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37 réponses ont été classées comme douteuses.

Pour se rendre bien compte de cette importante et curieuse enquête, il est utile de se reporter aux parties essentielles des réponses reproduites dans le volume de l'Office du travail. On y voit comment l'absence de scrupules de certains fournisseurs, l'exploitation des faiblesses des ouvriers les moins bien armés pour les luttes de l'existence, ont pu en quelques années transformer, dans l'application, une loi votée dans un esprit de justice, en une loi dont les effets sont désastreux dans la pratique.

La lecture de ces dépositions fait craindre que l'autorisation préalable du juge de paix à la saisie, la substitution du greffier à l'huissier, même la restriction du droit de saisie aux seuls créanciers pour fournitures d'objets de première nécessité, contenue dans la proposition de loi de 1898 votée par la Chambre des députés et soumise au Sénat, ne soient des palliatifs insuffisants pour remédier à la gravité du mal.

Cependant il est bien grave d'édicter l'insaisissabilité absolue. Nous sommes surtout touché du préjudice qui en résultera infailliblement pour les meilleurs ouvriers, les plus rangés et les plus laborieux. C'est contre eux, qui n'en peuvent mais, que se retournerait une loi de protection plus intense, en ruinant leur crédit, même chez leurs fournisseurs les plus indispensables, le boulanger, l'épicier et le logeur.

Le volume se termine par deux notes, fort importantes, bien que contradictoires, remises trop tard au Ministère du commerce pour être comprises dans les tableaux de l'enquête : l'une par le Ministre de la marine (annexe x) et l'autre par le Ministre de la guerre (annexe x1), pour les établissements de l'État relevant de ces deux ministères.

Le Ministre de la marine conclut dans le sens de l'insaisissabilité absolue. Le Ministre de la guerre (général de Gallifet) s'élève au contraire énergiquement contre cette solution, avec 22 directeurs d'établissements militaires contre 11.

Nous sommes très frappé de ce passage de cette dernière note: «L'insaisissabilité aurait trop souvent sur les employés les inconvénients qu'elle présente pour les sous-officiers et soldats retraités qui, ne pouvant emprunter sur leur retraite, s'adressent à des prêteurs véreux qui en profitent pour leur faire payer des intérêts usuraires, tout en retenant comme gage le titre qui constitue l'unique ressource du malheureux débiteur.»

Le législateur fera bien de ne pas perdre de vue ces dernières pages de l'enquête qui en confirment beaucoup d'autres.

Th. DUCROCQ.

TABLEAU DES CRISES ET DE La reprise des AFFAIRES,
par M. Jacques Siegfried.

Vous m'avez chargé de vous rendre compte du travail de M. Siegfried. mais grand est mon embarras; comme il l'indique lui-même, s'inspirant de mon livre sur les crises commerciales, il lui a emprunté le tableau du tracé de deux des principaux articles des bilans des banques : le portefeuille, c'est-à-dire l'escompte, le crédit que les banques accordent et l'encaisse métallique qu'elles gardent pour garantir les payements en métal d'une partie du crédit qu'elles ont accordé.

Ce tracé parle-t-il aux yeux? a-t-il quelque signification? ou sont-ce seulement des colonnes de chiffres qui se suivent sans avoir aucun rapport entre elles?

C'est ici que, juge et partie, j'hésite à parler. Si j'approuve, c'est mon travail que je loue; si je blâme, c'est celui de M. Siegfried.

Je pourrais me borner à dire que, comme tout tableau bien fait, il parle de lui-même, et qu'il fait passer sous nos yeux avec une exactitude parfaite et indiscutable les chiffres empruntés aux bilans des banques sur lesquelles nous opérons, ce qui n'est pas commun dans les relevés de la statistique.

Pris sur les situations de chaque jour et ne conservant que les chiffres maximum et minimum de chaque année, nons obtenons des séries marchant dans le même sens en hausse ou en baisse. Tous les chiffres dans des proportions variables, sauf de rares exceptions, sont toujours supérieurs on inférieurs à ceux de l'année précédente, ce qui indique bien, malgré les oscillations de chaque jour, qu'il y a une force toujours agissante qui maintient et dirige le mouvement.

Ces oscillations se manifestent aussi bien sur le portefeuille (escompte que sur l'encaisse, quoique en sens contraire, et ces deux mouvements ainsi liés, en retirent une plus grande valeur.

Suivant ainsi les demandes de crédit sur la ligne bleue et les demandes d'espèces ou de lingots sur la ligne rouge, nous voyons, depuis 1847. — on peut remonter à 1800, les mouvements de hausse et de baisse se produire alternativement pendant un certain nombre d'années, plus granddans le mouvement ascendant que dans le mouvement descendant, suite du développement des affaires. Nous l'appelons la période prospère: elle se termine toujours par une crise à la suite de l'abus du crédit, qui entraîne une période de liquidation.

par

Les deux mouvements des lignes bleue et rouge, quoique les sommets soient toujours en sens opposé, ont presque la même amplitude. La liga grise indique l'année de la crise; le portefeuille touche son chiffre maximum alors que l'encaisse est à son chiffre minimum.

Les sommets des maxima, aussi bien pour l'escompte que pour le méta!

s'élèvent sans cesse, tandis que les cônes qui indiquent les chiffres minima s'arrêtent tous presque au même point, c'est-à-dire là où les affaires ne peuvent plus se réduire sans que le mouvement social soit suspendu. Les lignes sous les yeux, on constate qu'il y a des périodes de prospérité et des périodes de liquidation dans l'une desquelles on est toujours placé.

On reconnait la période prospère à l'accroissement continu du portefeuille et simultanément à la baisse de l'encaisse; la période de liquidation, à la diminution du portefeuille et à la reconstitution de l'encaisse.

D'après ce que nous venons de dire, nous sommes encore dans la période prospère: nous marchons vers la crise. Peut-on aller plus loin, préciser l'époque? C'est plus délicat. Cependant, d'après le chiffre du portefeuille (1,200 millions et celui de la dernière crise 1,700 millions), on peut dire qu'on est aux deux tiers de la période prospère.

Cl. JUGLAR.

SÉANCE DU MERCREDI 18 AVRIL 1900.

PRÉSIDENCE DE M. TRANCHANT.

Étaient présents: MM. Aulard, Bienaymé, Ducrocq, de Foville, des Cilleuls, Glasson, Lyon-Caen, Noël, Frédéric Passy.

M. LEVASSEUR S'excuse de ne pouvoir assister à la réunion.

M. Eugène THOISON, correspondant du Ministère à Larchant, envoie une étude intitulée : La viticulture en Gâtinais. M. Cheysson en rendra compte.

M. DUCROCQ fait hommage au Comité d'une brochure intitulée : Les nouveaux types monétaires de la France, rapprochés, pour l'un d'eux, des monnaies gauloises. Ce mémoire a été l'objet d'une lecture par M. Ducrocq, à la dernière séance publique annuelle, à Poitiers, de la Société des antiquaires de l'Ouest, dont M. Ducrocq est l'un des anciens présidents, et il est extrait du Bulletin de cette société sa

vante.

M. Ducrocq résume de la manière suivante les conclusions pratiques qui se dégagent de son travail :

1o Des diverses critiques adressées à nos nouveaux types monétaires, il convient de ne retenir, en y insistant, que celles relatives à l'admission du prétendu Coq Gaulois, qui occupe tout le revers des nouvelles pièces d'or de 20 francs et de 10 francs;

2° L'idée fausse du coq dit Gaulois n'est que la conséquence d'un mauvais jeu de mots sur le vocable latin Gallus. Il résulte de l'histoire et de l'organisation des divers peuples de la Gaule aquitanique, celtique et même belgique, de leurs monnaies et de la statuaire, que jamais les Gaulois n'ont eu le coq pour emblème. L'idée du coq prétendu gaulois est une erreur certaine, malgré la tentative politique et passagère de 1830, qui n'avait du moins porté aucune atteinte aux monnaies de cette époque ;

3o Dans la mythologie gréco-romaine, et, en conséquence, sur certaines monnaies grecques et dans la statuaire antique, le coq, un des attributs de Mercure, est l'emblème de la Vigilance. C'est à ce titre seulement que cet oiseau fut admis, en termes exprès, et non à titre gaulois, avec d'autres symboles, par le rapport de Belzais-Courmesnil, député de l'Oise, au nom du Comité des monnaies en 1791, aux pieds du Génie de la France du graveur Augustin Dupré, sur les monnaies constitutionnelles d'or et d'argent de l'Assemblée constituante. La Vigilance, dans nos sociétés contemporaines, est surtout représentée par la Police. Une place modeste et très restreinte, comme celle qui lui est faite dans le type monétaire de 1791, n'est pas choquante. Il en est autrement, au plus haut degré, de la prétention de lui réserver le revers de nos monnaies d'or, et de l'imposer comme emblème à une grande nation, comme la France, ambitionnant à juste titre l'apostolat des idées et marchant, l'une des premières, dans les voies de la civilisation et du progrès;

4° Le coq récemment placé sur nos nouvelles monnaies et ailleurs, ne peut donc échapper aux liens de ce dilemme : ou emblème gaulois, ou emblème de la Police? Or, d'après les données irréfutables de la science, il n'est pas gaulois. Qui donc, sans méconnaître ses services et sa nécessité, voudrait accepter l'emblème de la Police, antique ou moderne, comme le symbole national de la France?

5o Le décret nécessaire pour la frappe des nouvelles pièces d'or de 100 francs et de 50 francs, n'étant pas encore rendu, le vœu suivant résulte du travail de M. Ducrocq: «Que ce décret veuille bien ordonner que ces nouvelles pièces porteront, au droit, la tête de la République par M. Chaplain, et, au revers, le Génie de la France de 1791 par Augustin Dupré, tel qu'il était frappé depuis 1872. Il y a des précédents de médailles et de monnaies dont les coins ne sont pas des deux côtés du même artiste, celui du droit et celui du revers étant de graveurs différents;

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6o Un article du même décret modifierait ceux du 22 février et du 20 juillet 1899, en ordonnant qu'il en sera de même, à dater du jour du nouveau décret, des pièces de 20 francs, et que les pièces de 10 francs reprendront leur ancien revers, sauf à l'améliorer.

Cette combinaison conciliante, ajoute M. Ducrocq, tout en faisant

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