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gation, le 2 mai de la même année, d'un arrêté royal édictant la Loi sur les mines, on commença corrélativement à préparer les éléments d'un Rapport au Roi sur les mines, usines minéralurgiques et machines à vapeur de la Belgique (1). En 1858, un arrêté royal, daté du 1er octobre, décréta l'organisation d'une École spéciale des mines, à Liége. C'était l'application de la loi du 27 septembre 1855, réglant le but distinct des deux Universités de Gand et de Liége. L'École spéciale des mines de Liége devint bientôt la brillante pépinière où nous aurons à trouver ultérieurement de glorieux noms dans l'historique des phases qui vont suivre de la lutte contre le grisou.

La bonne conduite à donner aux travaux est, dans les mines grisouteuses, un facteur non moins important que les mesures relatives à l'aérage et à l'éclairage. C'est ce que démontra M. De Vaux dans des articles du Journal de Liége, publiés dans les numéros des 29 juin et 10 juillet 1858, où ses vues sur ces trois importants problèmes furent développées et précédèrent la publication, en 1859, de mesures et d'instructions officielles, destinées à rendre moins dangereuse l'exploitation des mines à grisou.

Citons d'abord l'Arrêté du 14 mai 1859 de la Députation permanente du Conseil provincial de Liége relatif à l'aérage et à l'éclairage des houilleries et qui prescrivait, spécialement en vue des soins à donner à l'aérage, de nouvelles mesures de surveillance. Un arrêté royal du 11 mai 1840 vint donner une sanction définitive à ces mesures, dont un travail de M. l'Ingénieur en chef des mines De Vaux avait, conjointement avec les articles susmentionnés, démontré le bien-fondé. Dans cette étude, intitulée : Instruction pratique concernant l'aérage et l'éclairage des mines à grisou, approuvée par M. le Ministre des Travaux publics (pour le texte détaillé voir Chicora et Dupont, pp. 499-504), l'auteur s'est occupé d'une manière particulière de l'important problème de l'aérage et de la ventilation des mines grisouteuses.

Si l'attention de nos gouvernants fut, en 1840, attirée sur la nécessité de nouvelles réglementations, on peut l'attribuer aussi à d'importantes recherches, méthodiquement poursuivies depuis deux ans en France, au sujet de la grosse question de l'aérage, par M. Combes, ingénieur en chef des mines.

(1) Une reproduction, par extraits, très détaillée de ce document, se trouve inseree, pages 179-216, dans le tome I (1843) des ANNALES DES TRAVAUX PUBLICS de Belgique. Elle y figure dans le chapitre, Mines, sous le titre : De l'Exploitation et du Traitement des substances minérales en Belgique. Premier article: Mines de Houille. Cette reproduction parait avoir été faite par les soins de M. Auguste Visschers.

La théorie de l'aérage était alors encore à faire et pouvait seule constituer la base rationnelle des progrès ultérieurs. Telle fut l'œuvre de M. Combes.

L'influence directe que les travaux du savant spécialiste

travaux

en partie réédités en Belgique ont eue sur ce qui s'est fait chez nous pendant les débuts de la troisième phase de notre revue historique, qui sera abordée tout à l'heure, ne permet pas de passer sous silence les importants mémoires de M. Combes. Il publia d'abord, en 1837, dans les ANNALES DES MINES (5° sér., t. XII, pp. 575-402), un Mémoire sur le mouvement de l'air dans les tuyaux de conduite, mémoire suivi immédiatement, dans le même tome de la revue (pp. 403-466), d'un Deuxième mémoire sur le mouvement de l'air dans les conduites, avec des applications à l'aérage des travaux de mines. La théorie exposée dans le premier mémoire recevait ici son application rationnelle à l'aérage des galeries de mines, et l'auteur y introduisait l'action de la gravité. Il est à noter que M. Combes s'y occupe assez longuement de l'influence des dépressions barométriques dans leurs rapports avec la variation des dégagements grisouteux.

En 1859, le tome XV des ANNALES DES MINES contient (pp. 91-508) l'important article du même auteur, intitulé: Aérage des mines, qui a été réimprimé ensuite à Paris, puis à Bruxelles en 1840 par la Société Hauman et Cie (Société belge de librairie), sous le titre : Traité complet de l'aérage des Mines.

En 1839 également, mais dans le tome XVI de la 3 série des ANNALES DES MINES parurent (pp. 177-199) les Notes additionnelles au Mémoire sur l'aérage des mines. Voici les titres des six intéressantes notices fournies sous cette rubrique par M. Combes: I. « Sur les gaz irrespirables rencontrés dans les excavations abondonnées >> (pp. 177-179); II. « Sur un dégagement d'hydrogène protocarboné sous une forte pression » (pp. 179-181); III. « Sur l'effet des foyers d'aérage et leur consommation en combustible» (pp. 181-187); IV. « Sur l'effet de quelques machines aspirantes à pistons » (pp. 187191); V. « Sur l'établissement du ventilateur à force centrifuge (pp. 191-195); VI. « Sur les précautions à prendre dans le cas où une explosion de gaz met le feu à la houille » (pp. 194-196).

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Il convient d'autant plus de signaler ici ces notices que la troisième et la quatrième d'entre elles s'appliquent spécialement à des houillères ou à des dispositifs étudiés par l'auteur dans le bassin belge. Dans la seconde de ces notes, nous voyons apparaître la notion nette des fortes pressions sous lesquelles se présente parfois le grisou. L'auteur concluait

des observations, rapportées par lui à ce sujet, que l'inondation de la mine est un moyen absolument insuffisant, dans certains cas, pour arrêter le dégagement du gaz, qui passe aisément, en bouillonnant, sous l'effet de fortes pressions, au travers de puissantes masses d'eau (10 mètres dans le cas rapporté par M. Combes).

Le tome XVI des ANNALES DES MINES renferme enfin (pp. 251-253) un Erratum et Note additionnelle au Mémoire sur l'aérage des mines, dans lequel M. Combes rectifie certaines des formules de son mémoire, et nous ne quitterons pas ce volume sans y signaler l'article de M. Gruner, ingénieur des mines, intitulé: Rapport sur les expériences faites à Saint-Etienne au moyen de la lampe de M. Du Mesnil (pp. 511-518, pl. VIII).

Comme il s'agit ici d'une lampe inventée par un Belge, M. le baron Du Mesnil, nous indiquerons sommairement les conclusions du rapporteur, qui, d'après le manuscrit de l'auteur, fournit la description de cette lampe de sûreté à cylindre de verre et expose les premières expériences qu'il a faites à l'aide de ce dispositif, expériences qui ont amené l'inventeur à modifier son appareil. La lampe Du Mesnil éclairait mieux mais était plus haute et plus lourde que la lampe de Davy. Considérée comme lampe fixe, elle offrait plus de sécurité que celle-ci, mais au transport, sa hauteur, son poids et certains inconvénients amenés par son renversement accidentel donnaient lieu à des critiques exposées par M. Gruner, qui conclut que l'expérimentation devra être reprise et prolongée lorsque le dispositif Du Mesnil aura encore subi certaines améliorations. Parmi ses particularités, la lampe Du Mesnil devenait chantante et faisait entendre un son de cornemuse lorsque la proportion d'hydrogène mélangé à l'air devenait abondante l'inventeur disait-il que sa « lampe crie dans le danger »>.

aussi

Nous verrons plus loin, en relatant ce qui s'est passé en 1839-1840 à l'Académie des sciences de Bruxelles, ce qui a décidé M. Combes à publier, en 1840 (ANNALES DES MINES, 5 sér., t. XVIII, no 6 de novembredécembre 1840, pp. 545-666), son Supplément au Traité de l'aérage des Mines, dans lequel il répond à diverses objections que lui avaient faites plusieurs des spécialistes belges ayant pris part au concours académique dont il est question plus loin.

Les matières étudiées dans l'intéressant Supplément au Traité de l'aérage des Mines sont groupées dans six chapitres, traitant successivement de la composition des gaz inflammables qui se développent dans les mines, de la propriété de diffusion des gaz, de l'influence des variations de la pression de l'air sur l'abondance des gaz dégagés, de

la formule donnant la vitesse et le volume de l'eau qui circule dans la mine, des moyens de déterminer les courants d'air ventilateurs dans les mines, et enfin des lampes de sûreté, au sujet desquelles l'auteur avoue ses préférences pour la lampe Du Mesnil, qu'il trouve supérieure à la lampe Mueseler.

Tout cet ensemble, répondant directement à de multiples opinions, objections et considérations émises dans les mémoires du Concours académique belge de 1859 et exposant les résultats des travaux de la Commission liégeoise des lampes de sûreté, constitue un travail appartenant au premier chef à notre Aperçu historique belge, bien que cet exposé de M. Combes ait paru dans la revue technique française des ANNALES DES MINES.

Avec la fondation à Mons, le 13 mars 1835, de la SOCIÉTÉ DES SCIENces, des arts et DES LETTRES DU HAINAUT, s'était ouverte une série de concours et de publications locales, ou plutôt régionales, qui, peu d'années après cette fondation, devaient donner un nouvel essor à l'étude du grisou et des questions qui s'y rattachent.

De 1833 à 1840, cette Société ne publia guère qu'un petit nombre (huit) d'opuscules peu importants; mais avec l'année 1840 commença la publication de la première série de Mémoires et Publications de la Société hennuyère. Nous y reviendrons plus loin au cours de l'exposé d'une phase historique nouvelle qui va nous montrer que les pouvoirs publics n'étaient pas seuls à s'émouvoir des dangers incessants, et toujours grandissants, que le grisou faisait courir à nos populations ouvrières et des préjudices qu'il causait aux propriétaires et exploitants de nos mines.

Il en fut de même à Liége et il en fut partout de même dans le pays, réveillé du long sommeil où l'avait plongé la domination étrangère, rebelle à l'initiative de nos nationaux.

Quant à l'École provinciale de Commerce, d'Industrie et des Mines du Hainaut, décrétée en 1836 par le Conseil provincial hennuyer, elle fut fondée l'année suivante, et nous aurons longuement à parler, plus tard, de la remarquable série de publications techniques à laquelle donnèrent naissance (à partir de 1853) les anciens élèves ingénieurs et professeurs de ladite école.

Mais ce n'est pas seulement dans le bassin houiller de Mons que d'important rouages de progrès techniques et scientifiques commencèrent à fonctionner peu après l'établissement de la nationalité belge libre et indépendante.

Faut-il rappeler l'épanouissement rapide du commerce et de l'industrie belges, qui datent de la glorieuse Révolution brabançonne et des débuts de l'indépendance de la Belgique? La création successive de puissantes sociétés financières, de banques solides et entreprenantes et de multiples grandes industries donnèrent à l'extraction du charbon et à l'exploitation des mines un essor que ne parvinrent guère à ralentir les crises temporaires de 1858 et 1848. Puis vinrent, pour amener la rapide et lointaine diffusion de nos richesses minières, la création des chemins de fer, en 1834, sous le ministère Rogier, la multiplication des voies navigables, bienfaits qui, plus tard encore, sous le ministère Frère-Orban, devaient être suivis de l'abolition des octrois. Cet ensemble de facteurs de prospérité de l'industrie minière amena la multiplicité et l'approfondissement des fosses et des chantiers où l'homme allait se trouver en lutte plus ardente que jamais avec le terrible grisou. La science du savant et la technique du praticien, plus encore que l'action du Gouvernement et des pouvoirs publics, devaient arriver à la rescousse et redoubler d'efforts. Il en fut heureusement ainsi, et c'est ce que va nous montrer le chapitre suivant.

TROISIÈME PHASE.

ROLE ACTIF DES SOCIÉTÉS SAVANTES.

INTERVENTION DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES ET LE « CONCOURS >>> DE 1840. TRAVAUX ET RECHERCHES SUR LE GRISOU DANS LES « ANNALES DES TRAVAUX PUBLICS », DANS LA REVUE UNIVERSELLE DES MINES » ET DANS LES « PUBLICATIONS DES INGÉNIeurs de l'École des Mines du HAINAUT ». RECHERCHES SPÉCIALES DE MM. V. ARNOULD, R. MALHERBE ET D'AUTRES, sur le Grisou, sur L'ORIGINE DE LA HOUILLE, etc. TRAVAUX DIVERS DE L'ADMINISTRATION ET DES INGÉNIEURS DES MINES, DE 1840 a 1866. ARRÊTÉS ROYAUX ET MINISTÉRIELS DE 1840 ▲ 1864.

En 1859, à la suite de graves accidents grisouteux survenus dans le bassin de Liége, l'Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Bruxelles (1) introduisit dans ses programmes de concours pour 1840 la question suivante : Rechercher et discuter les moyens de soustraire

(1) Devenue, à partir de 1845, l'Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique.

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