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acte fût valable, il devait être passé en présence de deux témoins, signé par les contractants, les témoins et le notaire.

Les parties contractantes pouvaient signer l'acte, en y apposant une croix; mais les notaires et les témoins ne le pouvaient pas, sous peine de nullité.

Les témoins devaient être, pour ne point entraîner la nullité de l'acte auquel ils auraient assisté, âgés de vingttrois ans accomplis et bons catholiques.

Le fisc s'était emparé de ces places et en avait fait une branche de finances. Un notaire avait-il rendu le dernier soupir, on mettait en quelque sorte sa place à l'encan, et on la vendait au plus offrant. Telle était la déplorable position où par leur cupidité, les Espagnols, et ensuite les Autrichiens, avaient mis l'institution du notariat.

L'électeur de Bavière, ayant, en 1704, besoin d'argent, supprima par un édit tous les notaires et en créa des nouveaux, à charge de finances. Il institua en titre de propriété, avec défenses de tous hommes de fiefs, aux bourgmestres et échevins des municipalités, de recevoir à l'avenir des contrats, nonobstant les dispositions des coutumes, qui le leur permettaient.

Cet édit, aussi injuste qu'inconstitutionnel, fut rapporté le 28 septembre 1706.

Un autre édit, du 10 décembre 1728, établit le tabellionage, qui n'a pu se maintenir qu'en quelques-unes de nos provinces.

Le

gouvernement ne put même jamais le faire exécuter en Flandre; et les notaires, ainsi que les cours féodales, les magistrats des villes et les gens de loi des campagnes, furent réintégrés dans leurs fonctions de recevoir et de garder tous les actes, conformément aux coutumes et aux dénombrements des seigneuries.

Quelques seigneurs justiciers de villages nommaient aussi des notaires; mais ceux-ci ne pouvaient exercer que

dans l'étendue seulement de la justice qui les avait établis. Il n'existait aucune communauté entre eux, et ils n'étaient soumis qu'aux seigneurs qui les avaient nommés et à leurs tribunaux particuliers.

Les notaires apostoliques avaient été principalement institués pour la prise de possession des bénéfices et des . autres actes ecclésiastiques. Ces charges étaient exercées par des hommes qui ne faisaient aucune profession du notariat ordinaire; cependant ils en usurpaient souvent les fonctions, ce qui donnait lieu à de fréquentes contestations entre eux et les notaires. Ils n'étaient soumis à aucune discipline et ne connaissaient point d'autorité supérieure pour leur régime; mais ils furent obligés, sous Joseph II (1785), de soumettre leur nomination au placet royal.

En cet état, est intervenue la loi du 29 septembre et 6 octobre 1791, qui a supprimé les notaires royaux et les autres, ainsi que la vénalité et l'hérédité des offices. Cette loi, rendue exécutoire en Belgique par la réunion de celle-ci à la France, est la première qui ait formé de toutes les classes de notaires un corps, sous la dénomination de notaires publics; mais elle était encore imparfaite et ne reçut son entière exécution que par la promulgation de la loi du 25 ventôse an XI, qui régit l'institution actuelle du notariat.

HILAIRE DU TRIEU.

Variétés historiques

SUR

LA DOMINATION FRANÇAISE EN BELGIQUE.

1792-1798.

Le trop fameux baron prussien Clootz qui, dans la révolution française, changea son nom de baptême contre celui du philosophe scythe Anacharsis, et s'intitula modestement l'Oruteur du genre humain, envoya, en 1792, à Dumourier, conquérant de la Belgique, l'adresse suivante :

A Dumourier, vainqueur des Prussiens, des Hessois, des Autrichiens et autres rebelles.

Général du genre humain !

L'irlandais Ward et le prussien Gerresheim sont animés d'un zèle révolutionnaire. Leur bravoure égale la vôtre, et leurs talents dirigés par votre génie, seront funestes à la cause des rois. Amant de la victoire, vous allez engendrer les départements de l'Escaut, de la Lys, de la Meuse inférieure, de la Moselle inférieure, de l'Issel, des Bouches-duRhin, etc. C'est ce que vous souhaite l'orateur du genre humain.

Signé, ANACHARSIS CLOOTZ.

Le pauvre orateur du genre humain fut proscrit en 1794, par la faction Robespierrre, comme appartenant à celle

des Hébertistes, ultra-révolutionnaires et athées. Il périt sur l'échafaud le 23 mars 1794. En recevant son arrêt de mort, Anacharsis Clootz interjeta appel au tribunal du genre humain (1).

(1) J. B. Clootz, baron prussien, connu sous le nom d'Anacharsis Clootz, naquit à Clèves en 1755 et devint possesseur d'une fortune considérable, qu'il dissipa en peu de temps par son inconduite. Il était neveu du célèbre De Pauw, chanoine de Xanten et auteur des Considérations philosophiques sur les Egyptiens, sur les Grecs et sur les Américains. Un amour fanatique de la liberté et cette métaphysique subtile et nébuleuse qui plait tant aux Allemands, ébranlèrent fortement son cerveau. Longtemps avant la révolution française, dont il devint un des principaux coryphées, il avait donné de nombreux signes de folie. Le 19 juin 1790, Clootz se présenta à la barre de l'Assemblee nationale, suivi de plusieurs crocheteurs ramassés dans les ruisseaux de Paris et portant le costume de différents peuples des quatre parties du globe, qu'il eut l'impudence d'annoncer comme députés de toutes les nations, et il prit la qualité d'orateur du genre humain. Cette misérable farce, digne du Mardi-gras et que son auteur qualifia d'ambassade du genre humain, fut honorablement accueillie par l'assemblée et obtint les honneurs de la séance. Le 22 janvier 1792, Clootz adressa à l'assemblée législative une lettre qui commençait ainsi : « L'orateur du genre humain aux législateurs du genre humain, salut! » Le 12 août, notre maître-fou vint féliciter l'assemblée sur la journée du 10, dans laquelle le faible et bon Louis XVI avait été expulsé de son palais par une horde de bandits, nomma le roi de Prusse le Sardanaple du Nord et vomit les plus dégoûtantes injures contre l'impératrice de Russie et l'infortunée Marie-Antoinette. Le 27 août, il revint supplier l'assemblée de mettre à prix la tête du monarque prussien, du duc de Brunswick, et célébra la bravoure de Brutus Anckarström, assassin de Gustave III, roi de Suède. Il prononça à ce sujet un discours où il dit : « Charles Ier eut un successeur; Louis XVI n'en aura pas. Vous savez apprécier les têtes des philosophes, il vous reste de mettre à prix celles des tyrans; mon cœur est français, mon ame est sans-culotte. » Il se déclara en même temps l'ennemi personnel de JésusChrist. Anacharsis Clootz fut élu député à la Convention, où il vota la mort du roi, au nom du genre humain, et il ajouta : Je condamne pareillement à mort l'infâme Frédéric-Guillaume (le roi de Prusse). Dans un ouvrage publié en 1792, Clootz pose en principe « que le peuple est le souverain du monde; que, de plus, il est Dieu; que la France est le berceau et le point de ralliement du peuple-Dieu; que les sots seuls croient à un Être suprême, etc., etc. » Clootz, devenu suspect à Robes

Le Conseil exécutif provisoire de la répubique française prit, le 6 novembre 1792, l'arrêté révolutionnaire suivant, qui anéantissait l'article du traité de Westphalie par lequel la république des Provinces-Unies s'était assuré le monopole de la navigation sur l'Escaut et la Meuse

« Le Conseil exécutif, délibérant sur la conduite des armées françaises dans le pays qu'elles occupent, spécialement dans la Belgique, un de ses membres a observé :

» 1° Que les gênes ou les entraves, que jusqu'à présent la navigation et le commerce ont souffertes tant sur l'Escaut que sur la Meuse, sont directement contraires aux principes fondamentaux du droit naturel, que tous les Français ont juré de maintenir.

» 2o Que le cours des fleuves est la propriété commune et inaliénable des habitants de toutes les contrées, arrosées par leurs eaux; qu'une nation ne saurait, sans injustice, prétendre au droit d'occuper exclusivement le canal d'une rivière, et d'empêcher que les peuples voisins qui bordent les rivages supérieurs ne jouissent du même avantage; qu'un tel droit est un reste des servitudes féodales, ou du moins un monopole odieux qui n'a pu être établi que par la force, ni consenti que par l'impuissance; qu'il est consé

pierre, et traduit devant le tribunal révolutionnaire comme faisant partie de la faction des athées, fut condamné à mort le 23 mars 1794. En allant au supplice, il apostropha Hébert pour l'empêcher de prendre des sentiments religieux dans ses derniers moments. Il demanda à être exécuté le dernier, « afin, dit-il, d'avoir le temps d'établir certains principes pendant que l'on ferait tomber les têtes de ses camarades. » La mort d'Anacharsis Clootz est un des crimes de la révolution française. L'humanité réclamait que l'orateur du genre humain fût enchaîné comme fou furieux et finit sa carrière dans un des cabanons de Bicêtre.

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