restituant son ancienne dénomination à l'académie, la restauration ne changea d'ailleurs rien à la position de Dacier. Ainsi, malgré la suspension assez longue qu'il éprouva dans l'exercice de ses fonctions, on peut le regarder comme ayant joui constamment depuis 1782 jusqu'à sa mort de la confiance et de l'estime de ses confrères. Obligeant par caractère, il l'était particulièrement à l'égard des jeunes gens qui montraient des dispositions réelles pour les lettres. Il les dirigeait lui-même dans leurs études, encourageait leurs efforts, et jouissait de leurs succès plus que des siens propres, auxquels or peut lui reprocher d'avoir été trop indifférent (4). Il concourut, dans le même temps, par ses conseils, e quelquefois plus activement encore, la rédaction de grands ouvrages parmi lesquels, imitant la retenue d

(4) Parini les élèves de Dacier qui lui font I plus d'honneur, on doit distinguer Abel Rem sat et Saint-Martin, tous les deux enlevés à 1 fleur de l'âge par le terrible fléau qui désol Paris en 1832 (Voy. leurs noms, au Suppl.).

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