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le volume et l'étendue des parties qui doivent être recouvertes.. On la moule sur le membre blessé, ou s'il est trop douloureux, sur le membre sain, ou bien encore sur un homme de même taille. Quand la gouttière est moulée, on la retire pour arrondir les angles et régulariser la section des bords. Après l'avoir garnie à l'intérieur d'une légère couche de ouate, on l'applique définitivement en la fixant au moyen d'un bandage roulé ou de lacs en ruban de fil.

Appareil de Desormeaux (1) (fig. 96 et 97). L'appareil représenté ici comme exemple de la construction et de l'application des gouttières de gutta-percha est employé par Desormeaux pour le traitement des fractures de l'humérus. La fi

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FIG. 96. Gouttière de gutta-percha pour le traitement des fractures de l'humérus. (Appareil de Desormeaux.)

gure 96 reproduit la gouttière moulée et taillée suivant la manière de faire ordinaire. La figure 97 montre l'appareil appliqué sur le membre, autour duquel il forme une gaîne complète. Dans ce modèle, on remarquera que la gouttière présente, au-dessus du moignon de l'épaule, un prolongement qui emboîte toute la région sus-scapulaire et sus-claviculaire, afin de trouver là un point d'appui solide. En bas, elle embrasse le coude et la moitié supérieure de l'avant-bras maintenu dans la flexion à angle droit. Cette disposition a pour effet d'assurer l'immobilité entière de tout le membre et la contention des fragments, qui ne sauraient éprouver aucun déplacement, lorsque l'appareil est convenablement appliqué après une réduction et une coaptation exactes.

Les gouttières de gutta-percha constituent des moyens de contention solides, légers, faciles à maintenir. Elles offrent l'avantage de s'adapter exactement à la configuration des régions, dans quelque position que le membre soit placé. Leur application est particulièrement avantageuse au membre supérieur, où elle est susceptible de remplacer utilement la plu

(1) Desormeaux, Nouveau Dictionnaire de médecine et de chirurgie pratiques. Paris, 1866, t. V, article BRAS.

part des appareils mis en usage dans le traitement des fractures du coude et du bras. La gouttière de gutta-percha nous semble même préférable à la demi-cuirasse thoracique, imaginée spécialement par Bonnet pour immobiliser l'épaule dans le cas de fracture de l'extrémité supérieure de l'humé

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Appareil de gutta-percha de Desormeaux pour le traitement des fractures de l'humérus.

rus. Enfin, le plastron de gutta-percha, appliqué à la manière de Lesueur, constitue un appareil des plus propres à maintenir la clavicule fracturée ou luxée. Au membre inférieur, l'usage de la gouttière de gutta-percha trouve des conditions moins favorables. Il ne serait guère possible de faire des gouttières complètes, enveloppant le membre en totalité; mais on a quelquefois recours à des applications partielles, fort utiles dans quelques cas de fractures de la jambe, de la rotule, de la cuisse, et enfin, dans le traitement de certaines affections articulaires du genou et de la hanche. Après toutes ces considérations, il faut cependant ajouter que la guttapercha, malgré ses avantages, n'est guère mise en usage plus souvent sous forme de gouttière que sous forme d'attelles. Les raisons qui s'opposent à

la généralisation de son emploi ayant été exposées à propos des attelles (voy. p. 157), il serait superflu de les répéter ici.

IV. - Gouttières de carton.

Le carton, déjà employé par Amb. Paré, Wisemann, J. L. Petit, etc., est devenu de nos jours d'un usage fréquent. Il entre comme partie essentielle dans la confection des appareils inamovibles imaginés par Seutin, Velpeau, Merchie, Burggraëve, etc.

Toutes les espèces de carton livrées par le commerce ne sont pas propres aux usages de la chirurgie. Il en est qui doivent être rejetées, comme par exemple, le carton collé, le carton préparé au chlore, qui est trop friable, etc. Celui que l'on choisira de préférence doit être tenace et facile à déchirer. On en fait des attelles (Sommé d'Anvers), des gouttières ou de véritables cuirasses.

Appareil de Carret (de Chambéry) (1). Ce chirurgien, qui a généralisé l'emploi du carton sous cette dernière forme, procède de la manière suivante : - On prend une feuille de carton de la longueur da membre et d'une largeur un peu plus que suffisante pour en faire le tour. On la ramollit en la trempant pendant quelques minutes dans l'eau. La fracture étant réduite et maintenue, le carton mouillé est placé sur le membre, que l'on recouvre entièrement en appliquant l'un après l'autre les deux côtés du carton, dont les bords viennent se croiser en avant. Tandis qu'un aide tient le tout, le chirurgien fait par dessus, avec une bande également mouillée, un bandage roulé ordinaire. Pendant qu'il est ramolli, le carton se moule sur les parties en adhérant légèrement à la peau. En séchant, il durcit et reprend sa consistance première, tout en conservant l'empreinte de la région. Par son retrait, il exerce une légère compression, en même temps qu'il devient inflexible et inamovible. Quand on veut visiter le membre, on enlève la bande et l'on écarte doucement les bords du carton en le décollant de la peau. Pour réappliquer ensuite l'appareil, il suffit d'humecter légèrement le carton à l'intérieur. S'il existe une plaie, on la met à découvert en pratiquant à son niveau une fenêtre à la gouttière.

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Appareil de Cortèze (2). Ce chirurgien traite les fractures de la jambe par l'application successive de deux appareils différents. Il se sert pendant la première période d'une boîte spéciale, et construit pour la seconde période une botte de carton amidonné, qu'il prépare d'avance en

(1) Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1856, t. XLII, p. 103. (2) Cortèze, Annali universali di medicina, 1855.

moulant sur le membre sain deux demi-bottes, l'une postérieure, assez longue pour se prolonger sous la plante du pied et former une semelle, l'autre antérieure, descendant également sur le cou-de-pied. Quand ces attelles, appliquées mouillées sur le membre sain et retenues par un bandage, ont bien pris la forme, ce qui demande environ trois ou quatre heures, on les enlève et on leur donne de la rigidité en les tapissant au* dedans et au dehors avec des bandelettes de toile amidonnée. - Ainsi préparées et séchées, elles sont ensuite placées sur le membre fracturé.

V. Appareils modelés.

Un nouveau mode d'application de la méthode inamovible, proposé dans ces dernières années, consiste à se servir d'appareils modelés à l'avance. Ce n'est pas que les appareils de ce genre soient autrement composés que les appareils solidifiables ordinaires. Destinés comme ces derniers à la contention des membres fracturés, ils n'en diffèrent que parce qu'ils sont préparés d'avance au moyen d'un moulage exécuté sur nature ou sur des formes d'une exactitude rigoureuse. Mais cette particularité seule suffit pour agrandir notablement leurs attributions, en donnant à leur emploi une utilité et une valeur spéciales. Diverses matières plastiques autres que le carton ont été essayées pour la confection des appareils modelés.

Appareil de Smée (1). — Smée avait imaginé, dans le but d'obtenir une substance facilement malléable et susceptible de conserver les empreintes après dessiccation, de coller deux pièces de gros drap au moyen d'un mucilage épais de gomme mélangé à de la craie pulvérisée. L'étoffe ainsi préparée et séchée forme une tablette de l'épaisseur d'un carton mince, d'une grande résistance. Mouillée, elle devient molle, flexible et susceptible de se mouler sur les parties. En la faisant ensuite sécher au fea, on obtient une gouttière modelée.

Ce procédé compliqué et dispendicux n'a point été adopté.

Appareils de A. Laforgue (2). - Frappé des inconvénients que présente, dans les ambulances, l'emploi des bandages ordinaires à attelles, dont l'exécution exige beaucoup de temps et de soins, et qui sont loin d'assurer convenablement l'immobilité pendant le déplacement des blessés atteints de fractures des membres inférieurs, Laforgue chercha le moyen d'avoir à l'avance des appareils simples, légers, peu volumineux et portatifs, d'une application commode, rapide, et surtout assez exacte pour opérer la

(1) Smée, London med. Gaz., février 1839, et Archives de médecine, 1839, 3 série, t. V.

(2) A. Laforgue, Thèse, Montpellier, 1846, no 34.

contention du membre et rendre le transport plus facile. Il songea d'abord à se servir des coques provenant de bandages inamovibles fendus en avant; puis il s'arrêta à l'idée de composer des appareils avec des bandes de papier collées sur un treillis de fil de fer recuit. Chaque appareil devait être formé de deux valves, une antérieure et une postérieure, assez larges pour recouvrir toute la circonférence du membre préalablement entouré d'une couche de coton. Des courroies ou de simples rubans de fil suffiraient à maintenir les valves. Laforgue proposait de construire à l'avance un certain nombre de ces gouttières, en les moulant sur des modèles en bois de plusieurs numéros, correspondant à des tailles et à des conformations diverses, afin d'en approvisionner les caissons d'ambulance. L'auteur, et après lui Goffres (1), avaient donc entrevu toute la portée des services que seraient appelés à rendre des appareils de cette sorte, mis à la disposition des chirurgiens d'armée.

Appareils de Merchie (2).- En généralisant le procédé des appareils modelés, Merchie tenta de donner à leur application la valeur d'une méthode nouvelle. A cet effet, il proposa tout un système d'appareils modelés, confectionnés avec le carton. Ces bandages, dont l'usage a été adopté pour les transports des blessés dans les armées belge, russe, etc., sont simples, légers, portatifs, peu coûteux, d'une application facile et rapide. Ils sont constitués par des moules ayant la forme des membres qu'ils sont appelés à maintenir, préparés à l'avance sur des patrons de différentes grandeurs. Leur intérieur est doublé d'une épaisse couche de ouate, afin de pouvoir s'accommoder plus exactement à tous les contours.

Pour confectionner avec le carton des coques aussi complètes et aussi régulières que celles que l'on obtient par la dessiccation et la section d'un bandage amidonné, il est nécessaire de prendre, pour chaque membre, une forme type représentant sur une surface plane la configuration rigoureuse du membre. Ce patron sert ensuite à découper un nombre illimité de cartons de formes et de dimensions identiques. Pour obtenir ce patron type, on applique, sur les membres d'un homme de moyenne stature et bien conformé, un bandage roulé qui s'étend depuis l'extrémité digitale jusqu'au tronc. Après avoir enduit ce bandage d'une couche d'amidon, on le recouvre d'une seconde bande amidonnée. La dessiccation achevée, on incise le bandage suivant sa longueur; on écarte et l'on étale les deux valves au-dessus d'une feuille de papier placée sur un plan horizontal, en

(1) Goffres, Précis iconographique de bandages, pansements et appareils. Paris, 1858, p. 213.

(2) Merchie, Appareils modelés, ou nouveau système de déligation, etc. Paris,

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