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ÉTIENNE DE GALLARDON

CLERC DE LA CHANCELLERIE DE PHILIPPE-AUGUSTE

CHANOINE DE BOURGES.

Lettre à M. le vicomte François Delaborde, sous-chef de la section historique des Archives nationales.

Mon cher ami,

Au moment où vous étudiez les origines et les vicissitudes du Trésor des chartes, avec une clairvoyance que les lecteurs de la Bibliothèque de l'École des chartes ont déjà eu l'occasion d'apprécier, vous me permettrez d'appeler votre attention sur un détail qui n'a pas encore été remarqué et qui mérite cependant d'être examiné.

Je voudrais vous soumettre quelques observations sur l'auteur du registre où le chef de la chancellerie de Philippe-Auguste, Guérin, évêque de Senlis, fit disposer méthodiquement les documents sur lesquels reposaient les droits de la couronne et auxquels devaient souvent recourir les officiers chargés de l'administration du royaume. Vous voyez qu'il s'agit du gros volume que Gérard de Montaigu, au temps de Charles V, avait classé au Trésor des chartes sous la cote XXVI, et qui, après avoir été conservé pendant plus d'un siècle à la Bibliothèque nationale, a repris, aux Archives nationales, en 1862, son ancienne place parmi les registres du Trésor. C'est celui que j'ai désigné par la lettre E dans le classement des registres de Philippe-Auguste.

1. Les Travaux de Dupuy sur le Trésor des chartes et les origines du Supplément; Bibliothèque de l'École des chartes, 1897, t. LVIII, p. 126-154.

La date de la confection de ce registre, le nom du directeur de la chancellerie qui en ordonna l'exécution et celui du clerc à qui la rédaction en fut confiée sont indiqués dans la table des chapitres qui est en tête du volume et dans le catalogue des rois de France qui est sur le fol. 304. Quoique ces textes aient souvent passé sous nos yeux, il n'est pas inutile de les relire attentivement, et j'ai cru bon de les faire imprimer à la suite de ma lettre1. Pour le moment, je me borne à en extraire les mots relatifs au problème que nous voulons élucider :

Registrum anno Domini 1220 scriptum, de mandato reverendi patris Garini, Silvanectensis episcopi, per manum Stephani de Gual'., clerici sui.

Anno dominice incarnationis 1220, quo scriptum est registrum istud, per mandatum reverendi patris Guarini, Silvanectensis episcopi, a Stephano de Gual'., clerico suo.

De ces lignes, il résulte que le registre a été fait en 1220, et qu'il a été composé par l'ordre de Guérin, évêque de Senlis, faisant alors fonctions de chancelier. Il ne saurait exister le moindre doute sur ces deux points. Toute la difficulté porte sur le nom de l'auteur du travail. Celui-ci, à deux endroits, a voulu se faire. connaître; mais, dans l'un et dans l'autre endroit, il a écrit son nom en abrégé : STEPHANUS DE GUAL'. C'est la forme complète et authentique de ce nom qu'il importe de retrouver.

L'abbé Sallier, qui a le premier décrit le registre dont nous. nous occupons, a cru que le nom du rédacteur devait se lire : STEPHANUS DE GUALT, et voici l'observation par laquelle il a essayé de justifier sa lecture: « Le manuscrit porte de Gual, mais la finale est tranchée, ce qui indique la suppression d'un t; il faut donc lire Gualt ou Gualto. » Évidemment, cette explication n'est pas acceptable.

En 1856, quand je dus passer en revue les sources auxquelles j'avais puisé les éléments de mon Catalogue des actes de Philippe-Auguste, je crus pouvoir supposer que l'auteur du registre E s'appelait Etienne de Galles, STEPHANUS DE GUALLIA. Je reconnais aujourd'hui que ma conjecture n'est guère plus satisfaisante que celle de l'abbé Sallier.

1. Appendice, I et II.

2. Mémoires de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, t. XVI, p. 169.

STEPHANUS DE GUAL. doit se lire STEPHANUS DE GUALARDONE. J'espère, mon cher ami, que vous adopterez cette lecture, quand vous aurez vu comment j'ai été amené à la proposer.

Ayant eu récemment une vérification à faire dans un précieux cartulaire du chapitre de Bourges, dont la Bibliothèque nationale s'est enrichie en 1875 et qui porte le n° 1274 dans le fonds latin des Nouvelles acquisitions, je fus frappé, en le feuilletant, de la ressemblance que l'écriture de la partie primitive de ce registre, notamment aux fol. 13-18, 31-32, 39-40, 61-64, 73-74, 219223 et 229-230, offre avec l'écriture de la partie primitive du registre E de Philippe-Auguste. J'ai eu l'honneur de vous faire constater cette ressemblance, quand je vous ai apporté aux Archives nationales le cartulaire de Bourges pour le confronter avec votre registre du Trésor. L'identité des écritures est évidente, et, pour que les lecteurs de la Bibliothèque soient à même de s'en assurer, j'ai fait reproduire en héliotypie une page de chacun des deux manuscrits.

Or, nous allons voir dans un instant que l'auteur du cartulaire de Bourges nous a livré son nom en toutes lettres dans plusieurs des rubriques de son recueil, et, de cette façon, nous pourrons savoir à qui est dû le registre E de Philippe-Auguste. Mais il faut, avant tout, décrire sommairement le cartulaire. C'est une précaution d'autant plus justifiée que le plan suivi dans le cartulaire rappelle à certains égards le plan du registre de PhilippeAuguste.

Le cartulaire du chapitre de Bourges a été acquis par la Bibliothèque nationale en 1875, après avoir longtemps appartenu à un libraire de Bourges, M. Vermeil, chez qui M. de Raynal2 et M. le baron de Girardot 3 purent le consulter pour leurs travaux sur l'histoire du Berri. C'est un volume de 380 feuillets de parchemin, mesurant 270 millimètres sur 183. Outre les chartes proprement dites, il renferme des statuts, des listes de résidence, des comptes, des censiers, des notes d'administration et des pièces diverses, ajoutées à différentes reprises dans le cours du xII° siècle. Ces additions ont été copiées pêle-mêle et un peu au hasard, souvent en caractères cursifs, assez difficiles à lire. La partie pri

1. Planches I et II.

2. Hist. du Berry. Bourges, 1844-1847. 4 vol. in-8°.

3. Mémoires de la Soc. archéol. de l'Orléanais, t. II, p. 38 et suiv.

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