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« L'accord qui règne dans les six dernières périodes de vingt-cinq ans. entre les prix du marché de Poitiers et ceux des hospices d'Orléans, vient confirmer les renseignements recueillis par les deux auteurs. La différence considérable qui porte sur les années 1551 à 1600, s'explique par des renchérissements qui ont affecté la ville d'Orléans dans la seconde moitié du seizième siècle. M. Mantellier fait connaître effectivement qu'en 1573, les autorités municipales furent obligées d'acheter du blé pour le revendre aux habitants; et ce blé ne fut pas livré aux pauvres à moins de 42 francs l'hectolitre; la ville en vendit même jusqu'à 58 francs.

« Les prix qui viennent d'être rapprochés les uns des autres sont le résultat de la transformation de la livre tournois en francs, d'après le poids légal et le degré de fin de cette livre pour chaque année. M. Mantellier, pour opérer cette conversion, s'est servi des recherches rigoureuses développées par notre savant confrère M. Natalis de Wailly, dans son Mémoire remarquable sur les variations de la livre tournois (Mémoires de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, t. XXI, 1857). Les considérations présentées dans le Rapport sur le concours de 1859, à propos du Mémoire couronné de M. Duffaud, qui vient d'être cité, seraient toutes applicables ici; et, pour abréger, il est permis de s'y référer. Il s'en trouve cependant une qui a besoin d'être répétée, car bien des auteurs se sont crus obligés de connaître la quotité d'or ou d'argent contenue dans les monnaies pour en apprécier la valeur relative. Cette connaissance n'est bien souvent qu'un intermédiaire superflu. On peut en apporter comme exemple l'évaluation de la pension que la ville d'Orléans faisait, en 1439, à la mère de Jehanne la Pucelle. Cette pension était de deux livres tournois par mois. Dans le

tableau 166 de l'auteur, elle est évaluée à 23 fr. 91 c. Ainsi la mère de Jeanne d'Arc aurait reçu à peu près l'équivalent de 287 francs par an. Ce serait taxer bien bas la munificence de la commune d'Orléans. Mais si, pour se rendre mieux compte de ce qu'était cette pension, on prend la peine de calculer, d'après le tableau même de l'auteur, le prix du blé dans l'intervalle de 1434 à 1457, on trouve pour moyenne 3 sols 10 deniers tournois la mine d'Orléans. Comme la même mesure, pendant les années 1851 à 1860, coûtait 6 fr. 63 c., on peut dire que la livre tournois de 1439 représentait 34 fr. 46 c. d'aujourd'hui ; et que, par conséquent, la pension de 24 livres payée annuellement à la mère de la Pucelle équivalait à 827 fr. << Ce calcul prend pour valeur normale la valeur du blé, et peut-être a-t-elle varié beaucoup. On sent qu'une pareille comparaison n'a pas la prétention de mettre à même de juger exactement d'une somme payée dans un siècle déjà si reculé. Elle n'a pour but que de mieux montrer tout l'intérêt qui s'attache au recueil de M. Mantellier, et en même temps de faire ressortir la difficulté qui subsistera toujours dans l'appréciation de la valeur des choses pour des temps éloignés. Les savants qui se serviront de ces matériaux si précieux, auront à choisir entre bien des résultats semblables à celui qui vient d'être calculé sur le blé; car rien n'empêcherait de rapporter la valeur nominale de la livre tournois à celle du franc, par l'intermédiaire des tableaux qui donnent les prix du seigle, ceux des journées de manœuvre, etc., etc. Mais ce n'est là qu'une face des dépenses de chaque individu; et il restera bien des travaux à faire avant de pouvoir comparer les fortunes relatives des différentes époques historiques.

« Le Mémoire de M. Mantellier offrira des éléments indispensables de ces comparaisons; seul même, il abonde en renseignements statistiques sur une des villes importantes de l'empire. C'est à ces titres que votre Commission accorde à l'auteur le prix de 1862. »

M. Littré vient de publier à la librairie Hachette les premières livraisons de son Dictionnaire de la langue française. Nous nous bornons actuellement à annoncer cette œuvre considérable, qui, pour la langue moderne, nous donne, à la suite de définitions d'une précision toute scientifique, un choix heureux d'exemples tirés des grands écrivains, à partir du dix-septième siècle, et contient une partie étymologique et historique d'un singulier intérêt pour les personnes qui étudient notre ancienne langue. M. Littré a fait à lui seul pour la France ce qu'au seizième siècle l'Académie de la Crusca a fait pour l'Italie, mais avec ces différences qu'une critique plus sûre et plus avancée doit produire dans l'exécution de deux œuvres analogues.

Vient également de paraître le tome XXIV de l'Histoire littéraire de la France, qui est entièrement rempli par deux discours de M. Le Clerc · et de M. Renan, l'un sur l'état des lettres, l'autre sur l'état des arts au quatorzième siècle.

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1. Le but de la première partie de ce travail a été de débarrasser l'histoire des origines de l'évêché de Bayeux d'un anachronisme grossier que tous les savants y signalèrent aux deux derniers siècles. L'évidence du plagiat commis par l'auteur de la Vie de saint Regnobert, soi-disant second évêque du diocèse, mais qui, en réalité, n'a vécu que beaucoup plus tard, ne peut laisser aucun doute sur la fausseté de l'ensemble de son récit. Cette élimination préalable était nécessaire au bon ordre de nos recherches ultérieures, particulièrement sur le point de savoir à quelle époque remonte la fondation du siége épiscopal de Bayeux.

Saint Exupère a toujours été considéré comme le premier évêque du diocèse. La Vie de saint Révérend, dont nous avons reconnu la sincérité, le donne comme l'apôtre du Bessin, et, sur ce point, confirme formellement la tradition. Mais quand et comment vint-il évangéliser cette contrée? Ici commencent les nombreuses divergences que nous avons eu lieu de signaler.

Une opinion à laquelle on a voulu donner récemment toute la valeur d'une tradition, en quelque sorte consacrée, prétend que saint Exupère a été envoyé par le pape saint Clément, dès le premier siècle de l'Église. Les Bollandistes ont prononcé sur cet envoi la même condamnation dont ils avaient frappé la légende du pseudo-saint Regnobert. Le Gallia Christiana avait adopté les idées IV. (Cinquième série.)

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des Bollandistes, et ces prétentions à une si ancienne origine paraissaient à peu près délaissées, lorsqu'elles ont reparu de nos jours avec une grande énergie.

Si nous examinons les textes dont peut s'autoriser cette croyance, nous en trouverons deux seulement.

Le premier est cette fausse Vie de saint Regnobert, que nous avons déjà publiée. A l'en croire, saint Exupère était un des disciples de saint Clément et avait été consacré par saint Denis, saint Martial et saint Saturnin. Nous savons quelle confiance on peut avoir dans ce document; il n'en mérite aucune.

Le second texte, jusqu'à présent inédit, paraît avoir été ignoré des savants auteurs des Acta'. C'est une Vie de saint Exupère, que l'on conservait dans un légendaire de Saint-Spire de Corbeil. Le manuscrit n'a pu être retrouvé; mais il en existe une copie à la Bibliothèque impériale2. Cette copie, faite au dix-septième siècle, par le laborieux hagiographe normand Dumoustier, présente tous les caractères de la fidélité. Elle est conforme à la traduction qu'un historien de Corbeil, Delabarre3, nous a donnée de plusieurs passages qu'il prit dans l'original, et aux Vies de saint Exupère qu'ont publiées deux autres écrivains de la même ville, d'après le même légendaire *.

Quant à la valeur de ce document, on peut l'indiquer d'un mot: c'est le plagiat du produit d'un plagiat. Comme on avait dépouillé saint Révérend au profit de saint Regnobert, on a repris à cet évêque sa légende d'emprunt, pour l'arranger à l'honneur, presque exclusif, de saint Exupère. Les miracles du prétendu disciple deviennent l'œuvre du maître, et l'on ne remarque guère d'invention que sur un point, celui de la mission donnée par le pape saint Clément à l'apôtre du Bessin. Au demeurant, ce plagiat, ainsi porté à sa seconde puissance, est trop évident pour qu'il soit nécessaire de le prouver autrement qu'en publiant le

1. Tillemont en a soupçonné l'existence. « Nous n'avons pas, dit-il, d'histoire de saint Exupère; mais il y en a néanmoins quelqu'une, comme on le peut juger des faits que M. du Saussay en rapporte. » Mém. sur l'hist. ecclésiast., éd. 1752, IV, 202.

2. Bibl. imp., ms. f. lat. 10051, fol. 208.

3. Antiquitez de Corbeil, in-4°, 1647, p. 36.

4. Les Vies de sainct Exupère et sainct Loup, vulgairement appelez saint Spire et saint Leu, premier et troisiesme évesques de Bayeux, par Jean Bocquet, Parisien, prestre, licencié en droict et chanoine des esglises royales de Nostre-Dame et de Saint-Spire de Corbeil. Paris, P. Gaillard, 1627.

texte incriminé, que nous croyons du reste, à raison de son étrange généalogie, assez curieux pour mériter de voir le jour. Il est bien évident d'ailleurs que ces deux productions ne vaudraient pas l'honneur d'une publication si elles ne servaient à montrer dans la pauvreté et dans la fausseté de leur manifestation première ces traditions soi-disant historiques.

Il n'est pas possible de dire avec précision quand et par qui fut perpétré ce nouveau détournement de légende. Nous inclinons à y voir le fait d'une main corbeilloise. C'est à Corbeil que les reliques de saint Exupère furent transférées vers le neuvième siècle. Une église y fut placée sous l'invocation du saint évêque, dont le culte devint bientôt populaire. La même église possédait également certaines reliques de saint Regnobert', qu'on honorait tout particulièrement à Auxerre et à Varzy. Si, comme nous le pensons, la fausse Vie de ce dernier prélat était composée avant que son corps fût transféré de Saint-Victor d'Épines, en Bourgogne et en Franche-Comté, on a pu la connaître de bonne heure à Corbeil, où elle fut peut-être retenue au passage avec la portion des reliques du saint qu'on y conserva. On aura voulu ensuite établir la biographie du premier évêque de Bayeux, principal patron de la ville, sur ce qu'on savait de l'histoire de son prétendu successeur; telle est du moins notre supposition. Quoi qu'il en soit, ce texte est certainement antérieur à la rédaction du bréviaire de Bayeux, qui s'en est inspiré et lui a emprunté plusieurs expressions pour sa légende de saint Exupère. Or le bréviaire a dû être composé au treizième ou au quatorzième siècle. Remarquons à ce propos que si les rédacteurs de ce dernier ouvrage prirent quelques lignes à notre texte, c'est à la Vie de saint Regnobert qu'ils ont fait les plus larges emprunts, reconnaissant dès lors son antériorité,et préférant puiser à leur source première des renseignements, par malheur déjà fort altérés.

1. Fasti Corbolienses, Bibl. imp., ms. f. lat. 9269. On portait ces reliques à la procession solennelle qui avait lieu chaque année. Il existe encore dans l'église Saint-Spire un autel Saint-Regnobert, dans lequel une châsse est, dit-on, renfermée. 2. Le ms. de Dumoustier ne laisse aucun doute sur ce point : « Legendarium ms. antiquum Corboliense in gestis Sancti Renoberti Baiocensis. » Fol. 23 vo. C'est sur ce document que Delabarre, Bocquet et les autres ont pris ce qu'ils disent de saint Regnobert, et nous avons ainsi la preuve que ce texte ne différait pas au fond de celui que nous avons publié d'après un ms. de Varzy; mais, par plusieurs fragments conservés par le même Dumoustier, nous voyons que le style avait été modifié. Ibid., fol. 23.

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