Page images
PDF
EPUB

UN SÉNATUS-CONSULTE Romain récemment découvert.

En son Voyage archéologique dans la régence de Tunis, I, p. 391, publié il y a quinze ans, M. Victor Guérin nous apprend qu'il a trouvé sur les ruines romaines de Begar, non loin de Sétif et de la ligne qui séparait l'ancienne Numidie de la Mauritanie, c'est-à-dire sur les confins du royaume actuel de Tunis et de notre province d'Algérie, une inscription dont M. Guérin n'avait pu déchiffrer que les onze dernières lignes, les dix-neuf premières lui ayant paru rongées par une sorte de lichen qui avait altéré profondément la plupart des caractères. L'éveil était donné par cette annonce, et la science n'a pas tardé à tirer profit de la révélation du voyageur français. Un savant épigraphiste allemand, M. G. Wilmanns, connu par l'excellent manuel qu'il a imprimé en 1873, sous le titre d'Exempla inscriptionum latinarum (2 vol. in-8°), a visité de nouveau la plaine où gisent les ruines signalées par M. Guérin, et, plus heureux que le voyageur français, il a pu compléter la découverte de ce dernier, et nous donner le texte d'un sénatus-consulte qu'il vient de publier dans l'Ephemeris epigraphica (vol. II, p. 271 et suiv.).

En reproduisant le texte du sénatus-consulte, je m'abstiens de commentaire : quelques notes suffisent pour tout expliquer. Je ne pourrais guère, d'ailleurs, que m'approprier le travail intéressant de M. Wilmanns, auquel M. Mommsen a ajouté des observations judicieuses; je préfère y renvoyer nos lecteurs. Il me sera seulement permis de faire remarquer que les monuments de ce genre sont assez rares. Nous possédons peu de sénatus-consultes dans leur forme officielle et authentique. Le texte latin de celui d'Asclepiade de Clazomène est grandement avarié. Celui de Thisbé, qu'a publié M. Foucart, est en grec, et, quoiqu'il révèle parfaitement les formes connues de l'ancienne chancellerie romaine, il lui manque cependant sa forme originale et latine 1. Le sénatus-consulte que nous publions est complet dans son texte. Malheureusement son objet a peu d'importance. Il s'agit de la concession à un particulier du privilége d'ouvrir un marché public (nundina saltus Beguensis) sur le lieu même où l'inscription a été trouvée (Hanschir el Begar). Deux exemplaires en étaient gravés sur pierre et se trouvaient exposés aux deux principales entrées de l'enceinte. M. Guérin n'en avait rencontré qu'un. M. Wilmanns a trouvé le second. L'acte est de la fin du règne d'Adrien, date fournie par le nom des consules suffecti, nommés sur le monument, et qui sont connus par d'autres indications anciennes.

Voy. mon Enchiridion juris romani, p. 638, et les sources que j'y ai indiquées. Sur les formes de procéder, dans

le Sénat romain, cf. Fr. Hoffmann, Der römische Senat (Berlin, 1847) in-8°, p. 80-104; et surtout notre Barnabé

Voici le texte prout jacet de notre nouveau sénatus-consulte, suivi des notes critiques et de la restitution de M. Wilmanns, laquelle ne présente aucune difficulté sérieuse. Nous reproduisons seulement l'exemplaire vu par M. Guérin. Celui qu'a découvert M. Wilmanns est identique, mais plus endommagé. Il offre cependant le complément de quelques lettres, et une variante que nous avons relevés.

SC DE NVNDINIS SALTUS BEGVENSIS INT CASENSI DESCRIPTVM ET RECOGNITVM EX LIBRO SEN TENTIARVM IN SENATU DICRVM KVII TIVNI NIGRI C POMPO NI CAMERINI COS IN QVO SCRIPTA ERANT AMINI IVRA ET ID 5 QVOD IS EST (IN COMITIO IN CVRIA) TIRANESHA IBVNDO ADFVERVNT Q SAŽONIVS QF QVI NGVS MI QVAR INVS C OPPIVS C F VEL SEVERVS (CF) VIKKIR CHAI UKSIA TREMPAH SERV

[ocr errors]

M F QVIR CLARVS P CASSIVS L F AEM DEXTER Q F NONIVS M FOVI MA
RINVS QIN SENATV FVERVNT CF willen.

10 OD P CASSIUS SECVNDVS P DELPHIVS PEREGRINVS ALEIVS ALEN NIVS MAXIMVS WALERIANVS PROCUL WORTHOPHORA MARR sic NVS COSS VERBA FECERVNT (DE) DESIDERIO AMICORVM LVCILI AFRICA NI C V QVI PET VNT VT EI PERMITTATUR IN PROVINCIA AFR REGIONE

A NSI TERRITORIO MVSVLAMIORVM AD CASAS NVNDINAS 15 IIII NON NOVEMB⚫ ET. XII K DEC EX EO OMNIBVS MENSIBVS

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

IIII NON ET XII. K SVI CVIVSQ MENSIS INSTITVERE HABERE QVID FIERI PLACERET. DE EA RE ITA CENSVERVNT

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

.

PERMITTENDVM LVCILIO AFRICANOC V I ROVINCIA AFRIC REGIONE BEGVENSI TERRITORIO MVSVLAMIORVM AD. CASAS 20 NVNDINAS IIII. NON NOVEMBRET. XII.K. DECEMBR ET EX EO OM NIBVS MENSIBVS IIII NON ET XII K SVl CVIVSQ MENSIS IN STITVERE ET HABERE EOQVE VICINIS ADVENISQ · NVNDINANDI DVMTAXAT CAVSA COIRE CONVENIRE SINE INIVRIA ET IN COMMODO CVIVSQVAM LICEAT ACTVM IDIBVS OCTOBR

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors]

25 P CASSIO SECVNDO M NONIO MVCIANO EODEM. EXEMPLO DE EADEM RE DVAE TABELLAE SIGNATAE SVNT SIGNATORES T.FL. COMINI SCRIB · C · IVLI · FORTVNATI · SCRIB · M · CAESI · HELVI EVHELPISTI · Q · METILI PERIBLEPTI QONESIMI IVLI

[ocr errors][merged small][merged small][ocr errors]

3, litterae VII post K omnino dubiae sunt. -5, in altero exemplo legitur: IN COMITIO IN CURIA. 6-8 ita evanidi sunt ut ne ea quidem quae dedi ubique satis certa sint. -6 fortasse. Q. Salonius Q. f. Ouf. [vel Qui.] Longus, sed vestigia litterae quae inter SA et ONIVS visuntur ad B vel R potius quam ad L pertinere videntur. altero exemplo legitur: DE DESIDERIO (Wilmanns).

Le sénatus-consulte peut être ainsi restitué :

Senatus) consultum) de nundinis saltus Beguensis in territorio)

Casensi. Descriptum et recognitum ex libro sen

Brisson, De formulis, etc. lib. II, p. 119 et suiv. de l'édition de Conradi, 1731, in-fol., ouvrage d'une science incompa

[blocks in formation]

tentiarum in senatu dic[ta]rum k(apite) septimo (?) T. Iuni Nigri C. Pomponi Camerini cons(ulum) 2, in quo scripta erant Africa]ni iura3 et id 5 quod infra) scriptum) est. In comitio in curia; [scr]ibundo adfuerunt Q. Salonius (?) Q. f. Qui. Longus (?).

C. Oppius C. f. Vel. Severus. C. Fi...

.mi... Quar/t/inus, [Sex. Erulciu[s]

M.f. Quir. Clarus, P. Cassius, L. f. Aem. Dexter quaestor), P. Nonius M.f. Ouf. (?) Macrinus q (uaestor); in senatu fuerunt C...

10 Senatus) consultum) per discessionem factum.

Quod P. Cassius Secundus, P. Delphius Peregrinus, Aleius Alen

nias Maximus, Curtius Valerianus Proculus, M. Nonius Mucia

nus co(n)s(ules) verba fecerunt de desiderio amicorum Lucili Africa

ni clarissimi) viri), qui petunt : ut ei permittatur in provincia Afric(a), regione

15 Beguensi, territorio Musulamiorum ad Casas, nundinas

IIII nonas Novemb(res) et XII kalendas) Decembr (es), et ex eo omnibus mensibus IIII non(as) et XII k(alendas) sui cuiusq(ue) mensis instituere habere, quid fieri placeret, de ea re ita censuerunt :

permittendum Lucilio Africano clarissimo) v(iro) in provincia Afric(a),

regione Beguensi, territorio Musulamiorum, ad Casas,

20 nundinas IIII non(as) Novembr(es) et XII k(alendas) Decembr(es), et ex eo omnibus mensibus IIII non(as) et XII k(alendas) sui cuiusq(ue) mensis ins

tituere et habere, eoque vicinis advenisq(ue) nundinandi

dumtaxat causa coire convenire sine iniuria et in

commodo cuiusquam liceat.

25 Actum idibus Óctobr(ibus) P. Cassio Secundo M. Nonio Muciano. Eodem exemplo de eadem re duae tabellae signatae sunt.

Signatores: T. Flavi) Comini scrib (ae),

C. Iuli Fortunati scrib(ae),

M. Caesi Helvi Euhelpisti,

Q. Metili Onesimi,

C. Iuli Periblepti,
L. Verati Philerotis,
T. Flavi) Crescentis.

[blocks in formation]

Ch. GIRAUD.

[blocks in formation]

NOUVELLES LITTÉRAIRES.

INSTITUT NATIONAL DE FRANCE.

ACADÉMIE FRANÇAISE.

L'Académie française a tenu, le jeudi 9 mars 1876, une séance publique pour la réception de M. John Lemoinne, élu en remplacement de M. J. Janin. M. CuvillierFleury a répondu au récipiendaire.

ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES.

Dans sa séance du 3 mars, l'Académie des inscriptions et belles-lettres a élu M. Ed. Boutaric à la place vacante par le décès de M. Jules Mohl; et, dans sa séance du 10 mars, elle a élu M. Germain académicien libre, en remplacement de M. le marquis de Lagrange.

M. Guigniaut, membre et secrétaire perpétuel de la même Académie, est décédé à Paris, le 12 mars.

LIVRES NOUVEAUX.

FRANCE.

Lettres grecques du rhéteur Alciphron, traduites en français par Stéphane de Rouville, 5° édition augmentée de fragments inédits. Paris, imp. de Ch. Schiller, librairie de Rouquette, 1875, in-16 de III-183 pages. Quelle que soit l'époque à laquelle ait vécu le rhéteur Alciphron, qu'il ait été ou non le contemporain de Lucien, comme on peut le conjecturer d'après le recueil d'Aristénète, les cent dix-huit

[ocr errors]

lettres et les fragments qui nous restent de lui n'en ont pas moins une réelle valeur au point de vue de l'histoire intime de la vie des anciens. Cette correspondance imaginaire est attribuée à des pêcheurs, à des parasites, à des agriculteurs, à des courtisanes, à des acteurs et à des poëtes. En quelques pages elle fait passer devant nos veux les diverses classes de la société athénienne, elle nous montre les raffinements de sa civilisation, elle en dévoile les moindres détails, elle nous initie même à ses plaisirs. Il existe du livre d'Alciphron des versions latines et diverses traductions étrangères; mais il n'y en avait eu, jusqu'ici, en français, qu'une traduction complète, celle de l'abbé Richard, helléniste distingué du siècle dernier. Depuis cette époque, le texte du rhéteur grec a été amélioré par de savants commentateurs; il vient même d'être augmenté de quelques lettres et de plusieurs fragments. Tous les amis de l'antiquité grecque sauront gré à M. Stéphane de Rouville, d'avoir fait passer dans notre langue, avec une élégante fidélité, ce curieux tableau des mœurs athéniennes.

Cassiodore. De l'âme. Traduction française par Stéphane de Rouville, deuxième édition. Paris, imprimerie de Ch. Schiller, librairie de Rouquette, 1875, in-16 de IV-156 pages. De tous les ouvrages de Cassiodore, le Traité de l'âme paraît caractériser le mieux l'écrivain et former un ensemble plus complet de ses doctrines. C'est d'ailleurs une œuvre essentiellement morale, philosophique et chrétienne, d'un véritable intérêt, et qui rachète souvent un peu trop de recherche et de subtilité par la profondeur des pensées et l'élévation du style. Ce traité est divisé en douze chapitres, precédés d'une introduction. M. Stéphane de Rouville, à qui nous devons cette nouvelle et consciencieuse traduction, a placé en tête une notice sur la vie et les œuvres du célèbre ministre de Théodoric.

Nouvelle méthode d'enseignement géographique d'après les résolutions du congrès géographique de Paris, par M. Ludovic Drapeyron, ancien élève de l'École normale supérieure, docteur ès lettres, professeur agrégé d'histoire et de géographie au lycée Charlemagne, membre de la Société de géographie et du congrès de Paris; suivie d'une Étude sur la cartographie à l'exposition des Tuileries, par M. Frédéric Hennequin, ancien graveur et dessinateur au dépôt de la guerre, membre de la Société de géographie et du congrès de Paris. Paris, Dumaine, 1876. On sait qu'un congrès international de géographie s'est tenu à Paris, au mois d'août 1875. Toute l'Europe y était représentée. Il se divisait en sept groupes. A chacun des groupes était dévolu un des départements de la science géographique. Le sixième groupe, ou groupe didactique, devait s'aviser des moyens propres à développer l'enseignement de la géographie. Il se mit à l'œuvre avec beaucoup d'ardeur. Français, Belges, Russes, etc., coalisés, formulèrent des propositions qui furent longuement discutées, votées d'une façon presque unanime, puis soumises au congrès qui les approuva, après un examen consciencieux. Voici l'énoncé des six grandes propositions et le nom de leurs auteurs :

1° L'étude de la géographie devra commencer dorénavant par la topographie, et non plus par la cosmographie (proposition de M. Hennequin);

2o Dans les établissements secondaires, on établira l'accord le plus parfait possible entre les cours d'histoire et les cours de géographie (proposition de M. Drapeyron); 3° L'enseignement de la géographie sera confié à des professeurs spéciaux (proposition de M. Discailles, de Belgique);

4° A l'École normale supérieure, on organisera une section de géographie, avec de fortes études scientifiques pour base; il y aura, en outre, une agrégation spéciale de géographie (proposition de M. Maze);

« PreviousContinue »