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rouvrir les églises, ils mùrissaient des projets conçus depuis longtemps, songeaient à des fondations nouvelles. Et comme dans les premiers temps de l'ère chrétienne, on avait vu les fidèles aller chercher leurs prêtres jusque dans les profondeurs des catacombes, les habitants des Sables ménageaient aux exilés des retraites sûres, d'où leur voix se faisait entendre à un petit cercle d'élus, et trouvait des cœurs bien disposés à recevoir leurs conseils.

Une des plus assidues, la sœur Saint-Benoît, puisa dans leurs exhortations de nouvelles grâces et un nouvel aliment à l'esprit de charité dont elle était animée. Le Père Baudouin comprit bien vite tout ce qu'on pouvait en attendre. Entre le prêtre et la religieuse, il y eut échange d'idées, et, en prévision d'un avenir moins sombre, résolution bien arrêtée de soulager toutes les misères, d'éclairer les âmes de la lumière céleste, de dissiper les ténébres de l'ignorance. Sachant combien l'éducation des jeunes filles demande de soins, combien il est important de ne la confier qu'à des mains sages et prudentes, le Père Baudouin songeait à créer une pépinière de religieuses instruites, chargées de répandre l'enseignement qu'elles auraient reçu. Il s'en était ouvert à la sœur Saint-Benoît, à laquelle il se proposait d'en confier la direction, et l'avait trouvée très-disposée à le seconder. Mais comment arriver à la réalisation d'un tel rêve? Comment, quand tout leur manquait, songer à la création d'institutions dispendieuses? Comment élever un édifice, quand ils n'avaient pas la première pierre pour en jeter les fondements? La Providence devait y pourvoir, et ils contemplaient avec confiance l'avenir, quand le présent était encore chargé d'orages. En attendant, la sœur Saint Benoît partageait son temps entre les pratiques religieuses et les œuvres de charité. Du produit de son travail, elle contribuait à nourrir les deux saints prêtres, qui, riches des biens du ciel, ne possédaient aucun des biens de la terre.

Sur ces entrefaites, le P. Baudouin fut appelé à desservir la paroisse de la Jonchère, en l'absence de son ancien curé, qui

n'était pas encore revenu de l'exil. On était en 1800; de toute part, les églises voyaient accourir les fidèles. Le Père Baudouin voulut avoir auprès de lui celle sur les mérites de laquelle il fondait de si grandes espérances. Son emploi se borna à appren dre le catéchisme aux petites filles et aussi à quelques personnes du même sexe d'un âge plus avancé, que le malheur des temps. avait privées de tout enseignement religieux. Les soins à donner à la sacristie furent également dans ses attributions.

La fatigue, les privations et peut-être aussi l'insalubrité du logement, car le curé, ayant pour presbytère un ancien toit à brebis, il n'est pas à croire que celle qui lui venait en aide, reposât mollement dans un appartement somptueux,- dévelop pèrent chez la sœur Saint-Benoît une maladie grave, pour le traitement de laquelle son retour aux Sables devint une nécessité. Elle y retrouva deux de ses anciennes compagnes, la maîtresse de son noviciat et une autre sœur hospitalière de la Rochelle, avec lesquelles elle s'établit dans une maison particulière. Elles y recrutèrent une jeune orpheline, Me Velledon, qui devait un jour occuper uuc place distinguée dans la Congrégation des Ursulines de Chavagues. Cette demoiselle revenait de l'émigration. Recommandée à la sœur Saint-Benoît, par l'abbé Remard, elle trouva dans sa personne toute la tendresse d'une mère.

Autant elle avait eu dans sa jeunesse l'esprit d'indépendance et de liberté, autant la sœur Saint-Benoît se montrait maintenant animée de l'esprit de soumission et d'obéissance. Maîtresse de ses actes et n'ayant d'autre contrôle que sa volonté, recherchée comme guide, quand elle n'avait personne pour lui en servir, elle craignait, dans son humilité, de s'égarer et d'égarer celles qui avaient recours à ses lumières. Elle demandait avec instance au Père Baudouin de recevoir ses vœux; mais celui-ci, peut-être pour l'éprouver, différait de prendre une détermination à ce sujet. Il finit pourtant par céder à sa prière et, le 12 mars 1801, la sœur Saint-Benoît s'engagea à se vouer de nouveau à la pauvreté et à la chasteté, se liant par l'obéissance au Père Baudouin, comme elle l'avait fait envers les autres supérieurs,

dans sa profession, et pour tout le temps qu'elle serait sous la direction de sa charité.

De Saint-Cyren Talmondais, dont il avait desservi la paroisse, après avoir quitté la Jonchère, le Père Baudouin avait été appelé à la cure de Chavagnes. La seur Saint-Benoit se rendit près de lui, pour puiser des forces nouvelles dans le silence et les austérités d'une retraite. Sa réputation de sagesse l'avait devancée. Édifiés par la modestie de sa tenue et sachant combien ses leçons pourraient être profitables à leurs filles, les habitants de Chavagnes voulaient la garder comme institutrice, mais le moment n'étant pas encore venu de souscrire à leurs vœux, elle retourna aux Sables. L'heure où allait commencer l'œuvre sainte ne devait pas tarder à sonner. Les religieuses de différents ordres que le souffle révolutionnaire avait dispersées, se retrouvaient après la tempête. Dans la Vendée, les Ursulines rouvraient leur maison à Lucon, et les filles de la Sagesse se réunissaient à Saint-Laurent, d'où elles devaient bientôt se répandre sur toute la France. Pendant que les établissements d'enseignement et de charité se relevaient de leurs ruines, des fondations nouvelles allaient sortir du sol, fondations bien humbles et bien pauvres à leur naissance, mais qui devaient un jour porter au loin l'éclat de leur nom. Déjà la sœur du célèbre auteur de la Théorie des lois de la Monarchie française, Me Louise de Lézardière, en religion Mme Sainte-Angèle, avait réuni à l'ancien monastère de Boisgroland des religieuses éparses et sans asile. Avec l'assentiment de l'évêque de Luçon, qui leur avait donné une règle provisoire, elle avait ouvert uu pensionnat de jeunes filles. La maison de Boisgroland devint bientôt le centre d'un cercle dont la circonférence eut une certaine étendue. De son sein sortirent des religieuses qui créèrent des établissements du même ordre à Tiffauges, à Aizenay, à Napoléon et aux Sables.

(La suite à la prochaine livraison.)

C. MERLAND.

LISTE DES VICTIMES DE QUIBERON®

DE MESILLAC (Pierre). Aj., sous-lieutenant en d'Hervilly.

DE LA MEUVRERIE (P.-J.-S.). Lire, MARION DE LA MEUVRERIE, avocat, Lille (Nord). (No 699 de l'Etat).

MICHEL (Nicolas). Aj., laboureur, 20 ans, Landaul (Morbihan); + 26 nivôse, Vannes. Ins.

DE SAINT-MICHEL. Lire, Vincent GUYOT DE SAINT-MICHEL, 18 ans, Langres (Haute-Marne); + 9 fructidor, Vannes. Em.

MIGNAUX (Louis). Aj., marin, 23 ans, Carnac (Morbihan); + 17 fructidor, Port-Louis. Ins.

DE MILON (Pierre). Lire, Pierre-Hyacinte DE MILON DE LA TOUCHE-AUPROU, né à Lhommaizé (Vienne) vers 1752; 16 thermidor, Quiberon. Em. 1.

DE MINE (Charles). Aj., 24 ans, Somme; +13 thermidor. Vannes. Em. MIRLAVAUD. Aj., Combat du 16.

DE MOCOURT (François). Aj., 66 ans, Stenai (Meuse); + 15 thermidor, Vannes. Em.

LE MOINE. Lire, Jean-Denis LE MOINE, dit ADOLPHE, domestique du comte Bozon de Périgord, 28 ans, Rosny-sur-Seine; + 10 thermidor, Quiberon. Em. 2.

LE MOITON (René). Aj., palefrenier du comte Archambaud de Périgord, 17 ans 112, Rosny-sur-Seine; + 10 thermidor, Quiberon. Em. MOLGAT (Jacques). Aj., laboureur, Theix (Morbihan). No 252 de l'État.

Voir la livraison de décembre, pp. 477-481.

1 Il avait servi, en émigration, dans le régiment de Mortemart et ne laissait point d'enfant de sa femme N. de la Faire.

2 Nous avons attribué à Adolphe Lemoine (t. XXXV, p. 40), d'après quelques historiens, un mot sublime qui doit avoir été prononcé par un autre. Lemoine était, en effet, séparé de son maitre, le comte Boson de Périgord, qui était parvenu à se sauver le 21. Ce qui résulte, dans tons les cas, de son interrogatoire, c'est qu'il n'accusa nullement son maître de l'avoir forcé de le suivre, comme il eût été de son intérêt de le faire pour obtenir l'indulgence de ses juges.

DE MONDION (Pierre). Aj., sergent dans Hector, 34 ans, Limoges (HauteVienne); 10 thermidor, Quiberon. Em.

DE MONTARNAL (François). Aj., ancien capitaine aux dragons de Noailles, 36 ans, Senergues (Aveyron); + 13 thermidor, Vannes. Em.

DU MONTEIL (François). Lire, DU MONTEL DE MALUSSES, garde-du-corps, né à Saint-Julien (Haute-Vienne) vers 1735; 14 thermidor, Auray. Em. 1.

DU MONTEL. Aj., combat du 21.

DE MONTENANT (Paul). Lire, LE POULLETIER DE MONTENANT, volontaire dans Damas, 23 ans, Rouen (Seine-Inférieure); + 11 thermidor, Auray. Em. 2.

DE MONTESQUIOU. Aj., combat du 16 3.

DE MONTFORT (Pierre-François-Hugues). Lire, BURGAULT DE MONTFORT, lieutenant dans Damas, né à Gacé (Orne) le 29 août 1750; + 15 thermidor, Quiberon. Em. 4.

DE MONTLEZUN (François-Marie). Aj., capitaine au régiment Dauphin, infanterie, officier dans Périgord. Em.

DE MONTLEZUN (Henri). Aj., officier au régiment Dauphin, infanterie, volontaire dans Périgord, 36 ans, Duravel (Lot); + 13 thermidor, Vannes. Em. Condamné sous le nom de MOLEUN 5.

Famille d'origine belge, représentée aujourd'hui par le marquis du Montel de Malusses, neveu ou petit-neveu de la victime.

2 Il était fils de Laurent-Paul, conseiller-maître à la cour des Aides de Normandie, et de Catherine Mouchard de la Corbière. Un de ses frères périt sur l'échafaud; un autre a continué la postérité sous le nom de Le Poulletier d'Auffay.

3 La généalogie des Montesquiou n'indique aucun d'eux comme ayant péri à Quiberon, Peut-être la victime appartenait-elle aux Montesquiou (de la Boulléne), famille qui prétendait remonter à la branche de Montesquiou-Saintrailles. Elle était représentée, en 1739, par deux gardes-du-corps, François-Joseph et Jean-Henri, et par un élève de la marine, Joseph-Nicolas.

*Il était fils de Jacques Burgaud, seigneur de Montfort, et de Madelaine-Charlotte de Bardois de Tournay, et avait quatre frères et une sœur. Aujourd'hui le nom n'est plus soutenu que par des parents éloignés.

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D'aprés M. de Villeneuve La Roche-Barnaud, ils étaient trois frères du nom de Montlezun à Quiberon. L'aîné parvint à dissimuler son état; les deux autres se refusèrent à tout compromis. Ils servaient avant 1789 dans le régiment Dauphin, infanterie. Pihan ajoute au nom du dernier le titre de chevalier de Cours; nous croyons que c'est à tort. On trouve des de Cours Monlezun parmi les gentilshommes de la sénéchaussée de Lectoure; on en trouve dans le régiment de Rouergue; mais ceux du régiment Dauphin sont désignés par le seul nom de Montlezun. Sous la Restauration un marquis de Montlezun était maréchal-de-camp, et un comte de Montlezun ambassadeur à Carlsruhe.

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