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L'auteur de la lettre fait ensuite son éloge; il plaint le demandeur de ce qu'il ne s'est pas adressé plus tôt à lui, parce qu'il a perdu des bonifications proportionnées à l'achat qu'il aurait fait.

Le deuxième s'exprime ainsi : « Vous me demandez si on >> peut, sans crainte, faire usage de nos produits pour amé>> liorer les vins? La question se résout toute seule. Notre teinte » a été approuvée par la Société de médecine, brevetée et au>> torisée; si des poursuites judiciaires ont été faites, ce n'est >> que contre la contrefaçon de notre composé, puisque nous >> sommes seuls autorisés. » Suivent des détails sur l'époque de la fabrication du vin de teinte qui commence en septembre.

Le troisième dit : « Que sa teinte (son vin de teinte) est pour » dégraisser et éclaircir les vins; qu'il faut un litre de liqueur >> pour colorer un hectolitre de vin blanc; qu'il ne faut pas » allonger cette teinte de beaucoup d'eau, car ce serait frau» der; que quelquefois on emploie jusqu'à trois litres de >> teinte pour deux hectolitres de vin blanc, et qu'on en ob>> tient de bons résultats ; qu'il expédie souvent de cette mar>>chandise pour Paris, mais que comme il y a quelques diffi>> cultés, parce que le vin de teinte ne paie pas d'entrée, on » ne l'expédie qu'à la Villette.

» Que le prix de l'hectolitre de cette marchandise est de » 150 fr. rendu franco à la Villette; que plus tard, la nou>> velle teinte fabriquée cette année sera vendue 100 fr. »

Le marchand fait observer que sa teinte est brevetée.

On voit, par tout ce qui vient d'être dit, le chaos où nous sommes sous le rapport de la coloration des vins : 1° Des gens se prétendant très instruits vous offrent un liquide colorant qui doit améliorer les vins. Si vous l'employez. et que le fait soit constaté, vous serez condamné.

2o D'autres se disant autorisés par la Société de médecine, etc., sont sûrs de leur affaire. Si vous faites usage de leur liquide, vous serez condamné,

3. D'autres, enfin, ont une liqueur brevetée. Si vous l'employez, vous serez condamné.

Il nous semble que la position est difficile pour le vigneron; s'il ne connaît pas l'application qu'on peut faire de l'article 423 du Code pénal, s'il ne sait qu'il ne doit pas colorer son vin, s'il croit bien faire en mêlant à son vin soit le liquide annoncé par le prospectus orné des noms de savants, qui sont là mis en avant comme approbateurs, soit par le liquide approuvé par la Société de médecine, soit enfin par celui qui est breveté; dans tous les cas, il commet un délit, son vin peut être saisi, versé sur la voie publique; il peut en outre encourir une peine plus ou moins grave, l'amende ou la prison, et quelquefois l'une et l'autre.

Tout ce que nous venons de dire démontre d'une manière positive qu'il y a nécessité pour l'administration de faire étudier la question de savoir, s'il y a nécessité d'interdire, dans l'intérêt de l'hygiène publique, la coloration des vins par des substances étrangères à la matière colorante du raisin.

Pour résoudre cette question, il faudrait d'abord :

1o Savoir quel est le produit qui a été le sujet d'un privilége qui date de 1781, et si ce produit est le même que celui autorisé à cette époque? Enfin, s'il ne contient rien de nuisible à la santé ?

2o Voir quel est le produit qui a été breveté, et si ce produit doit être autorisé ;

30 Savoir quels sont les divers produits annoncés comme bonifiant les vins, les eaux-de-vie, etc., etc.

Nous pensons que ces questions étudiées, la solution de la question ne sera pas difficile, car nous ne croyons pas qu'on puisse regarder comme convenables pour la santé des liquides dans lesquels on fait entrer du suc de sureau, du suc d'hyèble, de l'alun.

Une objection nous a été faite par une personne à qui nous parlions du sujet de notre travail, c'est que l'on devait

ne mettre aucune entrave à l'industrie, et laisser colorer les vins, s'ils avaient besoin de l'être.

Nous sommes de l'avis de notre collègue, il faut favoriser le commerce et l'industrie; mais l'administration a une tâche plus grande à remplir, c'est celle de veiller sur la santé publique. Elle ne doit laisser faire une chose qui touche à l'alimentation que lorsqu'il n'y a pas danger pour la santé publique.

Nous admettrions un mode de faire qui ne devrait gêner personne, c'est d'exiger que le vin coloré par une substance étrangère au vin soit signalé comme étant coloré par cette substance. Ainsi, on dirait : du vin de Bordeaux coloré par de l'hièble, par du sureau, par de la betterave. Mais on nous a répondu Si l'on désigne ainsi ces vins, on n'en vendra pas. Cette réponse démontre positivement que la coloration des vins par une matière colorante étrangère au raisin est une fraude, et qu'il y a nécessité d'interdire par un acte public, connu de tous, la coloration factice des vins.

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Examen des mesures prophylactiques.

Pour chercher à apprécier la valeur des mesures destinées à prévenir la propagation de la syphilis, je les diviserai en quatre catégories comprenant :

La première, celles relatives aux vénériens de l'un et de l'autre sexe en général;

La deuxième, celles relatives seulement aux hommes;
La troisième, celles relatives aux prostituées;

La quatrième, celles relatives aux nourrices et nourrissons. Chacune de ces catégories contiendra plusieurs chapitres, dont les titres exprimeront, autant que possible, l'ensemble des idées exposées dans ces chapitres; idées déjà émises pour la plupart, que je rappelle, que j'examine, et que je développe même quelquefois, mais que cependant je suis loin d'approuver toutes.

Quoique les opinions des divers auteurs s'étant occupés de la prophylaxie des maladies vénériennes, aient été signalées précédemment, je ne crois pas que, dans l'unique but d'éviter les répétitions, il faille s'abstenir de revenir sur quelques détails historiques à propos de la plupart de ces mesures. Ces citations, ainsi groupées, auront alors l'avantage de montrer que bon nombre des mesures examinées ont déjà attiré l'attention de médecins instruits et d'administrateurs distingués.

PREMIÈRE CATÉGORIE COMPRENANT LES MESURES RELATIVES AUX VÉNÉRIENS DE L'UN ET DE L'AUTRE SEXE EN GÉNÉRAL.

Ces mesures sont :

I. La création d'une législation spéciale;

II. La recherche des vénériens ayant transmis leur maladie à autrui;

III. La multiplication et l'amélioration des moyens de se

cours;

IV. La publication de conseils sur les maladies vénériennes ;

V. Les inoculations préservatrices de la syphilis.

CHAP, I,

CRÉATION D'UNE LÉGISLATION SPÉCIALE.

Ce chapitre semble devoir présenter deux parties distinctes, car on paraît s'être proposé le double but de punir le vénérien ayant transmis son affection à autrui, et d'obliger à se soigner celui reconnu malade dans des circonstances déter

minées. Si je ne comprends pas dans une troisième division les mesures destinées à sévir contre les charlatans, comme le croient utiles divers médecins, entre autres M. le docteur F.-S. Ratier, la raison en est que ces industriels ne vendent pas uniquement des remèdes contre les affections vénériennes, pour lesquelles, cependant, beaucoup de personnes vont les trouver dans la crainte d'avouer leur maladie à leur médecin.

1o Peines portées contre le vénérien ayant transmis à autrui sa maladie.

« Chose étrange! s'écrie M. Yvaren, inexplicables effets de l'aberration et de la légèreté humaines! Tel qui affronterait les angoisses de la faim et qui souffrirait mille fois la mort plutôt que de commettre le moindre larcin, ne sait plus, quand l'aiguillon de la chair le presse, écouter la voix de sa conscience, et va trop souvent, sans scrupule, ravir à une jeune fille son seul patrimoine, la seule source de ses joies et de son travail, la pureté de son sang, le privilége d'une santé qui devrait être sacrée! Ce vol, cet empoisonnement, n'est prévu, ni puni par la loi, il n'est même pas justiciable de l'opinion publique. » Bourru, cependant, il y a près d'un siècle, demandait déjà qu'on punît rigoureusement ceux qui ne se font pas scrupule de communiquer la vérole et d'infecter une multitude de personnes.

Les articles 459, 460, 461 du Code pénal punissent, avec juste raison, celui qui laisse communiquer avec d'autres des animaux affectés de maladies contagieuses (1); mais aucune

(1) Art. 460. Seront également punis d'un emprisonnement de deux à six mois, et d'une amende de 100 fr. à 500 fr., ceux qui, au mépris des défenses de l'administration, auront laissé leurs animaux ou bestiaux infectés communiquer avec d'autres.

Art. 461. Si de la communication mentionnée au précédent article, il est résulté une contagion parmi les autres animaux, ceux qui auront contrevenu aux défenses de l'autorité administrative seront punis d'un emprisonnement de deux à cinq ans, et d'une amende de 100 à 1,000 fr.,

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