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de tissus fournis par les chiffonniers en gros, aucune de ces matières ne doit être livrée au travail avant désinfection sur place. Il appartiendra aux industriels de choisir le mode d'épuration approprié à leur usine, pourvu qu'il soit efficace. Mais il est opportun de signaler la résistance que les balles serrées de chiffons ou les amas de tapis et thibaudes opposent à la désinfection par la vapeur d'eau ou les vapeurs de formol. Aussi semble-t-il que l'immersion suffisamment prolongée des tissus dans une solution désinfectante conduirait au résultat cherché en assurant un nettoyage sommaire et la séparation des corps étrangers ou grossières impuretés. Des séchoirs seraient alors à prévoir pour amener les matières ainsi traitées au degré de siccité qui convient au travail ultérieur des machines.

Cette obligation exercera peut-être une répercussion sur le prix de revient des lainettes, qui, d'après un professionnel de l'effilochage, pourrait élever au double et au triple les prix de vente actuels. Malgré l'importance qui s'attache à la question commerciale, on ne saurait cependant lui donner le pas sur l'intérêt supérieur de l'hygiène publique. C'est d'ailleurs après un examen à ce double point de vue que la Chambre syndicale de la literie et des industries annexes, parlant par l'organe de son président, demande l'application des mesures sui

vantes :

1o Désinfection et lavage avant effilochage de tous les tissus usagés (tapis, thibaudes, chiffons de laine, etc.) destinés à la fabrication des lainettes;

2o Livraison de ces marchandises au commerce de la literie avec un certificat de l'effilocheur attestant qu'elles ont été traitées suivant les indications prescrites.

On a supposé que, sous l'influence de ces mesures, les matières premières destinées à l'effilochage seraient probablement dirigées sur des pays voisins qui approvisionneraient ensuite le marché parisien en lainettes non épurées. L'éventualité est possible. Mais, à défaut de certificat authentique attestant que les lainettes importées ont subi l'épuration

nécessaire, il sera loisible d'imposer aux employeurs la désinfection de ces bourres. Si, en lui-même, l'emploi de produits déjà fabriqués n'apparaît point classable, du moins peut-il être réglementé dant tous les ateliers déjà classés, qui sont à peu près seuls à utiliser ces bourres pour la literie. Il suffirait alors de prescrire au sujet de ces produits soit un certificat d'origine attestant la désinfection comme on l'exige pour les literies ayant servi aux contagieux, soit, et à défaut, une désinfection sur place des bourres avant leur emploi.

B. Débris de plumes. - La désinfection préalable est nécessaire pour cette catégorie de matières, et l'opération est classable comme épuration de plumes de literie. En conséquence, il y aurait lieu de prescrire que tous les déchets de plumes provenant des ateliers de plumassiers, de parures pour dames, etc., seront, avant leur emploi en literie, soumis à un lavage à fond, puis à une désinfection efficace par les procédés en usage. Ces plumes ne pourront être livrées aux employeurs que munies d'un certificat attestant la réalité de la désinfection. Ces mesures sont désirées par la Chambre syndicale de la literie et des industries s'y rattachant.

CONCLUSIONS

1o L'effilochage des tissus usagés, tel qu'il est pratiqué actuellement, peut présenter des dangers pour les ouvriers de cette industrie. Les produits de cet effilochage, lainettes ou bourres servant en literie, peuvent n'être pas sans inconvénients pour la santé des ouvriers confectionneurs et même du consommateur;

2o Les usines d'effilochage de tissus usagés sont des établissements classables et susceptibles de réglementation;

3o Les tissus usagés destinés à l'effilochage doivent, avant tout autre traitement, être soumis dans l'usine à une désinfection efficace. L'immersion prolongée dans une solution désinfectante semble un procédé recommandable;

4o Les lainettes ou bourres provenant de l'effilochage des

tissus usagés ne pourront être utilisées que si elles ont subi une désinfection préalable attestée par certificat authentique ;

5o Les mêmes lainettes ou bourres de provenance étrangère ne pourront être utilisées que si elles sont munies de l'attestation authentique de leur désinfection préalable soit aux lieux de production, soit dans les établissements classés qui les emploient;

6o L'effilochage des tissus usagés s'effectuant en majeure partie dans les usines de province, il y aurait lieu de provoquer des mesures d'ordre général visant tous ces établissements;

7o Les déchets de plumes provenant des ateliers de plumassiers, de parures pour dames, etc., devront, avant leur emploi pour la literie, être soumis à une désinfection efficace. Leur utilisation ne sera autorisée qu'après justification de cette désinfection préalable.

LES HOPITAUX ACTUELS ET FUTURS
DE MARSEILLE

Par le D GUSTAVE REYNAUD,

Chargé de cours à l'École de médecine et professeur à l'Institut colonial de Marseille.

La ville de Marseille a des hôpitaux trop peu nombreux, pauvres, malpropres et ne contenant qu'un chiffre de lits

insuffisant.

Cette situation, que M. Barbaroux, vice-président de la Commission des hospices civils, a fait ressortir dans une étude fort documentée, est devenue plus grave depuis que la loi de 1902 est entrée en application. Elle est redoutable pour la France entière autant que pour Marseille, si on fait entrer en compte que ce grand port de commerce, le plus grand de la France, est le point d'arrivée, d'escale

ou d'attache des navires français ou étrangers venant des pays foyers de choléra, de peste et de fièvre jaune, et autres. maladies épidémiques.

État actuel. Nous allons suivre M. Barbaroux dans son rapport, qu'il a bien voulu nous communiquer et dans lequel, après une critique fort juste de l'état actuel des hôpitaux, il expose sommairement les projets de réformes ou de constructions nouvelles estimées indispensables pour que la seconde ville de France possède les formations sanitaires qui conviennent à son rang, à son rôle, à ses besoins.

Pour une population de 260 910 habitants, en 1860, la ville de Marseille avait 808 lits dans ses hôpitaux. Cinquante ans après, en 1910, elle n'a que 1250 lits pour une population de 550000 habitants environ. Le graphique ci-joint, dû à M. Barbaroux, fait puissamment ressortir l'infériorité de Marseille vis-à-vis des autres villes au point de vue des établissements hospitaliers :

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Il en résulte que, pour 9 600 malades annuellement admis dans les hôpitaux, il en est au moins 4000 autres atteints d'affections graves, en état d'être admis, qui ont été refusés

faute de place. Encore convient-il d'ajouter à ce chiffre un grand nombre de tuberculeux, de vénériens ou urinaires, de femmes enceintes, de malades atteints d'affections des yeux, de la peau, de la gorge et du nez, qui ne tentent pas de se présenter, sachant qu'ils seront refusés, parce que les services spéciaux qui devraient les recevoir ne disposent que d'un trop petit nombre de lits. Qu'on en juge :

Lits pour tuberculeux..

vénériens...

Femmes enceintes.

Urinaires, ophtalmiques, cutanés.

61

79

86

28

En raison de la pénurie des lits, la clinique de pathologie exotique, englobée dans les chiffres généraux de l'HôtelDieu, reçoit des malades quelconques.

On ne peut qu'être impressionné par l'urgence des besoins d'une ville telle que Marseille. Dans cette grande cité maritime, commerciale, de plus en plus industrielle, grouille une population formée en immense majorité de travailleurs. de toutes nationalités, généralement misérables, concentrés en grande partie pendant le jour ou la nuit dans des usines. où les contaminations sont fréquentes et inévitables, où les voies respiratoires sont lésées par des poussières ou des vapeurs irritantes. Dans ce grand port arrivent et séjournent des marins du commerce, débarquant de navires où ils sont parqués dans des postes insalubres. Et cependant les hôpitaux de cette grande cité maritime n'offrent aux tuberculeux innombrables qui se trouvent mêlés à sa population, que 61 lits spéciaux. On n'y trouve pas d'hôpitaux d'enfants scrofuleux ou tuberculeux, pas de sanatoria.

D'autre part, cette population cosmopolite, hétérogène, compte assurément de nombreux vénériens qui diffusent à Marseille et dans les colonies ou les pays étrangers la syphilis ou la gonorrhée contractée au passage. Il n'y a, dans les hôpitaux, que 79 lits pour cette catégorie de malades.

Projet de la Commission des hospices. — Le projet présenté par M. Barbaroux a pour objet de remédier à cette

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