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dents, enlèverait l'oxygène au moyen du carbone qu'il contient et formerait en même temps des sulfures: l'expérience est venue confirmer cette prévision.

» J'ai obtenu en effet les sulfures de bore, de silicium, de magnésium et d'aluminium en soumettant à l'action du sulfure de carbone, sous l'influence d'une température élevée, l'acide borique, la silice, la magnésie et l'alumine. Pour rendre cette réaction plus facile et pour soustraire le sulfure à l'action décomposante des alcalis contenus dans les tubes de porcelaine, il est quelquefois utile de mélanger les oxydes à réduire avec du charbon et de former des boulettes qui ressemblent à celles qui sont employées dans la préparation du chlorure de silicium.

» Je me suis assuré par l'analyse que ces sulfures correspondent aux oxydes qui les ont produits.

» Je dirai maintenant quelques mots des sulfures qui ont été obtenus par la méthode que je viens de faire connaître.

>> Le sulfure de silicium avait été produit en petite quantité par Berzelius dans la réaction du soufre sur le silicium, et par M. Pierre dans la décomposition du chlorure de silicium par l'acide sulfhydrique.

» J'ai formé ce corps avec la plus grande facilité en faisant passer de la vapeur de sulfure de carbone sur des boulettes de charbon et de silice gélatineuse qui sont placées dans un tube de porcelaine que l'on porte au rouge vif. Le sulfure de silicium se condense dans le tube et se présente alors en belles aiguilles soyeuses et blanches qui sont peu volatiles, mais faciles à entrainer par des vapeurs.

» Pour démontrer tout l'intérêt qui s'attache à l'étude de ce corps, il suffira de citer ici deux de ses réactions. Lorsqu'on chauffe du sulfure de silicium dans un courant d'air humide, il se décompose et forme des cristaux soyeux de silice anhydre; il est évident qu'on peut expliquer, au moyen de cette expérience, la production naturelle de certains cristaux filamenteux de silice.

» Le sulfure de silicium mis en présence de l'eau donne, comme on le sait, un vif dégagement d'acide sulfhydrique et de la silice qui reste entièrement en dissolution dans l'eau et ne se dépose que lorsqu'on évapore la liqueur : il est impossible de ne pas rapprocher cette propriété curieuse du sulfure de silicium, des circonstances naturelles dans lesquelles se forment certaines eaux minérales et quelques incrustations siliceuses.

» Comme le sulfure de silicium se produit probablement dans tous les

cas où la silice se trouve soumise à la double action d'un composé binaire, qui lui cède du soufre et s'empare en même temps de son oxygène, ce sulfure n'est peut-être pas aussi rare qu'on le pensait jusqu'à présent; et en admettant sa présence dans les terrains qui produisent les sources sulfureuses, on expliquerait l'existence simultanée de la silice et de l'acide sulfhydrique dans les principales eaux sulfureuses : cette hypothèse se trouve en quelque sorte confirmée par les intéressantes observations de M. Descloizeaux, qui démontrent que les eaux siliceuses des Geysers d'Islande contiennent une quantité notable d'acide sulfhydrique.

» Je me contente de soumettre ces considérations aux géologues, et de leur faire remarquer qu'en expliquant la formation des eaux sulfureuses et siliceuses par la décomposition du sulfure de silicium, je ne fais que donner de l'extension à la théorie ingénieuse proposée par M. Dumas pour rendre compte de la formation de l'acide borique.

>> Les sulfures de bore et d'aluminium ont été produits comme le sulfure de silicium et sont également décomposés par l'eau.

» J'ai obtenu le sulfure de magnésium en faisant passer du sulfure de carbone sur de la magnésie pure; dans ce cas, la présence du charbon ne paraît pas utile: ce sulfure est cristallisable et soluble dans l'eau froide; lorsque sa dissolution est conservée à la température ordinaire, elle ne dégage que très-lentement de l'acide sulfhydrique; mais lorsqu'elle est portée à l'ébullition, elle produ alors une vive effervescence d'acide sulfhydrique en laissant déposer aussitôt de la magnésie.

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Tel est le résumé de mes premières observations sur les sulfures décomposables par l'eau, et qui doivent, selon moi, jouer un certain rôle dans la production des eaux minérales; je suis persuadé que ces composés seront employés dorénavant par les chimistes pour former de nouveaux corps sulfurés. Je continue mes expériences sur cette classe intéressante de sulfures, et je m'empresserai de communiquer à l'Académie la suite de mon travail si les résultats que j'obtiens me paraissent dignes de son attention.

» Je me fais un devoir de reconnaître ici que dans mes recherches sur les sulfures, je suis aidé avec le plus grand zèle par un jeune chimiste, M. Boutmy. >>

CHIMIE APPLIQUÉE. - Méthode pour obtenir des épreuves positives, directes, sur glace; par M. ADOLPHE MARTIN.

« La simplicité de l'emploi du collodion ioduré comme couche sensible,

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la rapidité avec laquelle il reçoit l'impression lumineuse, la finesse de l'épreuve obtenue ont tourné les esprits vers son emploi exclusif. Les méthodes qu'on a données jusqu'à ce jour se rapportent surtout à l'obtention des négatifs, et, malgré les résultats remarquables auxquels on est arrivé, on ne peut s'empêcher de remarquer le manque d'harmonie et de modelé des épreuves obtenues en dernier résultat par ces méthodes.

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à

Occupé depuis quelque temps de cette question, je ne tarderai pas communiquer à l'Académie quelques améliorations qui me sont personnelles. En attendant, je crois rendre service à la photographie en communiquant un procédé aussi sûr que facile d'obtenir des positifs directs.

» Le collodion, tel que je l'emploie, est composé d'une solution éthérée de coton azotique (obtenu en traitant 2 grammes de coton par un mélange de 50 grammes d'azotate de potasse et 100 grammes d'acide sulfurique; le coton, bien lavé et bien séché, est entièrement soluble dans un mélange de 10 volumes d'éther et de i volume d'alcool); on ajoute alors de l'éther et de l'alcool, de telle sorte que la dissolution définitive se compose de I gramme de coton, 120 grammes d'éther et 60 grammes d'alcool: on ajoute alors environ 1 gramme d'azotate d'argent transformé en iodure, et dissous dans 20 grammes d'alcool au moyen d'un iodure alcalin, mais, de préférence, de l'iodure d'ammonium.

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>> La plaque de glace, enduite à la manière ordinaire d'une mince couche de cette dissolution, est, avant qu'elle soit sèche, plongée dans un bain composé de 1 partie d'eau distillée, d'azotate d'argent et d'acide azotique. La pose a lieu, comme à l'ordinaire, pendant quelques secondes. La plaque de verre est alors plongée dans un bain de sulfate de protoxyde de fer, puis lavée avec soin.

>>

L'image est restée négative jusqu'à ce moment; mais, en la plongeant dans un bain de cyanure double d'argent et de potassium, on la voit devenir positive et complète, si la pose a eu lieu dans les conditions convenables. Il n'y a plus qu'à laver, enduire de dextrine et sécher, puis encadrer sur un fond de velours noir.

» Le bain de cyanures que j'emploie est le même que celui de MM. Ruolz et Elkington; il est seulement étendu de 3 volumes d'eau environ. Il se compose de litre d'eau, 25 grammes de cyanure de potassium et 4 grammes d'azotate d'argent.

>> Je ferai remarquer, en terminant, que ce procédé me donne toujours des épreuves, et que ces épreuves sont toujours positives. Leur perfection seule dépend de la juste appréciation du temps de la pose. »

M. LE SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE LONDRES adresse, au nom de cette Société, des remercîments à l'Académie pour l'envoi du volume XIII des Savants étrangers et des volumes XXXII et XXXIII des Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie.

CHIMIE.Nouvelle Lettre de M. MAISSIAT concernant sa réclamation de priorité pour les procédés employés pour l'analyse de l'air.

« Monsieur le Président,

» A la dernière séance de l'Académie, M. Regnault prit la parole sur une question de priorité entre lui et moi. J'avais l'honneur d'être présent, j'entendis donc la critique faite soit de ma réclamation même, soit de son objet. J'espère que l'Académie me permettra de répondre un mot à chaque remarque de l'honorable Membre.

» On m'a trouvé mal fondé scientifiquement à dire qu'une comparaison de gaz par volumes respectifs variables est très-difficile à préciser; on a ajouté qu'il suffit de savoir s'y bien prendre. Je rappelle qu'il s'agit ici, pour l'acide carbonique de l'air, d'une quantité moyenne égale à millième du volume total, et des variations de cette quantité minime. Or, depuis Dulong jusqu'à l'époque présente, je trouve tous nos maîtres d'accord sur ceci : que, dans la constitution d'une échelle de capacité, on n'établit directement que des points rares; pour les intervalles qui les séparent, toute la précision repose sur la régularité présumée du vase. Ai-je donc eu bien tort de dire que le millième d'un volume et ses variations sont trèsdifficiles à garantir? En deux mots, pour comparer deux volumes de gaz à une échelle de capacité, il y a chance d'erreur soit dans la constitution de l'échelle, soit dans la lecture du point de mesure. J'ai signalé un moyen de tourner une de ces difficultés de précision, d'atténuer l'autre, et mème une troisième de même nature (un moyen d'éviter l'erreur d'échelle de capacité, d'atténuer la portée de l'erreur de lecture soit du volume, scit de la pression), et parce qu'un habile expérimentateur pourrait, dit-on, se passer de tout cela, est-ce une raison de trouver inutile un tel moyen de faire commodément l'analyse exacte de l'air? Trouvons-nous les ponts inutiles? »» On a cité un, auteur allemand, M. Bunsen, qui aurait mis en pratique cette même méthode d'analyse des gaz. Qu'on veuille bien produire, à cet égard, quelque document authentique, et si cet auteur a pratiqué, ou mème simplement signalé clairement, suffisamment, soit la méthode, soit le procédé en question, je suis prêt à lui reconnaître la priorité. Mais aussi,

tant que personne ne me précédera authentiquement, je recourrai à l'Académie pour qu'elle me conserve l'honneur de la chose.

» On a dit que le caractère spécial de l'appareil de M. Regnault consiste dans la disjonction possible des deux capacités, l'une où l'on opere l'élimination des gaz, l'autre où l'on procède à leur mesure. Ce point n'est qu'accessoire, ce me semble; le mérite scientifique, c'est la précision: couper la route que suit le gaz, ce n'est point introduire de la précision scientifique; au contraire, c'est simplement obtenir une commodité, peut-être au prix d'une petite chance d'erreur, une petite bulle d'air hétérogène pouvant s'introduire par là dans l'appareil, lors de la coaptation. Le mérite scientifique de l'appareil de M. Regnault dépend donc bien de l'objet même de ma réclamation.

le

» On a dit : Il ne s'agit point de présenter des projets d'appareil, mais bien des appareils exécutés et fonctionnant. Je voudrais faire ici une distinction on conçoit qu'on ne puisse venir demander un prix à l'Académie ou son estime scientifique sur un simple projet d'appareil nouveau que l'on définit; c'est uniquement là une date certaine. Mais dès que projet se trouve réalisé, d'une manière quelconque, la pensée de conception première prend toute sa valeur, mérite d'exécution à part. L'exécution est une question de dépense d'argent et d'art. Mais apercevoir d'avance, par la seule force de la réflexion et de l'étude poursuivies, une vérité ultérieure; concevoir une méthode d'analyse nouvelle plus précise, et en indiquer les voies et moyens d'exécution, c'est là, ce me semble, le vrai titre scientifique. C'est, du moins, le seul point que je réclame.

>> M. Regnault déclarait lundi avoir conçu la méthode d'analyse en question et le projet d'appareil, peut étre huit ans avant la publication de son travail, où il en est fait mention pour la première fois. Je désirerais faire ici encore une distinction : il y a, concernant une chose, 1o la pensée intime, dont évidemment personne ne peut réclamer la date à son avantage; 2o il y a un commencement d'exécution de cette chose, dans un laboratoire privé, c'est une question de bonne foi qui ne saurait donner droit en public, mais que j'admets volontiers personnellement, en présence de M. Regnault. On trouve dans le Compte rendu des séances de l'Académie, t. XXV, p. 960, séance du 27 décembre 1847, une réclamation de M. Regnault lui-même, contre M. Doyère, où il est dit textuellement, en parlant de ce même appareil d'analyse des gaz, « ..... dont nous nous servons (M. Reiset et M. Regnault) depuis plus de trois ans, et que tout le monde a pu voir fonctionner » dans mon laboratoire, au Collège de France ». La date privée, la date de

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