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Nous relevons à l'article Bréhier le nom d'un des doyens de l'archéologie bretonne, M Ernest de Bréhier, connu aussi par des travaux littéraires et celui de Me Delafaye, née Julie Bréhier, qui, pendant près d'un demi siècle, a écrit pour l'enfance des récits historiques ou romanesques, entre autres Les petits Béarnais, un des classiques du genre. Citons encore parmi les Bretons qui ont écrit et se rencontrent au présent fascicule : René Brelet de la Rivellerie, théologien et recteur de Saint-Nicolas de Nantes; M. Paul Brémand, médecin principal de la marine; Jean-Baptiste Breny, prètre assermenté de 1791; M Charles Brenugat, poète et auteur dramatique; l'abbé Bretécher, auteur d'ouvrages sur la musique. Quant à Antoine Bret, le commentateur de Molière, il pouvait tirer son nom de Breton, mais il était de Dijon. Parmi les Breton eux-mèmes, que M. Kerviler a complaisamment énumérés, nous ne pouvons guère revendiquer qu'un poète-historien du XIVe siècle, Guillelmus Brito; un autre religieux de la mème époque, un jacobin de Guingamp, au XVIIe siècle; un professeur d'histoire, un poète au XIX; la plupart sont nés hors Bretagne, et les droits de la vieille province sont bien légers sur tous ces hommes distingués, mème sur le plus illustre, le peintre Jules Breton, qui a bien (comme le dit l'excellent bibliographe) les caractères de la race dont il porte le nom.

A l'article Bretagne », M. Kerviler a eu l'heureuse pensée de donner l'état général, la liste généalogique des comtes ou princes souverains, ducs et membres de la famille souveraine de Bretagne. Ce résumé substantiel lui permet de réparer une omission de son article « Avaugour, il avait oublié de citer Marguerite de Bretagne-Avaugour, dame de Goulaine, dont les poésies toutes ronsardiennes ont été publiées par M. de la Borderie dans les Mélanges de la Société des Bibliophiles bretons. Les Bretagne hors Bretagne » nous suggéreraient la mème observation que les Breton de partout, ou les Bretonneau de Tours.

A son ordinaire, M.Kerviler enregistre d'assez nombreux pseudonymes; celui de Yan Braz (Ed. Le Marant de Kerdaniel); celui d'André et de Georges de Brech (M. Georges de Cadoudal); celui d'Alfred de Bréhat (le roromancier Guezenec); celui de Breiz, celui de Lucien de Breuneville (Edouard Perlié); celui d'A. de la Breure (le R. P. Libercier); celui d'Yves Breton Robert Oheix), enfin celui d'Un Breton qui a servi « de masque à bien des écrivains d'autrefois ou d'aujourd'hui ».

Au chapitre des curiosités, M. Kerviler s'est souvenu, après M. Albert Macé, de Jean-Noël Brelivet, vicaire perpétuel de Saint-Gildas d'Auray, refusant en 1791 de chanter le service solennel pour Mirabeau, et il a

reproduit l'acte de mariage de Jeanne Brenugat, la mère de René Le Sage, relevé par M. de l'Estourbeillon sur les registres paroissiaux de Notre-Dame de Redon.

Notons qu'une veuve Bréant, de famille nantaise, était receveuse de la loterie impériale à Nantes en 1814 : nous ne la trouvons pas citée chez M. Kerviler.

C'est là une addition minime, mais la Bio-Bibliographie bretonne ne néglige rien. M. Kerviler ne ressemble pas au préteur de Rome et il se montre, à chaque instant, un grand auteur de petites choses. OLIVIER DE Gourcuff.

ASPHALTE et GALETS, échos des grèves de Haute-Bretagne, par le vicomte H. de Tournemine. - Rennes, Hyacinthe Caillière, 1892.

M. le vicomte de Tournemine, qui appartient à une des plus vieilles familles de Bretagne et compte parmi ses ancêtres un des membres les plus spirituels de l'ordre religieux le plus renommé pour ses hommes d'esprit, n'est point un inconnu pour les lecteurs de revues bretonnes ; mais le volume qu'il intitule avec quelque raffinement < Asphalte et Galets », est, je crois, son premier né, un enfant charmant et qui mérite de faire son chemin dans le monde. La fausse comtesse de la première nouvelle, malgré son origine forestière; Christian de G., l'artiste boulevardier de la Dot de Rose; Adhémar, le piteux séducteur d'Un verre de Lacryma-Christi, et l'ex-boutiquier Anatole, un Protée aux allures prudhommesques, représentent l'Asphalte; quant aux Galets, ils se personnifient en de solides pècheuses ou des matelots jacuins, parlant le français salé de ce coin du littoral breton. C'est en effet dans la bourgade de Saint-Jacut de la Mer, qui garde le monument de dom Lobineau et les préférences de M. Richepin, que le vicomte de Tournemine a fixé sa résidence et déroulé la plupart de ses récits L'aimable écrivain a des qualités assez rares, l'aisance et la grâce, une franche et saine gaieté qui se voile parfois d'émotion, une tendresse pour le sol natal qui est un titre à nos vives sympathies. Je lui reproche l'affectation du parler parisien, un peu de trivialité et surtout de prolixité dont la lecture d'un maître au style serré comme Guy de Maupassant le débarrasserait vite. Avec sa pimpante couverture illustrée et d'agréables dessins (certains culs de-lampe sont de vraies petites marines) le volume réunit tous les attraits. O. DE G.

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NOTICE GÉNÉALOGIQUE SUR LA MAISON DE LA FONTENELLE, par le
Vte Paul de Chabot. Vannes, librairie Lafolye, 1892.

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Utilisant les papiers de famille des La Fontenelle qu'il possède et les complétant par des recherches, M. le Vte Paul de Chabot a écrit une généalogie intéressante de cette ancienne famille poitevine, éteinte en 1858 en la personne d'Eugène-Charles- Armand de la Fontenelle. Outre les La Fontenelle proprement dits, la famille comprenait la branche de la Maison-Neuve et la branche de Vaudoré. De celle-ci est sorti ArmandDésiré de la Fontenelle, ancien officier vendéen, mort en 1848, conseiller à la cour de Poitiers, auteur de très nombreux ouvrages d'histoire et d'archéologie dont M. le Ve de Chabot a dressé la précieuse bibliographie. O. DE G.

BOSSUET, HISTORIEN DU PROTESTANTISME, par Alfred Rébelliau, ancien élève de l'École normale supérieure, maître de conférences à la Faculté des lettres de Rennes. Paris, Hachette, 1891.

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Esprit étroit, ennemi de l'instruction qui gènait ses partis pris, rempli de cette sotte prétention qu'a l'esprit français de suppléer à la science par le talent, indifférent aux recherches positives et aux progrès de la critique... fondé de pouvoirs de tous les défauts de l'esprit français,» tel est le jugement sommaire que M. Renan a bien osé porter sur Bossuet (préface de l'Histoire critique des livres de l'Ancien Testament, par A. Kuenen, traduite par A. Pierson, 1866; cf. Bossuet, historien, etc., préface, p. III, note).

L'étude de M. Rébelliau sur l'Histoire des variations nous offre la rétutation savante et documentée de cette ignorante et prétentieuse exécution de l'illustre évêque de Meaux. C'est vraiment plaisir de lire ces pages où l'érudition intelligente et la critique impartiale se prêtent un mutuel secours, où partout une exposition claire et facile, un style limpide, nous font pénétrer sans effort dans des discussions de textes parfois obscurs, dans des exposés d'erreurs subtiles. M. Rébelliau montre TOME VIII. SEPTEMBRE 1892.

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une sincère admiration pour Bossuet, et cette admiration, il nous la fait partager, tant il sait nous initier habilement à la pensée du grand prélat, mettre en lumière les soins, les précautions sans nombre dont il s'entourait pour arriver à la vérité; nous faire toucher du doigt l'inanité de presque toutes les attaques dirigées contre l'œuvre qu'il étudie ! Ce n'est pas à dire que M. Rébelliau soit un admirateur de parti pris, non; si l'argumentation de Bossuet ne lui paraît pas concluante, il le dit, et il a raison (cf. liv. III, ch. IV).

Faut-il maintenant signaler quelques taches dans ce travail?

On regrette d'abord que l'auteur ne nous fasse point pénétrer plus intimement dans l'œuvre même de Bossuet et se contente de nous en montrer surtout les dehors. On connaît avec M. Rébelliau les origines, les sources et le succès de cette Histoire. C'est très bien, mais ce n'est pas assez, semble-t-il. On serait heureux de faire, à la suite d'un guide aussi sûr, une petite excursion à travers les pages elles-mêmes de Bossuet, ne fût-ce que pour se rappeler les principales idées développées'. M. Rébelliau a cru sans doute qu'il serait dangereux à qui n'a pas approfondi la théologie de toucher à ces questions. Ce scrupule l'honore.

C'est encore sans nul doute ce manque de science théologique qui nous vaut çà et là quelques idées tout au moins hasardées. Ainsi, pour n'en citer qu'un exemple, le catholicisme ne serait pas, d'après le docte écrivain, l'ennemi acharné de la superstition, du moins au même degré que le calvinisme (p. 30).

Comment aussi, à propos de la croyance au merveilleux diabolique, que M. Rébelliau signale chez les hommes du XVIe siècle, et de l'entretien de Luther avec le démon, l'auteur rappelle-t-il les « visions d'Ignace de Loyola à Mancèze » (p. 445, note)? Il n'y a nulle assimilation possible entre deux choses si contraires; si M. Rébelliau a le loisir de s'occuper de ces matières, il le constatera sans peine.

Ailleurs (p. 73 et passim) l'éloge des port-royalistes paraît trop enthousiaste des ouvrages récents fort sérieux, même les Histoires jansénistes de Clémencet, Besoigne et autres, lues avec perspicacité, nous présentent ces révoltés sous un jour moins favorable. Par contre, le

L'auteur parle (p. 72) d'un « conseil spécial établi pour travailler à la réunion » des catholiques et des protestants, et dont auraient fait partie, dès 1666, les PP. Annat et Le Tellier. Pour ce qui regarde ce dernier, il y a certainement erreur ce religieux, âgé seulement alors de 23 ans et n'ayant point encore étudié la théologie, ne pouvait avoir été désigné par ses supérieurs pour une fonction de cette importance.

jugement sur Pallavicini,

le célèbre historien du Concile de Trente >

(p. 166), est d'une sévérité excessive.

Nous espérons que dans la nouvelle édition qu'un travail si consciencieux ne peut manquer d'avoir prochainement, ces taches auront disparu, et qu'une table alphabétique des noms propres, ajoutée à l'ouvrage, aidera à mettre à profit les trésors d'érudition renfermés dans ces pages.

P. BLIARD,

Professeur à l'Ecole libre Saint-François-Xavier, Vannes.

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