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l'en féliciter c'est un groupe charmant que celui de cette jeune femme filant au rouet à côté du berceau de son petit enfant endormi. Cette toile justifie bien les éloges que M. Lucien D. donnait, le mois passé, au talent de M. de Curzon. Nous nous sommes également rencontré avec lui dans l'appréciation de la Madeleine pénitente: c'est une belle femme, je l'accorde, mais une sainte, je le nie.

L. DE K.

MÉLANGES.

A M. LE DIRECTEUR DE LA REVUE DE BRETAGNE ET DE VENDÉE.

Monsieur le Directeur,

Paris, le 7 septembre 1859.

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J'ai reçu, avec le numéro d'août de votre estimable Revue, le compterendu qui a été fait de mon livre intitulé: VOYAGE EN BRETAGNE FINISTÈRE, · précédé d'une notice sur la Bretagne au XIXe siècle. Je dois reconnaître, tout d'abord, les erreurs commises au sujet de certains monuments, et la critique de M. Pol de Courcy ne fait que me rappeler qu'il est passé maître en archéologie; mais je me permettrai de lui faire remarquer qu'il ne peut être décoré du titre de touriste, car je crois, en vérité, qu'il n'a jamais quitté les limites de son arrondissement. Il a peut-être eu raison, après tout; aujourd'hui, on ne rêve que voyages et distractions loin du foyer, et je ne sais si on s'en trouve mieux. Dans tous les cas, si M. de Courcy a jamais voyagé, il a dû nécessairement se fier quelquefois à de simples renseignements demandés aux paysans de la localité. Lorsqu'on voyage à pied surtout, il est très-difficile de changer sans cesse de direction pour voir telle ou telle ruine insignifiante. On s'est tracé un itinéraire, et il faut le suivre aussi exactement que possible. M. de Courcy ne comprend pas ces négligences, bien pardonnables cependant, lorsqu'on fait un livre qui n'a point la prétention d'être un guide archéologique ; bien loin de là, c'est le livre d'un archéologue en herbe qui cherche des maîtres indulgents. Puis, après tout, il n'y a pas de livre sans errata, el je ne manquerai pas de consigner toutes les fautes qui m'ont été indiquées.

Une des preuves que M. de Courcy n'a jamais beaucoup voyagé, c'est qu'il me déclare l'inventeur des fermes ou des métairies éclairées par une seule fenêtre et quelquefois même par la seule lumière que laisse passer la porte entr'ouverte. Le savant archéologue n'a donc jamais parcouru le Morbihan ou certaines parties des Côtes-du-Nord (1)? Eh bien! j'ai visité ces deux départements, et je n'ai point consigné ces habitations comme des raretés. M. de Courcy me fait donner une hauteur de fantaisie au clocher du Creizker, et, en cela, il altère mon texte; puis, plus loin, il me fait porter le poids de l'opinion de Strabon et de Ptolémée, qui auraient, dit-on, parlé des toiles d'Occismor..... Je m'arrête, et, tout en vous priant de vouloir bien remercier sincèrement de ma part M. Pol de Courcy, pour les erreurs qu'il a bieu voulu me signaler, je ne terminerai pas, Monsieur le Directeur, sans vous faire remarquer avec quelle obstination M. de Courcy veut que je n'aie pas visité la Bretagne à pied ou en voiture de louage, comme je le dis au commencement de mon livre. Si M. de Courcy me connaissait, il saurait que je ne prends jamais une diligence qu'à mon corps défendant; j'ai voyagé, comme j'ai dit, pendant deux mois entiers; j'ai parcouru la Bretagne en tous sens; je n'ai jamais séjourné plus de deux ou trois jours dans une ville, et je n'ai jamais fait d'étapes ailleurs que dans des hôtels ou des auberges de village.

J'ai cherché à guider les touristes dans un pays que l'on ne peut visiter sans guide; si j'ai mal fait la besogne, je la recommencerai, et j'y mettrai toute mon opiniâtreté de Breton.

Quant à présent, et en attendant l'apparition des volumes Morbihan et Côtes-du-Nord, je ne demande qu'une chose, c'est que mon livre me soit léger et que les archéologues me pardonnent cet essai sur un terrain où je marche en tremblant.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assurance de ma considération distinguée,

ÉDOUARD VALLIN.

Nous ne ferons que quelques observations sur cette lettre, car nous n'avons point à intervenir dans ce qui est personnel à M. de Courcy ou à M. Vallin. Mais il y a quelques points de fait qui, pour l'édification de nos lecteurs, doivent être bien fixés.

4° Nous avons parcouru, à plusieurs reprises et un peu dans tous les sens, les trois départements de la Basse-Bretagne, et, d'après notre expérience personnelle, nous persistons, avec M. de Courcy, à considérer les métairies sans fenêtre comme introuvables, et celles à une seule fenêtre comme extrêmement rares. Sans doute, M. Vallin a pris pour des fermes

(1) Le chapitre où je fais cette remarque, fait partie de la Notice sur la Bretagne au XIX siècle.

1

les pauvres maisonnettes habitées par de simples journaliers, et qui offrent parfois, mais non toujours, cette rareté d'ouvertures.

2° Il est constant que Strabon ni Ptolémée n'ont jamais écrit un mot des toiles d'Occismor.

3° Sur le ciocher du Creisker, le livre de M. Vallin porte (p. 94): « Ce » clocher a 79 mètres de hauteur, » et une note ajoute : « L'édifice tout » entier a 120 mètres de hauteur. » Le point le plus élevé de l'édifice est évidemment la pointe du clocher. Or, M. de Courcy, qui peut le savoir mieux que personne, affirme que la hauteur totale du clocher est de 77 mètres; la nouvelle édition du Dictionnaire d'Ogée porte la même chose; il résulte donc que l'édifice tout entier n'a que 77 mètres de hauteur. M. de Fréminville, à la vérité, porte cette hauteur à 370 pieds ou 123 mètres 33 centimètres; mais M. de Fréminville, on le sait, est fréquemment inexact sur de tels détails.

(Nole de la Direction.)

LES CONCOURS AGRICOLES ET LE REBOISEMENT.

Nous ne pouvons pas,

on le comprend, suivre tous les concours, agricoles ou autres, et en entretenir nos lecteurs : le cadre de la Revue n'y suffirait pas. Nous ne devions donc point parler du concours d'Ancenis, mais cela ne nous empêchera pas de prêter notre publicité à la communication suivante d'un de nos abonnés :

« Monsieur le Directeur,

>> Dans votre estimable Revue vous direz sans doute quelques mots sur le concours agricole d'Ancenis; veuillez me permettre de vous soumettre une observation relative à une omission renouvelée à tous ces concours ayant pour but l'augmentation des richesses qui prennent leur source dans la culture du sol. A une époque où le gouvernement et tous les économistes reconnaissent l'urgence du reboisement en France et en Europe, comment se fait-il que la multiplication et les plantations d'arbres forestiers n'obtiennent pas un prix, pas même la plus légère attention à ces concours? Et cependant aucune branche de la culture n'a plus besoin d'encouragement et d'émulation, car il n'en est point qui soit plus ignorée et plus négligée. >> Si ces réflexions vous semblent, Monsieur, dignes d'occuper une place dans la Revue de Bretagne et de Vendée, veuillez vous les attribuer entièrement et ne pas me nommer, mon goût très-connu pour la culture des arbres pourrait suggérer la pensée d'un intérêt personnel.

» Veuillez agréer, Monsieur, etc.

DE L......

UNE STATUE DE M. AMÉDÉE MENARD. Nous venons de voir, dans un des ateliers de M. Amédée Menard, la statue colossale de M Angebault, évêque d'Angers, que notre artiste vient de terminer.

Cette statue, en pierre de Minié, doit être placée dans le vestibule du collége de Combrée, qui, fondé en 1810 par M. l'abbé Drouet, a été réédifié en 1858, par Ms Angebault, et est devenu un des plus beaux établissements de France. C'est en reconnaissance de cette œuvre que MM. les Administrateurs du collège de Combrée ont voulu placer au milieu d'eux l'image de leur cher protecteur et pasteur.

M. Amédée Menard a représenté Mer Augebault dans le nouveau costume de cérémonie des évêques ; le prélat a le bras gauche appuyé sur un vieux tronc d'arbre où se lit cette inscription: Fondation du collège de Combrée en 1810. De ce tronc, que toute vie paraissait avoir abandonné, sort un rejeton plein de sève; les larges feuilles de cette branche de chêne montent le long du bras, qui repose sur le plan déroulé du nouveau collége; de la main droite Monseigneur montre ce plan au premier fondateur, dont le monument est placé en face du sien, et il semble lui dire : Voyez et >> consolez-vous: la mort a enfanté la vie. »

- «

Exécutée avec le soin le plus minutieux jusque dans ses moindres détails, cette statue reproduit admirablement les traits et l'attitude du vénérable pasteur. On doit féliciter l'auteur d'une telle œuvre, car c'est bien là de la vraie et grande sculpture.

Nous n'avions qu'un regret en la contemplant: celui de penser que, dans quelques jours, elle quitterait notre ville. Pour nous consoler, nous sommes allé revoir les deux gracieuses cariatides représentant la Peinture et la Musique, qui supportent le grand balcon du nouveau cercle des BeauxArts. M. Menard a traité ces statues dans un style noble et original. Du reste, il n'en a pas d'autre, et vous serez de mon avis, si vous connaissez quelques-unes de ses œuvres nombreuses: le Forban, le groupe de sainte Anne et de la Vierge bénissant l'entrée du port de Nantes, le fronton de Notre-Dame-de-Bon-Port, le saint Martin de l'église de Chantenay, JésusChrist bénissant la foule, dans l'église Saint-Similien; le groupe des Enfants Nantais, si populaire à Nantes; la statue funèbre de Mr Graveran, dans l'église de Quimper: le roi Grallon entre les deux tours de la même cathédrale, etc., etc. Aussi ne sommes-nous point étonné qu'on ait choisi M. Amédée Menard pour représenter les prophètes David, Daniel, Isaïe et Jérémie, qui décoreront le beffroi que l'on érige sur l'église Sainte-Croix. Les petits modèles promettent beaucoup, et, nous n'en doutons pas, l'artiste tiendra grandement ses promesses. E. G.

LA TRAPPE DE THYMADEUC, par M. le V de Bélizal (1). — Nous donnons ici le compte-rendu de la Trappe de Thymadeuc, qui nous est parvenu trop tard pour prendre place aux Notices et comptes-rendus.

- Il vient de paraître à Paris un opuscule que les lecteurs de la Revue liront bien certainement avec intérêt. La Trappe de Thymadeuc et son pieux fondateur sont pour beaucoup d'entre eux des amis dont le souvenir est cher et vénéré. Tous aimeront à apprendre de la plume chrétienne de M. le Vie de Bélizal la simple et touchante histoire du premier établissement dans le Morbihan des disciples de l'abbé de Rancé.

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On dirait un feuillet enlevé à quelqu'un de ces livres où les anciens monastères conservaient, pour l'instruction et l'édification de la postérité, le souvenir des signes sensibles de la protection divine qui environnaient presque toujours leur berceau. Voyez plutôt cette vieille devise des anciens seigneurs du lieu Espoir en Dieu, que les chevaliers du Christ, trois pauvres moines, trouvèrent écrite sur une pierre à demi rongée par les temps, à la porte du petit manoir, où, le 24 juillet 1841, ils vinrent planter la croix de bois que, suivant l'antique usage, l'abbé de la maison-mère leur avait remise en partant, et ces huit postulants maçons, menuisiers, etc., que Dieu envoie juste au moment où l'on avait besoin de leurs services.

«La première pierre de la chapelle fut encore un don de la Providence. >> Un officier de passage au monastère fut ému à la vue de ces hommes qui, guerriers comme lui, à la différence du drapeau et de l'ennemi, mon» traient plus de courage dans le combat de tous les jours que les plus braves soldats sous le feu le plus meurtrier. Il dépose lui-même cent

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» francs sur la pierre qui devait être la base du pieux édifice. »

Nous regrettons que l'espace restreint dont nous pouvons disposer ne nous permette pas de citer nombre d'autres fragments de la petite brochure de notre excellent collaborateur. M. de Bélizal n'est pas, d'ailleurs, un étranger pour nos lecteurs. Ils n'ont pas oublié la composition si éminemment chrétienne dont il voulut bien leur donner la primeur, à son retour d'un pieux et lointain voyage. Aujourd'hui c'est encore une bonne pensée et une bonne publication qu'il nous offre, et de plus, c'est un acte de gracieuse reconnaissance auquel s'associera bien certainement quiconque a eu, comme lui, l'heureuse chance de profiter de l'hospitalité de Thymadeuc, et en même temps un enseignement utile pour ceux qui ne connaissent pas le monastère et ses lois renouvelées des solitudes de la Thébaïde. Qu'il nous permette de l'en remercier au nom de tous ceux qui voient, dans la restauration complète des institutions de l'église catholique et des vieilles traditions de nos pères, le seul remède assez puissant pour guérir radicalement les plaies de la société moderne.

C. DE KERANFLEC'H.

(1) Voir aux annonces sur la couverture.

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