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chines de précision aux mains et à l'intelligence de l'homme. En fin de compte, c'est à la supériorité de cette intelligence que l'invention et la réglementation en sont dues; mais une fois inventées et régularisées, elles peuvent être appliquées par toutes les intelligences, même les plus vulgaires.

J'en conclus donc que les motifs allégués contre l'emploi des appareils pour produire l'anesthésie chloroformique ne reposent que sur des préjugés, des préventions, et ne supportent aucun examen sérieux.

L'Académie me permettra de lui présenter un appareil dans lequel les principes et les règles qui viennent d'être exposés ont été rigoureusement observés.

Dans cet appareil se trouvent réalisées les quatre principales conditions auxquelles peut être ramenée la chloroformisation régularisée :

1 Le dosage précis;

2o La dilution complète des vapeurs chloroformiques;

3° L'introduction d'une quantité suffisante d'air pour prévenir toute asphyxie, et l'évacuation successive de tout l'air expiré ;

4° La faculté de suspendre, de graduer, de renouveler la chloroformisation dans des limites précises et rigoureuses.

L'appareil est disposé pour recevoir, à la surface interne ou d'évaporation d'un disque d'éponge, en rapport suffisamment éloigné avec les voies respiratoires, la quantité voulue de chloroforme.

L'air, en traversant les pores de l'éponge, se charge des vapeurs très divisées du chloroforme, et la longueur du trajet à parcourir est telle, que les plus ténues seules de ces vapeurs arrivent au poumon.

Le tuyau de communication est d'un diamètre en rapport avec le diamètre de la trachée-artère; comme l'épaisseur et la densité des disques imprégnés de chloroforme que l'on doit traverser sont telles, qu'elles ne peuvent retarder ni amoindrir la quantité d'air nécessaire à la respiration libre et complète; enfin, il existe, entre les surfaces d'évaporation et le tuyau conducteur, un opercule ouvrant et fermant à vo-`

lonté, qui permet d'intercepter complétement ou simplement de la modifier, l'aspiration des vapeurs de chloroforme ou de l'air pur, comme aussi d'en ajouter de nouvelles doses parfaitement déterminées le tout instantanément et sans déplacement aucun de l'appareil.

Telles sont les observations que j'avais à soumettre à l'Académie à l'occasion de la communication de M. Devergie. Ces observations peuvent se résumer en trois points principaux :

1° Il ne faut jamais perdre de vue que le chloroforme est ou un poison ou un agent anesthésique;

2° Que l'une ou l'autre de ces deux propriétés résultera surtout de la manière d'employer l'agent;

3° Qu'il est des variations individuelles dont il faut tenir compte, mais qu'il est généralement possible de les ramener à des conditions plus ou moins précises, ou que l'observation ultérieure rendra de plus en plus rares et exceptionnelles.

M. J. CLOQUET. Le travail de M. Devergie porte principalement sur deux points: doser la quantité de chloroforme, et éviter l'asphyxie. Sur le premier point je ferai remarquer combien est variable à cet égard l'aptitude des individus. I! est aussi difficile d'évaluer d'avance la quantité de chloroforme nécessaire pour produire l'anesthésie, que d'évaluer la quantité d'alcool qui sera nécessaire pour produire l'ivresse. Il est tels sujets qui inhalent une grande quantité de chloroforme sans pouvoir dormir, tandis que tels autres dorment après quelques inspirations.

On a imaginé beaucoup d'appareils. J'en ai fait un moimême, mais que j'avais imaginé d'abord pour un autre but. C'est un appareil que j'avais destiné aux ouvriers qui travaillent au milieu d'une atmosphère pulvérulente ou méphitique, qu'ils ne pourraient respirer longtemps sans danger pour leur santé. C'est une sorte de masque s'appliquant sur le nez et la bouche, auquel sont adaptés deux tuyaux, l'un pour l'inspiration et qui devait communiquer avec l'atmo

sphère extérieure, l'autre pour l'expiration. Avec quelques légères modifications, cet appareil pouvait être très facilement approprié à l'administration du chloroforme. Je l'ai essayé. Eh bien ! je me suis convaincu ; c'est qu'il est mauvais, bien qu'il aille mieux que tous les autres. C'est assez dire que je ne suis pas partisan des appareils. Avec les appareils, les malades ont beaucoup plus de chances d'être asphyxiés que sans appareils. Et cela se conçoit. Il faut en effet avoir le soin de laisser pénétrer une grande quantité d'air avec le chloroforme. Avec des éponges creuses, une compresse conique garnie de charpie, on peut graduer la quantité de chloroforme nécessaire presque aussi bien, et assurer son mélange avec l'air bien mieux qu'avec les appareils les mieux confectionnés. Sans doute avec les appareils on sait plus exactement la quantité de chloroforme inhalée ; mais comme la quantité nécessaire est très variable à raison de l'extrême variabilité des effets, il en résulte qu'on n'a aucun avantage réel à doser exactement le chloroforme.

Quant à ce qui concerne le point de vue légal, la responsabilité du médecin, je ne puis non plus partager les principes de M. Devergie. Quelque respect que j'aie pour la justice, je ne peux admettre en ceci la compétence des juges; le médecin seul est juge, il ne relève à cet égard que de sa conscience. Je m'inscris donc formellement contre la prescription des appareils comme moyen de garantir la responsabilité médicale. Je repousse d'autant plus cette prétendue garantie, qu'avec les appareils on a deux causes d'asphyxie au lieu d'une. Avec l'éponge, au contraire, qui permet l'accès facile d'une large colonne d'air, on a toutes les plus grandes chances possibles d'éviter l'asphyxie.

En résumé, voici mes conclusions :

Renoncer à toute espèce d'appareils qui compromettent la vie des malades, au lieu de la garantir, et par conséquent aussi la responsabilité des médecins;

Remercier M. Devergie pour avoir soulevé cette importante question.

OUVRAGES OFFERTS A L'ACADÉMIE.

1. Journal de médecine et de chirurgie pratiques. Juin.'

2. Bulletin général de thérapeutique, 15 juin.

3. Revue de thérapeutique médico-chirurgicale, 15 juin. 4. Journal des connaissances médicales et pharmaceutiques, n. 25. 5. Gazette hebdomadaire de médecine et de chirurgie, t. IV, D. 24. 6. Gazette médicale d'Orient, n. 3.

7. La France médicale et pharmaceutique, n. 64.

8. Gazette médicale de Paris, n. 24.

9. Le Moniteur des hôpitaux, n. 70 à 72.

10. Gazette des hôpitaux, n. 68 à 70.

11. L'Union médicale, n. 70 à 72. 12. L'Abeille médicale, n. 17.

13. Esquisse géographique des invasions du choléra en Europe, etc., par M. le docteur Marc d'Espine.

14. Nouvelle circulaire du conseil du canton de Genève, adressée à MM. les médecins praticiens et vérificateurs des décès, en vue de rendre plus exacte et plus uniforme l'enquête sur les causes immédiates de la

mort.

15. Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, t. XLIV, n. 23.

SÉANCE DU 23 JUIN 1857.

PRÉSIDENCE DE M. BUSSY.

CORRESPONDANCE OFFICIELLE.

I. M. le ministre de l'agriculture, du commerce et des travaux publics invite l'Académie à vouloir bien hater le rapport qu'elle doit faire sur le remède présenté par M. PASSEMENT MOREL, de Bordeaux. (Commission des remèdes secrets et nouveaux.)

II. Le même ministre transmet les travaux des vaccinations pratiquées en 1856 dans les départements de l'Aisne, de l'Allier, des Hautes-Pyrénées et du Var. (Commission de vaccine.)

CORRESPONDANCE MANUSCRITE.

I. M. CHAUVEAU adresse à l'Académie une nouvelle note en réponse à celle lue par M. Bérard sur la non-existence du sucre fermentescible dans le sang chez les animaux à jeun. (Commissaires: MM. Bouley, Poggiale et Longet.)

II. M. BOINET, au sujet de la discussion sur les anesthésiques, envoie à l'Académie la relation d'un fait arrivé dans sa pratique.

III. M. BERCHON, chirurgien-major de l'Algésiras, soumet une note explicative sur le procédé suivi dans les hôpitaux de la marine pour l'inhalation des agents anesthésiques.

IV. M. WANNER Soumet à l'Académie le résultat des expériences auxquelles il s'est livré sur le sang de cochons d'Inde asphyxiés, les uns par l'inhalation du gaz acide carbonique,

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