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Renaissance, envisagées au triple point de vue des Arts, de la Vie militaire et religieuse, et des Mours, usages et costumes.

Nous nous bornerons à mentionner le premier de ces traités (les Arts), auquel nous consacrâmes ici, dans le temps, une notice détaillée.

Dans le second de ces volumes (La Vie militaire et religieuse), nous voyons se dérouler toute une série de chapitres, dont le seul énoncé dit assez l'intérêt: Féodalité, ses origines germaniques, sa législation, sa constitution politique, territoriale et sociale; Guerre, invasions barbares, armées et leurs changeantes organisations dans les divers siècles, armes et machines de siége, tactique offensive et défensive; Marine, vaisseaux longs (galères) et vaisseaux ronds (nefs), navires à éperon, à tourelle, etc., (car ici, comme en tant d'autres choses, rien n'est nouveau); Croisades, leurs émouvantes et romanesques péripéties, leur influence religieuse et sociale sur l'Occident; Chevalerie, son origine, ses caractères, ses lois, ses tournois, joutes, lices et duels; Ordres religieux, de Saint-Jean, du Temple, de Calatrava, de la Toison d'or, etc. : voilà pour la vie militaire. Et pour la vie religieuse: Les Papes, leur action réformatrice et civilisatrice sur la société antique et sur les Barbares; Conciles œcuméniques et régionaux; Clergé séculier, Ordres religieux, les sauveurs des lettres et des arts; Liturgie et cérémonies religieuses; Institutions charitables, enveloppant dès lors de leur divine sollicitude toutes les infortunes, travaillant infatigablement à consoler tous les maux, celui du lépreux à soigner comme celui de l'esclave à racheter; Pèlerinages, dont notre âge sceptique voit avec étonnement refleurir la pieuse pratique; Hérésies, Inquisition, Funérailles, sépultures et leur cérémonial...

On voit quel vaste champ ce volume offre à notre étude.

Plus piquant encore et plus neuf est le sujet traité dans le livre des Mœurs, usages et costumes. Ici, nous avons la physionomie intime des générations passées. Comment vivaient nos pères? Quelles étaient leurs institutions, leurs mœurs sociales, publiques et privées? Comment s'habillaient-ils et que mangeaient-ils ? Comment étaient aménagés et meublés le castel du seigneur, la maison du bourgeois citadin et la chaumière du vilain? Jeux, divertissements, chasses, cérémonial de fêtes et de deuil; régime social et

politique, transformation progressive de l'esclave en serf et du serf en paysan; régime judiciaire, si admirablement réformé par saint Louis, avec jugement de chaque classe par ses pairs et devant un jury (autre institution soi-disant moderne); corporations de métiers, commerce, industrie, impôts, finances et monnaies, etc. :autant de sujets pertinemment étudiés et exposés par l'érudit écrivain. Il n'est pas jusqu'aux Juifs, aux Bohémiens et aux mendiants, qui ne trouvent leur pittoresque croquis dans ce vaste tableau d'ensemble.

Est-il besoin d'ajouter que les deux volumes dont nous parlons sont non moins richement illustrés que les précédents? Vingt-neuf planches en couleur et 850 gravures sur bois, toutes fidèlement reproduites d'après des originaux de l'époque, offrent aux yeux un vivant commentaire du texte.

Ces quatre volumes réunis nous présentent, au multiple point de vue religieux, politique, social, artistique, scientifique et littéraire, le tableau complet d'une période historique de mille ans, du Ve siècle au XVIe. Période fondamentale de notre histoire, tour à tour sombre et radieuse, cruelle et héroïque, de luttes ardentes entremêlées de courtes trèves, et qui fut comme le creuset où vinrent se fondre et s'amalgamer ces trois éléments réfractaires en apparence, le Romain, le Barbare et le Chrétien fusion à laquelle présida l'Eglise, cette divine alchimiste, et d'où sont sortis les peuples modernes, aujourd'hui si ingratement oublieux de leur origine et si superbement émancipés.

Ce beau monument historique et artistique élevé en l'honneur du Moyen Age et de la Renaissance, par MM. Didot et Lacroix, pourrait se symboliser à la fois par une cathédrale gothique, un manoir féodal et un palais, Notre-Dame, Pierrefonds et Chambord, que l'érudit, l'artiste ou même le simple amateur peuvent, et ils ne s'en feront pas faute, ranger côte à côte, en figure, sinon en réalité, sur les étagères de leur bibliothèque.

LUCIEN DUBOIS.

CHRONIQUE

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SOMMAIRE. M. Alain de Kersabiec. La Bretagne et la Vendée à la réunion des délégués des Sociétés savantes.

Il y a quelques jours à peine, notre collaborateur, M. Edouard de Kersabiec, conduisait à sa dernière demeure, dans le cimetière de SaintÉtienne-de-Montluc, un frère, plus jeune que lui, et bien digne de tous nos hommages.

Né le 23 septembre 1842, Alain de Kersabiec entra à dix ans au collége Saint-François-Xavier des Jésuites de Vannes; il en sortit bachelier, à dix-sept ans. Sa mère y consentant, six mois après, il partit pour Rome, où son cœur et sa foi le sollicitaient d'aller défendre le Vicaire de JésusChrist attaqué par la Révolution. Il fut des Francs-Croisés de Cathelineau, des Zouaves pontificaux de La Moricière et de Becdelièvre. Combattant à Castelfidardo, il y fut blessé grièvement à la jambe et demeura prisonnier des Piémontais. Compagnon de Guérin, de sainte mémoire, il occupa, à Osimo, le lit d'hôpital que la dépouille mortelle de ce petit ange venait de quitter pour le ciel. Le Saint-Père daigna le nommer chevalier de son ordre de Pie IX.

Après un court séjour en France, Alain de Kersabiec retourna à Rome; il fut de tous les travaux de cette garnison laborieuse; il subit toutes les tristesses infligées au Saint-Siége par la politique d'alors; il assista à tous les combats: à Viterbe, à Valentano, à Mentana, et, depuis, à la Porta-Pia. Il vit les horreurs de l'entrée des Piémontais à Rome et eut sa part des outrages que les soldats de la Révolution infligèrent aux martyrs de la Justice et du Droit. De retour en France, il fit la campagne des Volontaires de l'Ouest, durant l'hiver de 1870 à 1871.

Alain de Kersabiec s'était marié à Rome, avec une jeune Canadienne, d'origine française, Mlle de Beaujeu, qui, toute dévouée aux nobles causes, avait trouvé en ce jeune zouave ce qu'avait rêvé son âme ardente pour le bien. Ils espéraient le bonheur ici-bas, et tout semblait leur sourire; mais

ces travaux multipliés, dans la période de la vie où les forces ont besoin d'être ménagées, avaient gravement atteint la santé du soldat du pape, il avait donné dix ans de sa vie à Rome et à la France, à ses deux affections de ce monde; il mit le reste à franchir la distance qui sépare le ciel de la terre ces six dernières années ont été employées par lui à mourir, jour par jour, lentement, courageusement, pieusement, saintement. Sa dernière recommandation à sa jeune veuve a été celle-ci : « Je veux sur ma tombe une pierre de granit, avec une croix, et au dessous : IL A SERVI L'ÉGLISE ».

Alain de Kersabiec avait une nature droite, franche, loyale, ennemie de toute voie détournée; il avait obtenu lentement, par la force des choses et par son seul mérite, le grade de capitaine.

Les récits publiés dans cette Revue, qui ont été lus avec intérêt et ont eu une certaine notoriété, l'ont été à son insu 1.

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La dernière réunion des délégués des Sociétés savantes des départements tenue à la Sorbonne, du 4 au 7 avril dernier, a été très-brillante et des mémoires du plus haut intérêt y ont été lus dans les quatre sections: l'archéologie, les sciences, l'histoire et les beaux-arts.

Les limites de notre chronique ne nous permettent pas de donner in extenso le compte rendu des communications qui ont été faites, mais nous tenons à parler sommairement des délégués bretons et vendéens qui ont pris une part active à cette session.

Dans les sciences nous citerons: M. Sirodot, doyen de la faculté des sciences de Rennes, qui a communiqué les résultats de sondages pour arriver à préciser l'âge du gisement préhistorique du Mont-Dol; MM. Monteil et le comte de Limur, de la Société polymathique du Morbihan; le premier a exposé que les lignes qui limitent la surface alaire sont en › relation avec la vitesse de l'aile, le poids de l'oiseau et l'angle que fait la marge antérieure de l'organe avec l'axe de rotation; le second a montré une météorite, ou corps tombé des espaces planétaires; M. GuyotJomard, de Vannes, secrétaire de la Société polymathique, a donné lecture, dans la section d'histoire, d'une intéressante Etude de linguistique celtique.

Dans la même section nous devons citer encore M. Fierville, proviseur du lycée de Saint-Brieuc, qui a lu la seconde partie d'une étude sur Etienne de Rouen, moine du Bec au XIIe siècle, auteur de l'Abrégé inédit de Quintilien, fait par ce moine vers 1165, et le meilleur que nous

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1 Ces récits sont: Journal d'un zouave pontifical. T. IX, année 1861. Les soldats L'entrée des du pape; journal de deux zouaves bretons. T. XXII, année 1867. Piémontais à Rome a été publiée par l'Univers et reproduite par l'Espérance du peuple.

ayons avec celui de Rollin (1715), qui a suivi une méthode analogue à la sienne, bien qu'il n'ait pas connu ce manuscrit.

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la

Dans la section des beaux-arts section nouvelle, réunie, pour première fois, sous la présidence de M. le marquis de Chennevières, directeur des Beaux-Arts, et assisté de M. Alfred Darcel, du comité des travaux historiques M. C. Marionneau, secrétaire de la commission de surveillance du musée de peinture et de sculpture de Nantes, a développé l'état d'avancement de l'inventaire des richesses d'art du chef-lieu de la Loire-Inférieure. Le travail est presque achevé pour les églises. La cathédrale, en outre du tombeau si connu de François II, exécuté par Michel Colombe, d'après un dessin de Jehan Perréal, et de la coupole peinte par Charles Errard, possède un tableau du père du premier directeur de l'école de Rome, représentant Jésus-Christ baillant les clefs à saint Pierre, dont le contrat d'adjudication a été trouvé par M. Léon Maître, aux archives départementales. A côté des œuvres des XVIIe et XVIIIe siècles, les églises de Nantes possèdent des peintures importantes d'artistes modernes.

Enfin, dans la section d'archéologie, dont l'importance s'accroît chaque année, M. Ducrocq, président de la Société des antiquaires de l'Ouest, a lu une dissertation sur un denier gaulois inédit à la légende GIAMILOS, qu'il attribue à la région de l'ouest de la Gaule, où il a été trouvé, et M. le baron de Wismes, membre de la Société archéologique de la Loire-Inférieure, a exposé le résultat des découvertes de monuments préhistoriques à Pornic et aux environs, et a mis sous les yeux de MM. les délégués de grands dessins représentant des signes gravés en creux sur des grès. Ces signes paraissent être une ancienne écriture, analogue aux caractères, encore inexpliqués, observés depuis longtemps dans le Morbihan, à Gavrinnis. Expliquera-t-on ces signes? Sont-ce vraiment des caractères alphabétiques? M. de Wismes ne croit pas le moment venu de le décider; il s'est contenté de les soumettre à la critique de ses collègues, MM. les délégués à la Sorbonne.

Nnous ne pouvons plus heureusement terminer ce compte rendu qu'en reproduisant le passage du discours de clôture de M. le Ministre de l'instruction publique, où il est amplement question d'un nom et de faits qui nous touchent de près :

Un jeune ingénieur, M. Kerviler, occupé à creuser un bassin à Penhouët, près SaintNazaire, a constaté que les couches d'alluvion qui avaient été déposées par le fleuve pouvaient se compter d'une manière régulière, absolument comme les années d'un sapin peuvent se compter par les couches concentriques du bois.

M. Kerviler a remarqué que les dépôts annuels de la Loire se sont toujours effectués avec une constante régularité; aussi loin qu'il a pu pénétrer dans les couches qui se sont accumulées, il a retrouvé la même disposition. Il a pu faire ses obser

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