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c'est-à-dire une infraction punissable, par sa nature, d'une peine afflictive ou infamante, se commet actuellement, lorsqu'il vient de se commettre dans un délai rapproché ou lorsque le prévenu est poursuivi par la clameur publique. Dans tous ces différents cas il semble qu'il faut admettre que le médecin qui refuserait son concours à la justice qui le requiert tomberait sous le coup de l'article 475, § 12, du Code pénal et serait passible de peines de simple police; mais il semble que, dans la pratique, on étende le cas de flagrant délit même au cas où il y a non seulement crime, mais simple délit.

M. BROUARDEL. Les opinions divergentes qui viennent de se produire semblent démontrer que la question mérite d'être étudiée par la Société.

En province, un médecin requis est obligé de perdre sa journée; il va ensuite devant la cour d'assises; comme il ne connaît pas toujours très bien la question médico-légale, il est vivement critiqué par la défense; sa situation est souvent très délicate.

M. HORTELOUP propose de nommer une commission chargée d'étudier quels sont les cas dans lesquels le médecin peut refuser

son concours.

La Société désigne MM. Horteloup, Chaudé, Rocher, Masbrenier, Laugier.

La séance est levée à cinq heures et demie.

SÉANCE DU 13 MAI 1889.

Présidence de M. BROUArdel.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le ministre de l'instruction publique adresse à la Société une lettre par laquelle il la prie de vouloir bien se faire représenter aux séances du congrès des sociétés savantes, qui se tiendra les 11, 12, 13 et 14 juin. --M. Marcel Briand est désigné pour représenter la Société.

M. le secrétaire délégué des Congrès internationaux adresse à la Société une lettre par laquelle il la prie de vouloir bien se faire représenter au Congrès de thérapeutique et de matière médicale qui aura lieu du 1er au 5 août. M. Mayet est désigné à cet effet. M. CHRISTIAN lit, au nom d'une commission, un rapport sur les titres des candidats aux quatreplaces actuellement vacantes de membres titulaires de la Société de médecine légale. Le rapporteur

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conclut à la présentation des candidats dans l'ordre suivant : MM. Guillot, Magnan, Duponchel, Richardière, Vallon, Floquet. Il est procédé à l'élection de deux membres correspondants étrangers et de cinq membres correspondants nationaux : MM. Semal de Mons, Micario y Garcia, de Madrid, sont élus membres correspondants étrangers.

MM. Décès de Reims, Finot de Troyes, Mabille de Lafon, Lallemand de Tunis, Sicard de Béziers, sont élus membres correspondants nationaux.

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M. HORTELOUP rappelleque, dans la dernière séance, la Société a nommé une commission pour étudier les devoirs des médecins envers la justice et rechercher les cas dans lesquels le médecin peut refuser son concours. Cette question a été discutée en 1875 par une commission dont M. Chaudé fut le rapporteur. A la suite de ce rapport la Société a décidé que : « l'article 475, § 12, du «Code pénal, s'applique au médecin ou à l'officier de santé qui, légalement requis de prêter son concours dans les cas prévus «par cet article, refuse, pouvant le faire, d'obtempérer à la réqui«sition. » La commission de 1875 a donc étudié la question très complètement et, depuis ce temps, il n'y a pas eu d'arrêts nouveaux. Il s'agissait surtout de définir le flagrant délit or il ne semble pas que ce soit au médecin à décider s'il y a ou non flagrant délit. M. Horteloup ne pense donc pas que la nouvelle commission récemment nommée par la Société puisse utilement discuter sur cette question, et il demande s'il y a lieu de maintenir à cette commission les pouvoirs qui lui ont été confiés.

M. MASBRENIER fait remarquer qu'il ne s'agissait pas seulement de discuter des points de jurisprudence, mais aussi de rechercher et de faire connaître aux médecins les circonstances dans lesquelles ils pourraient être en droit de refuser leur concours à la justice.

M. BRIAND. La conclusion adoptée en 1875 par la Société prévoit le cas où le médecin «< refuse, pouvant le faire, d'obtempérer à la réquisition ». Ces mots, «< pouvant le faire », ne sont-ils pas de nature à supprimer la plupart des difficultés.

M. BROUARDEL fait observer que la situation actuelle est fâcheuse à tous les points de vue : il est déplorable qu'un médecin, très souvent incompétent au point de vue médico-légal, puisse être obligé de faire une besogne à laquelle il n'a pas été préparé, de compromettre ainsi sa réputation et ses intérêts, de compromettre de plus les intérêts de la justice. A Paris et dans les grands centres où la justice peut disposer du concours de médecins-experts compétents en médecine légale, les difficultés ne se présentent

guère mais il n'en est pas de même dans les campagnes. M. HORTELOUP. Lorsqu'un médecin requis pour une expertise est incompétent pour le travail qui lui est demandé, il peut tout au moins se transporter au lieu où l'appelle la réquisition et rédiger un rapport dans lequel il constate son incompétence: en pareil cas, aucun tort ne serait de son côté.

M. BROUARDEL. Dans d'autres pays, en Bavière et en Prusse, par exemple, le système des expertises médicales est organisé autrement que chez nous, et ce système paraît donner de bons résultats. S'il y a des modifications à apporter à l'organisation actuelle en France, c'est certainement par la Société de médecine légale que ces modifications peuvent être utilement étudiées.

M. HORTELOUP fait observer qu'il faut alors élargir beaucoup les pouvoirs de la commission et que la question ainsi posée devient très vaste et peut entraîner à l'étude de modifications profondes à apporter dans l'organisation judiciaire et dans l'enseignement de la médecine légale.

M. LAUGIER propose d'augmenter le nombre des membres de la commission précédemment nommée. Cette proposition n'est pas adoptée.

Il est décidé que la commission se réunira prochainement.
La séance est levée à 5 h. 35.

SOCIÉTÉ DE MÉDECINE PUBLIQUE

ET D'HYGIÈNE PROFESSIONNELLE

Séance du 22 mai 1889.

M. CARTIER, agent voyer en chef du département des Bouchesdu-Rhône, lit une Note sur un projet d'assainissement de Marseille, qui consiste à construire un réseau secondaire et un grand collecteur émissaire, qui traversera la ville et ira déboucher en pleine mer, de l'autre côté des collines de Marseille Veire.

Le grand malheur de ce projet est de représenter une dépense de 17 millions.

M. le Dr NETTER communique un mémoire sur les microbes pathogènes contenus dans la bouche de sujets sains et les maladies qu'ils provoquent. Voici les conclusions de ce travail :

Préparation des organes, consentement de l'organisme, varia

tions dans l'activité des microbes, telles sont les conditions qui permettent aux microbes de la bouche de donner naissance à des maladies.

Nous sommes donc en droit d'émettre la proposition suivante : On diminuera la fréquence de certaines maladies et la gravité de beaucoup d'autres, si l'on arrive à détruire ou à rendre inoffensifs les microbes pathogènes recélés dans la bouche.

La lutte contre les microbes doit dorénavant s'imposer au médecin.

J'ai fait voir le but. Je ne suis pas encore en mesure d'indiquer les moyens les plus convenables. Mais, en attendant, sachons utiliser ceux qui nous sont indiqués par la tradition. Continuons à recourir aux soins de propreté, aux gargarismes avec des antiseptiques faciles à tolérer. Ces moyens ont fait déjà leurs preuves, sinon contre les agents pathogènes dont j'ai parlé, au moins contre d'autres parasites buccaux dont j'ai intentionnellement négligé l'étude et dont l'action est limitée à la cavité buccale. Par les moyens précités, on diminue certainement la fréquence des stomatites, des parotidites, des gangrènes de la bouche, qui compliquaient souvent jadis la rougeole et la fièvre typhoïde. Ces moyens suffisent à rendre plus rares les otites dans les mêmes maladies.

Ils ne restent pas sans effet sur les autres complications dues aux streptocoques ou aux pneumocoques.

VARIÉTÉS

L'HYGIÈNE DANS L'ARMÉE

Rapport au Président de la République française.
Monsieur le président,

L'hygiène de l'armée a fait depuis plusieurs années, grâce à la sollicitude de mes prédécesseurs et aux travaux du corps de santé, de très notables progrès. La mortalité militaire en temps de paix, qui était en 1870 de 12 p. 1,000, s'est abaissée au-dessous de 8 p. 1,000. Ce chiffre est encore trop considérable et pourra être, j'en ai le ferme espoir, sensiblement réduit. Les causes qui portent atteinte à la santé des troupes sont, en effet, aujourd'hui trop

connues pour qu il ne soit pas permis d'en restreindre l'action dans une large mesure. Déjà mes prédécesseurs ont obtenu beaucoup à cet égard. Je viens, à mon tour, essayer de diminuer le mal en m'appuyant sur les données les plus récentes de la science.

La maladie qui fait les plus grands ravages parmi la troupe est la fièvre typhoïde. En treize ans, de 1875 à 1887, elle a atteint 141,648 hommes et entraîné 21,116 décès. Pendant cette même période elle n'enlevait à la population civile qu'une proportion environ sept fois moindre, malgré les conditions défavorables dans lesquelles vit une partie de cette population. L'excès de la mortalité chez la troupe tient évidemment au rassemblement, qui rend la contagion plus facile, et aussi, il faut bien le dire, à des conditions défectueuses d'installation auxquelles l'administration peut et doit porter remède. Les dépenses qui en résulteront seront volontiers autorisées par les Chambres, qui n'ont jamais reculé devant aucun sacrifice pour le bien de l'armée.

Les circonstances qui amènent l'éclosion et favorisent le développement de la fièvre typhoïde ont été, par suite des recherches en France et à l'étranger, nettement déterminées. Ce sont principalement la mauvaise qualité des eaux d'alimentation, la contamination du sol par les égouts, les fosses d'aisances et autres dépôts de matières putrescibles, et, enfin, la mauvaise installation des cabinets d'aisances.

Dès mon arrivée au ministère, j'ai tenu à me rendre compte de l'influence de ces divers éléments.

J'ai adressé, le 13 mai 1888, aux directeurs du service de santé dans les corps d'armée, une circulaire leur prescrivant d'établir, par des renseignements précis et authentiques, une relation exacte entre la situation à ces divers points de vue et les épidémies typhoïdiques constatées depuis un certain nombre d'années. Je leur ai demandé, surtout, de faire une analyse chimique et bactériologique des eaux servant à l'alimentation. Il leur était prescrit de fournir pour chaque casernement un certificat attestant la bonne qualité de l'eau ou un rapport indiquant ses défauts et suggérant les moyens de les corriger, soit par l'adduction d'eau de sources, soit par l'emploi de procédés de filtrage perfectionnés.

Cette vaste enquête, dirigée par M. le médecin inspecteur Dujardin-Beaumetz, a réussi au delà de toute espérance. Tous les membres du corps de santé ont rivalisé de zèle, et plusieurs ont produit des rapports qui sont de véritables monuments scientifiques. En même temps, des échantillons d'eaux, empruntés à nos divers établissements militaires, depuis les vastes casernes de

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