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9 septembre 1848, qui réglemente la durée de la journée de travail des adultes et dont l'exécution avait été confiée aux soins des Commissaires de police, resta pendant quarante ans sans effet et ne commença à ètre appliquée que lorsque la loi de 1883 eut chargé les Inspecteurs du travail de la faire observer.

L'expérience a donc démontré d'une façon évidente la nécessité de remettre à des agents spéciaux la charge de veiller à l'observation et à l'exécution des lois sur le travail.

L'inspection du travail, telle qu'elle existe actuellement en France, constitue un service fortement centralisé entre les mains de l'Etat afin de lui assurer une direction uniforme -- et absolument spécialisé. Il est confié à des agents salariés par l'Etat dont l'application des lois sur le travail doit être l'unique fonction et la préoccupation constante.

Il nous a paru intéressant d'essayer de retracer, dans cette étude, l'histoire de cette organisation de l'Inspection du Travail en France, et de montrer les transformations successives qui y ont été apportées par le législateur depuis sa création.

Nous diviserons notre étude en trois périodes qui correspondent d'une façon très exacte à l'extension même de la réglementation du travail: la première période commence avec la mise en vigueur de la loi du 22 mars 1841 - qui, pour la première fois en France, réglementait le travail des enfants et se

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termine avec le vote de la loi du 19 mai 1874, relative au même objet: la seconde période s'étend du vote de cette loi de 1874 jusqu'au vote de la loi du 2 novembre 1892 sur le travail des enfants et des femmes; et, enfin, la troisième période commence avec la mise vigueur de cette dernière loi et se poursuit encore actuellement.

PREMIÈRE PÉRIODE

De 1841 à 1874

CHAPITRE PREMIER

La loi du 22 mars 1841 est le premier texte législatif qui ait réglementé en France le travail des enfants employés dans les usines et les manufactures.

Dès 1828, la Société Industrielle de Mulhouse avait commencé sur cet objet une active campagne, et c'est sur son initiative que le Parlement fut amené, pour la première fois, à s'occuper de la réglementation du travail des enfants employés dans les établissements industriels.

A la suite d'une pétition adressée dans ce sens aux deux Chambres, aux Ministres de l'Intérieur, de l'Instruction publique et du Commerce, ce dernier commença, en 1837, une vaste enquête auprès des Chambres de commerce, des Conseils de prud'hommes, des Conseils généraux de l'Agriculture et du Commerce. En présence des résultats fournis par celle enquète, qui se poursuivit pendant plusieurs années,

le Gouvernement crut devoir présenter à la Chambre des Pairs, le 11 janvier 1840, un projet qui, après de très vifs débats au sein de cette Chambre et de la Chambre des Députés, est devenu la loi du 22 mars

1841.

En présentant ce projet à la Chambre des Pairs, le Ministre du Commerce, abordant la question de l'inspection, s'exprimait en ces termes : « Le projet soumet, en principe, le travail des enfants à une inspection tutélaire. Mais cette inspection sera proportionnée aux convenances des lieux, comme elle s'adaptera à la nature des industries diverses.

«Des règlements généraux pourront être faits, mais en pleine connaissance de cause et lorsqu'on aura pu reconnaitre quelles dispositions peuvent être rendues uniformes. »

Le projet du Gouvernement, conçu en termes très vagues, établissait, par son article 6, des inspections locales chargées de surveiller l'exécution des règlements. Il fut amendé par la Chambre des Pairs et vint en discussion devant cette assemblée au mois de mars 1840. L'article 6 du projet amendé était ainsi conçu : « Les Préfets, les Sous-Préfets et les Maires sont spécialement chargés, sous la direction supérieure du Ministre de l'Agriculture et du Commerce, des mesures d'ordre, d'inspection et de protection prescrits par la présente loi. »

Puis, l'article 9 ajoutait : « Les Préfets, les Sous

Préfets, les Maires, les Procureurs du Roi et leurs Substituts, les Juges de paix et les Commissaires de police sont autorisés à visiter, pendant les heures de travail, les manufactures mentionnées à l'article 1er, aussi souvent qu'ils le jugeront nécessaire pour s'assurer s'il existe quelque contravention aux mesures prescrites en vertu de la présente loi. A cet effet, ils se feront représenter au besoin les registres, les règlements de l'établissement, les livrets des enfants et les enfants eux-mêmes.

« Ces magistrats pourront se faire accompagner par un médecin pour juger de la salubrité des établissements et de l'état sanitaire des enfants. »

La discussion fut longue et vive sur cette importante question de savoir à qui l'on confierait le soin de faire respecter la réglementation nouvelle.

Personne ne contestait la nécessité d'organiser des inspecteurs pour surveiller et assurer l'exécution des mesures qu'on allait édicter, mais les opinions différaient quant au choix de ces inspecteurs : « Que faut-il, disait M. le comte Cholet, à la Chambre des Pairs, lors de la première discussion du projet de loi, que faut-il pour que l'exécution de la loi soit réelle ? Il faut qu'une surveillance active, sans être vexatoire, soit exercée sur les établissements soumis aux règle

ments.....

« L'article 9 du projet de votre Commission, ajoutait-il plus loin, confie ce soin à tant de fonction

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