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un état d'extrême division. Par conséquent, c'est un mélange d'acide ulmique et de matières minérales désagrégées Mais, suivant Th. de Saussure, il s'y trouve aussi des matières organiques solubles ou insolubles différentes de l'acide ulmique, et des sels minéraux solubles.

La conversion des matières végétales en humus est toujours fort lente à s'effectuer. Elle est accélérée par une température élevée et le libre contact de l'air; elle est, au contraire, ralentie ou entravée par l'absence de l'humidité et par le contact d'une atmosphère d'acide carbonique, qui, en environnant les particules ligneuses, les empêche ainsi de rencontrer l'oxigène. Les matières antiseptiques et les acides arrêtent également la pourriture de la fibre ligneuse, tandis que les alcalis et les terres alcalines la favorisent. Dans un sol argileux, bien compacte, l'humidité, l'une des conditions nécessaires à la pourriture des matières végétales qu'il renferme, se maintient le plus long-temps, mais la rencontre de l'air s'y trouve interceptée par la consistance mème du terrain; aussi la transformation de ces matières en humus est-elle fort long-temps à se produire. Dans un sol sablonneux et humide, au contraire, et mieux encore dans un terrain composé à la fois de calcaire et de sable, la pourriture procède beaucoup plus rapidement, par suite de l'arrivée facile de l'air et du contact des matières organiques avec la chaux '.

Ingenhouz et Th. de Saussure nous ont appris comment le terreau agit sur l'air. Dans un vase rempli de ce fluide, le terreau humide enlève à l'air, bien plus rapidement encore que le bois pourri, tout l'oxigène, et le remplace par un même volume d'acide carbonique. Si l'on remplace celuici par de l'air pur, le même phénomène se reproduit.

'Liebig. — Chimie organique appliquée à la physiologie végétale et à l'agriculture, p. 318.

D'après Théodore de Saussure, si l'on fait macérer pendant deux jours du terreau de bruyère tamisé, de Meudon, avec le double de son poids d'eau de pluie, 100 grammes de la liqueur filtrée fournissent, par l'évaporation au bainmarie, un extrait brun noirâtre, non acide, du poids de 0,388 grammes, et dans lequel il existe :

Du sucre de raisin très coloré, qui en forme environ le quart. Beaucoup de dextrine.

Uue substance azotée.

Une matière insoluble, probablement de l'acide ulmique.
Des traces de nitrate de potasse.

de nitrate d'ammoniaque.

de chlorures de calcium et de potassium.

Cet extrait fournit 14 1/2 p.% de son poids de cendres, qui renferment 3 p.% de sels solubles; le carbonate de potasse y entre pour 1/10°. On y trouve du phosphate potassé de chaux et d'autres sels alcalins. La partie des cendres insolubles est principalement formée de phosphate de chaux, d'oxides métalliques et de silice.

Suivant le même savant, la plupart des extraits fournis par les terres végétales ne contiennent pas d'humus tout formé, mais leur dissolution dans l'eau dépose, par l'évaporation, une substance insoluble qui n'est elle-même qu'une espèce d'humus; on doit la considérer plutôt comme propre à former l'humus, que comme une dissolution de cette substance. Ces extraits sont ordinairement très chargés d'azote.

Au reste, la proportion des matières organiques insolubles, dans l'humus, l'emporte de beaucoup sur celle des matières immédiatement solubles, et les premières subissent, à l'aide de l'eau, une fermentation lente qui y développe une substance nutritive soluble, propre à remplacer partiellement et successivement les secondes. Les dernières macérations du terreau dans l'eau produisent un extrait plus

coloré que celui des premières, par suite de la fermentation que le terreau éprouve à l'air'.

L'eau bouillante se colore en jaune ou en brun jaunâtre par son contact avec le terreau; la solution se décolore à l'air, en absorbant de l'oxigène et en produisant un léger dépôt noir.

Les acides attaquent à peine le terreau, mais les alcalis le dissolvent presque complètement, en prenant une couleur très foncée. Puisque l'acide ulmique est insoluble dans l'eau par lui-même, mais au contraire très soluble dans les alcalis, il s'ensuit que, si l'eau bouillante se charge d'une certaine proportion des principes du terreau, cela tient à la présence des sels alcalins dans le terreau, qui donnent de la solubilité à l'acide ulmique.

Lorsqu'on distille le terreau, il donne les mêmes produits que le bois; mais, dans d'autres rapports, comme le montrent les expériences de Th. de Saussure, qui, de 10 grammes 60 de terreau de bois de chêne, et de la même quantité de bon bois de chêne non altéré, a obtenu :

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Il y avait moins d'ammoniaque dans les 4 gr. 24 d'eau provenant du bois de chêne, que dans les 2 gr. 81 d'eau provenant du terreau 2.

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Ainsi, à poids égaux, le terreau, comme on le voit encore ici, contient plus de charbon que les végétaux dont il provient. Il fournit aussi plus d'ammoniaque, et, par conséquent, il contient plus d'azote.

Lorsqu'on examine le gaz qui sort d'une terre riche en humus, on y rencontre toujours une assez forte proportion d'hydrogène carboné: ce gaz se dégage aussi en abondance de la vase des marais, des fossés qui, comme on sait, est un engrais assez énergique. Or, la présence constante de cet hydrogène carboné ne peut manquer d'avoir une influence notable sur la végétation, soit directement, soit indirectement; et il est très-probable que c'est par lui qu'une partie du carbone, nécessaire à l'accroissement des plantes, entre dans le tissu végétal '.

L'humus est produit continuellement à la surface de la terre; il se mélange aux matières terreuses qui constituent le sol, et il est la cause principale de leur fertilité. Le sol des forêts est celui qui en contient le plus. Peu abondant dans les terres médiocres, il existe en quantité très-marquée dans les terres très fertiles; et, comme le dit Bosc, il est si éminemment propre à de nouvelles productions végétales, qu'on est fondé à le regarder comme le principe véritablement actif de toutes les terres arables. Cet humuş est sans cesse renouvelé par les fumiers et les autres engrais que le cultivateur enfouit dans le sol.

Quand la décomposition des plantes s'opère, non à l'air libre, mais sous l'eau, il en résulte une variété d'humus qu'on connaît sous le nom de TOURBE. J'en parlerai plus tard.

Les éléments principaux des sols arables sont, d'après tout ce qui précède, au nombre de quatre, à savoir : Le SABLE (Souvent silice presque pure), L'ARGILE (silicate d'alumine),

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Introduction à la chimie moléculaire, p. 549.

Le CALCAIRE (carbonate de chaux),,

L'HUMUS ( matières organiques décomposées ).

Ces matières, mélangées en différentes proportions, forment la variété des sols; et, selon que l'une ou l'autre des trois premières substances prédomine dans la masse de la terre arable, on distingue trois principales espèces de sols, auxquels on donne les noms spéciaux de SOLS SABLeux, SOLS

ARGILEUX, SOLS CALCAIRES.

Isolément, le sable, l'argile ou le calcaire ne peut être la base d'une bonne culture; mais, par le mélange de ces substances, les vices de l'une sont corrigés par les qualités de l'autre, et le meilleur sol est celui qui réunit le plus de propriétés dans son mélange terreux pour faciliter la végétation. Chacune de ces trois substances minérales remplit des fonctions différentes, et influe singulièrement sur les qualités du sol.

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On peut considérer l'argile, dit M. Drappier comme la véritable assiette du terrain; c'est elle qui, par sa compacité, retient entre ses parties les divers engrais qui, sans cela, s'infiltreraient aussitôt et seraient perdus pour les couches supérieures; elle sert encore à fixer avec force les racines, et à empêcher les plantes de céder à la violence des vents. Mais cette compacité, que peuvent bien maîtriser quelques grands végétaux, devient un obstacle au développement des plantes plus faibles: d'abord, leur germination s'effectue avec beaucoup de peine; ensuite, les racines ne peuvent, malgré tous leurs efforts, séparer les molécules de l'argile, pour obéir à la loi d'accroissement qui est commune à tous les êtres organisés. Il faut donc qu'un autre corps favorise la tendance naturelle qu'ont les racines de s'allonger en tout sens, et le besoin qu'elles

1 Drappier. Annales générales des sciences physiques. Bruxelles, 1819, t. 1, p. 308.

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