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cause des avantages moraux du travail familial. En principe, l'établissement d'un contrôle sérieux sur les locaux où s'exerce l'industrie familiale, au point de vue de l'hygiène, leur paraît suffisant. Ce contrôle existe notamment en Angleterre (déclaration de Mlle Anderson, inspectrice du travail), et produit de bons résultats.

Relativement à la petite industrie, les mêmes orateurs admettent qu'elle doit, dans la mesure du possible et sous certaines réserves, être assujettie aux mêmes règles que la grande (sic, déclar. de MM. Verhaegen et Brouilhet); mais ils se refusent à considérer d'une manière générale et absolue la petite industrie comme une forme arriérée et barbare de production, appelée fatalement à disparaître devant la grande. Le petit atelier est au contraire la forme qui se prête le mieux à la fabrication de certains produits de luxe (soieries lyonnaises, article riche), ou d'articles supposant chez l'ouvrier un certain esprit d'invention (ex.: l'article de Paris, cité par MM. Yves Guyot et Valleroux). Un législateur prévoyant doit travailler à prévenir sa disparition, qui ne serait pas sans périls, et les industriels avisés doivent agir dans le même sens, notamment en facilitant aux chefs d'atelier la reconstitution de leur outillage, et en offrant leur concours aux entreprises de transport de la force motrice à domicile (Sur la mise en application de ces idées dans le milieu industriel lyonnais, voir le rapport présenté au Congrès, sur l'industrie à domicile à Lyon, par MM. Bonnevay et Godart.)

V. LES RÉGLEMENTS SUR LES INDUSTRIES DANGEREUSES. La question 5 (mise en concordance des règlements sur les industries dangereuses), avait un caractère trop technique pour soulever de longues discussions. Elle n'en a pas moins suscité d'intéressantes observations de la part de M. Henrotte, inspecteur du travail de Belgique, qui se déclare partisan d'un accord international tendant à la suppression radicale de certains poisons industriels d'un usage courant aujourd'hui, tels que la céruse ou le phosphore blanc. M. Yves Guyot conteste la possibilité d'une telle réglementation en France, dit-il, le monopole d'Etat aurait dù faciliter la suppression du phosphore blanc dans la fabrication des allumettes; et cependant, les enquêtes successives ouvertes, à la demande des ouvriers, ont démontré que cette substance était indispensable, dans l'état actuel de la science, pour satisfaire aux exigences du consommateur.

VI. ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DE L INSPECTION. Sur la question 6 (organisation et fonctionnement de l'inspection), s'est ouverte au contraire, une discussion très approfondie, dans laquelle interventionnistes et abstentionnistes ont de nouveau pris position. M. Vanlaer, auteur d'un intéressant rapport sur l'inspection du travail en France, signale tout d'abord les obstacles de toute sorte, provenant les uns de l'insuffisanee du personnel, les autres du mauvais vouloir de l'administration elle-même, qui s'opposeraient à l'accomplissement de la mission des inspecteurs : le remède le plus efficace à cet état de choses résiderait, d'après lui, non pas dans le renforcement de l'inspection, mais dans la simplification des lois réglementaires. Puis vient M. Fleury qui, accentuant la note abstentionniste, signale une prétendue contradiction entre la mission de contrôle et de répression légalement dévolue à l'inspection, et la qualité d'hommes de confiance des industriels que ces agents tendraient à prendre dans certaines régions, pour se conformer aux instructions conciliantes des ministres.

MM de Berlepsch, von Philippovich et Pic, ont pris la parole successivement pour réfuter ces critiques, qui ne tendraient à rien moins, si elles étaient justifiées, qu'à remettre en question la légitimité de toute législation protectrice de l'ouvrier. M. de B... insiste particulièrement sur l'étrangeté du remède proposé par

M. V... ; si les inspecteurs sont en trop petit nombre, ou s'ils ne disposent que de pouvoirs insuffisants pour faire respecter la loi, qu'on augmente leur nombre, ou qu'on leur confère des pouvoirs plus étendus: mais il serait illogique et périlleux d'abroger hâtivement, sous prétexte de simplification, des lois réglementaires récemment édictées, dont l'efficacité ne peut être appréciée qu'à la longue. L'Allemagne n'a pas hésité à organiser un corps d'inspecteurs suffisamment nombreux, recrutés avec soin, afin de mériter l'estime et la confiance des industriels qu'ils sont appelés à contrôler, et investis de pouvoirs très étendus. Ce système a produit les plus heureux résultats; l'inspection, après une période inévitable de tâtonnements, fonctionne aujourd'hui avec une régularité parfaite.

MM. von Philippovich et Pic s'associent à ces remarques en ce qui concerne l'Autriche et la France. Tous deux s'efforcent de démontrer qu'il n'y a en réalité aucune antinomie entre le mandat légal de l'inspecteur, et sa mission morale en quelque sorte auprès des industriels de son ressort, dont il a tout avantage à devenir, non pas l'homme de confiance, mais le conseiller et le guide. Mieux vaut prévenir que réprimer: pourquoi dès lors les inspecteurs n'indiqueraient-ils pas aux industriels qui viennent les consulter les mesures à prendre pour se mettre en règle avec la loi ? Ils n'en demeurent pas moins bien armés pour poursuivre, le cas échéant, toutes les contraventions que ces mêmes industriels pourraient commettre.

VII. LEGISLATION ET STATISTIQUE INTERNATIONALE DU TRAVAIL. -Il nous reste quelques mots à dire des questions 3 (législation internationale du travail) et 7 (statistique internationale du travail), qu'il nous a paru préférable de rapprocher, vu que l'établissement d'un bureau international de statistique peut être considéré comme un premier pas dans la voie de l'internationalisation des lois ouvrières. Sur la question de la législation internationale du travail, pas un orateur ne s'est déclaré partisan d'une campagne diplomatique prochaine tendant à l'adoption, par les divers Etats, d'une législation ouvrière commune; si bien que M. Raffalovich a pu faire observer, non sans ironie, que le Congrès, si divisé sur tous les autres points, avait du moins réussi à se mettre d'accord sur une négation. Cet accord négatif, moins complet d'ailleurs que ne le prétendait M. R..., s'explique aisément. Il est depuis longtemps reconnu que, sur ce terrain de l'élaboration d'une législation protectrice internationale, la conférence de Berlin a complètement échoué, et tout permet de supposer qu'une tentative du même genre échouerait de même aujourd'hui, à raison des différences profondes qui séparent encore les Etats au point de vue de leur situation économique, de leur outillage, du degré de développement de leurs moyens de transport, à raison des luttes de tarifs engagés entre diverses puissances, et plus encore à cause de la difficulté de faire respecter le règlement adopté sur le territoire de tous les Etats adhérents, alors que chacun d'eux entend ne rien abdiquer de son indépendance.

Est-ce à dire cependant que tout soit utopie dans les projets de cette nature? Telle est effectivement la conviction des libéraux, notamment de MM. Strauss et Raffalovich. Mais la majorité des congressistes n'a pas paru partager ce scepticisme un peu décourageant; ainsi que l'ont fait observer MM. Brentano, von Mayr et von Philippovich, les obstacles à l'établissement d'une législation internationale, qui semblent actuellement insurmontables, pourront s'aplanir. Les idées généreuses dont sont imprégnées les lois ouvrières les plus récentes gagneront de proche en proche; un jour viendra où les mêmes mesures protectrices essentielles seront consacrées par les législations particulières des différents Etats; et à ce moment, il sera relativement facile d'arriver à un accord international

sur certains points spéciaux tout au moins, tels que la réglementation des industries insalubres, le repos hebdomadaire, le travail des enfants et des hommes, ou le travail dans les mines.

Le désaccord précédemment signalé ne s'est pas reproduit sur la question connexe de l'organisation internationale d'une statistique du travail. Tous les orateurs, interventionnistes ou libéraux, en ont reconnu l'utilité ; ils se sont simplement divisés sur les voies et moyens. Le projet de création immédiate, sous la direction des gouvernements intéressés, d'un bureau ou office central de statistique, n'a guère été défendu que par M. H. Denis; le Congrès a nettement manifesté ses préférences pour l'organisation, d'un office privé, que les gouvernements n'hésiteraient pas à soutenir, lorsque son fonctionnement aurait fourni la preuve décisive de son utilité, et des services qu'il est appelé à rendre.

M. Raffalovich offre de confier cette mission à l'Institut international de statistique, qui a déjà mené à bien des enquêtes analogues, notamment en matière monétaire. MM. Brants, Schmoller, von Mayr donnent leurs préférences à un bureau ou office privé, constitué spécialement en vue de dresser et tenir à jour la statistique du travail industriel et des lois ouvrières mises en vigueur dans les différents pays; ils proposent comme type le comité permanent des accidents du travail et assurances sociales, constitué à Paris en 1889.

Ce dernier système paraît avoir réuni les suffrages de la majorité des congressistes. Il est vrai que, pour se conformer au règlement, le Congrès s'est séparé le 30 septembre sans avoir pris de résolutions. Mais, après sa clôture, les membres du bureau, et la plupart des rapporteurs et orateurs ayant pris une part active aux débats, se sont réunis pour délibérer à nouveau sur l'opportunité de la constitution d'un comité permanent. Ce comité n'a pas été constitué séance tenante; mais l'accord s'est fait aisément sur le principe, et les membres belges du bureau ont reçu mandat d'élaborer, sous la direction de M. le duc d'Ursel, président d'honneur, un projet, dont le texte ne saurait tarder à être connu et publié.

P. Pic,

Professeur à la Faculté de droit de Lyon, Chargé du cours de législation et économie industrielles.

Les concours d'agrégation de droit public et de sciences
économiques.

Les concours d'agrégation des Facultés de droit pour la section de droit public et celle des sciences économiques se sont ouverts, le premier, sous la présidence de M. Larnaude, assisté de MM. Brémond, Barrilleau, Leseur, Duguit, le second, sous la présidence de M. Léveillé, assisté de MM. Levasseur, Cauwès, Villey, Gide, les 27 septembre et 4 octobre 1897. Ils se sont terminés, après de brillantes épreuves, par la nomination de MM. A. Geouffre de Lapradelle, Le Fur et Lameire, pour la section de droit public, et de MM. Chauvin, Worms, Sauvaire-Jourdan, Benzacar, pour la section des sciences économiques.

Nous croyons être agréables à nos lecteurs, en reproduisant le texte des sujets des compositions écrites et des leçons donnés à ces deux concours.

SECTION DU DROIT PUBLIC

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Composition écrite : Les origines et le développement du Cabinet en Angleterre. Leçons de droit constitutionnel. 1. Du droit de pétition aux Chambres. 2. La déclaration des Droits de 1789. 3. La revision constitutionnelle d'après les lois de 1875. 4. Le droit de réunion en Angleterre et en France.

5. Les

lois électorales de la France sous la Restauration et le gouvernement de Juillet. 6. L'inconstitutionnalité des lois aux Etats-Unis. 7. De la permanence des Chambres. 8. Le gouvernement présidentiel aux Etats-Unis. — 9. Le droit électoral de l'Angleterre depuis et y compris la réforme de 1832. - 10. Du droit de dissolution. - 11. Des enquêtes parlementaires.-12. De la sanction et de la promulgation des lois.

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13. Le pouvoir constituant en France depuis 1789. Leçons de droit administratif. - 1. Du partage des biens communaux. 2. De l'autorisation de plaider nécessaire aux établissements publics. 3. Du contentieux de la grande voirie. - 4. De la compétence et des pouvoirs du jury d'expropriation. 5. De l'interprétation des actes administratifs. 6. Distinction du domaine public et du domaine privé dans la France continentale. - 7. Des actes de gouvernement. - 8. Contre quels actes et par quelles personnes le recours pour excès de pouvoirs peut être formé. 9. Exposer et définir les attributions

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des ministres en matière contentieuse.

10. Des attributions des maires.

11. Des fins de non-recevoir que l'on peut opposer à un recours pour excès de pouvoirs à raison du délai ou à raison de l'existence d'un recours parallèle. 12. De l'alignement. - 13. Des règlements administratifs.

Leçons de législation financière. liquidation des dettes de l'Etat. impôts indirects.

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1. De l'impôt sur les boissons. 2. De la

3. Définir et comparer les impôts directs et les

4. Des exemptions et privilèges dont jouissent les rentes sur l'Etat. 5 De l'impôt foncier sur les propriétés bâties. — 6. De l'amortissement de la dette publique. 7. De l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières. — 8. Des taxes applicables aux communautés religieuses. - 9. De la conversion des rentes sur l'Etat. 10. Des transformations subies par l'impôt des patentes depuis son origine et des éléments dont il se compose aujourd'hui. — 11. Des différents modes d'emprunts d'Etat. 12. Des crédits additionnels au budget de l'Etat. - 13. Des garanties établies par la loi au profit de l'Etat sur les biens des comptables.

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Leçons de droit international public. 1. De la condition des étrangers en Turquie. 2. Des conditions de validité des traités. - 3. Des Etats vassaux. - - 4. De la mer territoriale. 5. Condition internationale de la Papauté. 6. Des conséquences qu'entraîne, au point de vue des institutions politiques et du domaine de l'Etat, l'occupation par un belligérant de certaines parties du territoire de son adversaire. 7. Des conséquences qu'entraînent la formation et l'extinction des Etats au point de vue du domaine, des dettes et des traitės. - 8. Des mesures d'ordre international auxquelles a donné lieu la réaction contre l'esclavage. 9. De la déclaration de guerre et de ses conséquences. 10. Comment l'état de 11. Du régime de navigation du Danube, du Niger et du Congo. 12. De la captivité de guerre. – 13. Des conventions, autres que le traité de paix, qui peuvent intervenir au cours d'une guerre.

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Composition écrite : Les dépôts en banque : à quoi ont-ils servi autrefois ? A quoi servent-ils aujourd'hui ? - Leçons d'économie politique. — 1. Comparer les assurances mutuelles et les assurances à primes fixes. 2. De l'influence d'une monnaie dépréciée sur le commerce extérieur. - 3. Le homestead. 4. De l'influence de la productivité du travail sur le produit des salaires. 5. Du profit de l'entrepreneur. Entre-t-il dans les frais normaux de production? 6. De l'intervention de l'autorité publique dans la fixation des prix. 7. Les admissions temporaires. 8. De l'invention et des meilleurs moyens de la stimuler. 9. Re

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chercher si, et dans quelle mesure, la loi doit réglementer les sociétés par actions. 10. Des effets économiques de l'absentéisme. 11. Comparer en matière de douanes les tarifs conventionnels et les tarifs autonomes. 12. Théorie quantitative de la monnaie.

Leçons d'histoire des doctrines économiques.

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1. La critique du système industriel dans Sismondi. 2. Histoire et appréciation des théories sur la nationalisation du sol. 3. Origine et développement de l'idée coopérative en Angleterre au XIXe siècle. - 4. Bodin et la question monétaire au XVIe siècle. 5. Le système d'économie nationale de Frédéric List. 6. Apprécier le développement et l'emploi de la méthode historique dans la science économique. - 7. Origines et tendances doctrinales du socialisme de la chaire en Allemagne. 8. La théorie sur le commerce des grains en France dans la seconde moitié du xvIe siècle. 9. Le mutuellisme de Proudhon. 10. La critique du mercantilisme dans Ad. Smith. 11. Examen critique de la théorie de Malthus sur la population. — 12. La doctrine des produits immatériels.

Leçons d'économie et législation coloniales. 1. Comparer en matière coloniale l'annexion et le protectorat (en se plaçant au point de vue de la France). 2. De la colonisation militaire : les plans proposés et les expériences réalisées dans les colonies françaises. 3. Du rôle que peut jouer la main-d'œuvre pénale dans une entreprise de colonisation. - 4. Etudier les causes qui ont généralisé, au xvi1° siècle et au xvme siècle, le système des compagnies privilégiées de colonisation. — 5. De l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises et anglaises. — 6. Etudier le système douanier actuel de la France avec ses colonies. 7. Le système de Wakefield. 8. De la colonisation anglaise dans l'Inde, ses procédés, ses résultats. 9. La colonisation officielle en Algérie. 10. De la colonisation considérée comme remède au pauperisme. 11. Le pacte colonial étudié au point de vue des colonies françaises et anglaises. 12. Avantages et inconvénients du régime des décrets dans les colonies françaises.

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5. La ques6. L'impôt

Leçons de science et législation financières. 1. De la taille en France à la fin de l'ancien régime. - 2. L'incidence de l'impôt foncier. - 3. La théorie de l'impôt sur le capital. 4. La question de l'impôt sur la rente française. tion de la péréquation de l'impôt foncier sur la propriété non bâtie. réel et l'impôt personnel. - 7. Les emprunts à lots. 8. De l'émission des emprunts publics au-dessous du pair. – 9. De la discrimination des revenus : tous les genres de revenus doivent-ils être taxés de la même manière? 10. Les taxes locales. 11. Les assignats en France pendant la Révolution. - 12. Des emprunts publics amortissables.

M. Henry Michel (1)

La Faculté de droit de Paris, très éprouvée depuis quelques années, vient encore de subir une perte cruelle. Un de ses plus jeunes professeurs, M. Henry Michel, est mort presque subitement, le 25 novembre 1897. M. Henry Michel avait d'abord appartenu à la Faculté de droit de Lyon jusqu'en 1878. Titulaire à Paris, depuis 1887,de la chaire de droit administratif,il avait transporté dans cet enseignement, les qualités de méthode, de logique et de clarté qu'avait développées chez lui l'étude

Etude (1) Principales publications: Du droit de cité romaine. In-8, 1885. sur les créances et les dettes de l'Etat. In 8, 1886. Traité des forêts (en partie achevé) destiné au Répertoire de droit administratif, etc.

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