bre 1870, époque à laquelle le général Crouzat en fut nommé commandant, avec le grade de général de division à titre provisoire, jusqu'à la reconstitution de l'armée sur de nouvelles bases, au milieu du mois de décembre. La bataille de Beaune-la-Rolande forme l'épisode saillant du récit. Le 20o corps y perdit 40 officiers et 1200 hommes tués ou blessés; mais si ce ne fut pas un succès, ce ne fut pas du moins un revers, car l'ennemi avoua autant de pertes que nous et y laissa un de ses canons. Le 20e corps- dit le général Crouzat était brave, discipliné, patriote. Officiers et soldats avaient le sentiment simple et unique du devoir. Aussi ne s'est-il jamais livré à aucun de ces mouvements désordonnés qui étaient alors si fréquents. fla toujours marché avec ordre et ensemble. Depuis les Vosges et Besançon jusqu'à Beaune-la-Rolande, et de là jusqu'à Bourges, Héricourt et Pontarlier, nul n'a plus souffert et plus combattu que lui pour la patrie envahie.

D

M. Alfred Dumaine a traduit de l'allemand un ouvrage du colonel Wartensleben, intitulé: Les opérations de l'armée du Sud en janvier et février 1871. Pour l'écrire, l'auteur a mis à contribution les rapports de l'état-major général. A la suite d'une introduction relatant les faits accomplis dans le sud-est, antérieurement à la formation de l'armée, dont le commandement fut confié au général Manteuffel, le colonel de Wartensleben raconte les événements militaires qui aboutirent, comme on sait, à l'internement en Suisse d'une armée française de près de 90,000 hommes. La position de l'auteur, les documents qu'il a pu consulter, donnent une valeur exceptionnelle à son ouvrage. Grand admirateur du général Manteuffel, Dans une guerre, dit-il, nombreux sont les chemins qui mènent au même but, pourvu que l'on suive sans faiblesse la route où l'on s'est engagé. Sous ce rapport, nous croyons irréprochable le commandant supérieur de l'armée du Sud. Et ce résultat, à dire vrai, ne pouvait être pleinement obtenu qu'avec des troupes et des chefs comme ceux dont disposait le général Manteuffel. Le travail de M. Alfred Dumaine sera donc toujours consulté avec le plus grand fruit par nos historiens à venir de cette malheureuse guerre.

L'Expédition dans les Beni-Menacer, par M. le colonel Philibert, est le récit d'un épisode de l'insurrection algérienne de 1870-1871. L'opinion du colonel, proclamant que l'histoire a mission de rendre justice à tous et que la guerre d'Afrique n'est pas seule responsable de nos désastres, ne rencontrera certainement pas d'adversaires. Il ajoute : « Si l'on cherchait bien, on trouverait aussi des causes qui tiennent à notre caractère national et à l'abandon dans lequel notre nation, devenue mercantile, a laissé tomber les choses

militaires. Pour moi, toute fatigue est saine au soldat, toute privation lui est profitable, toute marche pénible a de la valeur, et les troupes rompues aux longues et rudes marches de l'Algérie sont tellement endurcies, qu'en Europe, si elles étaient essayées dans une campagne de marche, elles étonneraient ceux qui ne les connaissent pas. ›

M. Huguenin a publié une notice des plus intéressantes sur le Lieutenant général de Vault, ancien directeur du Dépôt de la guerre, et un des hommes qui ont le plus contribué à accroître l'importance de cet établissement. Le plan pour la rédaction des mémoires militaires, que M. Vault soumit au ministre Choiseul, dès son arrivée au Dépôt, plan aussi sage que bien conçu, indiquant la bonne méthode pour écrire l'histoire officielle, est reproduit dans la notice, dont il augmente ainsi l'intérêt.

Un anonyme a consacré quelques pages au Général de division de Bressolles, ancien directeur du service de l'artillerie au ministère de la guerre. C'est sous sa direction que fut organisé le matériel des expéditions de Crimée, d'Italie, de Chine, de Syrie et du Mexique : aussi devons-nous regretter la brièveté de la notice qui le concerne.

Les archives modernes du Dépôt de la guerre, tel est le titre d'un autre travail de M. Huguenin, destiné à faire connaître les différentes mesures qui ont été successivement prises pour mettre cette précieuse collection en état d'être utilisée, aussi bien par le gouverne ment que par les historiens et les hommes d'étude. M. Huguenin prévient qu'il se trouvera souvent en désaccord avec les différentes notices publiées jusqu'à ce jour sur le Dépôt de la guerre, mais il affirme ne rien avancer qui ne soit appuyé sur les pièces originales elles-mêmes. La collection se compose de plus de six mille cartons, contenant la correspondance originale des ministres de la guerre avec les naréchaux, généraux, intendants, etc., dans l'exercice de leurs fonctions à l'intérieur ou aux armées. Les différentes séries sont classées dans l'ordre suivant: Première République. - Premier Empire. Première Restauration. Cent-Jours. Seconde Restauration. Règne de Louis-Philippe. -Deuxième République. Second Empire. En outre, des séries spéciales renferment la Correspondance relative aux divers camps d'instruction (1683-1870); - la Collection dite du général de Préval (legs fait par le général en 1853); - les Mémoires historiques militaires sur les différentes guerres de France, spécialement depuis le règne de Louis XIV jusqu'à nos jours;— les Reconnaissances militaires dans différents pays; - les Historiques des régiments de toutes armes; la Correspondance topographique et administrative du Dépôt depuis 1792; et enfin l'Atlas historique,

ou recueil de cartes et plans servant à l'intelligence des campagnes, atlas dont la formation est due à M. Turpin, ancien archiviste. M. Huguenin termine son exposé en rappelant que les archives du Dépôt de la guerre sont ouvertes à tous les travailleurs et spécialement aux officiers de l'armée.

Le travail de M. Turpin, ayant pour titre : L'Atlas historique et militaire du Dépôt de la guerre, forme le complément naturel de celui de M. Huguenin. Il donne d'importants détails sur la manière dont les cartes ont été réunies et le catalogue confectionné. L'Atlas se compose aujourd'hui d'environ 7,000 cartes et plans, manuscrits ou gravés, de théâtres de guerre, champs de bataille, combats et siéges, depuis Louis XIV jusqu'à nos jours. Il s'arrête à l'expédition du Mexique. M. Turpin émet le vœu, assez légitime, que l'Atlas historique militaire marche toujours de pair, aux archives du Dépôt de la guerre, avec le classement des rapports officiels.

AUTRICHE-HONGRIE. - L'article de M. Auguste Mallet sur Les archives militaires de l'Autriche offre une grande analogie avec ceux qui précèdent. Cet article nous apprend qu'il existe à Vienne deux dépôts d'archives militaires: 1° les archives du greffe du ministère de la guerre, peu connues et partant peu consultées ;- 2o les archives militaires, qui ont été mises à contribution par tous les historiens. Il existe dans celles-ci plus de 1,400,000 pièces. Sauf quelques ouvrages rares et précieux, qu'on ne peut consulter qu'à l'intérieur de la bibliothèque, il est permis d'emporter les autres au dehors.

M. Viollet-Le-Duc a publié un travail intitulé: De l'étude de la géographie et de la topographie dans l'armée, tendant à prouver qu'on ne sait ni mieux, ni moins bien, la géographie en France, que dans beaucoup d'autres contrées de l'Europe; mais que, pour savoir se servir des connaissances acquises en géographie dans le cabinet, il faut voyager et voyager en observateur; ce que nous ne faisons guère, voyageant plutôt en gens pressés d'atteindre le but, et nous moquant volontiers de ces voyageurs étrangers, qui demandent sans cesse des renseignements et ont soin de noter leurs moindres observations. M. Viollet pense que les promenades militaires, que l'on ne saurait rendre trop fréquentes, pourraient être utilisées pour l'observation du terrain; qu'il serait utile de donner à tous les sousofficiers des notions élémentaires sur la connaissance des terrains et sur les moyens propres à rendre rapidement compte des acci

dents qu'ils présentent; enfin, que des études géologiques sont nécessaires à l'officier, et qu'elles doivent être le complément de ses connaissances en topographie. Nous appelons l'attention sur les motifs tirés de la tactique et de l'alimentation des troupes, qui font émettre cette opinion à M. Viollet-Le-Duc.

Tels sont les travaux qui ont été publiés par le Journal des Sciences militaires pendant les années 1872-1873-1874.

. Pour compléter cette analyse, il suffira d'ajouter que chaque livraison du journal donne un certain nombre de comptes rendus d'ouvrages militaires; en outre, une revue bibliographique fait connaître les titres, non-seulement des ouvrages du même genre imprimés tant en France qu'à l'étranger, mais encore les principaux articles spéciaux publiés par les revues et journaux français et étrangers.

Grâce à tous ces renseignements, il est on ne peut plus facile, pour qui veut s'en donner la peine, de se tenir au courant de la marche des idées dans le domaine militaire.

Si l'on se reporte aux détails de la classification, que nous avons donnés en commençant cet article, on verra que le plus grand nombre des sous-sections indiquées ont été l'objet de quelque étude. Ce qui nous amène à conclure que, persévérant dans cette voie, le Journal des Sciences militaires ne tardera pas à devenir l'encyclopédie militaire la plus complète qui se publie de nos jours.

DE LA

LIBRAIRIE MILITAIRE

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE MENSUEL.

CATALOGUE

DES PRINCIPAUX LIVRES MILITAIRES

PUBLIÉS DEPUIS LE 1" DÉCEMBRE 1873 JUSQU'AU 1" DÉCEMBRE 1874.

(Suite et fin.)