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MORELLI.

LA FUNZIONE LEGISLATIVA

sité l'action des reflexes du système nerveux social, représentent les principes

libéraux (1). »

J'en passe et non des moins curieux. Ce qui précède est suffisant pour faire apercevoir que la comparaison du corps social avec le corps vivant n'est point abandonnée par tous, si quelques-uns semblent douter qu'elle ait une valeur absolue. Tel n'y voit qu'une métaphore sans conséquence philosophique ; tel un acte de foi dans le déterminisme universel; un grand nombre d'auteurs font la comparaison parce qu'elle est courante et s'en déclarent partisans sans en voir la portée, tout en se proclamant les adversaires du déterminisme. Position peu logique et dangereuse aussi, car ne risque-t-on pas de populariser et de répandre la thèse déterministe par cet emploi constant et inconsidéré des métaphores qui sont chères aux docteurs de l'école ?

(1) Ibid.. p. 388, 390, 391, 417.

ROBERT BEUDANT.

Professeur de droit constitutionnel .à la Faculté de droit de l'Université de Grenoble.

PÉRIODIQUES ALLEMANDS

I. Archiv für offentliches Recht (ARCHIVES DU DROIT PUBLIC), publiė par les Dr G. Laband, professeur à Strasbourg et Félix Stærk, professeur à Greifswald, Fribourg et Brisgau, 1895-1896, vol. XI.

1. Dr A. V. WEINRICH. Complément à l'enquête du ministre de la justice de Prusse, sur la liberté d'exercice de la profession d'avocatavoué) (p. 1-45).

La liberté de la profession d'avocat-avoué, reconnue depuis 1894 par la législation d'Empire, c'est-à-dire l'application du principe du libre choix des professions aux occupations des avocats-avoués a été maintes fois critiquée. Les motifs qui ont été invoqués par les adversaires de ce système ont paru suffisamment sérieux pour décider en 1894 le ministre de la justice de Prusse à procéder à une enquête à fins d'étudier différentes modifications à apporter à la législation sur ce point. C'est cette législation que l'auteur expose, et examine au point de vue critique. Les points mis en discussion par le ministre de la justice sont les suivants: 1) L'introduction du « numerus clausus ».

2) Faire dépendre l'admission au barreau de la condition que l'assesseur de justice (1) (gerichtsassessor) ait d'abord fait un stage de deux ans auprès d'une juridiction, ou comme clerc auprès d'un avocat.

3) Interdire l'admission de l'avocat auprès d'un tribunal collégial de première instance (Landgericht) quand le candidat n'a pas été auparavant, trois ans au moins, avocat auprès d'un tribunal à juge unique (Amtsgericht).

4) Faire dépendre l'admission auprès d'une Cour d'appel (Oberlandesgericht) d'un avis favorable de cette cour.

5) Pour empêcher qu'on ne tourne la loi, modifier le droit en vigueur de façon à ce que l'avocat accrédité près du tribunal du procès ne puisse plus transmettre la représentation des parties à un avocat non accrédité à ce tribunal.

L'auteur donne d'abord un aperçu des solutions proposées et des opinions émises sur ces questions, il se livre ensuite à leur critique.Sa manière de voir est, brièvement résumée, la suivante : il repousse les points 1) et 4) mais admet, sauf quelques modifications, les autres. Par suite, la libre pratique des avocats-avoués ne serait plus admise qu'auprès des instances inférieures de la justice, les Amtsgerichte, et leur admission auprès des juridictions supérieures serait liée à certaines conditions, entre autres: l'obligation d'avoir occupé antérieurement un office de justice, ou fait partie du barreau près d'un Amtsgericht. L'enquête n'a pas eu jusqu'à présent de résultat législatif.

Les explications de l'auteur (p. 6 et suiv.) sont surtout intéressantes pour ce qui touche la nature du barreau allemand, dont les membres sont à la fois avocats et avoués, alors qu'en Angleterre et en France ces fonctions sont remplies par des personnes différentes.

L'auteur indique comme rôle principal du barreau les plaidoiries devant la justice (faites en France par les avocats, en Angleterre par les barristers at law). Les avoués, attorneys, solicitors, s'occupent de la procédure, de l'échange des

(1) Pour être nommé assesseur de justice, il faut prouver sa capacité à occuper un office judiciaire, en passant deux examens. Les conditions exigées, sont d'après le droit en vigueur, les mêmes pour l'office d'avocat-avoué.

pièces entre les parties etc... Leurs fonctions sont comparativement inférieures aux fonctions consultatives et oratoires des avocats C'est ce qui a poussé beaucoup de personnes, parmi lesquelles l'auteur, à élever des doutes sur la valeur du système allemand qui unit les deux charges d'avocat et d'avoué dans la même personne. L'auteur pense (p.20) qu'en Allemagne le caractère de l'avoué a absorbé celui de l'avocat. « Une conséquence logique en est que l'avocat allemand (Retchsanwalt) ne jouit pas de la considération que possédent en Angleterre le barrister et en France l'avocat ».

Cette dernière opinion est certainement juste. La situation sociale plus modeste qu'occupe l'avocat allemand, comparativement à ses collègues français et anglais, s'explique surtout par la grande considération dont jouissent les fonctionnaires judiciaires et administratifs, considération qui exerce sur les jeunes étudiants en droit, au moment du choix de leur carrière une attraction bien plus grande que l'avocature simple.

2. Dr DELIUS.

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Du droit administratif des fonctionnaires exécutifs et des militaires à faire usage de leurs armes.

L'auteur énumère les cas dans lesquels les personnes sus-indiquées ont le droit de briser par les armes les résistances qui leur sont opposées dans l'exercice de leurs fonctions. Les fonctionnaires civils autorisés à faire usage de leurs armes sont les gardes-chasse et agents forestiers, les gardes-frontières, la gendarmerie et tous les autres fonctionnaires de la police exécutive (sergents de ville, agents de la force publique) enfin les fonctionnaires des établissements pénitentiaires et des prisons. Les autres fonctionnaires ne sont pas autorisés à faire usage de leurs armes. Cependant ils ne sont pas punissables en cas de légitime défense ou d'urgence (§ 53, 54, du Code pénal de l'Empire).

Les cas dans lesquels les militaires peuvent user de leurs armes sont plus limitativement indiqués par une loi prusienne de 1837, étendue aujourd'hui à tout l'Empire sauf la Bavière. D'après cette loi, ils peuvent se servir de leurs armes: lorsqu'ils sont requis par l'autorité civile pour le maintien de la sécurité et de l'ordre public; lorsqu'ils sont attaqués ou immédiatement menacés de l'être ; lorsqu'ils sont l'objet de voies de fait; lorsque le commandant des troupes somme une foule de révoltés de déposer les armes et qu'il n'est pas obéi de suite à cette sommation; lorsque, au cours d'une arrestation, la personne arrêtée prend la fuite ou simplement si elle essaie. Enfin toute sentinelle doit se servir de ses armes pour protéger les personnes et les choses remises à sa garde.

3. Dr HERMANN ORTLOFF. - L'administration de la justice dans la procédure criminelle (p. 198-250).

Il s'agit du ministère public: l'article est tout spécialement intéressant pour le lecteur français, en ce sens que l'institution du ministère public, qui était entièrement inconnue dans le droit allemand, a été tout récemment importée de France en Allemagne.

L'auteur soumet à une critique acerbe le ministère public, tel qu'il est institué dans le droit allemand actuel (Loi sur l'Organisation judiciaire et ordonnance sur la procédure criminelle, toutes deux datant de 1877). « Cette institution qui a été liée étroitement à l'impérialisme napoléonien, et au bureaucratisme de l'Etat policier, ne cadre plus avec l'organisation constitutionnelle d'Etat basé sur la légalité, et est antinationale» (p. 239).

Il blâme surtout dans cette disposition de lege ferenda le fait que le procureur est un organe plutôt politique que judiciaire qui, sans jouir des garanties de l'indépendance des juges, est obligé d'obéir aux instructions des organes hiérarchiquement supérieurs (Procureurs généraux, ministère de la justice), et cela même

quand l'injonction de ces supérieurs porte sur l'admission ou l'abandon de l'accusation.

En vue d'y remédier l'auteur demande pour le ministère public une indépendance égale à celle du juge qui ne dépend d'aucune autre autorité que de la loi. Par là seulement, selon lui, on pourra rendre effectif le principe de legalité, c'està-dire une exécution de la loi pénale, illimitée, et affranchie de toute considération administrative ou politique, tandis que sous l'empire de la législation actuelle c'est le principe opposé, celui d'opportunité qui triomphe non pas, il est vrai de jure, mais de facto.

:

Les déductions de l'auteur portent la marque d'un pessimisme qui n'est pas justifié par la réalité des faits. On peut leur opposer avant tout que, en vertu des § 170-176, de l'ordonnance sur la Procédure criminelle, celui qui est lésé par un acte punissable peut, en raison de la non intervention du ministère public (refus de soutenir l'accusation) s'adresser directement à la Cour d'appel, c'est-àdire à l'instance indépendante désirée par l'auteur.

5. Dr J. GRASSMANN. Le Chancelier de l'Empire et le ministère d'Etat prussien. Contribution à la critique de la théorie de Haenel, sur la puissance publique de l'Empire (p. 309-347).

Grassmann appartient à l'Ecole bavaroise de droit public qui,sous la direction de Seydel soutient énergiquement le caractère fédéral de l'Empire allemand par opposition à la théorie dominante d'un Etat unitaire; admise par Laband, Schulze, Zorn, Bending, Georg Meyer et surtout Haenel. Avec une grande profondeur de vues juridiques, Seydel cherche à démontrer que l'Empire n'est pas un Etat : (il lui refuse tout caractère d'état fédératif) mais seulement « un rapport conventionnel des Etats confédérés les uns vis à vis des autres ».

Grassmann cite Haenel, le plus ardent défenseur de la théorie unitaire (p.309). « L'Empire, comme expression unitaire de toutes les puissances publiques allemandes, c'est tout simplement l'Etat allemand. Les Etats simples ne sont que des institutions et des organes de l'Empire, sans caractère étatique; la situation légale des territoires allemands, en tant qu'ils appartenaient à l'ancien Empire est réduite, par la constitution du nouvel Empire, de la pleine souveraineté passagère, à un pouvoir local. »>

L'article de Grassmann est une énergique protestation contre cette construction de l'Empire comme un Etat d'unités décentralisées: il ne résout cependant pas complètement cette question fondamentale du droit public allemand, mais met hors du débat un point isolé dont le jugement dépend de la façon dont la critique résout une autre question générale importante: la situation du Chancelier de l'Empire allemand au point de vue général, et en particulier, sa situation par rapport au ministère d'Etat de la puissance dirigeante, la Prusse cf. la dissertation de Seydel: le Chancelier de l'Empire allemand,dans la Revue du droit public, 1895, IV, p. 426 et s.) C'est la considération suivante qui en est le point de départ L'Empereur allemand à qui appartient, d'après l'art. 11 de la Constitution de l'Empire, la présidence de la fédération n'a, en cette qualité aucun droit monarchique. L'éclat du titre impérial ne doit pas faire illusion: la puissance impériale (Kaiserthm) qualification donnée par la Constitution à la présidence fédérale est une puissance prussienne, non au-dessus de l'Empire mais dans l'Empire (Reich). Le pouvoir présidentiel n'est pas la manifestation d'une supériorité hierarchique de l'un des Etats fédérés, mais l'expression de l'hégémonie de l'un d'eux (qui à lui seul est deux fois plus grand que les vingt-quatre autres réunis) sur l'ensemble de la fédération allemande.

L'union perpétuelle de la présidence fédérale avec le couronne de Prusse garan

tit seule, d'après l'auteur, la condition d'existence de l'Empire à savoir que le gouvernement du plus puissant des Etats fédérės gardera toujours les mêmes tendances politiques que l'Empire. Cette concordance et cette unité sont assurées au point de vue constitutionnel par la circonstance que l'Empereur allemand et le roi de Prusse sont nécessairement une seule et même personne ; mais les titulaires (Träger) de la responsabilité constitutionnelle sont pour l'Empire et pour la Prusse des personnes différentes. Dans l'Empire c'est le Chancelier : en Prusse c'est le ministère d'Etat prussien (un Conseil de ministres mais sans président à voix prépondérante.) Ici il y a donc possibilité de frottements et de difficultés qui, il est vrai, ne se sont jamais produits tant que Bismark a mené concurremment et pleinement le gouvernement de l'Empire et celui de la Prusse.

Grassmann espère, dans l'avenir rendre de tels conflits impossibles par une mo dification aux constitutions de l'Empire et de l'Etat prussien il serait établi : 1) Que le Chancelier sera toujours en même temps président du ministère prussien.

2) On accordera au ministère prussien le droit qu'il ne possède pas actuellement de prendre des décisions per majora, obligatoires pour chaque ministre et aussi pour le président du ministère.

Autrement dit le ministère prussien deviendrait l'organe véritablement compétent pour toutes les affaires de l'Empire dans toute l'étendue de la compétence de l'Empereur. La fonction de Chancelier serait abaissée et deviendrait un simple portefeuille des affaires allemandes dans ce ministère. L'administration de la présidence fédérale n'en serait qu'une section. Certainement l'unité des politiques de l'Empire et de la Prusse serait par là assurée, mais par l'anéantissement de l'indépendance de la puissance impériale. C'est là un prix qui paraîtra certainement exagéré à la majorité des Allemands.

5. Dr KARL HELFFHERISCH. De la nature juridique d'une monnaie commune à plusieurs Etats (p. 386-419).

Le système monétaire moderne repose, par opposition aux monnaies commerciales du moyen-âge (qu'on se rappelle les monnaies d'or en cours à cette époque: tels que besants, florins, ducats) sur le principe que toute monnaie est monnaie d'Etat. Chaque Etat a une monnaie qui lui est propre. Mais il peut se présenter des cas où cette monnaie jouit du caractère de monnaie dans plusieurs Etats : l'exemple le plus important en est aujourd'hui la monnaie du franc, de l'Union latine. Les recherches approfondies de l'auteur sur la nature juridique de ce système monétaire international, et surtout sur la question des devoirs internationaux des Etats au sujet du retrait de leur monnaie P'ont conduit aux résultats suivants.

La frappe de la monnaie n'a en elle-même aucune signification juridique : ce qui importe c'est l'attribution de la qualité monétaire au métal. Ce n'est pas de la frappe de la monnaie qu'on peut déduire le devoir de retrait, mais du fait de lui avoir donné la qualité monétaire.Il en résulte que ce droit et ce devoir de retrait ne peuvent exister qu'entre la puissance publique d'un Etat, et ses sujets, et non entre Etats souverains.

Le devoir de retrait n'est donc pas de droit international et n'est que de droit public. Au contraire, ce devoir, lorsqu'il s'agit d'une monnaie à laquelle le caractère monétaire a été conféré par plusieurs Etats (p. ex. la pièce de 5 fr. française, belge, suisse, etc...) existe pour chacun de ces Etats, et cela dans la mesure de sa circulation monétaire de fait. L'exécution pratique de ce retrait peut se heurter à des difficultés, car il peut être à peu près impossible de fixer l'étendue de fait de la circulation monétaire d'un Etat. Il faudra donc avoir recours aux conventions internationales pour fixer d'une manière rationnelle la part contributive

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