Emerson, avec son penchant au symbolisme, ne pouvait échapper à la tentation d'en faire une entité à laquelle il prete d'étonnantes vertus. C'est une illusion semblable à celle qu'on a notée chez Bryant. Avec un peu, non tout à fait de ce pédantisme, mais de ce ton doctrinal d'un essayiste qui n'a ni la bonhomie de Montaigne, ni la finesse de Charles Lamb, Emerson a exposé ses idées sur le sujet, en son dix-huitième essai intitulé Nature. Il s'agit des solitudes forestières et de leur influence réconfortante. L'Amérique avait alors, çà et là, des aspects de Thébaïde. Comme jadis les saints, en ces temps-là les romanciers, les poètes et les philosophes fuyaient le monde, allaient vivre au désert. Hawthorne fermait aux hommes les portes de son old manse; Whinttrop vagabondait solitaire sur les bords de l'Orégon; Thoreau, un civilisé retourné à l'état sauvage, demeurait au lac Walden, dans un log-hut édifié de ses mains, restait des années sans autre compagnie que les bêtes, les fleurs et les arbres. Tous fuyaient l'horreur d'une civilisation sans poésie et sans dignité. A ceux qui n'ont ni le loisir ni le courage de suivre ces exemples, Emerson conseille au moins d'aller de temps GET NEWSTERN à autre se retremper dans la nature : « Ses enGHARM chantements sont curatifs. » La saison poétique, c'est l'automne. Comme Bryant, Emerson aime cette saison mourante; il y a dans sa poésie quelque chose d'automnal : « Octobre. Le jour mois enso Then came the Autumn all in yellow clad, Mais le vieux rimeur songe quelque peu Bacchus; nos deux poètes, sobres et chastes, à peine à quelque dryade rêvée. Ah! si l'homme du monde, nous dit Emerson, l'homme d'affaires, voulait seulement venir jusqu'à la lisière des bois : là commencent une sainteté et une sincérité religieuse, là tous ceux qui viennent en amis sont accueillis avec une sympathie profonde et qui jamais ne se dément. << Car la nature est toujours fidèle A celui à sa fidélité Quand la forêt mus ser m'a bgaré, ront menti, nourrir, -- Quand la nuit et le matin au- Alors seulement, il sera temps de 29 pas de couvrir disparu (1). » CLAY Les restes de leur amoureux C'est une sorte de culte, qu'en son panthéisme IRRE fottant, Emerson professe pour la nature. Pour lui, elle a du divin, elle n'est point profane. « Il semble qu'une journée n'a pas été tout entière profane, où quelque attention a été donnée aux choses de la nature. » Dans la tombée de la neige, le passage du vent qui ride la surface des eaux, la chute bruissante du grésil sur les feuilles mortes, la réflexion des arbres et des fleurs par le miroir d'un lac, le murmure odorant du vent du sud, il voit « les images de la plus ancienne religion ». De pénétrer tout au fond en la métaphysique de la nature, selon Emerson, ce n'est ici le lieu puisqu'on ne veut montrer que le poète, endower doué, à un haut degré, du sens champêtre, et il faut, renvoyant de plus profondes analyses à referung from (1) For Nature ever faithful is To such as trust her faithfulness. When the forest shall mislead me, When sea and land refuse to feed me, Then will yet my mother yield A pillow in her greenest field. Nor the June flower scorn to cover The clay of their departed lover. (Woodnotes, I.) une étude sur le penseur, se borner à la notation des caractéristiques les plus notoires. •well nown Emerson est un esprit religieux, s'il en est de tels hors de la religion même. L'homme qu'il comprend est sujet au mal, n'arrive au bien que d'un effort de volonté, et ce bien, quel est-il ? Nous retrouvons les systèmes vains et faux du XVIII° siècle, la grande et déplorable hérésie de Jean-Jacques : le bien, c'est la conformité de la volonté individuelle avec la nature, bonne en soi drsne peut faillir. Même sa frequenta tion panse les faiblesses morales comme les faiblesses corporelles : « Viens! (c'est le pin forestier qui chante), viens t'étendre sous mon ombre calmante, y guérir les blessures que t'a faites le pèche. » Facile absolution, mais quoi d'étonnant selon les idées du poète, puisqu'en cette même nature douée de tant de vertus on rencontre l'infini même, le Seigneur que Moïse vit en la forme d'un buisson ardent qui, sans se consumer, brûlait! SAFE << Oh! quand je suis à l'abri dans ma maison forestière, Je foule aux pieds les vanités de la Grèce et de Rome; Et quand je m'étends HOLY sous les pins, Où l'étoile du soir si sainte -- Je me ris de la science et de l'orgueil humains, Quand l'homme peut, dans un buissón, se rencontrer avec Dieu » (1)? Eh! oui, Dieu se montre aux simples et aux croyants et aux purs en les mystères de la nature, mais celui-ci ne semble-t-il pas un peu "MEMBOLICAL vague, comme symbolique ou spinoziste ? Laissons le prophète, et qu'il suffise d'achever le dessein de l'amoureux du calme champêtre, du sylvan home, de la cabane forestière et soliMANY taire. A cette aspiration il revient en maints endrofts. Il aime les « pauvres champs, les prairies basses, les étroits ruisselets, trouve un chez lui en des lieux du vulgaire méprisés ». Comme ses vers, un peu rudes, pleins de reflets, donnent l'impression nette des renouvellements du printemps ! I bathe in the morn's soft and silvered air, (1) O when I am safe in my sylvan home, I laugh at the lore and the pride of man, |