Page images
PDF
EPUB

rend aisément compte des tentatives qui ont été faites en vue de faciliter une manœuvre capable de compromettre la vie du malade et la réputation de l'opérateur.

En 1826, j'eus à extraire par la taille bilatérale une pierre énorme, pesant plus de 180 grammes. Le malade succomba. Ce fut à la suite de cette opération, que je fis construire, en prévision des cas analogues, un fort instrument pour morceler les grosses pierres dans la vessie (1).

Cet appareil, construit d'après le trilabe ordinaire, ne servit que pour des expériences. Il ne fut pas appliqué à l'homme. Plus tard j'imaginai d'autres combinaisons qui n'eurent pas plus de succès. Cependant les faits de ce genre se multipliaient (2). Dans l'espace de quelques années, on en

(1) Voyez De la lithotritie, 1827, in-8, p. xxx de l'introduction et pl. V. (2) On trouvera dans mon Traité de l'affection calculeuse, p. 126 et suivantes, les principaux cas de grosses pierres extraites par la taille ou trouvées dans la vessie après la mort. Je me contenterai ici d'une énumération sommaire, en ayant soin de noter que les auteurs cités se sont rarement a-treints à des mesures precises. Le plus souvent ils ont simplement indiqué le poids des pierres volumineuses qu'ils avaient sous les yeux, ou donné approximativement leur volume, en les comparant à des objets connus, des fruits, des œufs, etc. Quelques praticiens distinguent les calculs en petits, moyens et gros. C'est de ces derniers qu'il s'agit ici. Les pierres pesant 3 onces (90 grammes) sont quelquefois difficiles à extraire. Lawrence en a retiré une de 4 onces 3 gros. Viricel, Belmas, Marcel, Prosinus, Lentillus, Scultet, citent des cas de calculs de 5 onces et demie. J'en ai retiré un de 5 onces par l'hypogastre. Scultet, Brugnatelli citent des pierres de 6 onces. J'en ai extrait par le périnée une de 6 onces 3 gros. Béclard en a retiré une de 6 onces. Frère Côme en a extrait une de 7 onces 3 gros. Les pierres de 8 onces ne sont pas rares. Salmuth, Rosinus, Lentillus, Detharding, Ledran, Smith, en citent des exemples. Jean Colot guérit un homme en le débarrassant d'une pierre de 9 onces. Barbantini (taille recto-vésicale) a extrait un calcul de 9 onces, et un autre de 9 onces et demie fut extrait par le haut appareil; d'après M. Belmas, Fabrice de Hilden et Hagendorf en ont vu de 9 onces. Tolet retira une pierre de 10 onces; la mort survint le neuvième jour. Smith en retira une de 17 onces et demie; le malade guérit, M. Rigal dit avoir extrait avec succès une pierre de 10 onces, 3 gros (taille vésico-vaginale,

observa douze des plus graves, qui mirent en pleine évidence l'insuffisance des ressources de l'art (1).

fistule). Brugnatelli, Helwig, Horst ont vu des pierres du même poids. Colot retira une pierre de 11 onces (mort). Chéselden, Kleine ont retiré des pierres de 12 onces, et les malades ont survécu. Une pierre de ce poids fut extraite par Travus; le malade succomba. On cite d'ailleurs, Bonet entre autres, des pierres trouvées dans la vessie, après la mort, pesant 12 à 13 onces. Dalignon a extrait, chez une femme, une pierre de 14 onces (incontinence d'urine). Blancard, Schroeck, Patin ont vu des pierres du même poids. Thomassin en a retiré une de 14 onces et demie de la vessie d'un homme mort à la suite d'affreuses tentatives d'extraction, dans lesquelles on avait faussé les plus fortes tenettes sans succès. Textor et Noël ont vu des pierres aussi volumineuses qui n'ont pu être extraites ni par le périnée ni par l'hypogastre. Gooch a extrait une pierre de 15 onces; l'opéré a survécu avec une fistule. Astley Cooper a retiré une pierre de 16 onces (j'en ai extrait une du même poids à l'hôpital Necker): le malade est mort peu de temps après l'opération. Dans les cas analogues cités par Helmont, Berellus, Zacutus Lusitanus, Fextraction de pierres de 18 onces a été suivie promptement de la mort. Ainsi des malades opérés par Græte, Vivencio, Deschamps, de Guise, pour des pierres encore plus volumineuses. La pierre énorme de 14 onces, que Earle ne parvint pas a extraire de la vessie, a été pour ce chirurgien l'occasion d'un travail inté-, ressant sur le danger de l'extraction des grosses pierres. (Medico-chirurg. Transact., t. I, p. 94.)

On ne se rendrait pas compte des succès mentionnés dans les cas qui précédent, si l'on ne se rappelait deux particularités importantes, que j'ai indiquées à plusieurs reprises, et qu'on oublie trop souvent.

Quelques gros calculs sont tellement friables, qu'ils se désagrégent au moindre contact des tenettes pour les saisir.

Dans plusieurs cas de grosses pierres, le col vésical et la prostate qui l'entoure en grande partie sont aplatis d'arrière en avant; le col se dilate par suite de la pression exercée par la pierre; la prostate subit une sorte d'atrophie; la pierre s'engage dans le col, et son débridement par côté suffit pour l'extraire.

Ce n'est pas pour les cas de cette espèce qu'a été institué le nouveau procédé qui consiste à perforer et à faire éclater dans la vessie les pierres trop volumineuses pour sortir par la plaie et trop dures pour céder à la pression des tenettes.

(1) Voyez Parallèle, p. 146.

Ce fut à la suite d'une de ces opérations laborieuses, qui eut de funestes conséquences, que je repris mes anciens essais, en suivant toujours la voie tracée par nos maîtres. Mais je ne tardai pas à changer de système.

On s'était borné jusqu'alors à imaginer des instruments spéciaux, autres que les tenettes. Introduits dans la vessie, ils devaient servir uniquement à morceler les calculs. Pour terminer l'opération, on employait d'autres instruments.

Le problème consistait à simplifier la manoeuvre en se servant du même instrument, c'est-à-dire de la tenette, pour remplir toutes les indications.

Sans entrer ici dans les détails des expériences préliminaires, je donnerai une idée sommaire du nouveau procédé.

Mon premier appareil, le casse-pierre, est de 1827. J'en ai reproduit la figure à côté de celle de l'instrument dont je me sers aujourd'hui (1). Ces deux instruments diffèrent peu en apparence, et cependant le premier est resté inapplicable, tandis que l'autre est appliqué avec succès.

Dans les deux, les moyens d'attaquer et morceler la pierre sont identiques, à savoir : le foret simple, le foret à éclatement, le cuivrot, le support coudé et ses accessoires. La différence essentielle est dans la manière de saisir la pierre dans la vessie et de la fixer. C'est sur ce point que s'est portée toute mon attention.

Au trilabe dont je me servais dans mes premiers essais, j'ai substitué la tenette ordinaire, modifiée selon la nécessité. C'est de cette substitution que date la série de nouvelles recherches dont je présente les résultats à l'Académie.

Par la plaie du périnée, on introduit dans la vessie la nouvelle tenette, avec laquelle la pierre est saisie et fixée.

Si l'extraction n'est pas possible, on adapte aux branches de la tenette, pour opérer le morcellement de la pierre, une griffe conductrice qui permet de rendre immobiles les branches de l'appareil et de porter dans la vessie les forets simple et conique sans léser les organes.

(1) Voyez, plus loin, pl. I et II.

Ces instruments accessoires constituent un appareil distinct, qu'on tient en réserve dans le premier temps de l'opération, et qui, adapté à la tenette, en cas de besoin, est retiré avec facilité, dès qu'il a servi. Cet appareil s'ajuste aux branches de la tenette, sans rien changer à la position de celle-ci, sans déplacer la pierre, et sans inconvénient pour l'opéré. Sous son action, la pierre perforée se désagrège, si elle est friable, et elle éclate, si sa consistance est grande.

Cela fait, l'appareil est enlevé, les branches de la tenette restent libres; et l'opérateur écrase, par la pression, les fragments placés entre les mors. Il les retire sans changer d'ins

trument.

Tel est, en substance, le nouveau procédé pour morceler la pierre dans la cystotomie.

Dans les applications de ce procédé, ainsi que dans mes expériences préliminaires, la pratique de la lithotritie m'a été d'un puissant secours.

C'est qu'il y a des rapports frappants entre les deux opérations, savoir le broiement des calculs par la lithotritie et le morcellement des grosses pierres dans la cystotomie. Dans la première, on brise le calcul entre la tête du perforateur et les crochets du trilabe; s'il résiste, on fait des perforations, pour vaincre la résistance.

Dans la seconde, on essaye d'abord d'écraser la pierre entre les mors de la tenette par la compression; et si elle résiste, on la percute, on la perfore, on la fait éclater, et avec la tenette on écrase les fragments.

Instruments pour la nouvelle opération.

Les figures ci-contre représentent très-exactement les nouveaux instruments. J'y joins quelques observations explicatives.

[ocr errors]

1° Tenette modifiée. En modifiant la tenette, j'en ai respecté le principe; j'ai seulement visé à remplir les principales indications.

Dans la pratique ordinaire, une grosse pierre échappe souvent pendant l'extraction. Pour prévenir cet accident, il

[merged small][merged small][ocr errors]
« PreviousContinue »