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devait rester uni: ce fut la Fédération des syndicaux qui se dissocia bientôt. Une autre Fédération syndicale était prête à recevoir les dissidents la Fédération des Bourses. Un autre parti politique existait qui avait admis, voté la grève générale, qui, par sa composition et sa tactique, se rapprochait des syndicaux : le parti allemaniste. C'est vers eux qu'allaient refluer les groupements corporatifs partisans de la grève générale.

11o CONGRÈS NATIONAL DU PARTI OUVRIER SOCIALISTE RÉVOLUTIONNAIRE, SAINT-QUENTIN, 1892. Les allemanistes avaient tenu à Paris, du 21 août au 11 septembre, un Congrès régional. Leur Congrès national s'ouvrit à Saint-Quentin, le 2 octobre.

Les débats de Saint-Quentin révélèrent les mêmes caractères et manifestèrent les mêmes tendances que les débats du précédent Congrès de Paris. « La loi de 1884 est mauvaise, dit l'un des rapports. Cependant nous devons constater que, depuis ce moment, une grande poussée en faveur du groupement a eu lieu dans le monde prolétarien. » Il s'agissait donc de multiplier les syndicats, puis de les grouper. Or, de concert avec les Fédérations de métiers, les Bourses du travail constituaient « l'organisme matériel et le complément indispensable pour parachever et régulariser l'organisation syndicale ouvrière ». Le Congrès émettait donc le vœu qu'il en fût créé dans toutes les villes. Et, d'autre part, « ce qui pouvait donner aux Bour

ses une grande force morale et aider dans une large mesure à faire prévaloir les revendications ouvrières, c'était la Fédération des Bourses du travail ».

Le Congrès délibéra sur une question qui avait été également discutée au Congrès de Marseille la propagande dans les milieux agricoles. Les élections générales toute prochaines donnaient à ce débat un caractère de grave actualité. Le Congrès le résolut par la création de Syndicats agricoles qui seraient organisés par les Bourses du travail, tandis que, parallèlement, le Parti chercherait à organiser dans les communes rurales des Cercles d'études sociales et d'action politique.

Dans chaque question traitée par le Congrès on retrouverait ces mêmes conceptions. Ainsi, le rapport sur la quatrième question (De la Révolution et des mesures immédiates pour en assurer le succès) assignait aux corporations ouvrières le rôle que, dans leur Congrès de Roubaix, les guesdistes avaient attribué aux groupes du Parti ouvrier.

Enfin le Congrès renouvela ses résolutions de Paris sur la grève générale, et il le fit en termes plus formels encore et plus décisifs. Il affirma à nouveau « la possibilité d'une action révolutionnaire autre que celle résultant de la protestation électorale ». Il assigna la grève générale comme but dernier aux groupements syndicaux et politiques. D'ailleurs, l'affirmation des théories collectivistes en période électorale allait rendre plus difficile la conquête des pouvoirs

publics. Et puis c'était quitter « le domaine trop parlementaire, briser avec les vieilles coutumes et, d'un parti de tactique, devenir un parti d'action révolutionnaire ».

C'est au Congrès de Saint-Quentin que fut voté le programme législatif du parti : il rappelait à la fois les articles du Havre et les considérants de Saint-Etienne, mais avec des modifications instructives.

Le Parti décida d'engager la lutte aux élections de 1893 dans le plus grand nombre possible de circonscriptions. Contrairement à la décision prise par le Parti ouvrier à Marseille, aucune alliance ne devait être conclue, même au second tour. Le Congrès rappela que les élus n'étaient dans les assemblées que des mandataires du parti, chargés de formuler en son nom « des mises en demeure ».

Un incident se produisit qu'il faut noter. Le groupe socialiste d'Auxerre transmit une proposition demandant « que le Congrès de SaintQuentin mit à l'étude la possibilité d'un seul Congrès socialiste où toutes les écoles seraient représentées ». Le Congrès ne répondit pas par une résolution explicite. Mais on annonça que la Bourse du travail de Paris avait l'intention de convoquer pour l'année suivante à un Congrès unique tous les groupes corporatifs. Le Congrès se borna à décider qu'il ne siégerait pas en 1893, et demanda qu'à l'ordre du jour de la réunion de Paris figurât la grève générale.

ANNÉE 1893-94

2o CONGRÈS DE TOULOUSE, 1893. tint, le 12 février, à Toulouse, sa réunion administrative annuelle. La Bourse du travail de Paris demanda « l'autorisation de convoquer, vers le 14 juillet 1893, un Congrès national exclusivement corporatif ». Les Bourses représentées donnèrent leur adhésion unanime à ce projet qui devait assurer l'unification des forces ouvrières. La majorité décida, après un débat assez vif, que la réunion se tiendrait à Paris.

LA FÉDÉRATION DES BOURSES,
La Fédération des Bourses

CONGRÈS NATIONAL CORPORATIF, PARIS, 1893 1.

La Fédération des syndicats avait d'abord accueilli ce projet comme un acte de rivalité presque hostile. Mais quinze jours avant l'ouverture du Congrès projeté, le 6 juillet, M. Charles Dupuy, ministre de l'Intérieur, ferma par un coup de force la Bourse du travail de Paris. Le Congrès de Paris prit aussitôt le caratère d'une protestation contre la brutalité gou vernementale, et les Syndicats s'y firent représenter en grand nombre.

1. Il faut noter que ce Congrès, qui en réalité fut plutôt une conférence de conciliation, n'a pris place dans aucune série.

Comment unir les forces syndicales? Le citoyen Groussier vint défendre la conception des Congrès allemanistes les Bourses unies par leur Fédération, les unions de métiers réunies par le Secrétariat du Travail. Au contraire, le citoyen Sapin attaqua la Fédération des Bourses qui, dit-il, ne vivait que des subventions municipales. Mais les idées de conciliation dominèrent. Puisqu'il existait deux organisations distinctes, on voulut les fondre et les unir. Le Congrès décida donc la fusion de la Fédération des Bourses et de la Fédération des Syndicats. A cet effet, la Bourse du travail de Nantes « déjà mandatée pour organiser, en 1894, le Congrès qui devait faire suite à celui de Marseille, devait organiser également, et à la même époque, le deuxième Congrès national corporatif convoqué par la Fédération des Bour

ses ».

Puis, après avoir décrété l'unité, le Congrès prit la résolution qui devait la rendre impossible: il vota le principe de la grève générale.

11 CONGRÈS DU PARTI OUVRIER, PARIS, 1893. Les 20 août et 3 septembre 1893, il fut procédé aux élections générales; grâce à l'incessante propagande des divers partis socialistes, et, il faut le dire aussi, gràce à des circonstances exceptionnellement favorables (Panama, décomposition du boulangisme, grandes grèves), près de 50 socialistes pénétrèrent au Parlement. Le Parti ouvrier tint à Paris, du 7 au 9 octobre 1893, un Congrès dont les élections législatives

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