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tial (1). L'Almanach intitulé La France littéraire ou les Lettres et Arts dont on a donné cette année une nouv. édit., est connu à Avignon; vous y lirés une très grande partie de ce qui me concerne en qualité d'écrivain (2). Je vous souhaite une parfaite santé et une augmentation d'ardeur pour l'étude, qu'il me paroit que vous aimés beaucoup. Tuus ex animo.

A Paris, ce 8 février 1756.

VII

...

1759.

J'ay reçu avec votre obligeante lettre les deux memoires abregès que vous aves eu la bonté de m'envoyer. J'aurois souhaitté qu'ils renfermassent un plus grand detail et que vous eussiés eu la complaisance d'ajouter à la notte de leurs auteurs, dont vous faites mention, la date de leur impression et les lieux differents où on en a fait des éditions. Je vous fais mes remerciemens sur les promesses que vous me faites de me donner des éclaircissemens; ils ne pourront qu'être estimables lorsqu'ils sont donnés par des personnes qui écrivent avec autant de delicatesse que vous le faites, et vous voudrés bien me permettre dans (sic) faire mention dans le tems.

Au reste, je ne saurois vous dire au juste le nombre de vol. que renfermera l'hist. en question (3). Nous prendrons pour forme des

(1) Sous-entendu, en faveur de la doctrine anti-janséniste. Le Dictionnaire historique portatif de l'abbé Ladvocat, docteur, bibliothécaire et professeur de Sorbonne, parut pour la première fois en 1760, et obtint un grand succès non seulement en France mais à l'étranger. De nos jours encore, j'ai entendu dire en Italie : « Un Ladvocat » pour un dictionnaire historique. Nous trouvons ici la première indication du projet d'un Nouveau dictionnaire historique portatif de la part de Chaudon. Cet ouvrage ne devait paraitre qu'en 1766. Dom Chaudon s'est éloigné à la fois, comme dit un de ses biographes, « de la prolixité de Moréri et de la sécheresse de Ladvocat. »

(2) La France littéraire, des abbés d'Hébrail et de Laporte, parut pour la première fois en un seul volume en 1751; on la désignait alors sous le titre d'Almanach des Beaux-Arts. Elle fut augmentée, améliorée et agrandie les années suivantes. Dans l'édition de 1769, en 2 volumes in-8', que j'ai sous les yeux. l'article Goujet est passé de la série des auteurs vivants à celle des auteurs morts (t. n, p. 52-54).

(3) Je n'ose décider de quelle histoire veut parler ici l'abbé Goujet. Il est fâcheux qu'il ne nomme pas son ami qui avait la principale charge de l'entreprise. On se croirait aidé dans cette recherche par le nom du P. Bougerel, auteur des Vies des hommes illustres de Provence qui devaient former quatre volumes in-quarto et par celui de Roubaud, auteur d'une Histoire générale de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique qui ne parut qu'en 1770 et années suiv. 5 volumes in-quarto. On ne trouve dans les mémoires de Goujet sur lui-même, rien qui se rapporte à un projet de ce genre. Il est donc probable que ce projet n'eut pas

de suite.

in 8o et à vue de païs il y en aura une quinzaine. On n'a point travaillé d'après les mémoires du P. Bougerel, encore moins d'après ceux de M. l'avocat Roubaud, dont vous me parlés et que je n'ay pas l'hon neur de connoitre. Mon ami fait depuis longtemps des recherches dignes d'un amateur. Il parcourt avec un zèle infatigable les bibliothèques où il espere trouver des matériaux qui puissent l'aider à remplir ses vues, et s'il étoit persuadé que M. Roubaud dut bien recevoir ses demandes i prendroit auprès de lui des éclaircissements dont il pourroit faire usage. Il se fairoit de son côté un vray plaisir de lui en donner à lui-même et comme il ne collectionne que pour la gloire de sa patrie et celle des lettres, il se portera toujours à ce qui pourra contribuer à l'un ou à l'autre de quelque part que cela vienne. Je vous auray obligation d'adresser dors en avant vos lettres ou paquets à M. Aubanel (1) pour m'être rendus. Vous m'enpêcherés par là d'ajouter de nouveaux frais à ceux que j'ai déjà faits et vous obligerės celui de vos serviteurs qui vous estime le plus et qui est avec. (Le reste a été déchiré, mais c'était la fin de la lettre).

...

VIII

Monsieur.

Je viens de lire vôtre lettre, qui n'est parvenue à Paris que dans un tems où j'en étois éloigné. Un ecclesiastique de vôtre nom et de vôtre famille m'avoit appris vôtre engagement dans le monastère de Lérins (2). Je suis charmé que vous travailliés à l'histoire d'une maison qui a produit tant de saints et d'hommes de lettres. Je ne connois sur ce sujet que l'ouvrage latin in -4° de Vincent Barrali, imprimé en 1613, à Lyon. Je l'ai dans ma bibliothèque (3). Ce que vous voulés bien soumettre à mon jugement ne m'a pas encore été communiqué. Je le lirai quand il me sera parvenu.

(1) On sait que les Aubanel étaient les imprimeurs du Pape en Avignon et que notre contemporain, le glorieux félibre, auteur de la Miougrano entroduberto, était fier de ce titre.

(2) La congrégation de Lérins dépendait depuis le xvr siècle des Bénédictins du Mont-Cassin. Cette union fut cassée par un arrêt du 26 mars 1740, qui rattacha le monastère à la Congrégation de Cluny, ancienne observance; ce qui donna lieu à de nombreuses et longues discussions. Force resta cependant anx ordres du roi et les religieux de Lérins devinrent Clunistes. Mais Chaudon ne tarda pas à quitter l'ile pour trouver dans la résidence de Mézin un climat plus favorable à sa santé, et ses projets pour l'histoire de Lérins furent définitivement abandonnés.

(3) Vinc. Barrali, monachi Lerinensis, Chronologia Sanctorum et aliorum virorum illustrium ac Abbatum insulæ Lerinensis. Ludg. apud Thomam Soubron, in-4, 1613.

L'article qui me concerne dans le Nouveau Moréri y a été mis malgré moi. M. l'abbé Ladvocat a très bien fait de m'oublier. Quant au P. Guillebaud, vous le croyés, sans doute, auteur du Diction. Hist. en 6 vol. in-8°. Il y a eu très peu de part; j'en connois l'auteur (1), et je ne lui ai pas permis d'y parler de moi dans un article separé. J'ai l'honneur d'être avec estime, Monsieur, vôtre très humble serviteur. A Paris ce 13 octobre 1762.

Borda et la mairie de Dax

A-t-on pris note d'une curieuse lettre de Borda publiée dans la Gazette anecdotique du 31 juillet 1880 (2)? Peut-être que non; et dans ce cas il ne parait pas inutile d'y revenir, dans l'intérêt de la biographie de Borda et surtout de l'histoire municipale de Dax. Dans cette lettre, datée d'Orole, 23 juillet 1776, l'illustre marin invoque la protection du chimiste Macquer pour éloigner de lui la dignité de maire pour laquelle la ville de Dax l'avait présenté au choix du roi. Il s'est déjà adressé au ministre Bertin pour obtenir d'être laissé à sa campagne et au travail qu'il a entrepris. Mais il donne encore à son correspondant d'autres motifs de sa répugnance, qui jettent un jour piquant sur la situation municipale de Dax.

Les magistrats de la ville sont dans une guerre continuelle, tantôt avec des corps particuliers, tantôt avec l'état-major. Souvent ils se trouvent entre les volontés contraires du parlement et de l'intendant, alors ils sont les victimes de l'obéissance qu'ils rendent à l'un d'entre eux. Les fonds de la ville sont fréquemment au pillage: il faut ou le tolérer contre son devoir, ou s'attendre à la persécution de ceux qui exercent ces rapines. A tout cela, Monsieur, j'ajoute encore que celui qui sera choisi ne pourra qu'être très désagréable au maréchal de Mouchy, commandant de la province. Il avoit recommandé très fortement un sujet qui n'a eu aucun suffrage. Ces differens inconveniens sont tels à mes yeux que je leur preferasses (sic) volontiers toutes les disgraces auxquelles je pourrois m'exposer par le refus le plus constant de la place pour laquelle ou m'auroit choisi. »

(1) L'auteur de ce dictionnaire ultra-jansóniste était l'abb Barral, de Grenoble, mort à Paris le 21 juillet 1772. Quérard assure que deux oratoriens, les PP. Guibaud (c'est sans doute celui que Goujet appelle Guillebaud) et Valla (bien connu comme auteur de la Philosophie et de la Théologie de Lyon) ont eu part à la composition de cet ouvrage : Diction. hist., litt. et eritique, 1758. L'abbé Barral devait étre en effet bien connu de Goujet : il fut l'éditeur des Mémoires historiques et littéraires de ce dernier, que j'ai cités plusieurs fois dans ces

notes.

(2) Communiqué par C. Henry au directeur de la Gazette.

BIBLIOGRAPHIE

Archives historiques de la Gascogne, 2° série, 5 fascicule. -LES HUGUENOTS EN COMMINGES, documents inédits publiés pour la Société historique de Gascogne par l'abbé J. LESTRADE. Paris, H. Champion; Auch, Leonce Cocharaux. 1900. Un vol. gr. in-8 de x1-428 p.

Cet important fascicule continue les contributions fournies déjà par notre Société à l'histoire, encore si confuse et si dispersée, des troubles religieux du XVIe siècle dans le sud-ouest de la France. Il se relie donc à la série de documents publiée en 1884 par MM. Durier et l'abbé de Carsalade sur les Huguenots en Bigorre (1) et en 1885 par M. Communay sur les Huguenots dans le Béarn. Ce nouveau travail ne perdra rien à être comparé avec les précédents, dont les meilleurs juges ont dit tant de hien. Il n'épuisera pourtant pas la longue histoire que je viens de caractériser. Il excitera peut-être, au contraire, d'autres chercheurs à étudier le passage des protestants dans plusieurs autres diocèses gascons dans celui d'Auch, encore trop peu étudié à cet égard, malgré les précieuses notes de plusieurs travailleurs et surtout de M. le comte de La Hitte (2); dans celui d'Aire, bien mieux connu, surtout par le Verbal de Charles IX, édité dans les deux premiers volumes de cette Revue, mais qui gagnerait à reparaître dans un texte plus correct et avec une abondante provision d'explications historiques... Je crois savoir que M. Lestrade lui-même a presque réuni les matériaux d'un autre recueil qui nous révèlerait précisément le point de départ des bandes huguenotes, dont nous pouvons suivre la marche dévastatrice en Comminges, en Bigorre et en Béarn, grâce aux trois fascicules que je viens d'indiquer. Puisse ce nouveau projet aboutir heureusement, et plaise à Dieu que nos chères Archives aient encore la bonne fortune de le distribuer dans un prochain avenir !

Mais c'est des Huguenots en Comminges que je dois me préoccuper aujourd'hui. Je viens de les louer assez en les comparant. Et en effet. à regarder la méthode et la composition du recueil, on s'aperçoit bien vite qu'il réalise le problème si difficile de rendre non seulement aisė à consulter, mais intéressant à la lecture, un amas de pièces d'archives. Ce résultat a été obtenu surtout par les notices préliminaires et complé

(1) On me permettra de rappeler l'analyse étendue que j'ai faite de ce travail dans la Revue de Gascogne de 1884, p. 537.

(2) Dans la Revue de Gascogne de 1881, p. 81, 141, 177, 366.

mentaires qui rattachent les documents les uns aux autres, en font ressortir le sens et l'intérêt et y ajoutent bien souvent des détails essentiels empruntés à d'autres sources historiques imprimées ou inédites. A considérer la valeur des pièces elles-mêmes, il n'en est vraiment pas d'indifférente, et considérable est le nombre de celles qui jettent un jour tout nouveau sur des points même importants de notre histoire provinciale. Un des principaux attraits pour les lecteurs préoccupés de la biographie du xvIe siècle, ce seront assurément les lettres de Blaise de Monluc qui ont échappé aux recherches de son éditeur, le très regretté baron de Ruble. Il en apprit quelque chose avant sa mort, non sans surprise il avait tant fouillé un peu partout! Mais les archives du Comminges lui avaient échappé. Personne ne lui avait dit que cet important dépôt était soigneusement conservé à l'hôtel-de-ville de Muret. C'est là que M. J. Lestrade a puisé à pleines mains, sans négliger pourtant un grand nombre d'autres dépôts et surtout les Arrêts du Parlement de Toulouse, les Archives départementales de la Haute-Garonne, celles du Séminaire d'Auch, les papiers de Larcher à Tarbes, etc. Malgré tous ces soins, plus d'un texte lui aura échappé sans doute; mais la moisson qu'il nous présente n'en est pas moins riche et substantielle. L'intérêt en est capital, non seulement pour l'histoire militaire et religieuse du protestantisme, mais encore et surtout pour la connaissance de l'activité et de la vie propres du comté de Comminges et de beaucoup de bonnes villes, dont plusieurs nous touchent de très près Lombez, Samatan, l'Isle-Jourdain, Lavit-de-Lomagne, etc. L'ensemble forme d'ailleurs, comme je l'ai insinué, une action historique bien complète et bien suivie et qui a l'avantage de révéler, avec plus de précision que les ouvrages généraux, le vrai caractère des faits et des personnes. M. Lestrade fait ressortir ces importants résultats dans l'excellente introduction qui ouvre son recueil. Avec le secours de ces pages et les notes prises dans tout le volume, j'avais l'idée de présenter une fidèle analyse de celui-ci. J'aurais ainsi suppléé de mon mieux le spécialiste qui m'avait promis de rendre compte ici même de la publication de M. Lestrade, mais à qui des raisons trop légitimes ont interdit ce travail. Ma tàche d'analyste eût été facile et agréable; mais dans une Revue encombrée de copie originale, elle aurait facilement dépassé les justes bornes. C'est pourquoi je crois mieux servir nos lecteurs et l'auteur lui-même en insérant ici le jugement d'un recueil périodique, d'une érudition et d'une critique sûres et sévères. On sait que la Revue historique passe, malgré son idéal d'impartialité, pour incliner plutôt du côté protestant ou juif que du côté catholique. On

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