COUR D'APPEL DE BORDEAUX AUDIENCE SOLENNELLE DE RENTRÉE Le lundi dix-sept octobre mil huit cent quatre-vingtdix-huit, les Membres de la Cour d'appel de Bordeaux se sont réunis au Palais de Justice pour tenir l'audience de rentrée. Étaient présents : MM. Louis DELCURROU (O. *) (I.), Premier Président; BOULINEAU, VALLER *, SAINT-AUBIN, Présidents de Chambre; RAVEAUD *, Président de Chambre honoraire; OUDART *, Conseiller honoraire; GRELLET-DUMAZEAU* ( A.), PRÉTOT *, HABASQUE * ( A.), DUVERGEY, ANDRIEU, MONGIE-CARSUZAN, LÉON, DUPOND ( A.), MARCILLAUD DE BUSSAC, GEOFFRION, ROUJOL, TABANON *, BONACHRISTAVE, PARIS, DUCASSE, DE MIOLLIS, DESBONNE et GUÉRITEAU, Conseillers; MM. LEFRANC ( A.), Procureur Général; CUMENGE, RIBET et PLÉDY, Avocats généraux; DAVID et MAXWELL, Substituts du Procureur Général; MM. LEGRAND, Greffier en chef; LAFARGUE, VERGEZ *(I.), BERNARD et SURGET, Greffiers de Chambre. Absent: M. ROZIER, Conseiller, malade à la résidence. A onze heures, la Cour, précédée de ses huissiers audienciers, s'est rendue en voiture à l'Église Primatiale Saint-André, où a été célébrée par M. l'abbé Petit la messe du Saint-Esprit, qui inaugure chaque année la reprise de ses travaux et à laquelle ont assisté: MM. les Membres des Tribunaux de première instance et de commerce, ainsi que les Juges de paix des cantons de Bordeaux, MM. les Avocats et Avoués près la Cour d'appel. A midi, la Cour, précédée de ses huissiers audienciers, s'est rendue dans la grande salle d'audience, où se trouvaient, parmi les autorités qui avaient répondu à l'invitation de la Cour, Monseigneur le Cardinal Lécor, M. le général VARAIGNE, commandant en chef le 18o Corps d'armée, M. BERNIQUET, préfet de la Gironde, M. PÉRIÉ, ajoint au Maire de Bordeaux, M. BOUFFARD, secrétaire général de la Préfecture, le Colonel de gendarmerie, les Vicaires généraux, etc., etc. M. PLĖDY, avocat général, a prononcé le discours d'usage, dont le sujet est: Étude sur les Principes de la législation du Travail. MONSIEUR LE PREMIER PRÉSIDENT, Dans notre siècle qu'un grand homme d'État anglais, récemment disparu, M. Gladstone, a appelé : « le siècle des ouvriers, » les questions sociales sont l'objet des préoccupations de tous. Elles obsèdent la pensée des chefs d'empire; elles ont inspiré une encyclique célèbre. Il m'a paru que, dans cette audience solennelle, peu d'études étaient plus dignes d'exciter votre intérêt et de retenir votre attention que celle des principes de la législation du travail. N'est-ce pas le premier devoir du magistrat chargé d'appliquer les lois que de connaître leur esprit et leurs tendances? N'est-ce pas une des meilleures façons de s'intéresser aux ouvriers que de chercher si les dispositions législatives multipliées en leur faveur ne sont pas soumises à des règles supérieures et nécessaires qu'il n'est pas permis d'oublier impunément? Pour rendre la justice, vous cherchez à comprendre toutes les misères. Ceux-là seuls qui ne vous connaissent pas, ont pu vous représenter avec un double visage : « un visage aimable et souriant du côté des heureux, un visage glacé, impassible, impitoyable, tourné du côté des misérables. » Ceux qui fréquentent vos salles d'audience et qui recueillent vos décisions, savent avec quelle bienveillance vous accueillez la plainte du malheureux, avec quel zèle vous pressez pour lui la marche souvent |