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Les principes qui régissaient la voirie rurale avant la loi du 20 août 1881, et les innovations que cette loi a apportées aux principes anciens, voilà le sujet de l'étude que nous avons entreprise.

TERMINOLOGIE

La dénomination des chemins que nous renfermons aujourd'hui sous la qualification de petite voirie, a beaucoup varié, et a donné lieu à maintes confusions. La langue française, moins riche en expressions que la langue latine, est obligée de distinguer les différentes espèces de voies qui sillonnent le territoire au moyen d'adjectifs ajoutés au mot chemin nous avons les expressions de chemins vicinaux, chemins communaux, chemins ruraux. Le sens de ces mots resta longtemps mal défini, chaque auteur donna un sens différent, de là bien des dissentiments en doctrine.

La loi du 21 mai 1836 vint accaparer le mot de chemins vicinaux pour une sorte de chemins spéciaux, définis par cette loi. Restaient les expressions de chemins communaux et de chemins ruraux. Les uns regardèrent ces mots comme synonymes, et ne firent entre eux aucune distinction; les autres (1), au contraire, voulurent voir deux catégories absolument distinctes. M. Petit, dans un article publié dans la Revue critique de jurisprudence, tome II, année 1857, distingue absolument ces deux sortes de chemins; il rappro

(1) Proudhon, Traité du dom. publ.

che les chemins ruraux des chemins vicinaux, leur seule différence vient de leur degré d'importance; au contraire, pour lui, les chemins communaux sont ceux qui servent aux habitants dans l'intérieur de la commune. Nous n'adopterons pas cette division.

C'est donc à un troisième système, bien plus généralement admis, que nous nous rangerons. L'expression de chemins communaux est un nom générique, embrassant tous les chemins appartenant aux communes. Il y a deux sortes de chemins communaux : les chemins communaux publics et les chemins communaux privés; les premiers comprennent les chemins vicinaux et les chemins ruraux, les seconds sont les chemins d'exploitation de la commune et faisant partie de son domaine privé.

La loi du 20 août 1881 a divisé les chemins ruraux en deux classes: les chemins ruraux reconnus et les chemins ruraux non reconnus.

Les chemins ruraux ou publics communaux font partie du domaine public de la commune. Tout chemin communal n'est donc pas un chemin rural, mais tout chemin rural est un chemin communal.

La première loi du 20 août 1881, objet de cette étude, ne s'occupe que des chemins publics communaux ou chemins ruraux.

TITRE PREMIER

Classements successifs des chemins publics communaux (1791-1836-1839-1881).

Ce fut en 1881 que, pour la première fois, le législateur s'occupa d'une façon spéciale des chemins ruraux. Cette loi est venue leur créer un état civil, leur apporter une réglementation qui permettra de donner à ce réseau si important de petite voirie un développement en rapport avec les besoins de communication chaque jour plus impérieux. Est-ce à dire que les chemins ruraux étaient laissés à l'abandon avant cette loi? Des lois générales sur les chemins communaux leur étaient appliquées, l'administration s'était efforcée de combler les lacunes considérables de ces lois, enfin la jurisprudence tâchait d'éclairer de ses lumières leur situation souvent mal définie.

Pour bien comprendre le classement des chemins ruraux, établi par la loi de 1881 au moyen d'arrêtés de reconnaissance, il est nécessaire d'étudier dans un tableau comparatif les différents classements des chemins publics communaux, d'en distinguer les caractères différents; nous verrons ainsi comment les che

mins ruraux sont arrivés à former une classe spéciale, qui appelait alors à son secours des règles spéciales, objet de la loi du 20 août 1881.

Le point de départ est l'art. 8 du titre II de la loi des 16-24 août 1790, qui autorise les maires à prescrire les mesures nécessaires pour assurer la sûreté et la commodité du passage sur les voies publiques.

Vu le peu de ressources dont les municipalités avaient à disposer et d'autre part la grande quantité de ces voies, la sollicitude municipale ne pouvait s'étendre à tous les chemins compris sous la dénomination de voies publiques communales. Aussi en 1791 apparaît un premier classement, c'est-à-dire une reconnaissance de certains chemins; cette attribution est donnée aux préfets par la loi des 28 septembre6 octobre 1791 et par un arrêté du Directoire du 23 messidor an V. Les effets de cette reconnaissance sont les suivants : les chemins qui bénéficieront d'un arrêté de reconnaissance, sont spécialement mis à la charge des communes qui doivent les entretenir; cette reconnaissance établit un titre pour la commune; ils prennent la qualification de chemins vicinaux; les conseils de préfecture sont compétents pour statuer suivant l'art. 8 de la loi du 9 ventôse an XIII sur les usurpations commises sur le sol de ces chemins.

Ces effets sont résumés dans la loi du 24 juillet 1824.

Mais jusqu'à la loi du 31 mai 1836, cette reconnais

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