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lateur, dit M. Brogniart (1), qu'on obtiendra les plus belles couleurs et qu'on parviendra à les mieux fixer. Cette réunion de personnes concourant au même but, ne s'est pas formée jusqu'ici, malgré les circonstances favorables où la Belgique s'est trouvée depuis 1815; c'est cependant sur ce sol où les colonnes milliaires sont les tours des plus belles églises, où l'amour des pompes du culte est universel, où le sentiment religieux est un des caractères principaux de la nation, qu'une telle réunion doit se former, dès qu'aura été donnée une impulsion que nous voudrions contribuer à faire naître.

En un temps si fécond en prodiges dûs au développement de l'esprit d'association, il nous semble que c'est encore de lui qu'on doit attendre l'initiative à prendre. Le siége des opérations à fonder devrait être Gand ou Bruxelles, à cause des universités, près desquelles il serait plus facile de trouver les chimistes dont on a besoin. Les frais se borneraient à l'acquisition d'un petit local, pour l'établissement d'un feu de moufle, le laboratoire du vitrier et le magasin de verres; le traitement d'un chimiste et d'un ouvrier. On formerait un dépôt de verres teints des fabriques de Cherty ou d'Allemagne ; peut-être que pour quelques qualités, ils seraient livrés au prix coûtant, ainsi que les couleurs. Le prix de cuisson de chaque pièce, calculé par pouces carrés, serait fixé de manière à prévenir les abus que pourrait faire naître un recours trop facile aux avantages qu'offrirait cette société. Dès que la fabrication aurait pris quelqu'extension, nous ne doutons pas que les frais de l'établissement, et les intérêts du capital à avancer par actions, ne fussent bientôt couverts. Nous espérons ce résultat, parce que le nombre d'églises auxquelles manquent des vitraux peints est considérable,

(1) Mémoire lu à l'Académie le 7 juin 1828.

et que le prix n'en doit pas être très-élevé. Une figure de quatre pieds de proportion, avec son encadrement en fer, coûtait à Sèvres, en 1836, environ 400 francs. Plus on acquerrera d'habitude, moins les prix seront élevés; on en était venu autrefois à des résultats qui peuvent étonner aujourd'hui : les vieilles croisées du Louvre, faites au temps de Charles V, roi de France, ne revenaient pas à plus de 11 à 12 francs de notre monnaie, vingt-deux sols d'alors, suivant Sauval.

Dans un pays aussi industriel, on s'affranchirait bientôt de l'obligation d'aller à l'étranger demander le verre coloré; on lui livrerait même le verre incolore propre à la peinture en verre, qu'on a tant de peine à se procurer maintenant : bientôt les artistes dont le talent n'a point atteint toute la perfection de l'art, ne seraient plus obligés d'aller chercher au-dehors, dans les ateliers de décor, une existence aisée; ils viendraient se grouper autour des maîtres de l'école, qui leur fourniraient des cartons. En offrant à tous la faculté de faire recuire leurs vitraux peints, on obtiendra l'avantage de ne pas devoir recourir nécessairement, pour se procurer ces vitraux, à des artistes dont le mérite est quelquefois peu approprié au genre de travail qu'on voudrait leur confier, et ainsi l'Ecole flamande ne peut manquer de redevenir la première dans cette peinture où elle a acquis jadis tant de renommée. A côté des ateliers d'une première société, pourquoi ne s'en formerait-il pas d'autres qui livreraient en concurrence, au commerce étranger, cette sorte de décor religieux, tout comme Lyon lui fournit les riches étoffes des ornements d'autels; les artistes étudiant dans nos académies seraient, pour ces établissements, des ouvriers tout trouvés, pour lesquels ce serait un encouragement à ne pas négliger l'étude des grandes compositions. Maintenant il suffit d'un homme auquel le patronage du clergé ne peut faillir dans un

semblable projet, qui veuille mettre ces idées à exécution, les compléter d'abord en y faisant entrer les détails qu'il nous était interdit d'aborder, dans l'ignorance où nous sommes des facilités locales à trouver dans une ville plutôt que dans une autre; le moment ne peut être mieux choisi: qui ne serait jaloux de restituer aujourd'hui à son pays l'une de ses gloires artistiques les plus brillantes? La réussite n'est-elle pas assurée, quand en même temps on s'adresse aux sentiments les plus intimes de la nation, et qu'on a déjà osé aborder l'idée d'achever la tour de la métropole archiepiscopale? (1)

Anvers, août 1838.

E******.

(1) Je n'avais pu me procurer, lorsque je m'occupais de cette notice, l'ouvrage de M. le baron de Reiffenberg sur la peinture sur verre dans les Pays-Bas. J'ai lu depuis ces curieuses recherches, auxquelles la plume de l'élégant commentateur de Barante a prêté tout le charme de son style, pour nous faire regretter davantage les belles verreries de nos églises emportées en pays étranger. C'est avec une complaisance amère qu'il se plait à énumérer une à une toutes ces pertes, que son goût éclairé lui a rendu plus sensibles, et qu'il déplore en homme aimant la gloire de son pays. A lui appartenait de lui restituer, dans l'invention de l'art de peindre sur verre, une part trop souvent réduite à la citation du verre de Jean de Bruges, et il l'a fait avec ce tact fin qui laisse arriver la vérité sans blesser les prétentions rivales, et doit nous faire espérer qu'il pourra quelque jour reprendre le fil de l'histoire de cette branche des arts d'imitation, qu'il croit rompu à jamais, et le rattacher aux siècles où venuc d'Orient, elle s'est naturalisée parmi nous avec le christianisme.

Recherches

LITTÉRAIRES ET BIBLIOGRAPHIQUES

SUR

QUELQUES ANCIENNES IMPRESSIONS DES PAYS-BAS.

Eu publiant, il y a très-peu de temps (1), la liste des ouvrages imprimés par notre célèbre Arend de Keyser, qui cut la gloire d'importer la typographie à Audenarde et à Gand, la perte d'une partie de notre manuscrit, nous a fait omettre deux opuscules fort rares, sortis des presses du même artiste : ce qui fait monter à dix le chiffre de ses impressions connues jusqu'ici. M. Du Puy de Montbrun, dans ses savantes Recherches (2), avait déjà indiqué exactement sept ouvrages publiés par Arend de Keyser: plus heureux que lui, nous avons eu presque toutes ces rarissimes éditions entre les mains, et nous avons cherché à les décrire avec tout le soin qu'il y eut mis lui-même, s'il se fut trouvé dans notre position. Voici ⚫ les intitulés de ces deux précieux opuscules, qui serviront à compléter la liste de toutes les impressions connues d'Arend de Keyser:

(1) Recherches historiques et bibliographiques sur la bibliothèque de l'Université et de la ville de Gand. Gand, Annoot-Braeckman, 1839; in-8° de 82 pag., avec une pl. gravée.

(2) Recherches hibliographiques sur quelques impressions Neêrlandaises du XVe et du XVIe siècles. Leide, Luchtmans, 1836; in-8° de 98 pag., avec des planches xylographiques.

Tractatus de periculis circa sacramentum eucharistie contingentibus. Petit in-4°, sans date, de 12 pages non chiffrées; sur le frontispice, une figure gravée en bois, représentant la Sainte Cène.

Après ce titre, on lit à la seconde page: Incipit tractatus de periculis que contingunt circa sacramentum eucharistie et de remediis eorumdem, ex dictis Sancti Thome de Aquino. Souscription: Explicit de suffragiis misse impressis Gandavi per Arnoldum Cesaris (circa 1483).

Voici l'autre impression:

Tractaet van aliantie ende eendragticheyt tusschen die drie staten van den hertoghdom van Brabant ende die van Middelborch, Lutsenborch, Vlaenderen, enz.: souscription: Ghedaen tot Ghent den eersten dach in mei 1488. Petit in-folio, de 6 feuillets, à longues lignes, au nombre de 38 la page pleine; sans nom d'imprimeur et sans date, mais très-probablement de 1488.

Pour montrer que le dernier mot n'est pas encore dit sur notre Arend de Keyser, nous nous empressons de relever une erreur dont nous sommes seuls coupables et qui n'appartient nullement à M. Fr. Vergauwen, bibliophile instruit, qui a bien voulu nous aider de ses investigations particulières. Le Liber domini Mancini de passione Domini, n'est pas sorti des presses d'Arend de Keyser, comme nous l'avons écrit (1), mais bien de celles de son fils Pierre: ainsi donc nous serious parvenus à découvrir, quinze impressions de ce typographe gantois, non compris le grand tableau avec les armoiries des nobles de Gand, pièce aussi précieuse qu'intéressante, qui fait partie du cabinet de M. l'architecte Goedtghebuer.

Nous appellerons en passant l'attention de tous ceux qui, comme nous, s'occupent d'études bibliographiques, sur

(1) Page 66 de nos Recherches déjà citécs.

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